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Doutch écrit aussi, un peu... [Textes du Concours à 4 mains]

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Doutchboune:
J'enchaine avec mon texte pour la 2e manche du concours, qui devait raconter celui de Neyrin. mais d'un autre point de vue, et à la première personne. Autant j'avais pas de souci avec la 2e condition, j'écris souvent à la première personne, autant j'avais tellement aimé le texte sur lequel je devais m'appuyer que j'avais très peur de ne pas réussir à lui rendre hommage. Quoiqu'il en soit, je vous conseille d'aller le lire avant de lire le mien, c'est le texte nommé Le Judas qui est dispo dans ce message du topic du concours. Pour ma part, le gros reproche que je ferais à mon texte, c'est qu'il ne peut pas être lu sans avoir lu celui de Neyrin. En tout cas, je pense qu'il est difficilement compréhensible sans le support de l'autre écrit...


Deuxième manche
*
Émanation

 
   Depuis combien de temps suis-je ici ? Des jours ? Des semaines ? Des mois ? Je n’en ai aucune idée, les débuts de mon existence ont été si confus, si décousus que je ne peux pas estimer leur durée. Tout ce que je sais, c’est que je suis née ici, dans cet appartement, un soir où l’émanation qu’Elle produisait était telle que j’ai pris conscience de moi-même. Ce n’était qu’une étincelle, une sensation étrange mêlant désir, peur et rejet. Je ressentais le vide soudain autour de moi, l’air faussement calme du lieu qui venait de vivre une bouffée intense d’émotions explosives dont les résidus d’ondes marquaient encore les murs autrement immaculés, mais qui avaient été comme annihilées par cette puissante émotion qui m’avait fait naître. Et puis, avec le retour du calme, j’ai perdu le contact. Je ne sais pas combien de temps il s’est écoulé avant mon apparition suivante, tout ce que je peux dire, c’est qu’il fallait qu’Elle laisse échapper ce qui bouillait en elle. Petit à petit, je m’éveillais de plus en plus facilement, saisissant chaque bribe d’émotion qu’Elle laissait filer par tout ce qui était Elle. De chaque sensation qui s’échappait des pores de Sa peau je me servais pour persister, jusqu’à ce que je sois, tout simplement.
   Je mis un certain temps à L’apprivoiser, à m’apprivoiser. A apprécier les variations de ce qu’Elle ressentait, cette force brute qui faisait que j’étais moi, ici, enfermée entre ces murs, pourtant libre de tout éprouver, libre de savourer chaque sensation qui La traversait, de la plus noire à la plus lumineuse, parfois étrangement liées en une sorte de danse mortelle. Je ne sais pas si Elle a conscience de ma présence, si Elle a perçu ma naissance, mais je ne peux m’empêcher de penser qu’Elle me ressent forcément, vu la force qu’Elle me transmet. Tout ce dont Elle me nourrit irradie de moi, et se répercute contre les murs, se réverbère au contact des dalles froides du carrelage. Elle ne peut pas y être indifférente, même si je n’ai aucun moyen tangible de le savoir. Moi-même, je ne suis pas tangible, après tout. Au fil des jours, j’ai compris ce sentiment de vide qu’Elle véhiculait. Il était à la fois un objet de peur et une bouée à laquelle Elle se raccrochait, désespérément. Un désespoir à la fois craint et recherché. Cette confusion était ma vie, le mouvement qui régissait mon existence, et j’étais vouée à y réagir, absorbant et rayonnant ce qu’Elle ressentait, ne subsistant qu’à travers la restitution de Son état émotionnel.
 
   Cette nuit-là, j’étais comme engourdie. De toute la journée, Elle n’avait pratiquement rien émis, seule une rumeur sourde et lasse m’avait permis de rester éveillée. J’étais prise dans une sorte de langueur, à me demander si j’allais, une fois encore, perdre conscience pour ne revenir que plus tard, sans savoir si des heures, des jours ou des semaines s’étaient écoulés. La sensation perdura quand tout à coup, une vague interrogative teintée d’inquiétude vint percuter ma léthargie. Au fur et à mesure que cette vague prenait de l’ampleur, je saisis Son mouvement. C’est à peine si je perçus le léger frisson de froid alors que ce dernier s’insinuait en Elle au contact de la plante de Ses pieds avec le carrelage glacé. De toutes les sensations qui emplissait la pièce, la curiosité dominait, et j’étais impatiente d’en savoir plus. Je ne pouvais m’attendre à ce qui vint me frapper ensuite.
   J’avais ressenti un changement, comme si Son environnement venait de brutalement basculer, comme si Elle venait de découvrir quelque chose d’inattendu. La surprise et la stupeur me submergèrent, me paralysant le temps d’un instant suspendu. Puis je ressentis la faim, la faim insatiable, la faim dévorante, celle qui consume au lieu de sauver, celle qui détruit au lieu de secourir. Tel un ogre de conte de fées, elle envahit tout l’espace, s’insinuant dans chaque recoin de l’appartement, dévorant toute autre sensation sur son passage. Je me mis à paniquer. J’eus peur de disparaître, de me faire avaler par cette faim vorace et de ne plus jamais rien ressentir d’autre. La terreur effaça tout. Brusquement, la sensation cessa, et il ne resta que les résidus tremblants de ma peur.
   Je ne sais pas, et je pense que je ne saurai jamais si cette peur était la mienne ou la Sienne. Sûrement un mélange des deux. Je La sentis ondoyer sous ses sensations, oscillant entre panique et dégoût, comme si tout son être ne cherchait qu’à expulser ce qui venait de le traverser avec une violence soudaine. Moi-même je n’étais que tremblements et spasmes, une suite de contractions douloureuses, brutales jusqu’à ce que le nœud se défasse subitement. La douleur reflua, la terreur se mua en angoisse sourde qui m’enveloppa tel un manteau inconfortable, mais je réussis à nouveau à m’ouvrir sur mon environnement. Je La sentis elle aussi s’apaiser, en quelque sorte, même si sa peur latente envahissait tout l’espace comme une brume rampante sur les eaux troubles d’un marais fétide. Malgré tout, la tension était palpable. Je n’avais encore jamais ressenti une telle émotion, c’était comme si chaque vibration de mon être était prête à se briser, à exploser, et pourtant, j’étais comme en sourdine, comme si chaque sensation attendait son heure, tapie quelque part au fond de moi. Elle s’était déplacée, variation subtile dans l’espace clos de l’appartement, et ce qu’Elle y faisait lui servait de diversion afin de calmer le flot d’émotions qui l’assaillaient. Je profitais moi aussi de cette fausse tranquillité pour adoucir mes tensions. Soudain, tout en elle se tendit, comme en réponse à un vent de tristesse qui venait de naître non loin de nous.
 
   La déferlante d’effroi qui m’assaillit me prit totalement par surprise. Panique, terreur, je fus paralysée, incapable de rien d’autre que de subir, craignant encore une fois de disparaitre sous la force qui tentait de me balayer. C’est cette crainte de mourir qui me sauva. L’instinct de survie me guida, je me forçai à assouplir mes ondes, à desserrer leur amplitude. La peur était toujours là, mais elle ne me paralysait plus. Je m’ouvris de nouveau à l’espace vibrant de l’appartement. Une sensation lourde comme du plomb pesa sur moi, lentement, et c’est à peine si je ressentis de nouveau le froid du carrelage s’insinuer entre les bribes de mes émotions. La chape qui s’était abattue sur moi devenait de plus en plus oppressante. Je me sentis me comprimer, je vis mon espace vital se réduire, et à chaque fois que la panique que cette sensation induisait lançait une de ses piques, la prison autour de mon être se resserrait. Je pulsais, luttant contre son emprise, mais chaque battement semblait uniquement refermer le piège dans lequel je m’étais enfermée. Totalement désemparée, je perdis le contrôle et me laissai éclater, à peine consciente des risques que mon existence encourait en retournant toute cette pression contre la force qui m’oppressait.
   Le vide. La prison avait disparu, mais il ne restait que le vide, béant. Un gouffre sans fond, abyssal. Je me sentis chuter, et pourtant je n’avais pas peur. Ce flottement était comme salvateur, après l’oppression que j’avais vécue, après la compression que j’avais subie. Tout n’était plus qu’espace, liberté, et je faillis bien disparaître à jamais. Ce fut Elle qui me permit de me raccrocher à l’existence. Elle ne cessa pas d’émettre, au contraire. Sa peur laissait délicatement place au désarroi. Je pouvais ressentir Son angoisse, Sa confusion. Elle me transmit Son oppression, mais étrangement je ne m’y sentis pas piégée. A cette moindre intensité, ces sensations me rappelaient que j’étais vivante, et que je devais ma vie à l’émanation de Ses émotions. A travers la masse des ondes que nous partagions, je laissais filtrer ma gratitude, sentiment puissant bien qu’incongru dans le déferlement de sentiments négatifs qui agitaient cette soirée.
 
   Je m’étais habituée à la peur qui imprégnait maintenant tout mon environnement. Je me sentais frémir sous la force de ses vibrations omniprésentes, mais ce n’était plus qu’un bruit de fond, une litanie qui troublait la surface des eaux qui m’entouraient. La confusion était alors beaucoup plus évidente, et je me laissai emporter par le tourbillon désordonné de ces sensations disparates. Un nouveau frémissement me traversa alors qu’Elle laissa échapper, en plus de sa peur, une vague d’appréhension. Je m’ouvris alors plus amplement aux émotions qui émanaient des limites de l’appartement, et ce que j’y découvris me stupéfia.
  J’y perçus de la joie, une joie simple et innocente, légère comme le vol d’une plume dans la brise de printemps, douce comme le souvenir d’un enfant. Le contraste me prit par surprise, un sentiment de béatitude m’envahit et je me sentis flotter… Jusqu’à ce qu’une sensation presque tangible vienne me toucher brutalement. C’était une caresse, un contact, riche en perceptions physiques que mes souvenirs interprétaient comme agréables et pourtant… pourtant, ils me faisaient mal, comme si chaque attouchement arrachait une partie de mon être. Comme si l’on venait d’extirper de ma substance toute cette joie que je venais d’éprouver, arrachant au passage toute trace de cette tendre innocence qui avait semblé m’appartenir.
 
   Subitement, tout ne devint qu’effroi. La peur prit tout l’espace, et je ne pus rien ressentir d’autre. Elle irradiait, avec une telle brillance, une telle présence que rien d’autre ne subsistait. J’entrai en résonance, je n’étais plus qu’angoisse, à peine consciente à la frange de mes perceptions que je ne faisais qu’entretenir la sienne, dans un tourbillon de terreur qui nous engloutit toutes les deux. Un contact doux et chaud me fit sortir de la spirale et je pus sentir qu’Elle s’était réfugiée dans un abri, recouvrant ses émanations d’un voile qui les étouffaient légèrement. Ma peur se dissocia de la Sienne. C’était comme si une part de la pression qui persistait cette nuit s’était évaporée, expulsée par je ne sais quelle soupape invisible. J’étais de nouveau moi, recevant Ses émotions, m’en nourrissant. Sa peur était toujours là, tout comme Sa confusion, je les ressentais comme une onde qui passait à travers moi et pourtant, je n’avais plus peur. Je saisis alors un des fondements de cette peur qui nous avait englouties, ce sentiment profond de culpabilité qui La hantait et avait resurgi au gré des forces qui avaient joué cette nuit. M’être enfin détachée d’Elle affina ma perception, discernant à présent ce qui m’avait échappé jusque-là. Je perçus l’importance de Sa fatigue, puissant catalyseur de sensations négatives, et surpris la naissance de la colère, comme une boule serrée qui enflait, enflait encore, repoussant le reste vers l’extérieur, chassant l’angoisse, la culpabilité.
   Je la sentis évacuer progressivement toutes ces émotions qui la paralysaient. La peur, la terreur se délayaient en filaments vibratoires dans l’air oppressé de l’appartement, laissant place à une étrange mais puissante détermination. Je me sentais regonflée à bloc, gagnée par la volonté de fer qui avait surpassé les craintes. Si Sa peur existait encore, je ne la percevais plus. J’étais portée par Son souffle, par la tension que seule une résolution sans faille et une profonde colère pouvaient apporter. Je me sentais me contracter et me dilater au rythme de Sa respiration, détachée et pourtant subjuguée par ce qu’Elle vivait.
 
   Enfin. Enfin, la libération. Ce fut une explosion, une de celles qui suit une contraction trop intense, quand plus aucune borne ne peut rien contenir. La peur, la colère, la fatigue, tout vola en éclats, éclaboussant les murs de résidus émotionnels dont les vibrations devaient longtemps perdurer. L’atmosphère oppressée de l’appartement se détendit brutalement, alors que les dernières traces de ce qu’elle avait si puissamment ressenti s’évanouissaient doucement dans le calme retrouvé. Je me laissai aller, plongeant avec délice et soulagement dans cette même langueur qui m’avait inquiétée quelques heures auparavant. Jamais je n’avais vécu tant d’émotions en si peu de temps, et même si c’était l’essence même de mon existence, pour une fois, je n’espérais qu’une chose : que ce calme léthargique se prolonge jusqu’à ce toute trace de cette nuit se soit dissipée dans le néant.

Doutchboune:
Ça fait une éternité que je n'ai pas posté ici. Bon faut dire aussi que je n'ai pas écrit grand chose depuis un an, ou alors des petits posts RP pour ma guilde, mais qui ne sont pas vraiment des histoires qu'on peut montrer indépendamment. Du coup, j'ai ressorti un truc plus ancien.

C'est un topic RP du forum de ma guilde, commencé en 2019, et terminé en 2020. Je ne suis pas seule à l'écriture, il y a un autre joueur avec qui mon personnage échange, mais c'est tout de même moi qui écrit le plus, et qui mène le RP. J'aime assez bien ce texte, après, il est un peu long, j'en ai donc fait un gdoc, en précisant au fil du texte qui en est l'auteur.

Pour le contexte, mon personnage, une chamane draenei, membre du même ordre militaire que ma prêtresse botaniste que vous avez croisés plus tôt dans mes textes, a ressenti un appel des Seigneurs Élémentaires de son monde d'origine, et décide finalement, après plusieurs années, d'y répondre. La situation RP de la guilde à ce moment fait qu'elle n'est pas autorisée par la chef à partir seule, et le récit débute alors qu'elle cherche un compagnon de route.

Élémentaire, ma chère chamane
clic sur le titre pour lire le texte
Et bon, parce que c'est un peu rude de juste balancer un lien, je vais mettre quelques extraits dans le post !


--- Citer ---Elle faisait la moue quand elle entra dans la salle commune, mais en levant les yeux, un sourire lui fendit le visage. Voilà ! A une table était assis l'elfe taciturne capable de se transformer en boule de plumes. Elle avait souvent travaillé avec lui dans des missions d'infiltration, et elle s'entendait bien avec lui, globalement. Et puis, elle savait qu'il pouvait être discret, ce qui est un net avantage quand on part en petit groupe.

D'un pas alerte et avec un sourire enjoué, elle s'assit en face du druide, et lui parla d'une voix enthousiaste.
- Bonjour Vlazen ! Ça vous dirait de faire un petit voyage à l'autre bout de l'univers ?

--- Fin de citation ---


--- Citer ---Elle prit une dernière grande inspiration, et s'élança à grand pas vers le cercle de pierres. Elle sentait les énergies élémentaires lui tourner autour, l'ausculter, la détailler. Elle s'obligea à ne pas les rejeter, malgré la force de l'intrusion. Après tout, elle se dirigeait vers leur siège, il était normal qu'elles se renseignent. Lishaasi restait silencieuse, ignorant Choupi, même si en elle, elle était rassurée par la présence de la sélénienne. Au fur et à mesure que ses pas se rapprochaient du trône, elle pouvait apercevoir de plus en plus de choses qui s'agitaient autour, jusqu'à distinguer quatre immenses élémentaires, ordonnés en arc-de-cercle, à la limite du cercle intérieur.

Ils l'attendaient.

Elle fit un signe à Choupinélune pour qu'elle reste en dehors du cercle, puis elle avança jusqu'au centre. Là, elle inclina la tête, et dit d'une voix claire.

- Seigneurs, me voici. Je réponds à votre appel.

--- Fin de citation ---


--- Citer ---La grosse chouette avait réagi comme la chamane espérait. Elle l’avait souvent vue voleter de la sorte, mais rarement à des moments opportuns, elle était donc soulagée qu’elle l’ait fait à temps. Le sol ondula sous ses pieds, et elle vit l’élémentaire géant tituber, mais cela ne suffit pas à le faire tomber. Cependant, avant qu’elle ait le temps de pester, des racines sortirent du sol et vinrent entraver les pieds de leur adversaire. Elles n’eurent pas la force de le retenir, mais l’effort qu’il dût faire pour s’en dépêtrer, couplé aux effets du séisme eut raison de son équilibre. Dans un fracas à faire trembler la planète, il s’effondra devant elles.

Évidemment, il était loin d’être vaincu, mais le temps qu’il se relève, elles avaient le temps de l’affaiblir. Le bouclier de foudre lui posait problème, elle ne pouvait pas utiliser ses éclairs pour le toucher, ils seraient absorbés avant d’atteindre le cœur de l’élémentaire. Il fallait qu’elle annule le vent qui tournoyait autour de lui, mais combien de temps pourrait-elle tenir ? Et comment le frapper en même temps ? Elle commença à paniquer quand elle reprit conscience d’où elle se trouvait, et de ce qu’elle avait affronté jusque-là.

--- Fin de citation ---

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