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Le topic des idées impopulaires
Rodrigo:
Normal quand tu es Français et que tu vis en France, en parlant à des Français. Ma réalité, c'est qu'une fois sur deux quand j'ouvre la bouche en tant que Belge face à des Français qui connaissent peu la Belgique, ils pensent que je ne parle pas "français", parce que j'utilise des expressions qu'on n'utilise pas en France, et me reprennent sur pas mal d'expressions/prononciations. (et tu n'as jamais entendu des gens dire que le québécois n'est pas du français ?) Et si je fais le lien entre l'écriture inclusive et la francophonie, c'est que l'Académie française, et le gouvernement français ont longtemps eu une influence importante sur l'évolution de la langue, et sur comment elle devait évoluer (cf le débat actuel où les ministres tentent de légiférer sur comment doit être écrit le français, comme si l'évolution d'une langue passait naturellement par ... les lois, et non par l'usage). Même en Belgique on s'est pris votre réforme orthographique toute naze avec ognon et autres modifications d'accents. La France fait autorité dans le domaine de la langue française, alors que je ne pense pas qu'il y ait d'équivalent à l'Académie française (ou aux politiques liées à la langue en France) dans les pays anglo-saxons.
Après, les Québécois sont peut-être un peu plus particuliers, parce que leur situation à l'intérieur du Canada est particulière, et qu'ils sont bien plus éloignés de la France que ne le sont la Belgique et la Suisse (et je ne parle pas des pays africains, parce que je ne m'y connais pas assez).
D_Y:
--- Citer ---(et tu n'as jamais entendu des gens dire que le québécois n'est pas du français ?)
--- Fin de citation ---
Honnêtement, non.
Je pense que la plupart des français sont surpris ou curieux en entendant parler des belges ou des québécois. Mais ça me parait tellement absurde qu'ils essayent de leur apprendre comment parler que je suis convaincu que c'est une minorité. De plus, il y a autant de différences entre la façon de parler française/belge qu'entre certaines régions françaises, et rien ne fait vraiment consensus.
C'est comme si un anglais faisait la morale à un écossais ou à un américain, si ça existe (et ça doit exister), c'est des cons comme il y en a partout.
(et j'habite en Suisse, btw)
--- Citer ---Et si je fais le lien entre l'écriture inclusive et la francophonie, c'est que l'Académie française, et le gouvernement français ont longtemps eu une influence importante sur l'évolution de la langue, et sur comment elle devait évoluer (cf le débat actuel où les ministres tentent de légiférer sur comment doit être écrit le français, comme si l'évolution d'une langue passait naturellement par ... les lois, et non par l'usage).
--- Fin de citation ---
A part la réforme orthographique, tu as des exemples ? Dans le cas de l'écriture inclusive, le gouvernement s'est greffé dans le débat en disant qu'il ne voulait pas l'utiliser, mais ce n'est pas de leur initiative et encore moins celle de l'Académie.
L'Académie ne décide rien du tout, ce ne sont même pas des linguistes (des tanches comme Finkielkraut ont réussi à avoir leur siège), à part faire un dico de temps à autre (dico qui n'a pas plus de valeur qu'un Larousse), ils donnent leur avis mais c'est tout. Comme tu l'as dit la langue évolue d'elle-même, l'Académie a juste pour mission d'adapter la langue actuelle tout en suivant son utilisation (volonté par exemple de franciser des anglicismes comme "e-mail"). Inutile de dire qu'ils ont un temps de retard.
Pour l'écriture inclusive c'est la suite logique du débat sur le sexisme présumé de la langue française. Ça existe depuis des années et d'après Wikipédia même une auteur québécoise a initié le débat.
Bilberry:
Pour le sexisme "présumé" de notre langue, malheureusement, les règles actuelles ont été fondées et justifiées par une logique misogyne (je vous invite à chercher de votre côté sur le sujet, je trouve juste cet article assez synthétique) donc il n'y a pas trop de doute à avoir là-dessus.
D_Y:
Au delà des arguments féministes, le débat est carrément ouvert et même très intéressant, donc on va pas bouder notre plaisir en fermant carrément la porte à l'un des deux camps (surtout pas en partant du principe que, de base, les autres ne sont pas assez informés).
La linguistique est extrêmement complexe et l'assimilation du neutre dans le masculin va au delà d'un simple "les hommes sont les meilleurs". D'ailleurs, cette évolution est antérieure à Beauzée et Bouhours, elle date d'une époque où le français s'est "détaché" du latin, limitant les déclinaisons et faisant "disparaitre" le neutre (c'est plus compliqué que ça mais je suis pas linguiste, donc bon).
Dans cette optique, beaucoup de mots féminins à l'époque sont passés masculins et vice versa.
Au delà de ça, le fait que la langue soit principalement masculine me semble être une conséquence socio-culturelle complexe, plus qu'une simple misogynie. Qu'il y ait eu une volonté misogyne à une époque donnée est un fait, par contre ce n'est qu'un aspect d'une évolution plus complexe et plus espacée dans le temps. Cela dit je ne suis pas complètement hostile à la féminisation de mots français, car les répercussions sociétales sont réelles (mais ce n'est pas le seul problème, ni même le plus important, amha).
En bref, langue sexiste oui, le débat est de savoir si elle l'est consciemment ou non.
Je sais pas si t'es pour l'écriture inclusive ou non, mais j'ai l'impression que, formellement, elle encourage plus le sexisme qu'elle ne le combat, tout simplement parce qu'elle admet dans son principe une différenciation très marquée entre les deux genres.
Bilberry:
--- Citer ---Au delà de ça, le fait que la langue soit principalement masculine me semble être une conséquence socio-culturelle complexe, plus qu'une simple misogynie.
--- Fin de citation ---
Notre société et culture sont misogynes selon moi, donc j'avoue que pour moi ce type de considération c'est très kif-kif.
Ensuite bah suffit de voir comment on a forcé la suppression de la forme féminine de certains noms de métier (je link surtout pour les liens, j'ai pas envie de faire croire que j'ai trouvé ça toute seule) pour comprendre que ce n'est pas un glissement innocent.
--- Citer ---En bref, langue sexiste oui, le débat est de savoir si elle l'est consciemment ou non.
--- Fin de citation ---
Là encore une fois, je trouve ce type de considération pas très utile. Le sexisme, qu'il soit conscient ou non, il est bien réel. Peut-être que les Académiciens et compagnie ne détestent pas activement les femmes, mais ils vivent dans une société où le sexisme opère. Nous baignons tous là-dedans et nous opérons tous, chacun à notre niveau et sans forcément le vouloir, à entretenir ce système.
Concernant l'écriture inclusive, je défends son usage et je l'utilise moi-même de temps à autre (que ça soit le point médian, l'usage de iel, se faire succéder la forme masculine et féminine d'un même mot, utiliser des termes épicènes...). Je n'aime pas l'argument "ça contribue à creuser la différenciation des genres" parce que bah... c'est un fait, nous vivons dans une société qui fait cette distinction, et fermer les yeux et mettre tout le monde dans le même panier en espérant que ça passe ça va pas faire bouger grand chose. C'est le même problème avec les gens "pas racistes qui ne voient pas les couleurs", c'est appliquer un pansement sur une plaie purulente. Pour moi il s'agit principalement de reconnaître la place des femmes dans notre société et notre vécu bien particulier. Bref, avant de vouloir atteindre l'égalité des genres, j'aimerais qu'on reconnaisse l'existence toute particulière des femmes dans nos sociétés et passer par le langage me semble une bonne façon d'amener les gens à réfléchir là-dessus.
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