Plop, je viens poster pour parler d'une série japonaise que j'ai eu l'occasion de finir tout récemment.
C'est le premier
j-drama que j'ai vu parce qu'à la base, je ne suis pas spécialement intéressée par ça (je préfère me cantonner aux dessins animés
), l’aperçu que j'avais eu des différentes œuvres ne m'intéressait pas et le jeu d'acteur japonais étant assez différent du style "occidental", je n'avais donc rien été tentée de regarder.
Et puis j'ai entendu parler de
Jyouu no Kyoushitsu (lit. La salle de classe de la Reine) qui aborde un sujet qui me fascine et révulse à la fois : la scolarité japonaise et ses problèmes (certains pouvant évidemment se retrouver dans d'autres cultures). Enseignants qui n'en ont rien à foutre et se dérobent au moindre problème ou qui au contraire en font trop au point de se surmener et se faire mal voir par leurs collègues, brimades entre élèves, exigences au niveau des études avec des gosses de primaire qui doivent suivre des cours du soir pour entrer dans des collèges privés réputés, parents d'enfants gâtés qui foncent se plaindre au moindre problème...
Bref, c'est loin d'être joyeux, même si on peut dire que la fiction exagère évidemment parfois sur certains points pour le besoin du scénario.
L'herbe n'est pas toujours plus verte de l'autre côté du mur.
L'intro au début de chaque épisode donne le pitch de la série : "
C'est l'histoire d'élèves de primaire qui ont défié une enseignante démoniaque. Une archive d'une année."
La série fait 11 épisodes de 45 minutes + 2 épisodes spéciaux qui permettent de découvrir plus en profondeur le passé d'un des personnages principaux.
Pour en dire un peu plus, on suit principalement Kanda Kazumi, une petite fille de douze ans en dernière année d'école primaire (qui dure 1 ans de plus au Japon, d'où l'âge des enfants entre 11-12 ans), elle n'est pas spécialement studieuse et chercher surtout à en profiter pour se faire de bons derniers souvenirs de son école. Manque de pot, elle se retrouve dans la classe d'une nouvelle enseignante dans l'établissement : Akutsu Maya, dont les deux première syllabes du nom forment comme par hasard le mot japonais signifiant démon,
Akuma.
Constamment habillée en noir, avec ses bottines qui claquent sur le sol et ses cheveux soigneusement coiffés en un impeccable chignon, Maya a tout pour ressembler à une enseignante stricte et sévère, définition qui serait cacher toute l'ampleur de son caractère. Dès le premier jour, elle instaure un système basé sur les notes de contrôles semestrielles, donnant des privilèges aux deux premiers et toutes les corvées aux deux derniers qui deviennent représentants de la classe jusqu'au prochain contrôle.
Elle va leur imposer ses méthodes et tout faire pour maintenir un contrôle absolu lorsque des élèves lui désobéissent, n'y allant pas de main morte quand il s'agit de donner des punitions. Chaque enfant va devoir choisir entre s'opposer à Maya ou la suivre dans l'espoir de récolter des privilèges, s'intégrer à cet environnement et échapper aux punitions. Les positions de nombre d'entre eux changeront ensuite à plusieurs reprises au cours de l'histoire, selon les événements.
Devil, vous avez dit evil ? La série n'hésite pas à jouer à fond l'aspect terrible de cette maitresse démoniaque, si bien que l'ambiance lumineuse à l'écran change parfois complètement quand elle arrive, s'assombrissant soudainement ou tournant à un bleu glacial. De même, son omniprésence est jouée à fond : Maya est partout, elle sait tout, elle voit tout et parfois elle enregistre même des preuves de mauvaises actions des enfants afin de les garder sous sa botte (parce que le Japon, c'est aussi le pays des stalkeurs).
Parfois, c'en est carrément au point où ce n'est même plus crédible.
Il faudra m'expliquer comment elle a réussi à apprendre que Kazumi avait jeté l'ancien set de peinture de sa sœur quelques années auparavant, quand personne ne pouvait logiquement en être au courant.
Il y a aussi d'autres exagérations, utilisées pour accentuer certains détails ou placer de l'humour très japonais. J'imagine bien les scénaristes discuter des nombreuses scènes de maladresses de quelques personnages.
"Hmm, cette femme au foyer n'est pas épanouie et à l'aise dans sa vie actuelle, nous avons des scènes qui le montrent très bien avec un joli arc faisant évoluer sa relation avec sa fille mais on devrait aussi rajouter quelques scènes ou elle se gamelle par terre et casse des assiettes pour montrer ça de manière plus physique :D"
L'humour typiquement japonais pourra faire lever les sourcils à certains, surtout que les gosses ont tendance à un peu surjouer dans ces moments (par contre, ils se débrouillent mieux dans les scènes sérieuses, ce qui est le plus important je pense)
J'en ris mais au fond, dans l'ensemble, j'apprécie cet aspect. Ce serait moins marrant si Maya n'était pas aussi
toute puissante. Et ça permet d'ajouter quelques scènes légères de plus.
Parce que cela reste quand même une série très sombre sur de nombreux points, avec une enseignante qui humilie des élèves et dévoile leurs secrets devant le reste de la classe et leur sert des discours sur la noirceur du monde en leur demandant
d'ouvrir les yeux, ce sont des enfants qui vont se trahir tour à tour, se blesser et balancer des horreurs comme "tu ferais mieux de mourir" à leurs camarades.
Certaines scènes sont à vous donner des haut-le-cœur ou l'envie de foutre des paires de claques pour leur faire réaliser leur cruauté, même si vous êtes du genre pacifique en général.
À côté, le professeur Rogue n'est qu'un petit chaton grincheux. Malgré ce que je dis, n'allez pas non plus imaginer que la série se contente d'aligner malheur sur malheur sans autre but que de faire souffrir une classe de vingt-quatre élèves.
Jyoou no Kyushitsu peut s'avérer à la fois terriblement pessimiste et optimiste sur différents points. Certains verront l'ensemble comme réaliste mais je crois qu'il pourra aussi sembler idéaliste à certains égards pour d'autres. De nombreuses questions sont abordées comme les raisons pour laquelle on étudie, qu'est-ce qu'un bon professeur, comment agir lorsqu'un incident arrive en classe, quoi faire lorsque les autres élèves vous maltraitent.
Et des réponses qui pourront sembler plus ou moins satisfaisantes seront données.
J'aime beaucoup la réponse à la question sur pourquoi on doit étudier. Très positive et belle à mes yeux.
À l'inverse, la solution pour les brimades peut sembler très pessimiste : "dans la plupart des cas, personne ne vous aidera, il faut que vous trouviez une solution tout seul".
Dur pour un gosse de 12 ans, surtout quand toute la classe est contre soi (et que le système fait que si les profs/parents l'apprennent, c'est la famille de la victime qui déménage puisque c'est plus simple/c'est elle qui "perturbe l'harmonie de la classe". Oui, ça arrive même dans la vraie vie.)
La question "qu'est-ce qu'un bon professeur" n'a pas vraiment de réponse à mes yeux. Maya a eu un impact énorme sur ses élèves et leur a permit de beaucoup grandir en un an mais cela reposait sur énormément de chance et de travail de sa part : toutes les informations qu'elle a récolté l'ont été de manière qui a sans aucun doute dépassé le domaine de la légalité plusieurs fois et sa surveillance pour s'assurer que rien ne dérapait par sa faute lui a coûté sa santé et sa vie personnelle. On ne peut pas dire que ce soit une bonne chose. Un professeur est un être humain aussi, on ne peut pas lui demander de tout donner pour ses élèves. (même si Maya, elle, y était prête)
Sans compter qu'avec quelques erreurs, elle aurait pu foutre en l'air la vie de certains gosses (d'un autre côté, certains événements pourraient être considérés comme des erreurs imprévues qu'elle aurait alors réglé, sans se départir de son masque)
Je me demande si les enfants ne sont peut-être montré pas un peu trop joyeux et reconnaissants à la fin, à tous penser qu'elle est une bonne enseignante au fond. Car même si ses intentions et ses discours finaux le sont, les méthodes utilisées sont encore une fois sacrément douteuses.
D'un autre côté, ils sont tous euphorique sur la fin donc on peut se dire qu'ils ont volontairement laissé les mauvais côtés derrière eux xD.
On dirait que Maya essaie d'être un professeur parfait, ce qui est évidemment impossible... Avec tous ses efforts, elle leur a fait comprendre des leçons de vie et de moralité importantes qu'ils n'auraient peut-être jamais eu... mais peut-être qu'ils auraient pu les apprendre aussi au fur et à mesure.
J'avais entendu dire une fois que "le travail des professeurs, c'est d'enseigner, pas d'éduquer les enfants", or, Maya fait les deux.
Même en étant imparfaite, elle est un peu déjà une "super-prof" dans sa manière d'agir (elle retient tout, sait se défendre, est intelligente, douée en sport et en musique...), ce n'est pas rare dans les œuvres de fictions japonaise d'avoir un prof très spécial et de se dire "un enseignant normal ne pourrait pas faire ça, ne pourrait pas résoudre ce problème de cette manière"
Doit-on alors se dire que les leçons de l'histoire en perdent de leur puissance ? Je pense que non. Le but d'une œuvre comme celle-ci est à la fois cathartique et ludique : il permet de s'interroger sur nos attitudes, de nous encourager à nous remettre en question, à ouvrir les yeux. Et ensuite à étudier pour trouver des solutions à nos problèmes. Aussi bien enfants que parents et professeurs.
En allant dans ce sens, voici, un de mes discours préférés :
Comme il n'y a que 11 épisodes consacrés à l'année qui passe, les 24 élèves de la classe ne sont pas tous autant développés et certains font un peu figurants mais ceux qui sont sur le devant de la scène ont des histoires et personnalités variées, qui sont bien traitées et développées. (quoique le cas de Hikaru puisse sembler un peu mélodramatique. Sans compter les épisodes spéciaux qui, s'ils sont remplies d'informations très intéressantes, en font peut-être un peu trop aussi sur certains points)
La série est accompagnée par des musiques qui renforcent parfaitement les ambiances, notamment le thème de la Reine, à la fois beau et inquiétant.
Chaque épisode se conclue sur un générique qui tranche beaucoup avec le reste et permet de voir à quoi ressemble l'actrice de la terrible Maya une fois qu'elle s'arrête de jouer son rôle. L'effet peut sembler un peu étrange, après 40 minutes de regards sévères, glaciaux, méprisants, colériques... voir éventuellement un petit sourire démoniaque lors d'un coup particulièrement réussi.
Petit rayon de soleil avant de retourner en enfer.
Jyoou no Kyoushitsu n'est certainement pas une œuvre parfaite mais je l'ai trouvé passionnante et touchante. S'il n'y a pas de réponse parfaite à tout, c'est parce que le sujet abordé est bien trop vaste et compliqué. On peut développer davantage dessus évidemment mais la série pose déjà les bonnes questions et de nombreuses pistes.
Le tout avec beaucoup de cœur.
Oh et quelqu'un a fait une AMV dessus avec l'opening de L'attaque des Titans, c'est assez
fabuleux (mais pleeeein de gros spoilers)