On parle de Tolkien ici ?
Moi j'ai relu le livre récemment, me disant "je me laisse un pause entre les trois opus", résultat j'ai tout torché d'une traite, et sans forcer; la lecture s'enchainait comme un cour d'eau, un page-turner pour ma part. Chaque lecture se bonifie comme un bon vin.
J'ai lu en VO mais je comprendrais qu'on veuille pas s'infliger ça si on est pas trop à l'aise dans la langue. Mais de mémoire la trad. de Ledoux est assez nulle, et j'ai lu que celle Lauzon était bien mieux, faudrait que je la teste un jour.
Les films font pâle figure à côté de ce monument, t'as des passages c'est du cristal changé en lettres. Je ne dis pas qu'on doit forcément aimer ces livres, mais on ne peut qu'être d'accord sur le fait qu'en terme d'écriture, c'est d'une solidité sans faille, peut être même le livre le plus technique du XXe siècle en terme de cohérence linguistique (ce qui est logique vu le technicien derrière). Faut se laisser prendre au détour de chaque phrase, laisser son imagination voguer comme sur un océan tantôt d'un calme profond, tantôt déchainé.
Par ex -
Come not between the Nazgûl and his prey! Or he will not slay thee in thy turn. He will bear thee away to the houses of lamentation, beyond all darkness, where thy flesh shall be devoured, and thy shrivelled mind be left naked to the Lidless Eye.
T'as ça dans les films ? Franchement comme phrases qui font frissonner, ça se pose quand même bien. Et regarde en terme de construction grammaticale comment elles sont construites! En commençant par le verbe, avec les archaïsmes thee, thy, &c. qui ne sont pas là au hasard étant donné le background des Nazgûl et surtout de ce petit filou ci en particulier.
Y'a trop de passages de ce type, vertigineux, y'en a pléthores. Faut juste savoir les chercher et pas se baser sur les films qui à mon sens manquent très clairement de souffle épique. Car Tolkien c'est surtout ça :
Qui est rébarbatif ?!
Chez Tolkien il ne faut pas s'attendre à du blockbuster version papier, ou du D&D. C'est bien plus que ça. Il faut en sortir la moelle de l'imaginaire et ainsi découvrir de quoi notre esprit est capable.
En plus, c'est un avis tout personnel, mais il me semble que la thématique écologiste et industrielle est très actuelle et ne fait pas de mal. C'est un livre très politique et même assez universel, car sa couche d'interprétations possibles donne le vertige.
Aimer la fantasy c'est aimer Tolkien qu'on le veuille ou non. Dedans t'as de l'insouciance féérique enfantine, du plus sérieux à la Arthur; de la dark fantasy hardcore (cf passage ci-dessus), du nordique, de la tragédie bien shakespearienne (Gollum), du fight qui fait frémir les poils de nez (Balrog versus Gandalf).
Bon j'arrête là sinon je vais partir sur le Silmarillion et ça fera le double voire le triple de ce que j'ai déjà dit. J'aime peut être Tolkien trop exagérément ? C'est pas un soucis de pas aimer, c'est comme Homère, l'Arioste ou Shakespeare; la littérature a des codes, il faut s'y conformer et se laisser en emporter, même si on aime pas l'eau il se peut qu'en se faisant du mal on finisse par aimer la nage.