Il y a des souffrances que connaissent ceux qui suivent un studio depuis des années.
L'une d'entre elles est de voir une série s'éloigner plus ou moins drastiquement des valeurs qui l'ont aidée à croître.
Une autre est de voir une série inexploitée durant des années.
La pire étant de voir les deux réunies : une licence qu'on ne voit plus qu'à travers des jeux qui n'ont guère l'ombre de la valeur de ses épisodes phares.
Et les fans de Nintendo, si ça existe sur ce forum, la connaisse, envers la série
Metroid.
Face à cette expérience, plusieurs solutions se proposent.
L'une d'elles est d'apprendre le japonais juste pour pouvoir leur écrire une lettre d'insulte bien chiadée. Ça sert à rien mais ça défoule.
Une autre est de montrer à Nintendo comment qu'on fait du
Metroid quand on est un développeur de jeux vidéo. Et celle-ci porte deux visages.
Le premier, le plus téméraire, c'est de s'appeler
Metroid et d'en porter toutes les features, en passant par la case bien entendu du rip-off et du développement par-dessus du contenu déjà existant. C'est celui qui regarde dans les yeux les avocats de Big N. à l'affût de tout procès pour copyright infringement possible. Il porte d'ailleurs pour nom
AM2R et il est génial.
Le second, le plus timoré mais qui offre parallèlement plus de libertés, c'est de prendre
tout ce qui fait d'un
Metroid un
Metroid, mais
sans s'appeler
Metroid. Car si on peut breveter des concepts de jeu, il s'avère que Big N. n'a pas les droits du shoot-aventure et ne peut donc pas attaquer en justice tout studio qui propose un gun, de la plateforme et du build up ; sinon, ils seraient en guerre depuis 20 ans avec Konami.
Ce second visage, il est développé par
Apapappa et il porte pour nom
Zordak (on peut d'ores et déjà mettre un solide mauvais point pour l'originalité des noms).
C'est l'histoire d'une chasseuse de prime blonde en soutif-culotte mandatée pour aller enquêter sur une menace mineure détectée quelque part sur la planète Zordak (d'où le nom, je précise si besoin est). Mais son trajet en cryogénisation qui devait durer 2 ou 3 ans en fera finalement 200. Pourquoi ? Comment ? Peut-être va-t-on le savoir, mais ce qui est sûr, c'est que ce laps a permis à la planète de bien se délabrer...
Pour l'instant, le jeu est encore en démo gratuite ; la version finale sera payante.
Passé le début de cette démo, où on avance à poil sans gun ni map ni même de HUD, on marche en terrain plus que connu : on défouraille sur le moindre pixel en cherchant le chemin caché vers la prochaine porte, puis le prochain item, puis la prochaine zone, etc.
Et le moins que je doive dire, c'est que si Apapappa a appris ses leçons de level design du meilleur des maîtres* il n'oublie pas pour autant de sacrifier le plus emblématique au profit de sa touche personnelle, ce qui me laisse croire que
Zordak ne sera pas juste un ersatz bâclé, mais un jeu qui mérite le détour.
* je parle évidemment du Nintendo des années 90Le sacrifice, c'est la Morph Ball, qui est, comme chacun le sait, l'une des clés de voûte de
Metroid. On peut marcher à quatre pattes, ce que Samus ne peut pas faire, mais on n'a ni les Bombes ni les jeux de tunnels propre à la série. En compensation,
Zordak exploite bien mieux les tirs en diagonale, notamment dans les destructions d'environnements. J'ai parfois eu du mal à voir le pixel à viser pour l'enclencher.
Il innove aussi sur la présence de la menace, domaine dont la série de Samus est plus que réputée. Sound design, luminosité, impact de la santé, il reprend la formule en l'agrémentant de quelques points, comme la gestion de l'oxygène qui baisse dans les zones qui en sont dépourvues, mais aussi ce sentiment qu'on incarne un personnage faible.
Là où Samus démarrait dans sa légendaire Power Suit avant de subir un downgrade, on démarre littéralement en culotte et on doit ramasser du matos abandonné pour espérer survivre. Dans ces conditions, je ne serais pas étonné que le jeu soit un poil tendu pour quiconque n'a jamais touché un
Metroid (même si je n'ai personnellement frôlé le Game Over qu'une fois, face au boss, que j'ai vaincu sur le fil).
Voilà, je recommande donc chaudement aux nostalgiques de l'âge de platine de Nintendo de s'y intéresser, et je n'en dirai pas plus.