Après cette discussion riche en révélations et en paroles profondes, tous quatre mangèrent de bon cœur ce que Lucas, en excellent cuisinier, avait préparé. Ensuite, Manon déroula une carte sur la table :
- C’est là, dit-elle en montrant un point au sud de Tabanta. Environ deux jours à pied, on peut peut-être réduire à un si on prend les chevaux.
- Donc deux aller-retour, conclut Link. On va dormir à la belle étoile ?
- C’est là que ça se complique, bonhomme, répondit Lucas. Supposons qu’on trouve l’Épée après une journée de chevauchée. Il faut ensuite installer un campement, et tout le bazar. Or, la route près de la cachette est assez fréquentée…
- Attends… le coupa Link. Il y a une route pas loin de ce qu’on cherche et personne ne l’a trouvé depuis quinze ans ?
- On va t’expliquer. Continue, Lucas.
- Je disais donc que la route est fréquentée. Nous devons être discrets donc hors de question d’attirer les curieux. Donc…
- Voyage nocturne ? supposa Link.
- Gagné. Comme tu le sais, nous sommes libres de nos déplacements mais on risque de se faire contrôler si nos activités paraissent suspectes. Voyager de nuit est le meilleur moyen pour ne pas se faire remarquer.
Link hocha la tête puis relança Chiru sur le fait qu’une route jouxte l’endroit où était supposé se trouver l’Épée.
- Personne n’a trouvé ce dont nous parlons pour la simple et bonne raison que personne ne peut voir et encore moins toucher l’Épée.
Link fronça les sourcils, dans l’incompréhension totale.
- Je vais être un peu plus clair. Il semblerait que l’Épée ait été dissimulée aux yeux de tous pour éviter que n’importe qui ne la trouve. C’est aussi pour cela que le Conseil Sheikah a accepté de me prêter ceci.
Il posa sur la table un oculaire, pas plus grand qu’une loupe. Le verre était taillé dans un verre étrange, tel que Link n’en avait jamais vu.
- C’est un Œil de Vérité, reprit Chiru. Il permet de voir ce qui est caché aux premiers abords. Mais c’est l’un des deux derniers exemplaires encore existants. Il est donc extrêmement précieux. C’est aussi pour cela que nous devons être discrets.
- Donc, si j’ai bien compris, résuma le garçon, cet objet vous a permis de trouver l’Épée, invisible et intangible autrement, c’est ça ?
- Pas exactement, rétorqua Manon. Si tu veux, ce que nous avons vu grâce à l’oculaire est une sorte... d’énergie. On en trouve uniquement à cet endroit et mes recherches ont démontré qu’elle provient d’un artefact bien précis : l’Épée de Légende. Mais l’Œil n’a pas pu la dévoiler en elle-même. Nous pensons que seul l’héritier du Héros (autrement dit toi) peut la voir tant qu’elle n’est pas « réveillée ».
Link comprenait. Il se demandait cependant encore une chose : était-il prêt à affronter le monde extérieur ? Il était rarement sorti de la citadelle… Il en fit la remarque tout haut. Lucas le rassura en lui disant :
- Tu m’avais déjà dit ça une fois, pendant un entraînement. Laisse moi te contredire : avec une épée ou armé de tes seuls poings, tu sauras te défendre, crois-moi. Tu as du talent, alors cesse de douter de toi.
Link acquiesça, ragaillardi. Restait une chose à définir.
- On part quand ?
- Ce soir, répondit Chiru. Inutile de perdre plus de temps.
L’après midi passa en un éclair. Link s’occupa de préparer les chevaux, dont Orage, son étalon à la robe gris sombre. Une monture exceptionnelle et assez docile. Avant de partir,il chaussa des bottes plus épaisses et enfila une veste car, même au printemps, la température était basse aux alentours de Tabanta. Il descendit dans la cuisine, où Lucas faisait le point.
- Manon, tu as pris des provisions, Link a préparé les chevaux, j’ai affûté mon épée et celle de Link, rempli le carquois de Manon… Je crois qu’on est bons.
- Rappelez-vous, dit Chiru en entrant dans la pièce, personne ne doit savoir pourquoi nous voyageons. Si on nous questionne en sortant de la citadelle, nous partons étudier la flore de Tabanta mais je suis trop vieux pour faire le voyage seul. Idem si on croise une patrouille.
Les autres hochèrent la tête. Le crépuscule était là, il était temps de partir. Ils marchèrent dans les rues, tenant leurs montures par les rênes. Fort heureusement, ils purent sortir de la citadelle sans encombre. Avant d’enfourcher Orage, Link ferma les yeux quelques instants et prit le temps de respirer cet air vivifiant qui lui manquait en pleine ville. Il monta sur son cheval et rejoignit ses compagnons qui l’attendaient un peu plus loin.
La première partie du trajet passa sans encombre, pendant laquelle Link discuta avec Manon. Orpheline depuis ses cinq ans, Chiru l’avait un jour trouvée adossée contre un mur, non loin de sa maison. Il l’avait recueillie et, à partir de ce jour, l’avait élevée comme un ami plus que comme un père. Le fil des pensées de Link fut interrompu par Lucas, légèrement en avance sur les autres, qui dit :
- Il y a un cavalier en face de nous. Restez sur vos gardes.
En effet, une silhouette avançait face à eux. Arrivé à leur hauteur, l’étranger les salua et une conversation s’engagea. Chiru, méfiant, répondait de façon assez sèche. Un peu anxieux, Lucas avait l’impression d’être observé. Il se retourna et écarquilla les yeux.
- Link, derrière-toi !
Le garçon regarda dans son dos et vit un individu armé, assombri par l’obscurité, à quelques mètres de lui. Par réflexe, il fit cabrer Orage et lui fit faire volte-face pour tenir son adversaire en respect.
- C’est un guet-apens ! hurla t-il en dégainant.
Manon, alertée, encocha une flèche pour prévoir l’affrontement qui allait suivre. Elle fit bien, car un troisième assaillant surgit, à la gauche de l’archère.
- Je m’occupe du cavalier ! cria Lucas. Chargez-vous des deux autres !
Link dut réfléchir vite et bien. Il connaissait les bases du combat à cheval mais il aurait été plus efficace à terre. Cependant, il prenait le risque qu’on vole sa monture si les bandits étaient plus que trois. Hors de question. Il était plus exposé que son adversaire car Orage aussi pouvait être blessé. La priorité était donc de le désarmer. Le voleur utilisait une lame courte. Parfait, cela allait l’obliger à s’approcher. Link attendit donc que le bandit, confiant face à un garçon de quinze ans, s’approche. Il finit par le faire mais aurait peut-être dû s’abstenir. Le premier coup porté par le voleur était bien placé mais trop lent. Link le para facilement et contre-attaqua. Il prit peu à peu l’avantage et mit fin au combat en plaçant un coup sur la poignée de l’épée du bandit, qui lâcha son arme et fut assommé par un coup de coude bien placé. Link se tourna pour aider Manon mais elle n’en avait pas besoin : son adversaire était à terre et le cavalier (qui n’avait apparemment pas apprécié sa confrontation avec Lucas) ordonna la retraite. Après un soupir de soulagement, le garçon réalisa qu’il avait gagné son premier combat réel !
Remis de leurs émotions, les quatre voyageurs reprirent leur route.
- De la petite racaille, lança Lucas. Ils pensaient s’attaquer à une cible facile mais heureusement je suis accompagné de deux combattants extraordinaires !
- Je suis trop vieux pour ça, à présent, soupira Chiru avec nostalgie. Profitez tant que vous êtes jeunes…
- Attendez, le coupa Link. Vous parlez comme si ce genre de choses était courant. Je croyais que nous étions en paix, enfin à peu près.
- Balivernes ! répondit Chiru. Notre « dirigeant » nous assure que Hyrule est parfaitement sûre mais c’est faux. Depuis qu’il est au pouvoir, les bandits et autres fléaux pullulent. C’est la loi du plus fort. Soit dit en passant, je te confirme que tu as hérité des talents de ton paternel.
Honoré par ce compliment, Link n’était pourtant pas moins préoccupé par les paroles de Chiru. La loi du plus fort, rien que ça. Malgré tout, il essaya de ne plus y penser. Lui et ses amis faisaient route vers leur objectif et, un jour, le soleil se lèverait sur Hyrule. Pour son père.
Note : J'ai une question, peut-être plus à poser à quelqu'un qui connaît bien le forum. J'ai fait un dessin d'un futur personnage de la fiction et je ne sais pas si j'ai le droit de le poster ici ou si je dois créer une galerie artistique. En tout cas merci d'avance et bonne lecture !