Auteur Sujet: [Débat] Le marché du travail et le chômage  (Lu 21611 fois)

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[Débat] Le marché du travail et le chômage
« le: mercredi 21 mars 2018, 13:38:59 »

Je lance un petit sujet sur le marché du travail actuel et le chômage (et ses différentes réformes actuelles et à venir). Je sais que plusieurs personnes sont encore au lycée, stressent pour le bac (ou le brevet pour les plus jeunes) et pour qui le marché du travail est encore une douce chimère. Mais quelques petits axes de réflexions pourraient permettre à certains de réfléchir lorsqu'ils seront sur Parcoursup.

Comme la plupart des gens se lèvent le matin pour galérer et survivre, qu'il est plus ou moins admis que notre catégorie socio-pro a une influence majeure sur notre niveau d'étude (et que la plupart des gens viennent de CSP au mieux "modestes"), que la compétitivité de notre modèle économique actuel favorise le travail aliénant et répétitif et l'écrasement des individus (on en a eu un bon exemple ici avec maintenant l'ex-job de @Krystal :8):), que les diplômes perdent en valeur du fait de l'engorgement des études sup qui fait que des niveaux bac+5 peuvent être entrainés à faire des boulots sous-qualifiés, que les recruteurs sont souvent absurdes (cercle vicieux du "vous avez pas d'expérience" qui fait qu'on est pas pris et qu'on gagne pas d'expérience pour avoir un travail qui demande de l'expérience), et qu'en plus tout ça ne va pas s'arranger à cause de la mécanisation de la plupart des emplois (bonne ou mauvaise chose ? si on perd des emplois seront nous en mesure d'en créer des nouveaux ? si oui y'aura t-il une phase de transition ? de combien de temps ? sera t-elle hardcore à vivre pour des gens qui auront l'impression de n'être plus utiles en rien) ?

Bref, partons du postulat que, généralement, un humain est obligé pour manger d'avoir un boulot qui ne l’intéresse pas (pour être poli), même en étant qualifié. Ce qui remet sur la table le débat "Un humain est-il naturellement fait pour travailler ?". Sans rentrer dans les postulats débiles du genre "vivement qu'on revienne au temps des chasseurs-cueilleurs", la question, je pense mérite qu'on se la pose.
En d'autres termes, notre confort de vie mérite t-il tant de misère ? Donner du jus au capitalisme et au consumérisme sur la vie des hommes est-il un sacrifice qui vaut le coup ? Selon Harari (l'auteur du livre "Sapiens", vulgarisateur mais que je conseille), le cercle vicieux a été commencé pendant la Révolution Agricole, qui a obligé les hommes à vivre enchainé aux champs, dépendant des saisons, qui si elles pouvaient détruire les champs condamnaient les agriculteurs et leurs familles à la famine (et souvent à la mort). Sans parler du fait que l'agriculture est un métier très difficile qui brise (c'est déjà pas évident même avec nos moyens modernes, donc le labeur exténuant dans ce domaine se calcule en millénaires). Bref à cette époque les hommes ont perdu en confort de vie car auparavant nous vivions en tribus nomades, une tempête ne signifiait pas la mort mais le déplacement, et notre survie ne dépendait pas d'heures et d'heures de travail mais de choses beaucoup plus simples, plus liées à la Nature. Le reste servait à se sociabiliser au sein de la tribu (c'est important car le travail moderne perd son aspect de sociabilité pour devenir plus compétitif).

Bon, c'était l'instant hippie, après loin de moi l'idée de dire que l'époque des chasseurs-cueilleurs est une époque bénie ; elle est bien plus mortelle et sauvage à bien des égards, mais en terme de valeurs humaines, nous ne sommes peut être pas si évolués que cela par rapport à cette époque.

******************

Maintenant le chômage.

Comme vous le savez (ou pas), le gouvernement Macron a décidé de serrer la bride sur les chômeurs. Grossièrement, un chômeur sera obligé d'assister (pour ne pas dire accepter) à des entretiens organisés par Pôle Emploi. S'il ne le fait pas, Pôle Emploi le radie pendant deux mois, coupant naturellement les indemnités chômages.

Alors déjà première chose, avoir confiance en Pôle Emploi n'est pas une chose vraiment aisée, je pense que quiconque ayant un jour été en relation avec cet organisme en garde un mauvais (neutre dans le meilleur des cas) souvenirs. J'ai personnellement passé quelques temps dans quelques Pôle Emploi et ceux ci ne m'ont jamais été utile une seule seconde (je plaisante pas). Mais bref ça dépend des expériences de chacun, on va pas s'étendre là-dessus. Même si on pourrait arguer du risque qu'un chômeur bien diplômé se retrouve à être obligé de faire des entretiens pour travailler à Lidl.

Ce qui est plus intéressant au contraire est cette stratégie de répression des chômeurs.
La faille de la stratégie de Macron, c'est principalement qu'il y a un problème offre/demande. En d'autres termes, il y a littéralement pas assez de boulot pour tout le monde en France. Donc si dans un monde idéal toutes ces offres étaient pourvues, il y aurait toujours des chômeurs qui fatalement seraient privés de leurs droits. Ce qui fait qu'on enlève, plutôt arbitrairement, un moyen de subsistance pour des millions de gens (ce qui peut dans quelques cas signifier la rue).

Ça parait gros ? Ça l'est peut être, mais c'est mathématique. Admettons cependant qu'il y ait pile poil le bon nombre d'offres pour le bon nombre de chômeurs. Le chômage est à 0%, Macron est acclamé, il a réussi à faire disparaitre la pauvreté de son pays. Faire disparaître ou cacher ? Le modèle allemand nous enseigne que les taux de chômage les plus faibles sont des anomalies dans l'Histoire, et quand ce n'est pas le cas elles cachent beaucoup de misère sociale et de pauvreté (comme en Allemagne donc où les emplois précaires sont légion).

Pourquoi, dans notre pays, on charge tout sur le dos des chômeurs ? Pourquoi on a ce culte de la richesse et la haine de ce qu'on appelle "l'assistanat" de manière péjorative ? Dans une société qui produit assez de richesse pour nourrir, loger (coucou les SDF) et éduquer littéralement tout le monde, on voit un accroissement de la misère sociale, toutes les réformes honteuses creusant cette misère sont prises soit avec indifférence soit avec joie par des personnes qui en pâtissent mais qui approuvent pour des raisons obscures (et qui ont souvent des notions de politique et d'économie dans les choux, mais je fais des procès d'intention). Ne pourrait-on imaginer que les chômeurs sont volontairement présentés comme des paresseux et des assistés, voués à la pauvreté par dessus le marché, pour la seule raison de faire peur aux travailleurs, de leur faire accepter des boulots aliénants, fatigants et répétitifs, chose qu'ils n'auraient naturellement jamais acceptés si ne pesait pas au dessus de leur tête cette épée de Damoclès ?

Ou alors pourrait-on arguer que le monde du travail n'est pas vraiment adapté à l'Homme. La croissance exponentielle dans laquelle nous sommes plongé n'est pas infinie, elle s'arrêtera de gré ou de force (plus vraisemblablement de force). Outre les handicaps et problèmes physiques/physiologiques qu'il provoque, on pourrait aller jusqu'aux problèmes de la centralisation parisienne, et conséquemment du nombre d'automobiles qui sont sollicitées (= pollution = des milliers de morts par an sans parler d'autres problèmes liés à la voiture).
Mais bref sans vouloir partir trop loin, nous sommes peut être à l'aube (espérons le du moins, l'espoir c'est la seule chose qui fasse tenir) d'une révolution de pensée par rapport au monde du travail. La relation employeur > employé (travailler pour quelqu'un qui nous envoie des miettes) est assez récente dans l'histoire humaine, elle n'est pas plus éternelle que la croissance, il n'est pas impossible qu'un jour une nouvelle théorie économique pointe le bout de son nez, libérant une proportion non négligeable des humains de leur esclavage moderne.

Voilà je m'arrête là parce que je suppose que ce pavé est une purge à lire v.v
Néanmoins j'espère avoir émis ici quelques étincelles de pensée qui pourraient porter à débat, ce que je vous invite d'ailleurs à faire :oui:
« Modifié: mercredi 21 mars 2018, 13:45:08 par D_Y »
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[Débat] Le marché du travail et le chômage
« Réponse #1 le: mercredi 21 mars 2018, 14:58:51 »
Vos êtes à l'aube de rien du tout. Ca fait bien 4-5 ans que ça existe en Belgique (que je le subis personnellement, d'ailleurs.) et ça ne remet pas en cause le concept même du travail. Les chômeurs ont bons dos et sont la cause de tous les problèmes du pays, point barre.

En Belgique, notre Pôle Emploi national ne fait RIEN pour nous aider. Ce qu'ils demandent, c'est qu'on envoie un certain nombre de cvs par semaine et c'est tout. Osef de la pertinence de tes recherches et si par malheur, les employeurs potentiels ne daignent pas te répondre (et ils ne le feront pas), c'est toi qui te feras saquer dans tous les cas. Ils sont plus là à cultiver le chômage qu'à aider les gens à s'en sortir.

Même si je n'ai pas encore réussi à décrocher un job, ma recherche d'emploi a drastiquement progressé depuis que j'ai été exclu du système car je ne suis plus leurs lignes de conduites et je fais des trucs qu'ils ne m'auraient jamais suggérés de faire, trucs qui s'avèrent plutôt payant puisqu'à défaut d'avoir un job, je suis maintenant au moins sur une petite vingtaine de listes d'attentes, à... attendre qu'un poste se libère.

Pour moi, y a vraiment un gros soucis quelque part dans le système actuel et il est grand temps que les gens se réveillent et prennent conscience de ce qui se passe au lieu de bêler. Et Macron ne fait qu'imiter ce qu'il se fait en Belgique. Vous allez bien vous amuser, ça c'est moi qui vous le dit !

Ah et désolé, j'ai un peu lâché ce que j'avais sur le coeur du coup, j'oublie la question plus philosophique de l'homme est-il fait pour le travail ?

J'ai envie de répondre : non, juste non. Au fil des siècles, la société a développer une sorte de cage dans laquelle les gens ont été enfermés limite à leurs insu. De quel droit notre liberté dépend de notre capacité à gagner des sous ? Depuis quand on doit demander l'accord à quelqu'un d'autre pour pouvoir partir en vacances ou autre ? Et des vacances/congés limités, hein ? Je pensais qu'au bout d'un moment, on devenait adulte et on assumait nos choix, mais de ce que j'ai pu voir du temps ou on travaillait, on en est toujours au stade "maitresse, je peux avoir un jour congé, svpls ?" car l'intérêt principal de la société ce n'est ni la personne, ni sa famille, mais clairement l'entreprise qui est prioritaire. J'ai limite envie de dire que c'est de l'esclavage mais avec une carotte au bout pour éviter que le petit peuple se rebelle de sa condition. et le pire, c'est que ça marche. Dans la façon dont on vit actuellement, je ne vois aucune liberté, ou juste une liberté illusoire et les gens se complaisent dedans.
« Modifié: mercredi 21 mars 2018, 15:12:09 par Duplucky »

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[Débat] Le marché du travail et le chômage
« Réponse #2 le: mercredi 21 mars 2018, 20:21:07 »
Je n'ai pas vraiment le temps de participer à la discussion mais ça m'intéresse. Sur le chômage, je suis tombé hier sur un article de Marianne qui est à mon sens très juste. Je vais vous en partager une phrase : "Par un retournement d’optique imposé à force de propagande, on arrive à une situation ubuesque qui voit les premiers responsables du chômage traités comme des êtres supérieurs, des gagnants, des risquophiles, tandis que les salariés exclus de monde du travail sont sommés de rendre des comptes, de justifier de leur bonne foi et de prouver leur innocence." (https://www.marianne.net/debattons/editos/le-chomeur-individu-presume-coupable-de-ne-pas-rechercher-un-emploi)

Concernant le travail, ça dépend. Ca dépend de ce qu'on entend par travail : une activité ou un emploi ? Pour la première, oui ; parce qu'un travail, dans ce sens, peut être une source de plaisir et d'épanouissement. Un travail peut alors être n'importe quelle activité, rémunérée ou non. Un intellectuel, un artisan ou que sais-je, peut aimer ce qu'il fait. Il peut le faire en tant qu'activité principale, ou bien sur son temps libre. Par contre, un emploi est plus souvent  subi. La plupart des gens n'ont pas particulièrement de plaisir à accomplir les tâches qui leur sont confiées. Dans ce cas-là, l'individu occupe cet emploi juste pour se nourrir parce que le système le lui impose.
« Modifié: mercredi 21 mars 2018, 20:27:46 par Nilezor »
“My philosophy is basically this. And this is something that I live by. And I always have. And I always will. Don't ever, for any reason, do anything to anyone, for any reason, ever, no matter what. No matter ... where. Or who, or who you are with, or where you are going, or ... or where you've been ... ever. For any reason, whatsoever.” Michael Scott.

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[Débat] Le marché du travail et le chômage
« Réponse #3 le: mercredi 21 mars 2018, 23:29:04 »
On blague souvent avec des amis en disant qu'on va faire l'esclave quand on va travailler.

Le problème est loin de ne se poser qu'en France, malheureusement c'est partout dans le monde comme ça.
Que l'Homme soit naturellement fait pour travailler ou pas n'est pas la question importante je pense, mais plutôt pourquoi travaillons nous ?
Pour de l'argent, pour survivre donc, mais aussi pour avoir du confort et pouvoir consommer.

Mais du coup, quelle alternative, pour survivre (un toit, un lit, de la nourriture), du confort et de la consommation (loisirs..) si ce n'est en travaillant ?
J'en vois aucune, personnellement.

J'ai beau moi même trouver que c'est un peu de l'esclavage moderne, je ne vois aucune autre solution viable à ce modèle (par contre par exemple dans ma vie je fais tout pour que dans le futur je n'ai plus à vivre du salariat, on peut travailler sans être le salarié de quelqu'un), je suis curieux de voir si vous avez des alternatives par contre.

Maintenant les vrais problèmes en France par exemple pour moi se trouvent au niveau des diplômes. On demande des diplômes pour tout et n'importe quoi.
Sauf que le diplôme ne prépare pas du tout au monde du travail, à la pratique. Je ne compte plus le nombre de cas que j'ai connu qui ont ramassé un mur dans le monde du travail. Des professeurs qui avaient beaucoup de connaissances certes mais pas pédagogue pour un sou, des comptables qui n'avaient aucune capacité d'adaptation, des contrôleurs de gestion en PLS devant la méthode de travail de leur entreprise et je suis sûr que dans tout les corps de métier il y a des cas comme ça.

Et même de mon expérience, tout ce que j'ai appris dans mes études ne m'a absolument pas aidé pour mon taf (pourtant relaté à ces études), j'ai tout appris sur le tas directement.

Après bien sûr, il vaut mieux avoir un certain bagage technique, culturel pour certains métiers, bien évidemment. Mais le diplôme reste trop surcoté à mon sens.

Sinon en soi, si quelqu'un rejette vraiment le mode de vie de "l'esclave moderne", on peut vivre au RSA+APL (cumulé on tape les 750-800€/mois) en France donc c'est possible :  avoir à manger, un toit. Par contre il faut accepter de renoncer un peu à la consommation, au confort.

Tout se paie d'une manière ou d'une autre.

La seule "libération" de l'esclavage moderne que je vois c'est l'avènement du machine learning, des contrats intelligents et de l'intelligence artificiel. Le tout automatisé, autonome. Qui remplacera l'homme d'abord dans les métiers les plus simples (dans l'administratif, la manutention, la vente pour ce que j'ai en tête là) puis petit à petit dans des métiers de plus en plus techniques. C'est plus de la science fiction pour moi ça, c'est véritablement ce qui nous attend.

Et je pense qu'à ce moment là on devra forcément avoir un revenu universel. Mais il y a du chemin encore pour arriver à là, et beaucoup vont pâtir des premiers métiers qui vont disparaître je pense, ça va provoquer maintes crises à n'en pas douter.

On a aussi un "problème" qui n'a pas été évoqué, c'est la génération qui a 50-60 voir 70 ans actuellement. Ces personnes là ont tout eu, relance de l'économie après la guerre, un marché immobilier peu cher, un taux de livret A à 8% (sisi), pouvoir trouver un travail sans trop de difficultés sans même avoir de diplôme et la possibilité de monter les échelons d'une entreprise et donc se faire une carrière.
C'est super pour eux, je ne veux pas critiquer sur ce point, c'est tant mieux. Mais ils ne se rendent pas compte de la difficulté des jeunes d'aujourd'hui, et le problème c'est très souvent c'est cette génération qui est au commande d'un pays. Il y a donc ce conflit générationnel "va travailler, achète une maison", sauf que les conditions ne sont pas les mêmes. Alors certes notre génération a plus de liberté, de confort de part les nouvelles technologies et compagnie mais en contrepartie... Ils s'en foutent de vendre une maison 10x le prix acheté il y a quelques dizaines d'année à un jeune qui va s’enchaîner à 20 ans de crédit à travailler.

La vision de Dup' est assez puéril je trouve. T'es dans un contexte professionnel, aie un peu de bon sens. Imagine toi employeur, et ton salarié te dit "ouais je pars en vacance demain pendant 3 mois a+ ah et n'oublie pas de me payer". On pense toujours côté salarié mais il faut aussi penser à l'employeur qui a un business à gérer. Je dis pas qu'il a tout les droits loin de là, je défend rarement les employeurs d'ailleurs, mais sur ce point là wtf ? Evidemment qu'il est normal de demander si on peut prendre des congés, il doit s'organiser en conséquence (après s'il refuse c'est une autre histoire, ça craint déjà plus), de même que la limite des 5 semaines de CP est normale, on est déjà un des pays qui a le plus de CP, l'employeur/la caisse de CP nous paie je le rappelle pendant les congés payés, l'argent sort pas par magie.

Concernant le chômage, ça c'est une autre histoire mais je ne me prononcerais pas trop dessus.
Je réagirais juste au "culte de la richesse et la haine de l'assistanat", souvent dans la vie de tout les jours, j'ai plus vu l'inverse en vérité. Tout le monde semble détester ceux qui réussissent dans la vie ici. Je pense qu'il est normal de promouvoir la réussite plutôt que l'assistanat en tout cas. On va pas glorifier les glandeurs non plus.
Par contre tout les chômeurs ne sont pas des profiteurs (padamalgame tout ça) et en faire pâtir ceux-ci je suis d'accord que ça craint.
« Modifié: mercredi 21 mars 2018, 23:31:45 par Taiki »

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[Débat] Le marché du travail et le chômage
« Réponse #4 le: jeudi 22 mars 2018, 00:03:31 »
@Taiki Ah mais mon but sur ce débat n'est pas de trouver une alternative viable. Si j'étais suffisamment intelligent pour révolutionner notre modèle économique j'aurais fait l'ENA ou Polytechnique je serais pas en train de poster sur PZ.
Après le fait que personne n'y ait pensé ne veut pas dire que c'est impossible. Qui aurait cru il y a un peu plus d'un siècle que le capitalisme aurait pris cette tournure ? Pas même Adam Smith je suis sûr. Bien sûr comme c'est parti il y a peu de chance que ça change demain mais avec le réchauffement climatique, les futures grandes migrations, la surpopulation, la mécanisation du marché, la mutation est en marche qu'on le veuille ou non (que ça évolue en bien ou en mal c'est une autre histoire par contre).

En plus des 60aires comme t'as dit, le vrai problème pour notre génération je pense aussi qu'on est pile poil entre le travail traditionnel et le travail mécanisé. Apprendre à programmer par ex à l'école serait une piste pour nous préparer à ça pour l'avenir, malheureusement une minorité de notre génération sait coder alors que ce sera sans doute une compétence capitale avec les machines (je ne pense pas me tromper en disant cela). Quand cela arrivera (et je suis d'accord avec toi que ça arrivera tôt ou tard) il y aura du monde sur la touche, qui se retrouveront au chômage sans compétence particulière et qui seront bloqués soit entre les emplois vraiment dégradants, soit les emplois qui demandent un minimum de compétences.
De plus avec la mondialisation galopante, la maitrise des langues étrangères devrait être une priorité mais là-dessus no comment dans notre éducation actuelle...

Sinon je trouve que la mentalité "il faut promouvoir la réussite plutôt que l'assistanat" est le pire blocage qu'on puisse faire pour le revenu universel. Tu l'as dit toi même gagner de l'argent est le noeud du problème, pourtant tu cites le revenu universel qui va contre l'idée de travail aliénant et pénible, et pour plus de liberté individuelle. C'est bien qu'on a les idées pour faire un monde fonctionnant à l'argent sans les (gros) défauts actuels. Quant à garder notre confort actuel, j'ai aussi envie de dire que le confort est pas mal relatif, certes on ne vit pas comme des esclaves d'égypte antique mais c'est pas Byzance non plus pour la plupart d'entre nous.

Le principal soucis avec notre économie actuelle c'est que les idées les plus sociales sont entièrement contre intuitives. Le revenu universel, par exemple, a du mal à passer en travers de la gorge parce que ça nous donne l'impression que tout le monde va quitter son boulot pour vivre pépère à jouer à la console toute la journée. Les études réelles sur le RU montrent que contrairement à cette idée reçue, le revenu est totalement bénéfique pour notre économie car il pousse à consommer, d'une, et de deux les gens qui le touchent sont, paradoxalement, plus enclins à travailler ! La pauvreté et la pression constante des fins de mois difficiles ont l'effet psychologique de rendre contre productif et moins rationnel. A contrario le revenu universel permettrait non seulement de favoriser la consommation, augmenter l'éducation dans les milieux les plus pauvres (ce qui serait la meilleure façon de créer des entrepreneurs en devenir et donc de l'emploi), mais même motiverait chacun à s'investir pour davantage faire d'effort sur ce qui plait réellement (et donc le but ultime : faire des métiers épanouissants).

Après c'est l'idée ça, on est pas à l'abri de voir une large partie de la population ne rien foutre, mais en théorie le revenu universel se finance de lui même sur le long terme (par des moyens détournés), donc économiquement il n'est pas une aberration. Et là où je veux en venir c'est que le chômage marche à peu prés de la même manière : il permet de consommer et est, à terme, bénéfique à l'économie et à la société. Réprimer le chômage est une aberration économique. Le clivage vient du fait qu'il y a, basiquement (trés basiquement même car le chômage est psychologiquement très dur à vivre et beaucoup essayent de s'en sortir comme ils peuvent), des gens qui se cassent le cul, et d'autres qui en profitent. Culturellement on préfère privilégier ceux qui se cassent le cul plutôt que ceux qui en profitent (je dis pas que c'est anormal), sauf que le système qui fait se casser le cul aux gens est quand même une sacrée purge dans la plupart des cas. Donc, au lieu d'accepter la réalité du monde contemporain tel qu'elle est, je pense que nous sommes capables de faire changer les choses en bien. Il y a de fortes chances qu'il y ait toujours un clivage riches/pauvres, c'est quelque chose d'assez universel dans les sociétés modernes (seules sont épargnées les tribus encore sauvages), mais on peut rendre plus vivable la pauvreté cela dit, on en a largement les moyens.

En plus du chômage, je vois le relogement des SDF comme idée contre instinctive. On ne veut surtout pas donner un logement gratos à un SDF alors qu'à la rue, celui ci coûte plus cher (en frais d'hôpitaux par ex) que si on lui donnait un appart comme ça, sans contrepartie. De plus cela lui permettrait de reprendre pied et de chercher un travail, ce qui serait sur le long terme largement bénéfique à la société. Mais on ne le fera jamais car on vit dans une méritocratie absurde et que les mentalités qui semblent couler de source sont vraiment très difficiles à changer.

@Duplucky Mon passage "à l'aube de..." ne ciblait pas nous les français mais l'humanité en général qui serait à l'aube de révolutionner son mode de vie. J'imagine bien qu'on a pas le pire système de chômage du monde et qu'on a rien inventé.
« Modifié: jeudi 22 mars 2018, 02:53:49 par D_Y »
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[Débat] Le marché du travail et le chômage
« Réponse #5 le: jeudi 22 mars 2018, 13:04:13 »
@Taiki le congé est juste un exemple. Si tu veux un autre exemple, prenons la vie de famille. Je vois bien plus mon neveu que ses parents parce que je suis chômeur. Trouves-tu ça normal qu'un fils ne voit presque pas ses parents à cause du travail ? Pourtant, ils ne sont pas spécialement irresponsable. (Enfin si, pour l'un d'entre eux, mauvais exemple mais osef) Mais ils n'ont pas le choix d'aller bosser à 6h du mat pour ne revenir du boulot qu'à 19-20h et ce tous les jours.

Que le patron ait son entreprise à gérer, je peux le concevoir. Mais on en est au stade où il s'imisce tellement dans la vie de ses employés qu'eux ne peuvent plus vivre, si ce n'est que pendant une durée très limitée (5 semaines sur 50, ouaaaah, c'est énorme !) Après ça, quand tu seras retraité, tu seras trop usé pour faire tout ce que t'auras toujours voulu faire dans ta vie mais que tu n'auras jamais pu car t'auras travaillé comme un goret pour essayer de joindre les deux bouts.

Ne pas trouver d'alternative ne veut pas dire devoir accepter ce qu'on nous fait subir actuellement pour autant, je trouve.

@D_Y Dans ce cas, qu'est-ce qui te fais supposer que c'est le cas ? Moi, j'ai plus l'impression que les gens n'ont plus de cervelle et font leurs tâches en mode automatique, complètement soumis à leurs conditions de vie. 

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[Débat] Le marché du travail et le chômage
« Réponse #6 le: jeudi 22 mars 2018, 18:03:00 »
@Duplucky J'ai déjà donné quelques petits élements de réponses au-dessus. Aussi sur le fait qu'aucun modèle économique n'est vraiment éternel et que notre système actuel est fatalement voué non pas tant à disparaitre, mais à muter. Le fait que le monde du travail actuel soit considéré comme une belle daube par des gens comme toi ou moi prouve que les gens ne vont pas à la tâche sans réfléchir mais peuvent se questionner sur leurs conditions de travail (allez soyons fou, jusqu'à la condition humaine même). Même ceux qui s'en accommodent ont l'air de voir qu'il y a un malaise palpable.

Après je suis pas devin je sais de quoi l'avenir sera fait, mais comme on est incapables de prévoir comment sera le monde dans 10 ans, je peux je pense m'aventurer à dire qu'il y aura du changement (en bien ou en mal, j'ai pas d'avis sur cette question par contre). Même les plus grands empires ont chuté, je vois pas pourquoi l'occident serait immunisé au changement.
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[Débat] Le marché du travail et le chômage
« Réponse #7 le: jeudi 08 août 2024, 23:00:33 »
6 ans plus tard, je vais poster dans ce topic car j'ai ma vision assez simpliste du contexte actuel, sans qu'elle ne me semble en décalage, négativement parlant.

Il y a 3 problèmes majeurs aujourd'hui dans le marché du travail: l'inégalité de la répartition des richesses en premier lieu, la politique du travail et la vision sociale vis-à-vis du travail.

Inégalité de répartition des richesses: Les pauvres toujours plus pauvres, les riches toujours plus riches, malheureusement le COVID n'a fait que creuser le constat d'inégalités sociales. Et à l'heure actuelle où l'inflation dicte le pouvoir d'achat de plus en plus sévèrement, on est malheureusement toujours dedans. D'autant que le vrai problème pour moi va se situer ailleurs: la rentabilité du travail. A ce jour, elle est clairement pas terrible en moyenne. Comparons les indemnités chômage par défaut d'un ancien smicard, et le SMIC en lui-même. L'écart est carrément risible. Dans ce cas, pourquoi se souler avec un CDI qui rapportera toujours moins que des contrats d'intérim réguliers? Le NFP a proposé un SMIC net à 1600€? Ridicule, ça boostera d'autant plus les taux d'inflation et les taux d'intérêt, résultat le pouvoir d'achat sera encore plus tiré vers le bas...  Sans parler du fait que la liberté contractuelle est de plus en plus un argument dans une société de plus en plus en conflit avec un executif aux tendances dictatoriales, et qui en a marre de se voir poser des barrières partout à longueur de temps.

Politique du travail: Le travail n'est pas valorisé par le gouvernement, qui passe son temps à jouer au fort avec les faibles, et à jouer au faible avec les forts. Pendant que le peuple compte ses sous dès le 10 du mois et les premières factures réglées, vous voyez des guignols style PDG de Total qui augmente son salaire de 50% et qui le balance en pleine grève des ouvriers de sa boîte en 2023, ouvriers à qui on a proposé un truc symbolique du style 3% d'augmentation, sans améliorer les conditions de travail par derrière et en leur envoyant la milice en prime pour les réquisitionner à retourner bosser? Sans parler de la réforme des retraites qu'on nous a imposé au 49-3. Ce qui est ridicule en soi, car en poussant les actifs à bosser plus longtemps, on dépouille les jeunes de davantage d'opportunités de rentrer sur le marché du travail.
Enfin, ça, c'est plutôt en théorie. Car la réalité est toute autre. J'ai travaillé dans une agence d'interim, du "bon côté du bureau", et je peux vous dire qu'en quelques semaines, j'ai capté pas mal de trucs. Certains secteurs comme celui du BTP, la peinture industrielle en bâtiment, l'electricité, les commerciaux... sont en pénurie de main d'oeuvre. Du travail, il y en a, mais aussi, comment les entreprises peuvent-elles se permettre de chialer en disant "les gens ne veulent plus bosser" quand elles refusent systématiquement d'aller au-delà du SMIC? Quand tu proposes rien de mieux que le SMIC, c'est un aveu que tu considères que le poste ne vaut pas mieux que le minimum, alors comment celà peut-il envoyer un message positif pour les pourvoir? Pour les commerciaux, les rémunérer à la commission pour aller faire du démarchage sans garantie d'avoir de la clientèle régulière, vous croyez que ça va attirer qui?
Aujourd'hui, ne nous y trompons pas: ce sont les intérimaires qui ont le rapport de force en leur faveur, encore plus même depuis les confinements de 2020 qui ont affaibli la puissance financière des entreprises les moins bien lôties? Entre novembre 2021 et novembre 2022, je peux vous dire que j'en ai reçu des offres débiles de ce genre. Des offres de commercial indépendant, je les comptais même plus, et dès que certains réussissaient à m'arracher un entretien téléphonique, ils lâchaient l'affaire quand j'exigeais une garantie de fixe.

La valeur du travail aux yeux de la société: Job alimentaire, c'est souvent ce que j'entends en termes de considération sociale. Les gens ça les fait chier d'aller bosser, de plus en plus. Ils aiment de moins en moins leur travail car les mentalités ont une tendance à l'évolution négative... Beaucoup trop de gens vont bosser pour l'argent et c'est tout. Je trouve ça très dommage. Ce n'est clairement pas la bonne mentalité pour relancer l'économie. On accorde de moins en moins d'importance au critère du bien-être professionnel je trouve, c'est 95% du temps "argent, argent, argeeeeeeent". Et malheureusement c'était aussi le cas pendant ma carrière qui a duré une grosse quinzaine d'années, balladée entre des interims pour le compte d'entreprises débiles style La Poste qui m'a accusé d'avoir détruit un mur avec... un vélo :hap: (ouais jsuis trop baleze, le vélo il avait 0 trace en plus  :hap: ). Mais là où je veux en venir, c'est finalement qu'à part une fois en 2011 (et un patron en 2012 que j'avais dépanné en 4 jours en lui remettant sa compta à niveau, il m'a filé un magnum de champagne pour me remercier  :8):) , aucune entreprise ne m'a donné envie de rester chez elle, aucune entreprise ne m'a considéré, et aucune entreprise n'a eu de coup de coeur de ma part.
Bon, aujourd'hui, j'ai une situation stable, j'ai signé mon CDI pas plus tard que le 1er août dans une entreprise où je me sens très bien, une vraie petite famille professionnelle où l'égocentrisme n'a pas sa place, où j'apprécie chaque employé, du patron aux ouvriers, où on tape un barbecue tous ensemble, et pourtant, je suis pas payé une fortun hein!! Mais je reste en position de force, parce que j'ai malheureusement eu un arrêt de travail de 5 semaines à cause d'une maladie qui m'a fait passer en salle d'opération (et là j'en ai un autre d'une semaine et demie car la première opération a foiré et qu'il a fallu réopérer hier, bref, instant mylife fini)... Une heure après mon retour, le patron était à mon bureau et m'a proposé le CDI, parce qu'en 5 semaines, ils ont vu quel merdier c'était quand j'étais pas là, personne ne connaissant la moitié de mon poste... Donc si j'étais un enfoiré, que j'avais envie de revoir mes conditions salariales à la hausse en leur faisant du chantage, ou essayer d'évoluer dans l'organigramme de l'entreprise à n'importe quel prix, je le pourrais, car totalement involontairement, je les ai mis sous pression quoi... Mais JAMAIS je le ferais, là où avec La Poste par exemple, j'aurais pas hésité une seule seconde. Qui sème récolte, comme on dit.
Tout ça pour dire que quand on signe quelquepart, on doit aussi savoir tenir compte de ce genre de paramètres car ce n'est pas parce qu'un CDI est signé qu'on finira sa carrière dans l'entreprise avec qui on a signé. On doit pouvoir garder une marge et des arguments de négociation. Et on doit surtout être HEUREUX au travail. Y aller avec le sourire et pas les yeux rivés sur la calculatrice, en mode "Bon, qu'est-ce que les gars vont encore me sortir comme délires aujourd'hui?". Et se sentir coupable d'être en arrêt et de les savoir dans la mouise par la faute de la malchance sanitaire qui m'accable depuis deux mois, alors que dans la majorité des cas, on vous propose un arrêt de travail, vous le prenez, vous vous faites pas prier. Moi le personnel medical qui m'a suivi devait m'engueuler parce que ma boîte me manquait et que je pensais à faire une reprise anticipée.  :oui:
Mais vous savez pourquoi cette entreprise est aussi attractive et que c'est purement une rareté insolite sur un marché d'apparence hétéroclite? Parce que le patron, qui est le premier à devoir montrer l'exemple dans une entreprise, est un vrai personnage, attachant, humain, qui place le bien-être de ses employés en priorité. La preuve, il ne m'a pas fait barrage quand j'ai demandé à partir plus tôt le soir pour mes soins infirmiers indispensables. Et ce patron, je l'ai vu deux fois en entretien, les deux fois j'ai eu un coup de cœur pour le personnage. J'ai même signé mon CDD en me disant "je ne signe pas pour l'entreprise, je signe pour travailler avec ce gars, car je sens qu'avec lui, je ne vais pas m'ennuyer". Et ça ne rate pas.  :^^:
Alors bien sûr, je l'ai dit et répété, je sais que je suis dans une entreprise d'exception, pour laquelle je suis prêt à m'investir pour les 25 à 30 prochaines d'années si tout continue de bien se passer au travail. Mais ce qui m'attriste, c'est justement de me dire que nous constituons l'exception qui confirme la règle comme quoi c'est rasoir de bosser. Et ça s'est d'autant plus vu dans toutes les manifs début 2023 après le 49-3 des retraites où, avant de vomir sur l'exécutif (bon, ça, je maintiens que c'est bien fait), les gens vomissaient sur tous les aspects négatifs que le travail représente à leurs yeux.   :/
Sans parler qu'il y a des secteurs qui sont vraiment sinistrés (la médecine et l'éducation en premier lieu), mais ce n'est pas en formant la relève comme on fait de la manutention que l'on va résoudre les problèmes. Filer un tiers de SMIC à un interne en hopital en lui filant la charge de boulot d'un titulaire généraliste, désolé mais c'est non. Ou recruter des profs en leur imposant des secteurs d'exercice professionnel et une rémunération et une considération sociale identique à celle des sanitaires de lycée, là aussi désolé mais c'est non. On ne redressera JAMAIS de ces manières misérables ces secteurs primordiaux, prioritaires et indispensables pour notre société.

Voilà, désolé, j'ai fait un peu beaucoup de mylife, mais je trouvais que j'étais un exemple pas si terrible que ça pour pouvoir mettre en avant quelques arguments bien sentis, notamment pour l'importance à accorder à ce que certains considèrent comme des détails, détails qui pour d'autres font une différence énorme.
Sur ce, je souhaite à ceux qui m'ont lu de vivre une vie professionnelle comme celle que je vis depuis le début de l'année (les arrêts maladie en moins, évidemment)  :ange:
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[Débat] Le marché du travail et le chômage
« Réponse #8 le: vendredi 09 août 2024, 17:21:09 »
Ça c'est un truc que je répète souvent dans les débats actuels sur le sujet. La France mise à fond sur les start-up (maintenant, l'investissement dans le non coté en bourse est obligatoire pour certains livrets), et veut des patrons qui tentent et qui emportent un max si le pari marche !

Sauf que pour que le patron réussisse, faut qu'il ait des salar collaborateurs et collaboratrices qui réussissent, qui donnent de leur temps avec un salaire bas.

Sauf que dès qu'on parle de récompenser ces salariés avec des titres de la boite ou des obligatoires, ou autre chose qu'un magnum (par exemple) ou un restaurant, ben ça frissonne, ça pleure, ça dit que non, le salarié n'a pas risqué autant que le patron donc il ne mérite rien...

Ben du coup, s'il ne mérite rien, pourquoi serait-il attaché à sa boite ? Ma femme a donné 17 ans de sa vie à une boite qui l'a jeté dès qu'elle a appris qu'elle avait trouvé mieux ailleurs, sans chercher à la retenir, alors qu'elle aurait aimé continuer avec eux. Et ils n'ont jamais pris de nouvelle depuis.

17 ans, et rien, queud, alors que dans sa nouvelle boite elle enchaine reconnaissance sur reconnaissance.

C'est vraiment une mentalité à changer : celle que c'est le patron qui prend tous les risques. Et c'est un ancien patron qui est encore en train de rembourser sa boite qui vous le dit.   

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[Débat] Le marché du travail et le chômage
« Réponse #9 le: vendredi 09 août 2024, 17:33:54 »
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Certains secteurs comme celui du BTP, la peinture industrielle en bâtiment, l'electricité, les commerciaux... sont en pénurie de main d'oeuvre. Du travail, il y en a, mais aussi, comment les entreprises peuvent-elles se permettre de chialer en disant "les gens ne veulent plus bosser" quand elles refusent systématiquement d'aller au-delà du SMIC? Quand tu proposes rien de mieux que le SMIC, c'est un aveu que tu considères que le poste ne vaut pas mieux que le minimum, alors comment celà peut-il envoyer un message positif pour les pourvoir? Pour les commerciaux, les rémunérer à la commission pour aller faire du démarchage sans garantie d'avoir de la clientèle régulière, vous croyez que ça va attirer qui?

Donc ces boulots ne sont pas assez valorisés ? Si on augmentait le SMIC, peut être que ça motiverait les gens à les faire ? :oups:

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Job alimentaire, c'est souvent ce que j'entends en termes de considération sociale. Les gens ça les fait chier d'aller bosser, de plus en plus. Ils aiment de moins en moins leur travail car les mentalités ont une tendance à l'évolution négative... Beaucoup trop de gens vont bosser pour l'argent et c'est tout. Je trouve ça très dommage.

Oui 'fin ya des métiers je vois pas trop comment tu peux avoir une autre motivation que l'argent. Tu sais, les métiers essentiels pour faire tourner la société, ceux qui ont été maintenus pendant le covid. Genre éboueur, caissier, livreur par exemple. Je ne sais pas quel métier tu fais, ni même dans quel domaine tu exerces, mais je te souhaite de trouver un sens et un épanouissement au travail. Mais malheureusement, tout le monde n'en a pas la possibilité :/

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[Débat] Le marché du travail et le chômage
« Réponse #10 le: vendredi 09 août 2024, 19:37:02 »
@Guiiil ce qu'a vécu ta femme et la manière dont tu résumes les choses sont le parfait reflet de mon parcours jusqu'à maintenant.
TU t'investis, tu donnes de ta personne, tout ça pour des boîtes où on te considère de temps en temps surtout pour ce qui est des "petits" travailleurs. Mais alors les grands patrons, qui ne te connaissent pas, n'ont jamais vu ta gueule, ne t'ont jamais fait le moindre entretien, tu peux aller te faire foutre avec eux.
Forcément, à un moment, on va chercher ailleurs quand on nous propose mieux ailleurs. Ta femme a eu raison. Et j'ai eu raison aussi de claquer autant de portes, ça m'a endurci et appris que vu la tendance du marché, je préfère ne rien avoir que de me faire lourder par un job alimentaire. Au final ça a payé, pour elle et pour moi.  v.v


Donc ces boulots ne sont pas assez valorisés ? Si on augmentait le SMIC, peut être que ça motiverait les gens à les faire ? :oups:
Ces boulots sont-ils valorisés? Humainement parlant, je n'ai jamais vraiment travaillé dans ces secteurs donc je ne pourrai te répondre, à part sur le fait que les commerciaux ont l'image des casse-burettes du téléphone qui t'appellent parfois un vendredi soir à 19h pour te vendre des trucs dont t'as rien à battre, ou sont vus comme des voleurs uniquement motivés par la comm' et 0 SAV. Une chose est sûre pour eux: le SMIC, jamais ils l'acceptent, ils sont en position de force, ils trouveront toujours moyen d'avoir mieux tellement certaines régions sont en pénurie de main-d'oeuvre (la Bretagne par exemple, ça construit partout, mais les ouvriers changent non stop)
Et les autres jobs c'est sensiblement la même chose: tu ne dégottes personne pour les faire car le seul fait d'être au SMIC les rend dévalorisés. Et que tu mettes le SMIC à 1100 ou 1600€ n'y changera rien: tant qu'ils sont au SMIC, l'image c'est que c'est payé le minimum syndical, que les patrons ne font aucun effort sur ça. Comme le dit Guiiiil, si les patrons ne font pas l'effort, pourquoi ce serait toujours au salarié de le faire?
La seule chose que le SMIC réévalué va changer, c'est la baisse du pouvoir d'achat entraînés par la hausse inflationniste.

Oui 'fin ya des métiers je vois pas trop comment tu peux avoir une autre motivation que l'argent. Tu sais, les métiers essentiels pour faire tourner la société, ceux qui ont été maintenus pendant le covid. Genre éboueur, caissier, livreur par exemple. Je ne sais pas quel métier tu fais, ni même dans quel domaine tu exerces, mais je te souhaite de trouver un sens et un épanouissement au travail. Mais malheureusement, tout le monde n'en a pas la possibilité :/
Livreur j'ai déjà fait (facteur c'est pareil que livreur quasiment, sauf côté horaires), ça me déplaisait pas. C'est la mentalité des costards à lunettes qui nous bassinaient le matin avec leurs chiffres dont on avait rien à battre qui nous déplaisaient. D'ailleurs je suis pas le seul à avoir claqué la porte apparemment, j'en ai entendu des belles sur le devenir du tripot en question. Nombre de départs et/ou mises à la porte, harcèlements et j'en passe. 
La motivation principale est l'argent mais bon, si on commence à partir juste sur ce critère, on ne fait jamais une carrière épanouie. Perso, quand je me lève les matins, je pense surtout au fait qu'il y a de grandes chances qu'on se marre entre collègues pendant 8h, et même avec les clients ou les fournisseurs. Avec le patron que l'on a, on sait qu'on a tout pour être épanouis et avoir le sourire quand on vient remplir notre part du travail. Les treizièmes mois, les congés payés, les primes vacances, c'est mignon je dis pas, mais j'ai pas eu besoin de relire mon contrat 36 fois et de faire des calculs pour le signer.
Une heure après un arrêt-maladie de 5 semaines, le patron me propose un CDI. Tu as déjà vu ça dans une autre boîte?
L'entreprise qui vient te chercher pendant que t'es en vacances pour te dire "On a eu un coup de coeur sur ton personnage, pour nous c'est toi et personne d'autre, on nous a envoyé des CV mais on les a même pas lus car on veut d'abord ta réponse" sans tenir compte des compétences professionnelles ou quoi que ce soit, tu as déjà vu ça dans une autre boîte?
Pour te dire, même le PDG, quand il vient, il serre la main de tout le monde, sans forcément aller toujours plus loin. Eh bien pourtant, à mon retour et avant que le patron me fasse son offre de CDI, eh bien il s'est enquéri de ma santé, et clairement ça se sentait dans sa voix que c'était une question désintéressée.
Donc pour le moment oui, j'ai ENFIN trouvé ce que je cherchais: une entreprise où la plus belle motivation que l'on trouve, ce n'est pas celle qui arrive sur ton compte en banque. Et c'est aussi pour ça que j'aime en parler, pour que les gens puissent comprendre que non, toutes les boîtes ne sont pas pareilles.  :ange:
(et merci pour tes "voeux", ça me fait plaisir  :oups: )
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[Débat] Le marché du travail et le chômage
« Réponse #11 le: vendredi 09 août 2024, 22:21:45 »
Désolé pour le roman.

Je t'ai mis un rubis pour tes deux premiers points car je pense que tu tapes très juste, mais honnêtement je trouve que sur le troisième tu es d'une naïveté assez touchante (c'est pas péjoratif du tout, c'est même tant mieux que des gens comme toi existent, la suite de mon message éclairera ce point).

Déjà l'opposition entre les petits employés innocents et les costards-cravates qui naviguent à l'aveugle et ne comprennent rien à la vie est assez marquante. Je comprends bien que c'est un héritage révolutionnaire, mais tu imagines bien que la réalité est plus compliquée que cela. Si tu as vu ces gens de tes yeux, ce ne sont pas des pontes mais des salariés comme toi qui certes ne comprennent pas forcément tout, mais c'est bien pour ça que tu as pu les voir de tes yeux. Ceux-ci sont les moins bien lotis, car le système leur donne une aura d'importance alors qu'ils ne sont que la hiérarchie "haute" du prolétariat. Comme un manager chez McDo qui fait une crise d'autorité si tu veux, une personne qui est moins qu'un chewing-gum sous la chaussure des vrais patrons de McDo, car contrairement au chewing-gum, leur existence est concrètement (et sera toujours) ignorée. Mais assez sur eux car ce n'est le point principal de ton message.

Sur le fait que les gens devraient se sentir HEUREUX (sic) en travaillant. C'est à mon avis le morceau le plus intéressant de ton message. Qu'est ce que le travail ? Je ne vais pas partir dans le edgy "gnagna tripalium" qui est assez vain et pas spécialement à propos je trouve. Dans l'histoire humaine, la notion de "travail" a changé de telle manière que sa nature même en a été altérée. Pour simplifier dans les très grandes lignes, le travail en tant que tel n'existe que dans son sens économique usuel, qui est la production de biens et de services au profit de la croissance et du produit intérieur brut. C'est un facteur de production. Or c'est une définition relativement moderne de la chose. Un antique te prendrait pour un fou si tu lui expliquais le travail en ces termes. Le fait est qu'aujourd'hui les facteurs de production sont extrêmement scrutés et constituent dans une large part nos politiques actuelles. Car les états modernes reposent pour ainsi dire entièrement sur les quelques concepts que je viens de mettre en italiques. On appelle ceci les politiques contracycliques (i.e. les politiques censées mettre à niveau le PIB réel d'avec le PIB potentiel optimal), et son calcul la PGF (productivité globale des facteurs).

De ce paragraphe chiantissime découle plusieurs conséquences. La première, et la plus évidente, c'est que le travail moderne ne peut factuellement pas être une source de bonheur. Car le PIB n'est en rien un indicateur de bonheur, et n'est d'ailleurs un indicateur que de très peu de chose, car c'est un indice qui n'a que peu de valeur historique. Il n'y a que nous dans toute l'histoire humaine qui osons raisonner de la sorte. Nos ancêtres ignoraient tout des concepts de la "croissance" ou du "PIB". Les économistes d'ailleurs commencent doucement à réfuter le PIB pour la seule raison qu'il mesure tout sauf le bonheur. Il y a une raison plus ou moins philosophique à cela : produire des biens et des services est un ensemble de choix qui parait plutôt positif et sensé, mais qui est en réalité une dichotomie profonde. Tout le monde sait instinctivement que c'est une tâche impossible, car notre environnement est fini, or notre espèce le sait, mais continue à agir comme si elle croyait en l'inverse. Cette simple distorsion entre ce que l'on sait au fond de nous et ce que le système essaye de nous faire croire est, à elle seule, mécaniquement productrice de malheur et de misère. C'est la principale cause d'aliénation, car cette dichotomie ne peut créer qu'un tiraillement intérieur, sauf si par bonheur on arrive à en faire fi.

La deuxième conséquence est le changement de perception de ce qu'est le travail. Pour la plupart des humains de notre histoire, le travail équivaut à nourrir celui qui travaille ainsi que sa famille. Le développement de l'interdépendance a changé ce paradigme, en ce sens que l'on travaille pour soi ET pour la communauté. Par exemple je suis agriculteur, mon champ produit du blé, j'utilise ce blé pour nourrir ma famille, et soit je vends ce surplus dans un marché (origine première des villes), soit je l'échange contre quelque chose d'également utile (ex : je te donne mon surplus de blé pour te nourrir contre ce bois pour me chauffer, ou contre une hache fabriquée par un professionnel pour couper le dit bois). Dans cette configuration je détiens mes moyens de production, et la vente ou l'échange du fruit de mon travail m'appartient. Le forgeron qui a créé la hache détient ses moyens de production également. Le capitalisme a renversé la table en ceci que les moyens de production ne m'appartiennent plus, ni le fruit de mon surplus. Dans le monde moderne cela peut se résumer très simplement : sur une journée de travail 4h me sont payées, 4 autres heures vont dans la poche de mon employeur. Rien de tout cela ne présume si mon employeur est "gentil" ou non. Cela pourrait être l'humain le plus adorable de la planète qu'il engorgerait toujours 4h de ma productivité journalière, sur la simple promesse tacite que cela bénéficiera à nous deux (en quoi ? la plupart des salariés l'ignorent).

Pour éviter d'être beaucoup trop long, la conjugaison de ces deux phénomènes entraine mécaniquement le malheur salarial. Le marché sait sans qu'on ait besoin de lui dire que les ressources à nos dispositions sont finies. On ne peut créer des biens et des services à partir du vide. C'est pour cela que le chômage ne peut essentiellement jamais tomber à zéro, car il y a contradiction fondamentale entre "tous les humains doivent travailler" et "nous vivons dans un monde fini". La même absurdité recouvre la croyance en un PIB éternellement en croissance.
Quant au reste, la plupart des humains ne détiennent pas leurs moyens de production, et le monde étant ce qu'il est, il est beaucoup plus probable que les détenteurs de ces moyens abusent de leurs employés qu'aucun autre scénario.

(Il y a un effet beaucoup plus délétère à ceci, qui fait office de cercle vicieux. Le capital est voué à produire, or cette production est finie, même sans que l'on parle de ressources terrestres. Pour la faire courte, il existe une sorte particulière de crise économique, qui est la surproduction de capital et donc de monnaie superflue, qui ne peut plus trouver d'investissement, tous les créneaux étant déjà pris. Le seul moyen de percer cette sorte de bulle est d'exporter ces capitaux, or les investissements l'étranger sont très peu contrôlés. De ce processus découle spéculation incontrôlée, colonialisme et impérialisme. De cet impérialisme suit des contre-mouvements qui ont un effet réel sur nos vies, de sorte que nos choix/réactions réorientent les spéculations et allument d'autres feux ailleurs dans le monde. Car c'est une caractéristique de l'interdépendance, qu'une allumette peut embraser une forêt entière. Mais fin de la parenthèse).

Je me dépêche  :^^: Il est significatif que de l'organisation capitaliste nous ayons repensé nos conceptions du pouvoir. Dans le monde du travail, aujourd'hui, la compétition règne largement. Hobbes avait prédit cette compétition et l'appelait "état de nature", et lui même avait dit que cela était source de grand malheur et de perpétuelle incertitude. C'est le monde que nous vivons dans à peu prés toutes les sphères politico-économiques existantes, et je n'exagère pas du tout.

Je tiens ainsi à signaler la contradiction qui existe entre cette compétition et le champ lexical de la famille que tu utilises dans ton message. En fait tu as peut être raison dans la conclusion mais pas dans le prémisse. La famille n'a acquis son symbole d'unité que dans notre monde désorganisé et compétitif. Historiquement la sphère familial, c'était avant tout une arène de laquelle on veut s'émanciper et même socialement supplanter ceux-là mêmes qui nous ont donné la vie. En définitive, ce n'est pas un hasard si le capitalisme a essayé de faire passer l'entreprise pour une famille. L'erreur, c'est d'avoir fait croire à tout le monde que "famille" était synonyme d'amour. C'est un piège dans lequel tu es peut être tombé.

Merci d'avoir redonné vie à cette section  :^^:
« Modifié: vendredi 09 août 2024, 22:26:42 par D_Y »
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[Débat] Le marché du travail et le chômage
« Réponse #12 le: samedi 10 août 2024, 09:57:50 »
De rien, ça m'a fait plaisir.  :^^:

Sinon, j'avoue que je ne comprends pas totalement ta conclusion, même si je vois les grandes lignes argumentatives que tu construis. En relisant tout celà, je me dis que j'ai fait involontairement un amalgame qui a tiré ma propre argumentation vers le bas: la confusion entre le travail lui-même, et l'environnement de travail dans son ensemble. Avec le recul, je vois bien que cette confusion a entretenu l'image de la grande naïveté que tu as relevée (et que, je rassure, je n'ai aucunement mal prise).

Car, en effet, travail et environnement de travail, ce sont bien deux notions sensiblement identiques dans l'imaginaire, mais pas véritablement dans la réalité.
Je ne reviendrai pas sur ce qu'est le travail en lui-même, tu l'as précédemment fait et je ne vois pas ce que j'aurais à opposer à cette version.
J'abonderai même en ton sens en quelques termes. "Travail" c'est très souvent vu comme péjoratif dès que l'on l'entend, encore plus quand on en a un dans lequel on ne se sent pas épanoui. C'est souvent pour ça d'ailleurs que l'on entend plus fréquemment "alors, comment c'est le boulot en ce moment?" plutôt que "tu te sens comment dans ton emploi en ce moment?" avant d'entamer une discussion professionnelle.
C'est aussi pour ça qu'on a eu un tel tollé autour des retraites (bon, le 49-3 a mis le feu dans les rues sur la manière, mais même si le fond était passé sans 49-3 à l'AN, la contestation aurait été là, mais avec moins d'arguments de l'opposition) car prolonger ce sentiment négatif pour deux années de plus n'avait rien de réjouissant.

Mon argumentaire, et celui de Guiiil aussi je pense) tournait davantage autour de l'environnement du travail, qui est une constante différente à étudier, et ne se trouvera jamais résumée en quelques chiffrages ou sondages d'opinions de quelques centaines de lambdas.
On trouvera quand même dans l'environnement du travail les principales raisons psychologiques à se sentir ou non épanoui pendant un quota tournant en moyenne autour de 35 hebdomadaires. 35 heures sur 144, c'est 25% de notre temps de vie sur une quarantaine d'années. Sachant que sur les 75% restants, on en passe un tiers à dormir (et donc techniquement à ne pas vivre), on va donc dire que ces 35 heures de travail hebdomadaires représentent dans une carrière 40% de notre temps de vie. Et là, tu te dis que oui, c'est énorme, et donc que tu dois absolument faire en sorte de t'y sentir un maximum à l'aise, ou à minima de ne pas t'y sentir incommodé.  :/
Donc c'est là que ce que j'exposais précédemment prend une dimension qui, à mes yeux (mais je pense être quand même dans une minorité pensante sur ce genre de sujets  :hap: ) est primordiale, à commencer par ne pas y aller en traînant les pieds et y prendre le plus de plaisir possible. C'est d'ailleurs pour ça que quand on me demande "comment tu te sens dans ton nouveau job?", je ne parlerai pas du job en lui-même ou très peu car il n'a pas forcément grand chose de passionnant à raconter là-dessus, mais plutôt des valeurs humaines en interne, des barbecues improvisées ou des dernières gaffes, blagues ou anecdotes du chef qui est décidément un sacré personnage.  v.v
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[Débat] Le marché du travail et le chômage
« Réponse #13 le: samedi 10 août 2024, 12:09:08 »
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Car, en effet, travail et environnement de travail, ce sont bien deux notions sensiblement identiques dans l'imaginaire, mais pas véritablement dans la réalité.

Pas d'accord, j'aurais peut être du l'expliciter mais ce dont je parle (exploitation salariale, compétition permanente, sentiment implicite que le système est injuste et délétère pour notre environnement) ne peux avoir que des conséquences sociales négatives.

A ce titre c'est assez facile d'enjoindre les autres à prendre du plaisir à aller au travail, de ne pas penser à l'argent, ou de vouloir faire de ses collègues sa famille. Déjà il n'y a rien de plus naturel que de penser à l'argent quand on va travailler, car la théorie économique implique que le travail est créateur de richesse. En corollaire cela implique créer des richesses pour son confort personnel aussi (et surtout). On peut trouver cela dommageable, il reste que sans cette dimension il n'y aurait plus grand monde pour aller travailler (et probablement le capitalisme s'effondrerait, donc c'est un "si" de conte de fée). Et même sans parler de ça et en étant très terre-à-terre, le travail pour l'écrasante majorité de l'humanité consiste à se nourrir et à assurer d'avoir un refuge où dormir, pas de faire des barbecues ou de faire copain-copain avec Jean-Yves de la compta. Ceux qui gagnent assez pour aller bien au-delà de ces besoins primaires, ils le font pour pérenniser leur patrimoine personnel, voyager, envoyer leurs enfants dans les meilleures écoles, faire vivre l'entreprise Porsche, &c. Croire que quiconque dans le maillon de cette chaine à envie de devenir ami, c'est un peu idéaliste je trouve.

Sur la notion de "plaisir", pour reprendre tes propres termes et parler d'environnement de travail et non de travail (pour ma part les deux sont intrinsèquement liés mais bref), je pense qu'il n'y a pas de débat existant sur le fait que le plaisir est déterminé par le dit environnement. Tu as peut être ces sentiments car ils te sont inspirés par ta qualité de vie actuelle (ou par ton patron qui est un "joyeux luron"), mais on ne peut pas reprocher aux nombreux travailleurs qui ont un travail très difficile et pénible de ressentir une forme de malaise ou d'injustice sociale non plus. Pour eux le travail c'est de la survie, et de la survie qui les brise physiquement et psychologiquement.

Imagine juste aller voir une caissière ou un manutentionnaire Amazon et toi, jeune gars de PME qui va faire des barbecue avec ses collègues, leur expliquer "non mais prenez plaisir à ce que vous faites, le patron c'est votre ami, faites vos 8h de shift avec le sourire enfin", il y a de grandes probabilités pour que le dialogue se passe mal. Le monde du travail aujourd'hui est incroyablement difficile pour énormément de personnes, n'a pas beaucoup changé depuis le siècle dernier où Simone Weil a écrit sur la condition ouvrière, et je le répète, n'a pas beaucoup de raisons structurelles de se métamorphoser en mieux.

Je te comprends en un sens, des petits jobs j'en ai fait mon lot, prés de 15 ans maintenant, j'étais un peu comme toi à une époque. Moi aussi je pensais comme toi, essayer d'avoir le sourire et faire des blagues pour mettre la bonne ambiance. Moi aussi j'aime bien les "team building" de ma boîte où l'on passe de bonnes soirées, avec le RH hyper fier de lui alors qu'en définitive cela ne consiste qu'à redistribuer indirectement même pas 1% de ce que tous les employés ont contribué à faire gagner à la boîte annuellement, et faire croire aux organisateurs qu'ils sont vertueux et bons avec leurs employés (la vibe "féodale" de ce genre de pratique échappant a priori à tout le monde mais bref). Franchement en-dessous du vernis j'ai vu cette illusion que tu appelles "familiale" et le pot de pus malsain que ça cache. J'ai été obligé de fuir dans le milieu académique pour essayer (ne pas réussir pour l'instant) de changer cet aspect de ma vie, car impossible pour moi de passer 40 ans comme cela, et pourtant je travaille dans un environnement moins bien difficile et usant qu'une usine ou un entrepôt.
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[Débat] Le marché du travail et le chômage
« Réponse #14 le: samedi 10 août 2024, 12:46:50 »
Et même sans parler de ça et en étant très terre-à-terre, le travail pour l'écrasante majorité de l'humanité consiste à se nourrir et à assurer d'avoir un refuge où dormir, pas de faire des barbecues ou de faire copain-copain avec Jean-Yves de la compta.
Je n'ai jamais remis cette rhétorique en question d'une quelconque manière, je ne sais pas trop pourquoi tu sembles penser que j'imagine l'inverse.  :cfsd:
Je ne peux qu'être d'accord avec ça d'ailleurs, vu que c'est exactement ce que je pensais avant d'arriver dans mon entreprise actuelle, et que je m'étais déjà fait une raison personnelle pour ce qu'il en est d'être épanoui professionnellement, n'ayant majoritairement trouvé que des environnements pesants, voire malsains.


mais on ne peut pas reprocher aux nombreux travailleurs qui ont un travail très difficile et pénible de ressentir une forme de malaise ou d'injustice sociale non plus. Pour eux le travail c'est de la survie, et de la survie qui les brise physiquement et psychologiquement.

Là non plus, je n'ai jamais prétendu le contraire?  :cfsd:


Imagine juste aller voir une caissière ou un manutentionnaire Amazon et toi, jeune gars de PME qui va faire des barbecue avec ses collègues, leur expliquer "non mais prenez plaisir à ce que vous faites, le patron c'est votre ami, faites vos 8h de shift avec le sourire enfin", il y a de grandes probabilités pour que le dialogue se passe mal. Le monde du travail aujourd'hui est incroyablement difficile pour énormément de personnes, n'a pas beaucoup changé depuis le siècle dernier où Simone Weil a écrit sur la condition ouvrière, et je le répète, n'a pas beaucoup de raisons structurelles de se métamorphoser en mieux.
Encore une fois, ce n'est pas ce que j'ai dit  :cfsd:

En plus, ce n'est pas comme si je n'avais pas exprimé avoir parfaitement conscience de ma chance d'avoir trouvé une bonne structure humaine et accueillante, où le patron se marre avec tout le monde, que ce soit l'administratif, le commercial, le chargé d'accueil, la logistique ou les ouvriers du parc.
Je sais la chance que c'est de n'avoir aucune barrière sociale entre le bas et le haut de l'échelle dans cette entreprise.
Je sais que dans 99% des autres structures à minima, ce ne sera pas la même sauce et le patron sera bien trop souvent une calculette sur ressorts qui te recrutera juste en lisant un CV et en recevant les autres candidats pour la forme et alimenter sa base de données et se donner une bonne image sur l'autel de "Vous voyez bien qu'on recrute, on reçoit des gens!!"
Et je savoure ma chance comme il se doit car je sais que c'en est une.
Mais je n'ai pas la prétention d'aller dire à tout le monde "Je suis heureux au travail, alors arrêtez de râler et soyez-le aussi, c'est trop facile". Je n'ai la prétention de rien en fait. Ici, j'ai juste exprimé mon histoire personnelle pour illustrer mes propos. Rien de plus. Et si ça peut permettre à des gens qui me lisent de réaliser qu'humainement, l'herbe est sans doute plus verte ailleurs que là où ils se trouvent et qu'il ne faut pas s'encroûter dans une boîte où tu n'es qu'un numéro de dossier RH dans un organigramme si tu peux avoir de vraies opportunités valorisantes ailleurs, alors j'en serai heureux.
Parce que clairement, quand tu remontes un problème sérieux voire grave et qu'on te sort que tu dois juste laisser pisser et que ça va se tasser, alors non, faut se barrer car j'appelle ça "cautionner". Et clairement je suis à un âge où je ne cautionnerai plus ce que j'estime anormal et ce, peu importe les conséquences. Je reprendrais une phrase de Cantona pour finir là-dessus. "Quand je ne suis pas bien quelquepart, je m'en vais". C'est ma vision de la vie, à tous les niveaux, depuis 2023, et je n'ai pas eu à le regretter une seule fois. Après tout, jusqu'à preuve du contraire, personne de nous n'est Link, on a donc une seule vie, essayons de ne pas la gâcher au travail ou avec des environnements de travail qui n'en valent pas la peine.
D'ailleurs, je sais que si un jour mon patron part, ce ne sera plus la même rengaine, et si ça influe négativement sur les valeurs humaines de l'entreprise et mon envie de prendre la voiture le matin sans avoir à trainer les pieds, alors je poserai ma démission ou, tout du moins, j'y réfléchirai très sérieusement.  :ange:

J'espère que cette fois j'ai été suffisamment clair.  :R
"Les manuels d'histoire changent bien avec le temps. Alors, pourquoi pas Hyrule?"
Eiji Aonuma, 2017