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Errements Poétiques - [ Poème : Autre-Vert ]

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Synopz:
Mourir est un accouchement toujours dérangeant
Mourir
Est un accouchement
Toujours dérangeant

Et l'éclat ! Ah !
Tout ce qui se donne là
Dans le moment

Tes yeux se vident
Flot déversant
D'autres s'emplissent
Laissez mes vices

Pourtant j'aime
Cette vie ici !
Justement

Vivre
Est un accouchement
Ratant réussissant
Dans tes cils mille

Tout s'invente toujours
Cette vie est mot
Épelée
JAMAIS DITE AU BOUT

Synopz:
Ce post ne préjuge rien de mon retard au concours d'écriture et n'est pas lié à lui :niak:

Vivre face au soleil
Comment vivre face au soleil
Seulement
Surchargés par l'humaine veille
De nos abysses pénétrantes

Crois-tu dis
Qu'il faudra changer la vie
Seulement lentement
Dis oui !

Vivre face au soleil alors
S'écouler dans chaque rayon
Loin du fond ?
Il n'y a rien de mort
Seulement
Pas de révélation

Il n'est que nous certes
Nouvellement nés
Tant mieux !
Avec tous les degrés du soleil
A goûter

Exquise nuance
Des plis de la vie tous brûlants
Seulement
Nous ne savons pas vivre
Nous ne voulons pas craindre

Lentement forcément
Face au soleil
Nous serons des créatures belles
Seulement humaines
"La moralité est la faiblesse de la cervelle"
Disais-tu

Seulement
Nous serons éternels
Toujours mortels gavés de plis
Nous saurons vivre avec fracas
Mort et envie toujours déjà debout
Face au soleil.

Synopz:
Le plomb
Je me souviens de tout
Sous le ciel plombant
D'Août

Août plombant
Un mois trop mûr
Pris en pleine poire

On récolte les filles
Et les solitudes
Cap plein sud
Rayons de plomb

Avons-nous jamais
Aimé ces terres ?
Dans un lointain passé

Écrasé je me souviens
Terrifié d'oublier la Terre
Déjà plombée

Août l'été est mauvais conseiller
Je finis broyé soleil
De ne pas oublier.

Chompir:
J'ai pas grand chose de différent à dire que d'habitude mais c'est toujours un réel plaisir de voir un nouveau poème par ici et de le lire, les mots sont toujours aussi beaux et enivrants tout comme les titres qui annoncent toute la couleur du poème (d'ailleurs j'aime essayer de deviner de quoi va parler le poème en voyant le titre). Sinon j'ai beaucoup aimé le dernier qui colle bien à la période.

Synopz:
Voici mon petit texte pour la manche finale du concours, normalement relu, corrigé et mis en page ! J'avais un peu de retard cette fois-ci, mais, l'été aidant, je n'ai pas trouvé le temps plus tôt !  :8):

Le Septième roi
« Mon pays se trouvait au milieu du désert.
Le jour, un vent incandescent l'embrasait.
Et quand la Lune se levait, le vent devenait glacial…
Le vent apportait avec lui la mort…
Jamais un vent aussi malfaisant n'a soufflé sur la terre d'Hyrule.
Étais-je jaloux du vent d'Hyrule ? Ou le destin en avait-il décidé ainsi ? ... »

- Ganondorf, The wind waker


***
Quelque part, bien longtemps après le Héros du Temps.


   « Princesse ! Il est nécessaire que vous m'accordiez toute votre concentration désormais ! »
   
   Le précepteur semblait excédé. L'inattention de la jeune fille croissait de jour en jour. Rien ne semblait capable d'intéresser la fille du Roi à l'épais volume orné de complexes dorures représentant les armes de la famille royale. Cette somme accumulée par les Hyliens depuis des siècles et des siècles s'intitulait Histoire et Traditions des Dépendances de la Couronne d'Hyrule. Il s'agissait d'un incontournable de l'éducation de tout jeune noble, et plus encore de celle de la princesse d'Hyrule en personne.

   « Je ne m'intéresse pas à toutes ces vieilleries poussiéreuses, maître ! La légende des déesses est simple : je sentirai leur appel et j'agirai au mieux à ce moment-là. Vos circonvolutions politiques et historiques n'ont pas d'intérêt pour moi, je suis élue par le destin !

Le vieil enseignant soupira longuement, réajustant ses petites lunettes sans branche au sommet de son long nez fin. La jeune fille se rapprochait doucement des limites du raisonnable.

- Vous semblez très sûre de vous, jeune fille. J'ai hâte de voir votre pouvoir divin à l’œuvre, mais peut-être devriez-vous considérer que je ne suis pas ici simplement pour vous plaire, mais également pour vous apporter des choses dont vous ne mesurez pas encore le poids ? »

   Il était précepteur de la famille royale depuis des décennies, entré au service du père de Daphnès Nohansen Hyrule, qui régnait aujourd'hui. Le sang des Sheikahs, affaibli et mêlé par des années de métissage, coulait dans ses veines, il pouvait, par l'entremise des générations, rattacher sa lignée à la légendaire Sage de l'Ombre, Impa. Il se demandait souvent si l'antique nourrice de la princesse qui allait s'éveiller en tant que Septième Sage avait elle-aussi connu son lot de désillusions et d'exaspérations en élevant la plus grande souveraine d'Hyrule. Cette pensée le rassurait : tous ces personnages mythiques et légendaires, tous ces élus des Déesses n'étaient au fond que des humains, hantés par le doute moral, la peur de l'échec, terrifiés par leurs propres errances et leurs propres abysses.

   « Vous avez la fougue des gens de vôtre âge, bien sûr. Mais je suis sûr que vous serez heureuse de savoir que vous êtes sans doute mon élève la plus… Déterminée, dirons-nous ! Soupira-t-il en se tournant vers la grande baie vitrée qui donnait sur les vastes jardins royaux.

La jeune fille sourit effrontément, plus ravie de cet état de fait qu'elle n'aurait voulu le montrer.

- Peut-être que ces listes barbantes de dynasties ne sont pas pour moi, reprit-elle, testant chaque fois un peu plus les limites du précepteur. Je sais où est le juste, ma famille le défend depuis l'aube de ce monde, comment pourrais-je avoir cure de ces incessantes querelles politiques ? Choisissez autre chose, maître : la littérature, les arts, même les interminables discours philosophiques de vos lointains ancêtres Sheikahs me passionneraient plus… »

   Sa tâche n'était pas insurmontable, mais les grands accomplissements demandaient du temps et des efforts, et non une quelconque inspiration surhumaine. Il en allait de même de l'ordre de ce monde : les déesses n'étaient pas concernées par ces affaires de bien et de mal, l'émergence du malin ne relevait pas d'une quelconque erreur – comment des Dieux auraient-ils pu se tromper ou se révéler incapable de corriger leur création ? Bien au contraire, c'était l'équilibre des forces qui maintenait ce monde vivant. Quelle grandeur dans un monde toujours bienheureux ? Quels récits, quelles croyances, quels dépassements des êtres sans épreuves, chutes et alternances des forces sur la terre d'Hyrule ? Cette conviction ne pouvait s'afficher en public, bien sûr, la famille royale d'Hyrule avait bâti sa légitimité politique sur cette croyance eschatologique d'un bien unique et final que les Dieux réservaient au monde d'Hyrule une fois le malin exterminé.
   Mais, lui, Sevnès, lointain descendant du peuple des Ombres, dispersé et chassé, accomplissait une mission bien particulière, que lui avait confiée Daphnès Hyrule, la mission immémoriale que remplissaient les Sheikahs auprès de la lignée de la Déesse Hylia depuis l'aube du monde : transmettre le savoir plus ancien et plus fin d'un monde radicalement absent aux notions de bien et de mal. Loin de la croyance en un monde organisé avec ordre et bonté par les déesses, il devait, grâce aux arcanes, aux légendes, aux grimoires et aux épaisses considérations ésotériques de ses ancêtres, former patiemment l'esprit de la progéniture royale à percevoir au-delà des apparences.

   Il se retourna posément vers la jeune altesse qui attendait patiemment et poliment qu'il reprenne la parole, tout en parvenant pourtant à exprimer sur son visage une insolence qui relevait du tour de force. Il fallait qu'il change de méthode. Elle était désormais trop grande et trop intelligente pour obéir à ses instructions sans se poser de questions.

   « Le fait que les chroniques que nous abordons soient celles du peuple du Désert a-t-il à voir dans votre réticence ? Pensez-vous qu'il n'y ait pas d'intérêt à comprendre comment ces femmes – votre peuple aujourd'hui – ont pu laisser croître le mal en leur sein ? Comment cet homme, fait, au fond, comme vous et moi, de chair et de sang, a pu accueillir en lui la malédiction du Démon qui agite cette terre depuis son origine ?

La jeune fille semblait surprise de ce retournement de situation mais ne voulait pas perdre la face.

- Bien sûr, maître que tout cela a à voir avec mon désintérêt ! Je ne comprends guère pourquoi il faudrait me pencher sur les écrits du Désert qui datent d'avant leur entrée dans notre royaume. Ces femmes vivaient recluses et farouches, le mal a saisi leur animalité et leur sauvagerie, et il n'y a aucune compréhension séditieuse à donner au Roi du désert. Il n'a apporté que le mal, la désolation et l'ambition qui rongeaient son cœur sur cette terre.

Elle était déstabilisée, et tentait tant bien que mal de cacher cette surprise par son agressivité. Sevnès décida à cet instant précis qu'elle était finalement réellement prête.

- Que pensez-vous qu'il s'est produit quand les armées d'Hyrule ont franchi les rocheuses Gerudo, ma jeune élève ? Qu'ont vu ces fières femmes quand le Roi d'Hyrule et sa garde ont pénétré leur cité interdite aux hommes, triomphants sur leurs montures ?

La jeune fille n'en croyait pas ses oreilles. Son maître d'habitude si placide et impassible se mettait subitement à interroger ses croyances les plus profondes, des croyances largement partagées par l'opinion commune sans discuter.

- Je… Je ne sais que dire. Les nécessités du combat et l'horreur de leurs actes…

- Nous viendrons un jour, qui n'est pas si lointain, aux propres exactions d'Hyrule envers les peuples qu'elle a soumis à ses lois. Et vous verrez que l'horreur est un bien que les races de ce monde se partagent en abondance, quoiqu'elles aient aussi bien des choses intéressantes à faire valoir.

La princesse semblait outrée et effrayée en même temps.

- Je ne comprends pas comment de tels propos peuvent franchir la barrière de vos lèvres, maître ! Que dirait-on si l'on vous entendait discourir de cette manière ? Souffla-t-elle.

Il inspira profondément, tout à fait calme, et, en vérité, même amusé de voir l'adolescente entêtée revenir à ses postures enfantines une fois mise en face de la complexité du monde.

- Votre père, le Roi, m'a donné toute latitude pour vous faire comprendre un certain nombre de réalités. Votre quinzième anniversaire est désormais passé, il est bien temps de quitter les habits de l'enfance, et vous commencerez bientôt à tenir des rôles officiels au nom de votre famille et de votre lignée. Il est donc temps que vous preniez conscience que votre sang divin n'est pas nécessairement un blanc-seing moral absolu. Votre précocité et votre intelligence me poussent donc à vous former progressivement. »

   Le précepteur Sheikah se retourna habilement vers la grande bibliothèque qui recouvrait de haut en bas un des murs de sa sobre salle de travail. Il saisit une clé qui ne le quittait jamais et fit coulisser un large panneau de bois sombre,  derrière lequel étaient abrités des livres plus anciens encore que ceux déjà exposés dans son antique collection. Il saisit alors un livre à la couverture cuivrée et couvert d'arabesques étranges et le déposa devant la jeune fille, de grandes lettres traçaient un titre en ancien Hylien : L'Epopée du Désert – Troisième Volume : Le Septième Roi. La princesse laissa échapper un sifflement à mi-chemin entre l'inquiétude et l'excitation.

   « Maître. Je ne comprends pas. Voilà près de quatre siècles que la détention ou la lecture de ces ouvrages sont passibles d'exécution publique. Leur simple évocation n'est réservée qu'aux cercles d'érudits de la citadelle. Mon père me laisserait donc lire ce que la couronne d'Hyrule qualifie d'immonde propagande fallacieuse depuis des générations ?

Sevnès prit le temps de sourire doucement, sans rien trahir de ses intentions.

- Mon élève, ma dame, Zelda, trente-quatrième porteuse de ce nom si glorieux, si les chroniques des Sheikahs sont justes, ne vous faites pas plus bête que vous ne l'êtes. Vous allez me faire confiance, et vous allez lire cet ouvrage, sans que nous ayons par ailleurs besoin de l'évoquer davantage. Vous comprendrez alors que le bien et le mal sur la terre d'Hyrule sont des notions souvent étranges, c'est le destin de ce monde dans sa globalité qui prévaut, les équilibres vont et viennent, et les créatures qui peuplent ces lieux sont obligées de s'élever pour les construire. Je vais maintenant vous laisser seule et sans instructions, vous allez lire cet ouvrage, je suis sûr que vos capacités en ancien Hylien sont bien suffisantes pour déchiffrer cette traduction directe de la langue du Désert, établie environ quarante ans après que le malin eut été scellé. »

   Le précepteur s'arrêta là et ne rajouta rien. Il se permit – geste rare et très éloigné de ses habitudes – un clin d’œil discret à la jeune fille. Il sortit sans un bruit de son bureau, abandonnant l'adolescente face au volume. La jeune fille demeurait abasourdie : que se passait-il ? Qu'était-elle supposée comprendre ? Son père était-il véritablement d'accord avec cette démarche ? La suite des événements la laissait désemparée et brûlante de questions, mais son insatiable curiosité reprit vite le dessus. Elle prit le livre tabou et secret dans ses deux mains, appréciant la texture granuleuse et chaude de sa couverture de cuir. Elle n'en croyait pas ses yeux, une dizaines de décrets royaux devaient réguler la circulation des anciennes œuvres Gerudo, plus encore concernant un récit de la vie du Seigneur du Mal. Fallait-il donc entrer dans la peau de ses ennemis pour les comprendre ? Elle tourna les premières pages sèches et jaunies et s'absorba dans la lecture de cette épopée qui lui laissait enfin voir un point de vue autre sur l'histoire du Royaume.

***

L’Épopée du Désert

Le Septième Roi

Chant I
Le chant qui voit le plus grand des Rois venir sur cette Terre et les Hyliens l'agresser
 
Le soleil très haut étreignait le sable,
Le jour où il vint, Roi inestimable.
Né d'une amazone, fils de la déesse,
Il porta, loin, du désert la caresse.
Fière Gerudo qui lis ces lignes :
Incline-toi donc, montre-toi digne !
Ici repose le chant très sacré
Du Roi qui laissa Hyrule brûlée.
Ganondorf Dragmire, c'était son nom,
Donna aux Nomades tout leur renom.

Les chiens d'Hyrule et leurs femmes soumises
Aujourd'hui règnent grâce à la traîtrise :
Loin de tous leurs mensonges arrogants,
N'oublie rien jeune fille, laisse le vent
Sur les dunes te dire comment ces lâches
Nous attaquèrent fort et sans relâche.
Nous dirons toujours l'Histoire perdue
De notre gloire illustre mais vaincue
Que ce puissant Roi, jadis, nous confia
Bien avant que toi, fille, tu soies là.

Ô déesse du désert je t'invoque :
Puisse mon chant traverser les époques !
Il naquit dans la cité des aïeux
Six Rois avant lui, le dernier d'entre eux.
Fort, pieux et attendu, il fut loué,
Partout célébré, prêt à triompher !
Deux sœurs magiciennes furent choisies,
Occultes et puissantes, guidant sa vie.
C'est donc qu'à peine sorti de l'enfance
Il avait déjà d'un Dieu la prestance.

Encore jeune, fier, tout indompté,
Dans la pyramide des voleurs-nés :
Il se saisit, brûlant, du noir trident,
Et sut les secrets d'un pouvoir brillant !
A l'Est, l'orgueilleuse Hyrule se levait,
Sûre de de son pouvoir, elle se dressait.
Le Roi du désert prit donc compagne,
Une fière rousse remplie de hargne :
Sa mère l'avait nommée Vateah,
Et c'est pour elle qu'il se consuma !

Chant II
Le chant qui voit le Roi assailli et humilié par les cruels Hyliens dans l'attente de sa vengeance

Pourras-tu jamais entendre ceci ?
Puissant, respecté et rempli de vie,
Il gardait et ses femmes et son amante,
Loin des rêves d'Hyrule, menaçante.
Mais par un funeste jour de malheur,
Vateah, beauté rouge de chaleur,
Fut, dans un défilé étroit, saisie,
Ils prirent son honneur, son corps, sa vie :
Guerrière farouche, humiliée et tuée,
C'est tout ce qu'Hyrule sut nous donner.

Tu écouteras, fille, ces perfides,
Te dire qu'il se dressa contre eux, avide.
Mais le sable, lui, conte une autre chose
Que tu ne pourras jamais lire en prose.
Ce Roi ombrageux, touché en lui-même,
Jura d'atteindre le pouvoir suprême,
Pour abattre le vent mauvais d'Hyrule
Qui laissa tout le désert incrédule.
Il défia donc ce peuple orgueilleux,
Harcela leurs villages sous leurs yeux.

Les fils de la Déesse, venus du ciel,
Jugèrent son arrogance très mortelle.
Dix longues années de guerre vinrent alors,
Défait malgré lui, dans le désert d'or,
De ces gens honnis, il fut le féal,
Guettant, dans l'ombre, un moment idéal.
Il lut beaucoup, solitaire et très froid,
Découvrit des textes et de vieilles lois,
Qui parlait d'un pouvoir d'or, d'un démon,
Qui soumit le monde par son action.

Alors, cerné par tous ces noirs desseins,
Il accueillit ce pouvoir en son sein
Pour la gloire et la survie du désert,
Pour son aimée, il prit une vie amère.
N'oublie jamais, jeune fille à peine née,
Le sacrifice du Roi vénéré.
Il récita donc des formules antiques
Face aux dunes, de nombreux mots mystiques,
Prêt à tout contre les Hyliens cruels
Dont le vent souffle, toujours perpétuel.


Chant III
Le chant qui voit le Roi se venger, commander la Terre et devenir égal aux Dieux

Des années, il mûrit son prompt retour,
Instruit par ce Dieu, Demise, qu'un jour,
Le pouvoir luisant des Déesses acquis,
Il régnerait sur tous ses ennemis.
Il sut, dans la grise maison du temps,
Qu'il y avait derrière la lame d'argent,
Ce pouvoir doré qui exécutait
Les vœux fous de celui qui le touchait.
Allié à un Dieu noir, plein de vengeance,
Il forgeait, patient, sa dure sentence.

Il terrifia donc la princesse élue
De sombres visions offertes à sa vue.
Celle-ci trouva un très jeune garçon,
Qui partit, sûr, avec abnégation :
Ouvrir le long chemin vers le pouvoir,
Dont elle s'imaginait vraiment savoir
Qu'elle pouvait l'utiliser à ses fins
Pour repousser notre Roi tout d'airain.
Finalement, ils ouvrirent la porte,
Et le seigneur humilia ces cloportes.

Ganondorf devint un Dieu très puissant,
Béni par le pouvoir d'or séduisant,
Sur lequel il avait mis ses espoirs.
Et ce Roi d'Hyrule, imbu de sa gloire !
Lui qui se croyait le héraut du bien,
Fut, bien vite, traîné avec les siens,
Sur un échafaud battu par la pluie,
Où il perdit sa prétentieuse vie,
Comme jadis avait été souillée
Vateah, rouge, jamais oubliée.

Sept années, lui, le septième, fit craindre
Les Gerudo à ce peuple malingre.
Eux qui se croyaient justes, forts et bons,
Avaient vu leur empire moribond
Dévasté, mis au pas dans un linceul,
Vaincu, mort de n'avoir pas laissé seules
Et fières et tranquilles les femmes nomades.
Ses vastes palais à colonnades,
Ne privèrent pas Hyrule de sa chute,
Fort punie de sa belliqueuse lutte !

Chant IV
Le chant qui voit le Roi subir le plus injuste des châtiments par les traîtres Hyliens avant son retour prochain

Mais les Dieux ne soutiennent pas toujours,
Ceux qui défendent la gloire et l'amour.
Face aux piques aiguës d'Hyrule affamée
Notre chance finit bien par tourner.
C'est donc, hélas, aidés par leur Déesse
Que le jeune garçon et la princesse,
Revinrent, menacèrent notre Roi
Qui restait, ici, dans le désarroi.
Car, vengé, ayant asservi le monde
Son âme restait coite et vagabonde.

Mais, malgré tout, laissé par le destin,
Puissant, terrible, ce Roi tout d'airain,
Par ce jeune homme trop vert fut occis,
Enfermé dans un froid monde sans vie.
Châtiment miséreux, honteux, terrible
Infligé par la morale inflexible,
Des ces sages, princesse et grand héros
Qui croient, chaque fois, voir le vrai du faux,
Eux qui donnent tant de vastes souffrances
Au nom de leur « bien » et de son engeance !

Alors bien sûr, on le couvrit de honte :
On raconta que, comme dans un conte,
Il n'était là que le mal incarné,
Mais le Malin peut-il vraiment aimer ?
Jamais donc, tu sais, on ne chantera
« Il protégea les siens, celle qu'il aima ».
Non, porteur de la volonté des Dieux,
Appelé là pour faire tanguer le jeu,
Il reviendra le faire basculer,
Dans ce monde toujours si alterné.

Toi, fille du désert devant ces vers,
Tu sais que les peuples dans l'univers
Vont, viennent et gouvernent les cœurs, les âmes.
Le juste, l'amour, le laid et l'infâme,
Toujours discutés, ils tournent et varient
Selon qui domine dans cette vie.
Quand Hyrule triomphante dira :
« Choisie des Dieux, éternellement là »,
Tu sauras que les Dieux donnent, rieurs,
Au hasard du bien, du mal, le bonheur.

***

Seule compte, fière Gerudo, grande rousse,
La force de vivre dans un monde où tout pousse !
Coule dans un flux farouche, brûlant, guerrier,
Loin de ces valeurs mouvantes, dites toujours fixées.
Notre gloire reviendra, prouvée à nouveau,
Sanglantes, vivantes et prêtes à vivre le flot.

***
Bien des années plus tard.

   Je me souviens de ce vieux maître. Bien sûr que je m'en souviens, j'y repense souvent aujourd'hui. Mon maître Sheikah, ou du moins, apparenté à eux, Sevnès. Qu'aurait-il fait lui, maintenant ? Alors, qui a raison quand le monde s'effondre ? Où est le juste et où va la gloire de cette famille régnante qu'on dit « choisie par les Déesses » ? De leur point de vue, de son point de vue, à ce Roi-démon du passé, nous sommes les méchants, nous sommes le mal. Comme nous, il est choisi par ces Dieux pour faire advenir quelque chose sur ce monde, nous ne savons pas quoi, un mouvement, un dépassement, une création et une destruction sans fin.

   Comment en vient-on à pactiser avec un démon ? Voilà une question que je ne me serais jamais posée toute seule si ces vieux écrits Gerudo n'étaient pas tombés sous ma main. Il était le mal, et cela me suffisait bien. Mais j'ai lu, j'ai su, j'ai du admettre qui j'étais, d'où je parlais, sans plus jamais pouvoir me draper dans la joie assoupie d'une justesse morale qu'on croit toujours défendre. Il revient désormais, et nous n'avons pas les armes pour lutter. Hyrule balance d'un coté et de l'autre, toujours menacée par le déséquilibre, alors je ne peux qu'être moi, me battre pour les miens, pour ce que je crois, rien ne viendra jamais définitivement couronner et absoudre mes décisions morales.

   Voilà, je suis face aux portes de ce temple où j'ai autrefois vu mon père faire tant d'invocations aux Dieux. Mais, pour une fois, je sais que les miennes seront entendues. Non qu'elles soient plus justes, ou plus en faveur du bien, mais les déesses d'Hyrule ont trop joué avec l'homme du désert, le mal immémorial sur lequel nous avons bâti notre légitimité. Il est revenu, et nous avons attendu le garçon tout de vert vêtu. Il n'est jamais venu. Cette légende aussi n'était-elle qu'un tissu de mensonges ? Maintenant, ce sont aux Dieux de redonner de l'équilibre à ce qu'ils ont façonné. Je sais, sans doute, que nous n'y survivrons pas. Mais, je ne sais plus rien, j'ai changé de vue sur ces choses, depuis mon adolescence obstinée et bienheureuse. Où est le juste ici ?

   « Déesses d'Hyrule ! Nous n'avons plus d'armes, nous n'avons plus rien à sauver, nous nous offrons à vous ! Déchaînez la tempête sur ce monde, scellez Hyrule, nous ne pouvons repousser le Malin, entendez-nous ! Faites tonner l'éclair, déchirez le ciel, versez vos larmes sur cette terre bientôt brûlée, si Hyrule ne peut être sauvée, ne la laissez pas entre ses mains. Le mal seul ne peut régner. Entendez-nous, par pitié, grandes Déesses dorées... »

   Je me tais. Ma suite n'ose pas faire un bruit. Savent-ils que nous avons fini ? Les Dieux sont responsables, mais je ne peux leur dire. Dehors, un vent mauvais souffle, des trombes d'eaux comme les nuages d'Hyrule n'en ont jamais données frappent les carreaux du temple du temps. Ma fille est sur une de ces hauteurs, une de celles que préserveront les Dieux, je l'espère. Si cela leur plaît, si cela agite le monde, je ne sais pas. Moi, Zelda, princesse d'Hyrule, je ne sais pas ce que veulent les Dieux, je ne sais pas où ils ont mis le mal, car j'ai vu par ses yeux, je ne le pardonne pas, je crois toujours que nous avions raison. Mais, puis-je le prouver ? Je ne crois pas.

La pluie tombe. Hyrule continue de balancer.

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