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[Fiction Collective] Miderlyr - Saison 2

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Cap:
Pardon, j'ai plus tardé que prévu :niak:


21 juillet

    Je maugréai. Les mains dans les poches, je marchais dans les rues peuplées de la Basse-Ville. Slalomant habilement entre les gens, je laissais mes pensées vagabonder. Mon enquête n'avançait pas. La cheffe naine, Aube comme elle se faisait appeler, ne se montrait pas. Ses seconds m'avaient reçu, me certifiant que les relations entre nos deux guildes resteraient les même, et m'encourageant à apprécier les festivités.
    D'un mouvement fluide, j'évitais au dernier moment un homme en armure légère, une hache pendant à son côté. Sûrement un concurrent du tournois en recherche d'une bonne taverne.
    Et rien sur la Tiare. Soit je n'étais pas dans le secret, soit le projet de vol avait été avorté. Cette deuxième inenvisageable il y a quelques jours, était maintenant devenu une possibilité. Les assassins causaient trop de problèmes.
    La foule se fit plus compacte devant moi. Les gens s'étaient arrêtés, observant visiblement quelque chose. En me hissant sur la pointe des pieds, je vis quelques jongleurs faisant quelques tours. Rien d'intéressant. J'avisai une ruelle sombre sur la droite et m'y glissai.
    Un homme, habillé de sombre, était appuyé contre le mur à droite. J'eu un mauvais pressentiment en l'apercevant. Pressentiment qui se confirma lorsque, du coin de l’œil, je vis une autre silhouette se découper à l'entrée de la ruelle. Je soupirai. Les ennuis étaient arrivés.
    L'homme face à moi se détacha du mur d'un mouvement souple, et me barra le passage :
    - Eh petit ! As-tu envie de ...
    D'une voix posée, je le coupai net :
    - Quoique vous proposez, je ne suis pas intéressé.
    C'était des assassins, à ne pas en douter. Les rumeurs courant dans la guilde disaient qu'ils recrutaient, je ne pensais pas que c'était de la sorte. En tout cas, hors de question pour moi de les rejoindre. J'avais d'autres choses à faire qu'infiltrer la guilde des assassins.
    L'homme face à moi ne s'étant pas repris, je continuai :
    - Maintenant, si vous voulez bien m'excuser...
    Je repris ma marche d'un air nonchalant. Après deux pas, je fus à la hauteur de l'homme devant moi.
    - Eh petit pas si vite !
    Il posa une main ferme sur mon épaule. Voulu poser une main ferme sur mon épaule. Des que j'avais vu son geste, je m'étais mis en mouvement. Appui sur la jambe droite, rotation, jambe gauche projetée violemment. Un craquement sec confirma la rencontre entre mon pied et son genou. Il s'effondra dans un grognement tandis que son comparse se jetait en avant.
    D'un geste fluide, je m'emparai d'une des petite dague de lancer d'une de mes poche. Rotation. Lancer. La lame se planta profondément dans la cuisse du deuxième assassin, qui en manqua de tomber. En deux pas, je fus sur lui. Un coup de genou bien placé, et il fut au sol.
    Une seconde de réflexion plus tard, je sortis une fiole de poison d'une de mes poches. D'un geste poli par l'habitude, j'enduisis ma lame noire du liquide transparent. Je fis une petite entaille au bras à chacun des deux hommes, qui tombèrent très vite dans les vapes. Ce poison était d'une efficacité redoutable, et l'enchantement de ma dague renforçait d'autant leurs effets.
    Je poussais péniblement les deux corps contre le mur. L'éventuel passant n'y verrait que deux alcooliques cuvant leurs trop nombreuses bières.
    Je repris ma route. Cette fois, j'étais pressé. Je devais regagner la guilde, et vite. Deux assassins prisonniers, ça pouvait toujours être utile.


    Une fois arrivé dans le repaire, je croisais rapidement un des seconds de la naine. Ce fut Elsyäh. Cette elfe, grande, toute en finesse, portait ses longs cheveux blonds attachés en une longue natte. Dans ses grands yeux verts luisait une lueur tantôt d'amusement, tantôt de mépris. Elle m'assura d'une voix douce que les prisonniers seraient récupérés rapidement. Alors que je prenais congé, elle me glissa qu'Aube allait s'exprimer dans l'auditorium, et que ce serait bien vu que je sois présent.
    Je me rendis donc dans la salle indiquée. Elle était déjà bien remplie, les voleurs discutant en petit groupe, attendant l'apparition de leur cheffe. Je m'installai tranquillement contre un mur. D'ici, j'avais une vue d'ensemble sur la salle, et surtout, sur l'estrade sur laquelle la naine allait se montrer.
    Quelques personnes arrivèrent encore, dont un étrange trio : un gigantesque humain au cheveux noirs, une jeune elfe aux cheveux platine et un étrange félidé. Puis, enfin, Aube apparut. Petite, vêtue d'une cuirasse serrée d'un noir profond, et d'un pantalon bouffant de la même couleur, elle avait surgi d'un passage discret à l'arrière de l'estrade. Une capuche recouvrait sa tête, tandis qu'un magnifique masque d'or cachait son visage. Seuls deux yeux d'un bleu saphir y brillaient, posant sur la foule un regard attentionné. Elle prit la parole :
    « Mes chers camarades, aujourd’hui est la veille du tournoi. Comme vous le savez, celui-ci constituera une formidable distraction pour notre vol. N’oubliez pas, vous êtes mes yeux et mes oreilles, vous devez m’informer de tous les faits et gestes auxquels vous serez témoins. Je vous recommande également la plus grande prudence : la Guilde des Assassins semble avoir un nouveau chef, qui semble plus agressif que le précédent. Si les Assassins veulent une guerre, ils vont l’obtenir, mais évitez de les provoquer jusqu’au vol de la Tiare. J’ai envoyé deux espions l’épier, nous découvrirons ainsi leurs intentions. Continuez les préparatifs du vol sans vous laisser distraire. Par ailleurs, l’Invisible ici présent nous apportera son aide généreuse, envoyé par sa Guilde. Je vous prierais de le traiter comme l’un des nôtres. »
    Je la scrutais pendant son discours, notant chacun de ses mouvements. Aucun signe distinctif apparent sur sa tenue, rien pour la reconnaître. Et pas non plus de tic ou de manière de parler particulière.
    Elle énonça ensuite les différentes tâches auxquelles étaient affectées les différentes équipes de la guilde, avant de rapidement nous souhaiter bonne chance et prendre congé. Tandis que la foule s'éparpillait tranquillement, elle disparu par où elle était venue. Je restais songeur. Première fois que j'apercevais la cheffe naine, et je n'avais rien appris. Il fallait donc passer à la vitesse supérieure. Prochaine étape, infiltration de ses quartiers !

Sentinelle:
19 juillet

Je me levai, prête à accomplir la routine matinale. En ce superbe 19 juillet, j’observais sans motivation les marchands s’activer de bon matin. Ma fenêtre m’offrait une vue superbe de tout le Grand Hall. Ma forge se trouvait au rez-de-chaussée et principalement en extérieur (mettre une forge dans une maison n’étant pas particulièrement une bonne idée). Le premier, et seul étage de la masure me servait d’habitat.

Une fois toutes mes obligations terminées, je nouais mes cheveux blonds rapidement. Aujourd’hui était un jour différent de d’habitude, c’était le jour où je me rendais à la guilde.
Après quelques minutes, j’eus enfin fini ma marche et étais arrivée devant la lourde porte de la guilde.
La Guilde des Forgerons, dirigée d’une main de fer (excellente blague) par Ghildam l’Abrupt. Son physiquement imposait à la fois la peur et le respect, ses yeux très clairs contrastaient avec sa barbe brune et lui donnaient un regard insaisissable. Cependant, pour l’avoir rencontré plus d’une fois, je ne pouvais que m’attrister devant une telle réputation. En effet, il était un homme d’une gentillesse incroyable, toujours prêt à aider les apprentis forgerons. Sa maîtrise de la forge était sans pareille, et il était quelque peu mon modèle pour un jour forger une lame légendaire.

La Guilde des Forgerons était composée de trois allées, sans la moindre hiérarchisation. A vrai dire, c’était souvent un sacré bordel par ici. Mais ça ne me dérangeait aucunement, on ne pouvait pas dire que j’étais très organisée non plus. Tous s’affairaient sur différents projets de forgeage, des plans, des affaires d’argent…

Une guilde était un lieu de regroupement de personnes exerçant a priori la même profession. C’était le cas ici, mais je ne pourrais dire comment fonctionnaient les guildes de voleurs, mages, ou autres choses qui m’étaient très obscures. Beaucoup de camarades du métier se contentaient de se regrouper autour de grandes tables pour discuter de toutes sortes de choses, mais il y avait beaucoup de choses à faire ici. Moi, je venais surtout régler mes paiements de matériaux.
De nombreux forgerons achetaient leurs matériaux chez des particuliers, chez des marchands ambulants, peu importe, nombreuses étaient les possibilités. Les forgerons les plus modestes – comme moi, avaient plus d’avantages à les acheter directement à la guilde.

Je me dirigeai ainsi vers l’intendant chargé de recueillir mon paiement une fois que j’eus fini d’admirer la cohésion inébranlable de la guide. 
Une fois ma tâche achevée, je pouvais donner libre cours à mes déambulations. Je pris mon temps à observer quelques artisans à la tâche. Ils étaient pour la plupart très doués et je jalousais la facilité avec certains maniaient les métaux en fusion. Les plus impressionnants étaient bien souvent les fabricants d’armures. Pour l’instant, je n’arrivais qu’à forger des armures de cuir ou bien de fer léger. Je n’étais pas mauvaise cela dit, mais j’étais très loin d’atteindre leur niveau. La finesse et la solidité de certaines pièces d’armure me laissaient tout simplement sans voix. Toutes ces personnes concentrées dans leur tâche jusqu’à ce qu’ils eurent terminé ne me donnaient que davantage envie d’exercer ce métier.

Le forgeage était un art, à n’en point douter. Et un jour, je serais en mesure de parvenir à mes fins : Je forgerai une lame d’une qualité légendaire, sculptée délicatement et capable de fendre n’importe quoi. Une véritable œuvre d’art.
C’est pour cela que je m’entraînais chaque jour et parfois même la nuit.
Un bruit inhabituel me tira de mes pensées, je m’approchai de là d’où il semblait venir :
Un petit homme frappait de son marteau un matériau que je n’avais jamais vu, qui ressemblaient plus à un croc ou une griffe qu’autre chose.
Je m’approchai davantage, intriguée. Le petit homme me remarqua et m’adressa la parole en riant :
« Ça vous intrigue, hein ? C’est un croc de démon, je devrais pouvoir en faire une dague solide.
-Vous faites des armes en résidus de démons ?
- Quand j’ai les matériaux, oui. Mais il ne s’agit ici que d’un reste de démon mineur, elle ne deviendra jamais une lame aussi formidable que j’aimerais qu’elle soit. Il est très dur de se procurer des matériaux de démons intéressants pour le forgeage car ils sont très vite achetés par les mages, et leur sont souvent réservés… Va savoir ce qu’ils en font ces maudits mages.. Le moyen le plus sûre d’en obtenir est de s’en procurer soi-même. »

S’en procurer soi-même ? Comme si le commun des mortels pouvait trouver et affronter un démon pour récupérer des matériaux de forgeage. Je souris et remerciai le monsieur avant de repartir chez moi, je n’avais plus rien à faire ici.

Je ne pouvais m’enlever cette histoire de matériaux démoniques de la tête. Une fois rentrée chez moi, je m’assis et y réfléchit encore, jusqu’au coucher du soleil. J’avais déjà beaucoup entendu parler de la forge démonique, c’est un art très méconnu et très peu exploré puisque les matériaux sont quasiment inaccessibles. Mais une lame forger dans les restes d’un démon est assurément une arme extraordinaire. J’avais réellement envie d’en savoir plus sur tout ceci. Le forgeage démonique ne devait pas être bien différent du forgeage traditionnel, le principal problème restait les matériaux. Où pourrais-je trouver un démon ? Serais-je en mesure de le vaincre si je le trouve ?
Mes pensées se redirigèrent rapidement vers : « Où pourrais-je trouver quelqu’un capable de m’aider ? ». Le petit homme avait dit précédemment que les mages réquisitionnaient les restes de démons systématiquement, ils devaient en savoir davantage sur le sujet, ils devraient donc être en mesure de répondre à mes questions, voire de m’aider !

Achileus:
20 juillet

Il était midi lorsque Althanéa pénétra dans l'enceinte du grand collégium de magie de Miderlyr. À peine fut elle entrée qu'un vieil homme s'approcha pour la saluer.
-Dame Liadon, quel bonheur, vous avez bel et bien reçu mon message !
-Oui, Sir Kaylipt, je suis venue aussi vite que je le pus, mais la route fut difficile, et la météo peu clémente.
En réalité, elle était partie avec trois jours de retard, suite à un malencontreux oubli. Heureusement, le hasard voulu que le grand tournoi de Miderlyr débute juste après son arrivée.
-Peu importe, Dame Liadon. L'important c'est que vous soyez ici !
-En effet. Puis je visiter ?
-Laissez moi vous accompagner. Ce n'est pas tout les jours que l'on reçoit un RepoussOmbre, même dans un pareil établissement !
-Ce serait un honneur, mais si vous le voulez bien, je vais repérer les lieux seule. N'oubliez pas pourquoi je suis réellement ici.
-C'est vrai, je vous laisse travailler. N'hésitez pas à me demander si vous avez besoin de mon aide !
-Je n'y manquerai pas !
Elle se retourna et partit vers le bâtiment. Elle n'était pas fâchée de s'être défaite de ce directeur un peu ennuyeux et qui, surtout, avait une haleine affreuse qui lui rappelait certaines créatures peu ragoûtantes. De plus, visiter les lieux seule lui permettait d'amener son ami avec elle.
-Arjhan, siffla t elle en ouvrant sa valise, sort !
Un joli pseudodragon rouge sortit de la valise.
-Dis moi si tu sens quelque chose.
Elle referma sa valise tandis que la petite créature allait se nicher près du plafond. La magicienne continua sa visite sous l'œil de son familier caché derrière les lustres. Après quelques couloirs, elle tomba dans une aile consacrée aux appartements des professeurs et des invités. En effet, l'école accueille en permanence des mages, prêtres et autres druides afin de leur faire profiter de la bibliothèque et leur permettre d'étudier dans un environnement baigné de magie.
-Ah, dame Liadon, je vous trouve enfin !
-Monsieur le directeur, dit elle en se retournant, vous désiriez me voir ?
-En effet, je me suis rendu compte peu après notre entrevue que j'avais oublié de vous remettre la clé de votre chambre. J'ai donc parcouru l'école de long en large jusqu'à vous retrouver il y a quelques instants. Tenez, dit il en lui tendant un trousseau métallique, voici vos clefs.
-C'est très aimable à vous, et je vous remercie de tout mon cœur. Si cela ne vous dérange pas, je vais aller m'installer dans ma chambre. Au plaisir de vous revoir !
En réalité, elle espérait ne pas trop le croiser, étant donné son haleine qui assurément lui ferait perdre l'odorat en cas de surexposition.
-Moi de même, dame Liadon !
Elle se retourna et regarda le trousseau de clé. Il portait le numéro 347. Elle se rendit à la chambre indiquée. Une fois à l’intérieur de la pièce, elle s’allongea sur le grand lit, et s’apprêta à faire un petit somme lorsque son regard se posa sur un rouleau de parchemin scellé sur son bureau. Elle se leva à contre coeur et l’ouvrit.

“Pour Mme Liadon,

Voici votre emploi du temps. Il sera valable durant toute la période pendant laquelle vous occuperez le poste de professeur de défense contre les forces du mal au collégium supérieur de magie de Miderlyr.
Il prendra effet le 21 juillet à 13h”

Althanéa regarda sa montre à gousset qui ne la quittait jamais. Il était midi trente neuf.
“Alors c'est demain que je commence les cours. Je vais préparer le mien tout de suite. On verra ce que les élèves penseront de ma méthode.”

Vaati the Wind Mage:
21 juillet




“Je sens des auras néfastes, Imielda. Il y a une multitude de personnes à Mydelir veulent du mal à ceux de mon espèce. Je ne peux savoir qui, mais je te conseille la plus grande prudence. Le jour de mon retour approche, sois prudente. N’oublies pas, j’ai besoin de toi. Et je t’aime.”

A ces mots, je ressentai une flamme me consumer de l’intérieur. “Je t’aime.” Rien au monde ne me réjouis plus que d’entendre sa voix prononcer ces mots. J’étais assise en tailleurs sur mon lit, dans les dortoirs du Collégium. Mon idiote de camarade de chambre n’étant pas encore là, je pouvais discuter paisiblement avec Dazzrug.

“Ne t’en fais pas, lui dis je. J’exterminerai de mes propres mains tous ceux qui te voudront du mal.
-Je n’en doutais point. Le Rituel devra bientôt être effectué, tu dois dès maintenant acquérir une épée rituelle. Je sens une présence approcher, nous parlerons plus tard.”

Sitôt sa phrase terminée, Alraune entra dans la chambre. La petite sotte me fit un sourire, auquel je répondis par le plus pur des sourires possibles. Plus que quelques jours à supporter cette existence… Je devais tenir bon. La nuit tombée, je jetais un  simple sortilège afin d’endormir profondément Alraune, avant de m’enfuir par la fenêtre. Je me faufilais vers le nouveau point de rendez vous de notre culte, dans les sous sols oubliés du Collégium. Il ne restait que cinq jours avant le retour de Dazzrug. Le Conseil des Ombres était à présent assez puissant.  Les choses sérieuses pouvaient commencer. J’attendais l’arrivée de tous, voyant ravie que de nouveaux arrivants avaient rejoints les rangs. Une petite dizaine à peu près. Nous étions à présent précisément 189 croyants. Cela était parfait. Une fois tout le monde arrivé, je les fis entrer tous dans un immense cercle de poudre. J’étais au milieu de deux piliers.Une fois tout le monde entré, le cercle ainsi que les piliers s’enflammèrent de flammes rouges sangs, et je pris la parole:
“Mes chers frères, mes chères soeurs. Cet endroit dégage une aura magique immense. A partir de maintenant, le Conseil se réunira toujours ici. Je veux que vous tourniez toutes vos pensées vers Dazzrug. Pour nos nouveaux arrivants: ceci n’est pas un petit rendez vous pour votre dose de frisson démoniaque. Vous vous engagez en revêtant la tenue du Conseil des Ombres à prendre part dans une chose grande, et vous en serez récompensés. La cérémonie peut commencer. Ceci est le véritable commencement du Conseil des Ombres.”

Ainsi je leur fis gestes de s’agenouiller, et de prier. Ainsi je pus commencer:

“Yam Dazzrug, Ektal Kwal Jürdun, redictul amior nuelstra. Dekelterul  yut sapios et  yut powlega.”

Cette phrase avait été prononcée en langage démoniaque. Si je parlais cette langue à la perfection (un siècle ayant été nécessaire pour cela), aucun de mes fidèles ne la connaissaient. Néanmoins, elle eût l’effet escompté: un vent fort se mit à souffler. Je remarquais quelques regards inquiets: la puissance du démon commençait à se faire ressentir. Elle m’entourait, me englobait. Je me sentais entourée par lui... Le reste de la Cérémonie allait être effectué en un simple langage terrien.

“Dazzrug,Maître des monstres ancestraux Seigneur de la Mort et Pourfendeur des anges. L’heure heureuse de ton retour est proche. Adoré par tes fidèles, ton pouvoir fait trembler la terre. Que chacun ici se sache compris et écouté, aimé par toi. En croyant en toi nous augmentons ton pouvoir. Et plus ton pouvoir sera grand, plus ta générosité le sera.
 Toi qui fut scellé par les dieux tyranniques, ton retour annonce la joie sur terre.
Toi qui a connu l’Enfer créé par les divinités, tu viens nous en prévenir.

Tu es le seigneur des flammes et de la mort, et ton feu réchauffe nos âmes éperdues de toi.”

Le reste de mes louanges augmentaient l’intensité du vent, augmentant ainsi la croyance de mes fidèles, qui elle même faisait donc augmenter son pouvoir. Cela se passait de mieux en mieux.

Ainsi, à la fin de la cérémonie, les flammes finirent par s’éteindre. Avant de congédier l’Assemblée, j’appelais Alklebath à mes côtés. Alklebath était le seul mortel pour lequel j’avais de l’estime. Jeune elfe très talentueux, il était mon second, et également le seul à connaître mon âge véritable, ainsi que ma condition de vampire. Il portait un énorme sac, auquel il avait jeté un sortilège le rendant son fond. Il tendit alors à chacun des fidèles un masque et des gants en argents, tandis que j’expliquais leur fonction:
“Nous sommes aujourd’hui le 21 juillet, et dès demain matin le Tournoi de Mydelie commencera. J’aimerais que vous arpentiez la foule, et que vous attiriez le maximum de monde. Sachez très chers que le retour de Dazzrug est quasi imminent: si les choses continuent d’aller dans le bon sens, celui ci arrivera le 26 juillet. Ayez la foi, et répandez mes paroles. Si vous êtes menacés, prononcés simplement Obscurus  en tendant les mains gantées pour paralyser l'agresseur pendant dix secondes, vous laissant le temps de vous échapper.”

Sur ces bons conseils, je laissais mes fidèles prendre ces objets. Après tout, j’avais une nouvelle proie à traquer.
Généralement, je suis une proie environ une semaine avant de passer à l’action. J’obserse ses faits et gestes pendant la nuit, et un soir j’attaque. Je les choisi avec minutie: une personne à laquelle personne ne fait attention, et qui ne manquera à personne. Quand c’est un noble de la Haute Ville, j’attend généralement sa vieillesse. Généralement. Il m’arrive quelquefois de me faire un peu plaisir…
Quoiqu’il en soit, ma nouvelle proie était un chevalier déchu, veuf et sans enfants, et qui semblait quand même maintenir une hygiène de vie convenable. Un met correct en somme.

Cette nuit, je l’ai suivi de près, sous ma forme de chauve souris, tapie sous les toits. Il serait ma dernière proie avant le retour de mon bien aimé…
                                                                                                                                                                                       

22 juillet

Finalement, je rentrai dans les dortoirs, trouvant Alraune toujours autant endormie. Je me couchais, et profitais de quelques heures de sommeil.

Je fus réveillée par les premiers rayons du Soleil sur ma peau. En effet, l’un des avantages à être un vampire aussi âgé que moi est que vous devenez immunisé contre le Soleil. Cela était très pratique pour mon imposture en tant qu’étudiante. Je remarquais la présence d’une Haute-Elfe que je n’avais jamais vu avant. Cela était… intriguant. J’ai rapidement appris qu’il s’agissait d’une professeure de défense contre les forces du mal… Hum. De leur point de vue, et s’ils savaient, je représente peut être bien les forces du mal. Quoiqu’il en soit, nous verrons à quoi ressemblent ces cours…

Passant devant la bibliothèque, je remarquais également une jeune femme rousse, plongée dans un livre. Trop vieille pour être une étudiante, à coup sûr. Le Collégium accueillait souvent des curieux, mais elle m’intriguait. Je m’arrêtai pour la regarder. J’entendis Dazzrug me parler:
“Je sens une présence démoniaque émaner d’elle, mêlée à celle d’un être purement mortel. Je ne sais si ses intentions sont néfastes ou non.”

Mince, elle m’avait remarqué. Elle me regarda, intriguée. Je lui répondis par un petit sourire niais dont j’avais le secret, faisant comme si je la saluais, avant de m’en aller rejoindre Alklebath. Néanmoins, j’avais bien perçu quelque chose dans son regard avant de la quitter: elle se doutait de quelque chose. Son oeil noir, pour peu que l’on côtoie un démon quotidiennement et que celui ci consente à vous en apprendre sur son espèce, révélait une malédiction ou autre chose de ce genre. Si elle était nuisible, mieux valait en avoir le coeur net, et si c’était bien le cas, alors je l’assassinerai de mes mains. J’attirais donc Alklebath vers moi. Grand, mince, des cheveux bruns ténébreux et des yeux bleus, il se faisait régulièrement bourreau des coeurs au Collégium. Je lui dis donc:
“Je veux que tu t’approche de cette inconnue, et que me rapporte le plus d’informations à son sujet. Il ne faut prendre aucun risque.
-Très bien Imielda, j’y vais de ce pas.
-Parfait. De mon côté je vais tenter d’approcher cette nouvelle professeure. Sa présence n’augure rien de bon pour le Conseil. Les cours commencent dans une heure, je te retrouve à cette heure ci. Bonne chance.”

Cap:
21 juillet

    Cette bibliothèque était passionnante ! J'occupais la place depuis le matin, et la nuit était tombée depuis longtemps. La salle était vide, éclairée seulement par la sphère de lumière posée sur son socle à ma droite. De nombreux ouvrages, anciens ou très anciens, étaient posés sur la table en trois piles : une pour ceux qui semblaient intéressants, une pour ceux qui l'était vraiment et enfin, la dernière, pour ceux qui était, finalement, absolument inintéressants.
    J'avais entre les mains un vieux traité de démonologie d'un autre temps. Ecrit en Haut-Elfique, je peinais à le déchiffrer. J'avais posé sur la table un dictionnaire pour m'aider dans mon étude. Lorsqu'une information me semblait pertinente, je la griffonnais rapidement dans mon carnet de note d'une écriture grossière et penchée.
    Je sentis la Bête grogner. Ah ! Tu rages car j'avais trouvé de nouveaux moyens de contrer tes semblables ? Et bien tu peux cont... Non ! Ce n'était pas ça !
    Une douleur me vrilla la tête. Quelque chose de puissant, terriblement puissant, était en train de gratter la frontière de notre réalité.
    Je pris ma tête entre mes mains, réprimant un gémissement. Non ! Quelque chose l'appelle. L'attire ici.
    La Bête gronda. Je la sentis monter. Non. Non ! Toi, tu restes où tu es !

    Après de trop longues minutes de lutte intérieure, je réussi enfin à La canaliser, me laissant exsangue. Heureusement que j'étais seule dans cette bibliothèque ! Je pris encore d'autres longues minutes à me reprendre complètement, la tête posée entre mes mains, me massant légèrement les tempes les yeux fermés, laissant ma respiration reprendre un rythme normal.
    Je profitais de ce temps pour analyser la situation. Quelque chose était appelé ici. Mais visiblement, il manquait quelque chose pour finir l'invocation. La frontière entre sa réalité et la nôtre tenait encore le coup. Mais pour combien de temps ? Et ce quelque chose... Vu la puissance qu'elle dégageait, et Sa réaction, il y avait de grandes chances que ce soit un démon. J'eu un frisson. Il ne fallait pas qu'il soit invoqué. Surtout pas !
    J'ouvris les yeux. Je ne pouvais pas en parler à l'Archimage. Son comportement bizarre à mon arrivée m'empêchait de lui faire confiance : soit il était dans le coup, soit il n'était plus maître de son esprit. Et si l'Archimage était tombé, cela pouvait être le cas de n'importe quel professeur. J'eu un nouveau frisson. J'étais seule. Seule pour empêcher un démon de fondre sur Miderlyr. Je soupirai. J'avais du travail !



22 juillet

    Dès les premières lueurs de l'aube, j'avais repris mes recherches. J'étais néanmoins nettement moins efficace que la veille. Une part de mon esprit restait occupé par mes découvertes de la nuit. Et surtout, cherchais à répondre à une question : comment empêcher ce démon d'être invoqué et de fondre sur la ville ?
    Ignorant les passages des premiers étudiants, je continuais à (tenter de) déchiffrer le Haut-Elfique. Que voulait dire laurië déjà ?
    Le regard sur mon épaule se fit insistant. Je m'arrachai de mon texte, et tournai la tête. Encore elle ! La jeune étudiante que j'avais croisé devant le bureau de l'Archimage. Le visage pâle, les cheveux noirs, elle me fixait, le regard un peu dans le vide. Je me préparait à contenir la Bête, comme la fois précédente. Étrangement, il n'en fut rien. La jeune fille me salua d'un sourire, et repris la route. Je restais pensive. Pourquoi ne s'était-Elle pas manifesté cette fois ?
    Je secouai la tête. J'étais tranquille pour cette fois. Je n'allais pas m'en plaindre ! Je repris mon travail.

    - Salut toi ! Tu es nouvelle ?
    Je relevai la tête. Un jeune elfe s'était assis sur la chaise face à moi. Les cheveux bruns, les yeux bleus, il flottait sur son visage un air mi-amusé mi-charmeur. Il continua :
    - J'ai vu que tu n'as pas fait de pause depuis ce matin ! Même pas ce midi pour manger un morceau. Je me suis donc permis de t'amener un petit truc à grignoter...
    Joignant les mots à la parole, il me tendit un simple sandwich. Drôle d'approche. Mon estomac ne me laissa pas plus de temps de pour penser. Il n'avait pas tort, et j'avais sacrément faim !
    Je m'emparai du pain, le remercia et croqua une bouchée. Il reprit la parole pour me poser une autre question :
    - Ton travail a l'air très prenant ! Sur quoi tu travailles ?
Son regard passait de mon visage, aux différents livres posés sur la table. Je déglutis et pu enfin lui répondre :
    - L'invocation. Je suis chercheuse, et je viens profiter de cette bibliothèque.
Il me jeta un regard admiratif.
    - L'invocation ? Whoa ! C'est génial ! Tu as déjà invoqué quoi ? Des chimères ? Des esprits élémentaires ? Des... démons ?
    Il avait murmuré le dernier mot en un souffle. Je me figeais un bref instant. Ce pouvait-il que... ? Non, il avait simplement lu le titre des livres traînant sur la table, certains étaient en communs et portaient des noms particulièrement explicites comme par exemple Manuel d'invocation, de domination et de révocation des démons jusqu'au troisième cercle.
    Il interpréta mon silence d'une autre manière :
    - Oh, tu ne préfères pas en parler. Je comprends, nous autres, mage, avons tous nos petits secrets.
    Disant cela, il me fit un petit clin d’œil.
    - Je suis ravi d'avoir fait ta connaissance. Je vais néanmoins devoir te laisser, mon cours commence bientôt. Au plaisir de discuter plus longuement la prochaine fois...
   Il se leva.
    - Au fait ! Je suis Alklebath. Dit-il en me tendant sa main.
    - Sylvanyël. Répondis-je en la lui serrant.
    Le jeune elfe me fit un dernier sourire, avant de filer comme il était apparu. Drôle de personnage. Pétillant, plein d'énergie, il inspirait la confiance. Néanmoins, j'avais d'autres choses à faire que me lier d'amitié avec un apprenti mage, aussi curieux et insistant qu'il puisse être. Je me replongeai dans mon travail.

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