Forums de Puissance-Zelda

Communauté => Créations Artistiques => Littérature, Fictions => Discussion démarrée par: HamsterNihiliste le dimanche 29 août 2010, 15:55:08

Titre: K. ~ Partir et autres expériences.
Posté par: HamsterNihiliste le dimanche 29 août 2010, 15:55:08
Bonjour à tous, bonjour à toutes !

Bienvenue dans ma bibliothèque de passionné qui, pour l'instant, s'agrandit au fur et à mesure, en faisant en sorte que vous y trouviez votre compte ! Sachez que j'y indique aussi des liens pour vous faire découvrir mes textes sur d'autres sites, ainsi que des redirections pour les regarder sur l'Espace Fan. Attention cependant, toutes les balises n'y sont pas prises en compte, et certaines différences de forme à l'insu de ma volonté s'y présentent. Les originaux de mes textes sont donc ici, libre à vous !

N'hésitez surtout pas à commenter ce que vous voulez, c'est bien sur ce qui aide à avancer et qui est toujours agréable à recevoir quand la critique est bien formulée ! (100€ par commentaire lèche-botte.)

Sans plus tarder, je lève le sceau de ce Temple littéraire  ;)

•Nouvelles

•Mémoires d'un pot

Description : Vous êtes vous déjà demandé ce que pense un pot classique dans l'univers de Zelda ? Découvrez que la vérité n'est pas rose, même pour les objets. Apprenez aussi à vous méfier des apparences et à ne pas sombrer dans le matérialisme primaire. Bienvenue dans les mémoires d'un pot.

*


Je ne sais pas quand j’ai été créé.
Je ne sais pas vraiment où je me situe.
Mais cela n’a pas d’importance. Aujourd’hui ma vie se résume à trôner sur une étagère en bois de style post-Hylien, avec vue sur une cuisine et une fenêtre. Je n’ai pas à m’en plaindre.
Un autre pot, moins lourd, m’accompagne dans mon ennui. Il est orné de vaguelettes claires qui tournent tout autour de lui sur un fond bleuâtre. Je me suis souvent obstiné à chercher ce qu’il pouvait bien contenir. Un rubis ? Un objet précieux ? Des biens très chers à la famille qui le possède, comme moi ?
En effet, je contiens une relique qui contribue au succès de mes maîtres : Une représentation en or massif de la Triforce. De taille minime, elle est très rare et est leur objet le plus précieux. S’ils venaient à l’égarer, ils seraient entièrement perdus et sans le sou. Je suis si fier que l’on m’accorde autant d’importance de ma condition de pot et me dévoue de tout mon corps !

Récemment, un homme d’apparence royale est entré chez eux. Je n’ai pas pu comprendre ce qu’il a dit, lui et mes maîtres n’étant pas assez proches. Ils s’étaient retirés dans une suite, paraît-il remplie de coffres de valeur et de rubis, d’après ce que je comprends.
Mais imaginons un instant, si ce que je pensais n’était pas vrai ? Si cette famille se moquait complètement du pot dans lequel est conservé leur Triforce ? Si cette dernière n’était qu’un détail de leur monstrueuse richesse matérielle ? Je ne peux pas savoir.
Ils sont peut-être assez évolués pour prendre conscience que je ne suis qu’un pot, qu’un simple objet comme un autre ! Dans quel cas je suis heureux pour leur condition, même si je dois me sentir bien seul. Mais qu’importe, s’ils comprennent.

J’ai passé tellement de temps à écouter leurs conversations, à être spectateur de leur quotidien et de leurs actions. Même si je ne suis qu’un pot, je me sens déjà comme un membre de la famille. En ce moment ils n’ont pas l’air de vivre des moments faciles. Depuis l’entretien avec cet homme, leur ciel s’est peu à peu obscurci. Ils semblent à sec financièrement et leur relation s’en ressent.
Ils crient. Ils pleurent. Cela me rend triste. La tristesse ; un sentiment parmi ceux qui me permettent d’avancer. Un des rares sentiments qui m’animent. Que voulez-vous que je fasse dans cette existence ? À défaut d’actions et de préoccupations futiles, je cultive mon esprit ; Quoi de plus logique ?

Pourtant, je suis un pot. Je ne peux pas partager avec des humains. Ils sont trop loin de moi, et leur monde est trop proche. J’aimerais tant leur parler, leur dire ce que je pense d’eux, de moi, de leur monde. Mais hélas, piégé dans ma condition d’objet, cela semble impossible. Je ne crois pas aux miracles, jamais je ne me transformerais en un être doté de capacités physiques comme les hommes.  Beaucoup d’autres pots prétendent que c’est mieux. Quels lâches ! Si je pouvais changer de condition, tout irait mieux. Dans cet entourage, il n’y a personne non plus pour me comprendre. Ils sont trop fermés, personne n’est à l’écoute. Malheureusement je n’ai vu personne d’autre, sinon cet autre pot sur mon étagère. Nous n’avons absolument aucun intérêt en commun. Il est ridicule. Je dois changer, découvrir d’autres objets qui me correspondent. Quitter cette existence insipide.
Il me faut aller là-bas.

Il y a tant d’endroits si beaux sur Terre. Je me transporterais de déserts de glace en terre de feu, je parlerais aux volcans, je chanterais avec le vent ! J’en rêve déjà.
Mais je rêve trop.
Je suis coincé dans cette vie minable, entouré de minables. Je n’ai plus qu’à attendre. Je ne sais même pas quoi attendre.
C’est dommage ; j’ai du potentiel, je me sens si lucide. Mais au fur et à mesure que je parle avec vous, je doute de plus en plus.
Moi qui pensais me libérer... Ça n’a pas de sens. Je n’écris plus pour personne. Puisque le monde se fout de moi.


Il y a quelques jours, un jeune homme tout de vert vêtu est venu ici. Il paraissait si sage et plein d’espoir, prêt à s’élancer dans la vie. Il nous a égayé pendant quelques temps, moi et le grand pot. Malheureusement il s’est soudain élancé contre l’étagère, et le pot de la Triforce a qui appartenait ces écrits est tombé. Il est définitivement cassé.
Il m’a demandé malgré tout de léguer cette oeuvre au monde. Je suis si triste maintenant. Si j’avais su, je l’aurais aidé. Mais il est trop tard, et qu’importe : Je ne suis qu’un pot.


*

* Lire aussi sur l'Espace Fan * (http://fans.puissance-zelda.com/fanfics/fic.php?f=61)

•Ne rougis pas

Description : Link ayant dépassé beaucoup d'épreuves, il sillonne librement la mer en profitant pleinement de ce qui l'entoure. Vivant selon les aléas du temps, il va faire la rencontre d'une nouvelle femme qu'il avait aperçu et avec qui il avait vécu une passion muette. Bienvenue dans un monde où l'on peut apprendre à prendre sur soi et à rester lucide en Amour.

* Lire sur cette bibliothèque * (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg313582.html#msg313582)

* Lire aussi sur l'Espace Fan * (http://fans.puissance-zelda.com/fanfics/fic.php?f=62)

•Game Over

Description : Nouvelle courte et brutale écrite pour le thème de la Chute d'Hyrule du concours de PdC. Œuvre Baroque et troublante, dix ans après Twilight Princess, où un Link laisse éclater sa révolte après des années à avoir subi les autres. Faisant régner l'angoisse et la destruction imminente, bienvenue dans une chute qui ne laisse pas de place à l'affectivité.

* Lire sur cette bibliothèque * (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg315251.html#msg315251)

•Il part

Description : Nouvelle un peu gaie et un peu triste écrite pour le concours de Noël de John Craft. Un jeune homme un peu désespéré qui aime bien Téléphone, la Vodka, l'amour, et son pote Rodolphe, se prend pour le Père Noël mais.

* Lire sur cette bibliothèque * (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg323065.html#msg323065)

•L'été

Description : Monologue d'un fou qui chasse la lumière et qui vit heureux un éternel hiver, ou comment comprendre le regret d'avoir été assassin du temps perdu. Mais puisque c'est l'été, soit. Bienvenue dans un été où vivre libre et seul vaut peut-être ou peut-être pas autant que se résigner.

* Lire sur cette bibliothèque * (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg359775.html#msg359775)

•Un peu de fantaisie

Description : Parodie d'heroic-fantasy, avec des vrais morceaux d'emphase inutile, des vrais héros blonds aux yeux bleus, des vraies princesses elfiques sensuelles, de vrais princes imbus de leurs personnes, de vrais ennemis faibles à combattre jusqu'à l'écœurement et des vraies péripéties épiques. Vraiment ?

•Première partie :

* Lire sur cette bibliothèque * (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg385749.html#msg385749)

•Deuxième partie :

* Prochainement terminée et publiée *

•Deus Sex

Description : Nouvelle écrite pour le Thème I, Enfance, du Concours Croisé Littéraire. Un enfant, peut-être le mien, peut-être le votre, peut-être vous, peut-être moi, entend que la fin du monde approche parce qu'à la télé ils l'ont dit parce que papa il l'a dit et parce que papa il crie contre maman. Ou en tout cas, de ce qu'on en raconte. Car tout est relatif.

* Lire sur cette bibliothèque * (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg389796.html#msg389796)

•Alpha & Omega

Description : I am Alpha and Omega, the beginning and the end, the first and the last. C'était ce qui trônait sur des livres, s'ils existaient encore. Avant. Avant les champs de ruines et les ruines de folie. Nouvelle écrite pour le Thème II, Musique, du Concours Croisé Littéraire désormais annulé.

* Lire sur cette bibliothèque * (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg389823.html#msg389823)

•Mehr Licht!

Descritpion : Peut-être la dernière nouvelle de son genre, écrite avec sa forme, ses mots et ses lettres aussi sibyllines que celles de la bibliothèque fictive littéraire. Écrite de janvier à avril pour le Prix du Jeune Écrivain en Langue Française, publiée ici à la réception de la fiche de lecture, critiquant justement ce manque de clarté, qui demande au lecteur de crier à son tour Mehr Licht!. Le mythe de l'incendie d'un bibliothèque, d'un passionné, d'un passé, où ce qui est à la terre retourne à la terre de. Quelque part en Irlande.

* Lire sur cette bibliothèque * (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg437917.html#msg437917)

•Chapitrées

•Misanthropie, mon Amour. [Terminée.]

Description : Passé l'univers idyllique de héros réputés, leurs enfants vont découvrir ce monde livré à la bêtise humaine qui cherche plus que jamais à satisfaire sa petite personne au dépend de valeurs pérennes. En quête de repères, d'espoir, et d'exemples, ils vont vivre bien plus qu'un simple voyage initiatique. Combat entre l'affectivité et l'intelligence, entre l'individualisme et la communauté, voici une expérience dont on ressort transformé tant elle est riche. Bercée par des références musicales fortes de sens, bienvenue dans un monde où la littérature est reine.

* Lire sur le site adéquat * (http://www.pokebip.com/pokemon/index.php?phppage=membres/fanfics/affichage-fanfic&f=14050)

•Origines [Terminée]

Description : Les Origines et la recherche de la vérité de Link, devenu Héros au destin légendaire. Mais est-ce vraiment une œuvre du destin ? En milieu troublé, il naît certes dans des circonstances sombres et triste, où son entourage a voulu tout savoir. Bienvenue dans une histoire dont tout le monde connaît la suite ; mais pas la fin.

*

Chapitre I : Termina (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg316451.html#msg316451)
" Il existait un temps où l'utopie était réelle. "
Chapitre II : Origines (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg319480.html#msg319480)
" Si je venais à mourir...Tu m'oublieras. "
Chapitre III : Aube (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg320725.html#msg320725)
" Vieille dague ! Toi, je te garde. "

*

* Lire aussi sur l'Espace Fan * (http://fans.puissance-zelda.com/fanfics/fic.php?f=68)

•Thanatos, mon ami [Terminée.]

Description : Dans un monde absurde où la raison se perd, un Link schizophrène cherche une des réponses à une des questions qui anime son espèce, à savoir pourquoi, sans savoir pourquoi. Des concepts viendront rire de lui et d'eux-même, l'auteur viendra lui-même s'interroger sur sa condition et celle de son écriture, si l'on peut appeler les choses comme elles sont. Bienvenue dans un monde désincarné où la liberté peut triompher.

*

Chapitre 0 : Ceci n'est pas un prologue (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg320812.html#msg320812)
" La raison, c'était bien son principal ennemi et son principal allié. "
Chapitre  (-12 + 13 ) : Lis tes ratures (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg323060.html#msg323060)
" L'amour ? Ça veut dire quoi l'amour ? "
Chapitre Deux : À la recherche des peines perdues (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg328513.html#msg328513)
" -Repens-toi.
-Oui, tu as raison, je vais me rependre. "

Chapitre après le deuxième : C'est nul (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg333083.html#msg333083)
" -Mon Dieu pardonnez-moi, j’ai créé des monstres. "
Chapitre 3,14 : Une aventure épique selon les journaleuhs (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg337990.html#msg337990)
" Ma Raison ! Je veux ma Raison ! "
Chapitre 42 : 47 (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg345987.html#msg345987)
" Paradoxe. "
Chapitre K. : Le sens de la vie ? (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg351186.html#msg351186)
" … "

* Lire aussi sur l'Espace Fan * (http://www.puissance-zelda.com/fans/fics/74-Thanatos_mon_ami)

•Memento Mori, Memento Vivere. [Terminée.]

Description : Une fausse histoire dans laquelle des hommes naissent et des hommes meurent. Une fausse histoire dans laquelle tous sont appelés " hommes ". Une fausse histoire dans laquelle la liberté est moins qu'un rêve. Une fausse histoire dans laquelle des héros et des lâches se poignardent et se tirent pour trois triangles d'or scellés dans un lieu saint. Une fausse histoire dans laquelle le Temps est né et vivra. Une fausse histoire d'un auteur qui aime et sait écrire, qui prétend que la plume et la dague craquent l'encre noire, qui veut marcher sur les traces de ses précédents textes et qui aime la folie, le temps, et la misanthropie, parce qu'il faut particulièrement être fou pour écrire, et qu'il faut particulièrement écrire pour être fou. Une longue et importance expérience, jouée par des musiques, relatée par des auteurs et livres fictifs, divisée en trois parties, et, accessoirement, basée sur l'histoire de Zelda dont on connait la suite ; mais ni le début ni la fin.

*

Prologue : Alpha (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg392717.html#msg392717)
" Naître dans un monde commencé sans le temps et fini par le temps. "

Première et dernière partie : Le temps des dagues

I : Éros (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg395562.html#msg395562)
" Tu penses à l'avenir ? "
II : Vox Dei (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg401816.html#msg401816)
" Mais, faisant fi de mon cœur, je pris le monde en main. "
III : Le chœur de la superbe (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg404525.html#msg404525)
" Appelez-moi Naæviî. "
IV : Hermès (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg406702.html#msg406702)
" J’attendrai vite avant que cette terre ne se déchire. "
V : Assassins du temps perdu (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg410085.html#msg410085)
" Il y a des choses dans ce monde qui ne sont pas normales. "
VI : Morituri te salutant (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg414878.html#msg414878)
" Alors si je n’ai pas le droit, je prendrai le gauche. "
VII : Dans les champs des violeurs et violées solitaires (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg417607.html#msg417607)
" Quand je t'aurai quitté je rentrerai chez moi, je me laverai les mains, et je voudrai dormir. "
VIII : Alea jacta fuit (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg430032.html#msg430032)
" Alors choisis, Ikau ; c'est la guerre ou la paix, c'est le cœur ou le cœur. "
IX : Golgotha (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg441698.html#msg441698)
" Il n'y avait plus rien. "

Épilogue : Oméga (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg441699.html#msg441699)
" Laissez les hommes libres de vivre ou de mourir. "

* Télécharger le texte intégral en Pdf * (http://www.mediafire.com/view/?0m10viyglfphre4)

*

•Partir. [Partir.]

Description : Des extraits, un fragments, des bribes de Partir. qui n'appartiennent qu'à ma volonté, comme on écrirait une écriture automatique et un texte que l'on a toujours eu envie d'écrire, parsemé de citations qu'on a voulu placer, de thèmes qu'on a voulu écrire, de rêves qu'on a voulu réaliser et de réalités qu'on a voulu rêver. Maintenant c'est grand. Maintenant c'est mon bébé et mon avenir. Maintenant c'est une pièce. C'est du théâtre. C'est comme ça.

1 Juin - 1 Juillet 2012. (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg415432.html#msg415432)
Extrait : 1 Juillet - 31 Août 2012. (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg422578.html#msg422578)
Extrait : 31 Août 2012 - Père Fille. (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg425661.html#msg425661)
Suite - Père Fille. (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg426248.html#msg426248)
Père Fille - Point au 19 Octobre 2012. (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg429923.html#msg429923)
" Il faut que l'herbe pousse ". (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg435302.html#msg435302)
" Si mi la ré sol do fa " (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg436512.html#msg436512)
" Pauca Meae " (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg440658.html#msg440658)
" On s'habitue c'est tout " (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg441536.html#msg441536)
" Ne plus parler qu'à son silence " (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,5543.msg445209.html#msg445209)

Partir. — Les enfants du temps perdu. (http://www.tumblr.com/blog/hamsternihiliste)
*

Fin.
Titre: K. ~ C'est l'été
Posté par: Yorick26 le dimanche 29 août 2010, 16:20:35
Ah me voilà ! J'ai vu ton annonce 100€ par commentaire, alors me voilà.

Comment veux-tu que l'on procède. J'aimerai ne pas trop t'assourdir de commentaires du premier coup. Je ne suis pas le meilleur qualifié tout de façon pour ça.... Je suis sûr que notre très cher Prince du Crépuscule saurait très bien s'en charger.Et puis il faut quand même signaler qu'assourdir par des commentaires écrits se révèlerait difficile. Mais passons......... Il ne faut pas que je commence avec trop de commentaires positifs sinon tu risquerai d'être déçu quand je (ou un autre) commence à être en panne. Il ne faut pas tomber dans l'excès de commentaires négatifs, cela ne te pousserait pas à continuer. Car voilà mon but : que tu continues !

J'adore ce genre de petites nouvelles, de petits textes tout à fait décalé. Cela me rappelle l'histoire de la théière rose et du chocolat que j'ai écrit. A la fois dans le comique et dans l'univers zeldaesque. Je ne peux qu'approuver. Moi j'aime. C'est court, c'est mignon, c'est sympa, tu m'as l'air sincère. On comprend tout à fait dans quel dilemme, dans quelle mésaventure se retrouve ce grand pot. Mais une question me turlupine : Comment le petit pot a-t-il survécu à la catastrophe ambulante aux collants verts ? J'avoue que je l'imaginais posé à côté de son compagnon. S'il n'y a que le grand qui chute et qui se brise, pardonne moi l'expression, mais c'est un manque de pot.

Néanmoins j'aime bien le style. C'est simple et clair (comme la fermeture ... pathétique :mad: ). Ca reste très passif, mais du coup on peut explorer toute la psychique de ce pot. Et ça j'aime. Question, réponse, doute, interrogation, angoisse, encore des questions ... Tout ce qu'il faut pour faire de ce pot un vrai personnage.
Le texte est court et selon moi ça pousse au commentaire. Donc BIG GOOD POINT  si tu veux commencer ^^ !
Ce qui est moins bien, ce sont les fautes d'orthographe. Je ne suis peut-être pas un expert (et je ne sais combien ce sont glissées dans mon commentaire), mais j'en ai vu plusieurs. Les voici :

- confusion entre futur et conditionnel :
"Je me transporterais de déserts de glace en terre de feu, je parlerais aux volcans, je chanterais"
- "si ils comprennent" -> "s'ils comprennent"
- "peu à peut"

Voilà ce dont je me souviens. C'est tout... pour le moment  :yeah: !
Titre: K. ~ C'est l'été
Posté par: HamsterNihiliste le dimanche 29 août 2010, 16:40:09
Heureux de voir que tu as su sonder tout ce que j'y ai évoqué, je me sens moins seul ! Ne t'inquiètes pas pour les commentaires que tu veux poster, je suis ouvert Même si j'appréhende la visite de PdC :noel:

Par rapport à sa chute, je peux trouver une excuse en prétendant que vu la taille, le grand pot prend tout l'espace sur l'étagère : Donc au moindre coup, il tombe directement, alors que le petit a plus de place pour bouger, rouler et retrouver l'équilibre. Et j'aime beaucoup tes jeux de mots laids et Gad Elmaleh ( mais pas Secret Story ) enfin bref passons.

J'ai corrigé les fautes, sauf pour le conditionnel : Car en effet, c'est du conditionnel, le pot imagine ce qu'il pourra faire s'il s'évade, tellement il doute et il veut changer de "vie". De plus en plus on croît dans la passivité, m'vois-tu.
Titre: K. ~ C'est l'été
Posté par: astrid le mardi 31 août 2010, 12:15:29
Salut Hamster ! J'ai lu "Mémoires d'un pot" que je trouve très originales et agréables à la lecture. C'est vrai quoi, que pense un pot du haut de son étagère ? Le texte n'était ni trop long, ni trop court ; franchement c'est du tout bon boulot ! Bah, il ne me reste qu'à lire "Misanthropie, mon Amour." et je m'y mettrai bientôt, promis !
Bonne continuation !  ;)
Titre: K. ~ C'est l'été
Posté par: Suijirest le mardi 31 août 2010, 15:54:12
Effectivement, la taille du texte est très bonne et le contenu est facile à lire. J'avoue avoir lu en m'attendant tout du long à ce que le pot soit cassé par Link ^^".

Une très bonne nouvelle, un bon texte vient de paraître ! (moi aussi je sais jeudemoter minablement O:-) )
Titre: K. ~ C'est l'été
Posté par: Drothgar le samedi 04 septembre 2010, 14:13:16
J'ai beaucoup aimé cette petite nouvelle, elle m'a donné envie de faire une petite razzia de pots...
Peut-être que je trouverais la triforce  ;)
Titre: K. ~ C'est l'été
Posté par: Liam le samedi 04 septembre 2010, 17:18:01
J'ai bien aimé cette nouvelle. Une longueur parfaite, un style simple et agréable à lire. L'histoire est clairement sympa, et bien que la fin soit prévisible, la façon dont elle est amenée à nos yeux et écrite en fait un incontournable de fanfics mélangeant une ambiance triste, dramatique mais également comique.

Tu comptes faire d'autres chapitres? Parce que dans le cas contraire, si la prochaine nouvelle repose sur une autre histoire des faits divers d'Hyrule, il faudra que tu changes le titre de ta fanfic sur le site Fans PZ :p
Titre: K. ~ C'est l'été
Posté par: HamsterNihiliste le samedi 04 septembre 2010, 17:29:27
Je suis en train d'en écrire une nouvelle, je la publierai sûrement demain. Merci beaucoup pour les commentaires, ravi que la première vous plaise ! Je n'ai pas à me comparer à mon pot dans ce cas  ;)

Weekly : Non, elle est en un seul chapitre, et je ne sais pas comment m'y prendre pour le signifier sur l'espace Fan ( La marquer comme terminée en l'occurrence ). Et également, comment je peux diriger de l'espace fan à ce topic, via "Commenter sur les forums" ?
Titre: K. ~ C'est l'été
Posté par: Nico le dimanche 05 septembre 2010, 16:41:49
Citer
Non, elle est en un seul chapitre, et je ne sais pas comment m'y prendre pour le signifier sur l'espace Fan ( La marquer comme terminée en l'occurrence ). Et également, comment je peux diriger de l'espace fan à ce topic, via "Commenter sur les forums" ?
Enfin bref, voilà


Je m'en suis occupé.

N'hésite pas à me contacter pour des soucis comme ça.
Titre: K. ~ Ne rougis pas
Posté par: HamsterNihiliste le dimanche 05 septembre 2010, 21:27:49
Bonjoir à tous ! En cette période de rentrée et propulsé par de bonnes nouvelles, je me suis senti inspiré et vous livre une nouvelle nouvelle intitulée Ne rougis pas, largement bercée par une inspiration tirée d'Hugues Auffray.

Plusieurs années après The Wind Waker, voici un Link libéré et accueillant le monde tel qu'il vient. Il sera confronté à une ancienne connaissance, personnage de second plan, certes, mais dont l'histoire m'a touché. Si vous aussi, vous pourrez apprécier cette fable dans la veine de Mémoires d'un pot. Une MàJ du premier post pour en savoir plus, bonne lecture et à bientôt !

*

•Ne rougis pas

Comme depuis des années, le Héros du Vent sillonnait l’océan à bord de son fidèle bateau à voile. Depuis longtemps il avait quitté ses pied-à-terre et s’était libéré de tout enfermement, était libre et pouvait partir où il voulait dans l’infini. Il avait laissé derrière lui son passé et était maître de tout grâce à sa baguette, son âme de musicien sans laquelle il perdrait toute son humilité face à la nature. Le voyage était calme et magnifique, et l’horizon s’ouvrait à perte de vue. Link vivait pleinement.

Un jour, pour une raison quelconque, il ne put reprendre le contrôle de son navire à temps et se vit propulsé à toute vitesse droit devant. Son sort semblait être celui de finir écrasé contre une île. Restant calme malgré tout, il sortit sa Baguette et voulut calmer la force du vent, mais il était trop tard : Avant d’avoir terminé sa mélodie, le choc contre le récif l’éjecta loin du Lion Rouge.
Link reprit tant bien que mal ses repères, et s’évanouit finalement sur le rivage de l’île.
Revenu à ses esprits, son premier réflexe fut de rechercher son précieux objet sur et autour de lui.
-Ou est-elle ? Où est ma baguette ? Mon âme ! cria-t-il effrayé de ne pas la revoir.
Ne sachant pas où il se situait, il fit le tour de l’île et chercha dans l’eau pendant un temps effroyablement long.

Ayant finalement retrouvé son précieux grâce à l’aide du Lion Rouge, il rejoint le rivage et jeta un oeil sur l’île. Elle était grande, couverte d’herbe et parfaitement entretenue. Des plantes étaient cultivées autour, près de l’eau, et évoquaient l’autarcie les habitants. Au milieu, un trou creusé entouré d’une clôture permettait à certains de se baigner en sécurité dans l’eau, purifiée par une machine malheureusement bien visible.
Au fond s’élevait un immense manoir luxueux, qui frappait la vue des marins à plusieurs kilomètres. Couvert de fenêtres donnant sur un intérieur riche et doré, il correspondait à une richesse non négligeable. Link fut déçu de voir cet univers si terrestre, bien qu’esthétique qu’il avait voulu quitter, et se demandait bien ce qu’il pouvait renfermer.
Alors qu’il avançait d’un pas sur l’île, une femme ouvrait la porte du manoir. Link resta immobile, lui signifiant sa soif de découverte.

Elle avança peu à peu, et examina l’Hylien d’un oeil curieux et surtout snob.
-Vous cherchez quelque chose ?
-Euh, non, j’ai retrouvé ce que j’avais perdu, merci, répondit Link.
-J’en suis ravie, mais le fait est que vous vous trouvez sur ma propriété, affirma la femme d’un ton terriblement mondain.
-Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elle est magnifique !
-Certes. Je l’ai acquise depuis mes vingt ans. Dans ma jeunesse, j’ai travaillé dans une île loin de ma terre natale, et grâce à mes efforts, j’ai réussi à m’acheter cette sublime demeure. Elle me rappelle tant la maison dans laquelle j’habitais lorsque j’étais jeune... J’étais la plus belle et la plus riche fille de ma ville !
-Mais...
Elle continuait sans le laisser parler.
-Lorsqu’un monstrueux oiseau aux plumes dorées m’a...
-T’a enlevé et amené jusqu’à une Forteresse Maudite, continua Link. C’est alors qu’un jeune homme sachant contrôler le vent s’y est infiltré et t’as sauvé de cette infâme torture.
-Pas du tout.
Link était atterré.
-Mon père a dépensé toute sa fortune pour me libérer d’ici. Une fois réceptionnée, je me suis rendu compte avec effroi que nous n’avions plus rien pour vivre. J’en étais réduite à vivre dans la rue...
-Et à voler des rubis.

À cet instant, le Héros montra sa Baguette du Vent qui avait permit sa réputation et ses expériences.
-Link ! s’écria-t-elle en l’embrassant.
-Mina, soupira-t-il. Qu’es-tu donc devenue ?
-Riche, tu ne vois pas ?
-Si. Malheureusement. C’est pour ça que tu es partie et que je n’ai jamais pu te revoir ? C’est pour ça que tu as voulu quitter cette existence que tu détestait ?
-Oui, et je suis bien mieux ainsi. Comme avant !
-Comme avant. Je t’aimais comme avant. La première fois que je t’ai vue, dans ta luxueuse demeure, tu m’impressionnait tellement, tu paraissait si inaccessible. Je savais qu’un jour je pourrais t’atteindre avec ma gloire, mais je suis sorti résigné. Puis, lorsque tu travaillais chez Naglagla, j’ai pu voir ton naturel, je t’ai réellement compris. C’est comme ça que je t’aimais, tu n’avais plus de nom d’apparat, de superflu ; tu pouvais très bien t’en sortir. Tu as recommencé à zéro. Comme avant.
-Pfff...C’est toi même qui voulait m’aider à m’en sortir. Tu m’as aidé à prendre conscience et à gagner ma vie normalement. Alors c’est à cause de toi si je suis ainsi aujourd’hui !
-Mais tu n’étais pas obligée de te laisser pervertir par cette société mercantile et matérialiste ! Regarde-toi. Tu es devenue une pauvre riche, sans aucun naturel et totalement fermée. Tu peux te ressaisir ! Tu peux être la Mina que j’aimais !
-Je peux peut-être, mais je ne veux pas.
-C’est sûr que tu es bien plus à l’aise ici en ne manquant de rien et en te laissant entretenir qu’en étant libre, en naviguant en plein cœur de la nature ! Regarde-moi ! Je me porte très bien, et je vis selon le vent et selon mes désirs, c’est tout ! Je m’arrête sur différentes îles, j’vais boire une verre et me sustenter aux tavernes, je rencontre énormément de personnes, sans plus me soucier des relations que je cultiverais. Mais cela n’a jamais été pour toi ?
-Non. Tu mènes ta vie, je mène la mienne. Nous n’avons rien à partager, Link.
-Tu ne mérites pas d’être aimée, affirma-t-il d’un ton méprisant.

Puis, un homme arriva près d’eux, par une porte sur la gauche du manoir. Mina ne s’en soucia guère. Link le regarda quelques temps, puis Mina. Mina regarda Link, puis se tourna vers l’homme. L’homme regarda Mina. Link le regarda. L’homme le regarda. Mina regarda Link. Link ne regarda pas Mina. L’homme retourna à ses activités.
Sans rien dire, sans regard, Link s’en fut. Il n’avait plus rien à penser de Mina et de son passé, il ne chercha pas à savoir qui était cet homme ; le mari ? Un serviteur ? Un ennemi ? Il avait revu un femme qu’il aimait, mais cette femme ne l’aimait pas ; lui non plus.

Et c’est le cœur le plus léger du monde qu’il tourna le dos à ses regrets.

*
Titre: K. ~ C'est l'été
Posté par: Drothgar le dimanche 05 septembre 2010, 21:39:34
C'est beau.

Mais c'est triste !!

 :sad:
Titre: K. ~ C'est l'été
Posté par: Synopz le dimanche 05 septembre 2010, 21:54:52
Je viens de lire cette nouvelle et... J'aime beaucoup ton style d'écriture seulement il y a une chose qui me gêne : c'est la manière dont s'exprime Link. Je le vois mal parler d'une manière aussi soutenue ( il va se "sustenter" dans les tavernes ?  ;) ) et aussi ( je vais te faire un reproche sur lequel je devrais moi-même me corriger ) je trouve ça un peu trop court ! Quelques lignes en plus n'auraient pas été de trop !
Titre: K. ~ C'est l'été
Posté par: Liam le dimanche 05 septembre 2010, 22:16:41
Link...
Epic Fail :noel:

Plus sérieusement j'ai trouvé intéressante cette vision réaliste que tu évoques, comme si les mots et les mésaventures qui touchent les hommes n'affecteraient en rien leur vision du monde et leur façon de vivre. Mina a toujours été une jeune noble et le restera, Link découvrit sa passion de marin et ne la quittera plus. Oui, si on voit les choses de cette manière (je ne la partage pas et en ce qui te concerne c'est une nouvelle ce n'est peut être pas ta vision des choses en réalité), il est évident que ces deux-là n'ont rien à faire ensemble. Je t'avouerais quand même qu'en tant que fan, c'était mon couple préféré de TWW avant Scaff et Médolie, bref ton récit m'a... blasé d'une certaine manière ^x^

Mais sinon le style de l'écriture est toujours aussi bon, la scène des regards est probablement la plus intense, y'a ptet' cependant quelques maladresses qui ont perturbé ma lecture, relis-toi sait-on jamais. Puis en dehors des thèmes évoqués, commentons l'histoire en général... Faire parler Link c'est toujours un gros risque, surtout avec les phrases que tu lui fais sortir : "Mais tu n’étais pas obligée de te laisser pervertir par cette société mercantile et matérialiste !"... *BAM!* Non sur ce coup j'ai pas été convaincu, même s'il a beau être plus vieux. J'ai pas trop compris non plus comment le Lion Rouge aurait pu l'aider à retrouver la Baguette du Vent... c'est un bateau et le Roi est mort... Vive le Roi ! *crève*
Sinon niveau tournure du scénario, j'ai été étonnement Powned, au début je croyais que tu parlais de la Propriété de la Maîtresse de Mercantîle, et bah non c'était Mina en fait, chapeau j'ai rarement été aussi surpris de découvrir le personnage parce que je m'attendais à un autre (même One Piece m'a jamais fait cet effet c'est dire... comment ça c'est pas comparable? v.v)

Ouais puis sinon la longueur pour moi c'est toujours aussi bon, c'est court mais voilà si t'as rien d'autre à leur faire faire et dire faut pas se pousser à rajouter des lignes. Pour conclure je dirais que Mémoires d'un pot reste à l'heure actuelle ma préférée, et quand bien même je viendrais pas dénigrer la qualité de cette nouvelle, je fut surpris avec joie que tu traites ce personnage... mais tu ne l'as pas traité comme je l'aurais personnellement souhaité, mais comme dit huit mots plus tôt, c'est purement personnel, alors reste accroché à ta vision des choses et bonne continuation, qui sait d'ici Vendredi prochain j'aurais autre chose à me mettre sous les yeux :nlyeah:
Titre: K. ~ C'est l'été
Posté par: John Craft le dimanche 05 septembre 2010, 22:19:56
J'approuve un peu Synopz au niveau de la longueur... Enfin, plutôt, du rythme : c'est trop rapidement raconté. Les évènements s'enfilent trop vite, ne leur laissant pas le temps d'être assimilés, écoutés, reçus.
Je ne suis pas dérangé par le style de Link -sa façon de parler m'apparaissait comme celle que tu lui prêtais, simplement-, mais plus par son comportement, de nouveau un peu trop... "OUH"esque, si j'puis dire, comment expliquer... un peu trop fier ? Pas forcément ce mot, mais quelque chose dans ces eaux, mes excuses pour ma perte de vocabulaire.
Quelques petites fautes par-ci, par-là, rares et acceptables.
Pas assez de description -enfin... décrire -comme son étymologie l'indique : "loin de l'écriture", qui s'en éloigne, donc qui ralentit un peu les choses... et tu ralentis pas assez, tu prends pas assez le temps.
Malgré tout, cette idée de créer cette relation entre Mina et Link est très jolie, et j'avoue avoir toujours été touché par l'histoire de cette fille. Donc malgré mes critiques qui ne viennent que de mon impudence "moi y en a savoir eh l'aut' eh", je te dis "bravo", purement.
Titre: K. ~ C'est l'été
Posté par: HamsterNihiliste le lundi 06 septembre 2010, 18:55:23
Tout d'abord John, sache que j'aime beaucoup la clarté de tes propos ! Ironie.
La raison de la rapidité est que je cherche un bonne longueur en tenant compte du scénario et de ce qui peut tenter le public à rester la lire, donc le goût peut varier et je vais pas non plus m'adapter pour tout le monde.
M'adapter ? Mouahahahah, pourquoi serait-ce à moi de m'adapter, espéce d'humains ?

Bref, il n'y avait rien d'autre à raconter et cette anecdote ponctue la vie de Link comme une autre, il réussit à en tirer les enseignements et repart dans une histoire qui n'a plus d'intérêt. Quant à ce langage "soutenu" évoqué par Synopz, ce n'était pas le but recherché  :/ Link parle le plus naturellement possible et justement, il souligne bien la différence à Mina "J'vais me sustenter aux tavernes, et c'est tout !" pour lui montrer qu'elle peut s'adapter à sa vie. Mais c'ay peut être parce que j'ai moi-même une façon de parler assez travaillée Celui qui dit maniérée et qui sous-entend quelque chose je l'empale sur mon grappin., donc elle se ressent sur mon écriture mais il n'y a à voir en aucun cas que Link parle en étant trop sur de lui, au contraire. À l'inverse d'autres fics comme Misanthropie ou la fic-concours d'ailleurs, que je vous laisserai découvrir.

Pis j'avoue, cette fic est très personnelle donc certaines choses n'engagent que moi, mais vous pouvez y voir ce que vous voulez bien sur !

J'aime bien me justifier, j'aime bien avoir un ego surdimensionné et j'aime bien Hugues Auffray, oui oui  :noel:
Titre: K. ~ C'est l'été
Posté par: John Craft le lundi 06 septembre 2010, 19:31:00
Ah nan mais t'en fais pas, si t'es content de ton texte et que tu peux m'expliquer sans t'énerver pourquoi, t'as rien à r'toucher. Mon opinion r'gard' que moi, et même si tu m'dois obéissance pour mon talent et mon génie, tu as entièrement raison quand tu préfères t'en tenir à ton propre goût.
Fais gaffe à toi si j'te croise dans la rue, c'tout.
Titre: K. ~ C'est l'été
Posté par: Serkan le vendredi 10 septembre 2010, 23:44:33
Pour ma part, je ne suis pas un professionnel et j'ai rarement lu de Fanfictions. Ceci dit j'ai tout de même déjà lu des nouvelles et les ai étudiées (Zola, Matin brun,...).
Je trouve que tes récit sont fluides, facilement compréhensibles et agréables à lire, moi qui ne connaît pas très bien ce type de lecture, ai été étonné de prendre assez de plaisir à lire tes deux nouvelles.

Pour ce qui est de "Mémoires d'un pot":
J'ai trouvé l'idée intérressante. Consacrer un texte aux objets dont on fait le moins attention dans la vie quotidienne, je trouve cela peu commun, et ça en fait un avantage à mon goût. Le rapprochement avec la série Zelda est certes minime, mais suffisant. Je pense que je n'aurais pas apprécié d'avoir un texte entièrement à la sauce Zelda sous les yeux dans ce contexte. Pour la longueur du texte, je suis assez satisfait, sur cette nouvelle, plus de texte n'aurait servit à rien. Les détails sont assez nombreux et explicites sans pour autant être gênants.

Pour ce qui est de "Ne rougis pas":
Je n'ai pas été très fan. L'idée est bonne, le récit l'est aussi mais étant persuadé que Link restera toujours célibataire, sans sentiments amoureux et qu'il ne parlera jamais, je n'ai pas tellement apprécié. Ceci dit, je me doute bien qu'on ne peut pas faire interagir Link si il ne parle pas, dans une Fiction. En revanche, j'apprécie le fait qu'il soit libre de ses mouvements et qu'il lui arrive une mésaventure en bateau. ca donne un côté plus réaliste à l'histoire, ça me plonge plus vite dedans et je suis plus vite interressé. J'ai apprécié aussi Mina. C'est une fille bourgeoise au sale caracthère, comme on la voit au début de TWW et malgré qu'elle soit devenue pauvre  un moment, je pense qu'elle ne changera pas si elle retourne dans la luxure. Presque un instant j'ai cru que l'homme qui croise le regard de Link et Mina était son père. C'est juste dommage qu'on n'en sache pas plus à propos de ce mystérieux inconnu.

Enfin, tout cela pour dire que je trouve tes deux nouvelles excellentes.
Pour tout ça, je dois payer combien? Heu... Plus de 1000€...? Quoi? Déjà? :arrow:
Titre: K. ~ C'est l'été
Posté par: HamsterNihiliste le samedi 11 septembre 2010, 17:23:47
Hum... Si elle retourne dans la luxure, tu es bien sûr ?  :ash:
PS : L'annonce 100 € par commentaire était juste un faux prétexte pour attirer les gens :noel:
Titre: K. ~ C'est l'été
Posté par: Liam le samedi 11 septembre 2010, 17:38:26
Ah c'est bien les littéraires ça, on commente leurs œuvres et tout ce qu'ils trouvent à faire pour répondre, c'est de commenter notre propre commentaire, et évidemment pour que ça soit drôle, seulement les incohérences. Elle est où la réception de la critique? Tu me déçois HN :noel:

Sinon pour ne pas uniquement troller, c'est quand le prochain essai, qu'on puisse continuer à commenter? :dnt:
Titre: K. ~ C'est l'été
Posté par: Serkan le samedi 11 septembre 2010, 17:50:41
Hé bien, dans la luxure, oui, un univers luxuriant. La richesse, enfin, tout ce qui est du même champ lexical que "avoir beaucoup de richesses matérielles".
Titre: K. ~ C'est l'été
Posté par: Liam le samedi 11 septembre 2010, 18:06:36
Non Non LinkHyrule, en fait il est très facile de confondre, mais la véritable définition de Luxure, c'est ça (http://www.linternaute.com/dictionnaire/fr/definition/luxure/) ;-D

EDIT : En fait j'ai moi-même souvent fait l'erreur par le passé, alors faut retenir : Luxeure, et pas chercher plus loin :p
Titre: K. ~ C'est l'été
Posté par: Serkan le samedi 11 septembre 2010, 18:45:08
Aaah ^^"
Veuillez m'excuser pour cette erreur... ^^"
Bon sang qu'est ce je peux dire comme bêtises moi...
Titre: K. ~ C'est l'été
Posté par: HamsterNihiliste le samedi 11 septembre 2010, 20:23:56
Ça me fait penser qu'un jour je l'avais écrit dans une copie de Français, en parlant du luxueux décor d'un lieu, évidemment souligné en rouge avec un Oh !

Enfin bref, l'ambiguïté de l'homme est faite exprès, elle laisse planer le doute et montre bien que Link n'a plus rien à voir avec Mina et ne veux plus rien savoir. Donc la fin part à la foi sur une brutalité et sur une grande touche d'espoir. Bien mes fics Baroques ?  8-)

Mais, dans la prochaine fic ( En plusieurs chapitres cette fois ! ), complétement absurde, peut-être que Link ne parlera pas et s'embêtera un peu, du moins dans un des chapitres :noel:
Titre: K. ~ C'est l'été
Posté par: Yorick26 le dimanche 12 septembre 2010, 15:09:18
J'ai lu ta seconde fiction. Je ne sais pas pourquoi, je n'avais pas envie de la commenter la première fois que je l'ai lu. Du coup je l'ai lu une deuxième fois pour me donner envie de commenter, car j'avais plus envie de te commenter, plutôt que de commenter "Ne rougis pas".

Je suis d'accord avec certaines remarques de mes camarades de forum. Comme Weekly, je trouve que Link parle bizarrement. Le coup de système économique et tout... bof. Et puis je sais pas. La situation est très bizarre, voire gênante. Link est amoureux de Mina (ah ben tiens... aurais-tu vu du batifolage masqué dans la forteresse maudite ?), Mina n'est pas amoureux de lui (pas surprenant), elle a replongé dans la richesse prétentieuse (explicable). Il y a quelques points du coup sur lesquels je trouve le scénario bizarre. Je préviens ce sont des détails : Mina dit qu'elle est devenue riche "à cause" de Link. Cela devrait être plutôt "grâce à" non ? Pour moi à cause a une connotation péjorative ce qui fait que Mina aurait préféré être pauvre... ça ne va pas.
Et puis le langage de Mina me semble pas assez pompeux. Tu aurais pu faire un peu plus, peut-être que cela aurait ajouté un petit plus ... je ne sais pas.

Enfin bon, c'est peut-être qu'une question de goût, mais je ne suis pas fan de cette nouvelle. C'est pas mauvais... Imaginer Naglagla maigri à la place du mystérieux homme me fait rire, mais je préfère la première.

Sinon que voulais-je rajouter. Quelques fautes d'orthographes (des s à la seconde personne manquant, je crois un pluriel mal accordé...). Puis sinon bonne continuation ^^ !
Titre: K. ~ Game Over
Posté par: HamsterNihiliste le vendredi 24 septembre 2010, 21:34:27
Bien l'bonsoir jeunes gens !

Après avoir écrit et publié le Chapitre 8, Confrontations, de Misanthropie, mon Amour., tournant de l'histoire et brutal, je viens résumer la situation. En effet, je publie sur cette bibliothèque ma nouvelle pour le premier tour du concours de PdC, laquelle a défrayé la chronique. (http://forums.puissance-zelda.com/viewtopic.php?p=314888#314888)

Sur le thème imposé de La Chute d'Hyrule, cette nouvelle post-Crépusculienne est sombre et brutale, même dérangeante. Commentez-là à votre guise même si tout est dit et expliqué dans le Café.
Bonne lecture, n'ayez pas peur et détachez-vous de cette forme qui peut repousser au premier abord ce qui, je l'avoue, est tout à fait normal, mais pas recherché au moment de l'écriture.

*

•Game Over

Château d’Hyrule, trois mille trois cent jours après l’avènement du Héros du Crépuscule.

Deux gardes royaux, protégés par leurs lourdes armures, accompagnaient le ministre jusqu’à la chambre royale de la Princesse Zelda. Ils attendirent à l’entrée que l’entretien se termine, le temps d’entendre d’un ton neutre et solennel «Je sais. Je n’ai pas besoin de vous.»
La garde descendit l’escalier.

Zelda, qui n’avait pas pris la peine de se retourner pour répondre à son conseiller, contemplait encore par la fenêtre les frontières de son château à la merci des hordes ennemies. Des rangs d’animaux belliqueux armés jusqu’aux dents, brandissant leurs haine dans un seul et unique but. Une armée formatée par la puissance et la victoire. Un groupe incapable de ressentir la moindre émotion, ni même de faire preuve d’intelligence. Ce qui rendait le mal invincible face aux négociations et aux discours.

Link siégeait près d’un large bureau, sur une chaise en plaqué or ornée d’une fresque cosmogonique. Il partageait depuis longtemps sa vie avec la Princesse dans un Amour comblé et parfait, et ne pouvait s’imaginer une journée sans elle. De son rang de Héros, il avait su la charmer et lui correspondre affectivement.
Link était célèbre. Il était riche. Il était marié. Parfois, quelques quêtes épiques venait ponctuer son existence. En conclusion, il s’ennuyait.

-Link, je vais tenter d’appeler les déesses afin qu’elles te confèrent leurs pouvoirs.
-Ils sont trop loin. Le feu de Din ne pourra pas les atteindre.
-Tu n’as même pas essayé !
-La chambre où nous sommes se situe à plus de cent cinquante mètres. Or les Légendes de mes ancêtres ayant emprunté ces pouvoirs témoignent que la portée est infime comparée à cette altitude.
-Pourquoi es-tu si froid ? Tu te contentes de déclamer une thèse, comme une simple relation mathématique ! Soutiens-moi au moins, tu ne te rends pas compte de ce qu’il se passe ? Regarde en bas ! Ils veulent ta peau ! Ton sang !
-Je ne regarde pas en bas. Je ne me morfonds pas. Tu veux peut-être que je me jette dans tes bras et te demande en mariage comme au premier jour ? C’est toi qui parle du contexte de guerre, alors ton affectif, mets-le où je pense pour l’instant.
-Link, qu’est ce qu’il t’arrive ? Tu ne fais rien, tu n’agis pas pour ton Royaume ! Ces troupes de Ganondorf veulent ton sacrifice pour ressusciter leur maître ! Et une fois qu’il sera de retour, il voudra s’emparer de la dernière Triforce, la mienne, pour construire son empire du Mal ! lança-t-elle la larme à l’oeil.
-Je sais. Ne me prends pas pour un con !
-Alors tu dois savoir quoi faire chose !
-Non. Depuis que je porte cette tenue verte de Héros, je ne sais jamais quoi faire. Je me contente d’obéir, de suivre des indications sans avoir à me poser de questions. Sans devoir poser de questions. Je combat les ténèbres, je pille des temples, je cherche des artefacts sacrés, je ne suis bon qu’à ça. Je suis formaté pour accomplir un but. On m’a annihilé tout mon affectif et ma liberté de penser. On m’a rendu pire que toute cette foule qui se déchaîne au-dessous.

L’échange fut interrompu par le retour précipité du même ministre et de sa garde.
-Votre Majesté ! Ils ont forcé la porte Sud ! Ils pénètrent dans la Citadelle !
-Alors s’ils pénètrent, nous sommes bien baisés, affirma Link avec un sourire.
-Ne pouvez vous pas vous empêcher de lancer votre humour noir à chaque drame ? répondit le ministre, irrité par les propos.
-Si, je peux lancer des flèches ou des bombes à la place. Maintenant sortez, ou je tire ! hurla-t-il en saisissant son arc et le bandant aussitôt.
-Vous n’oserez pas ? Entre l’un qui bande et l’autre qui pénètre, on va s’amuser. Je peux appeler mes gardes si vous le cherchez tant.
-Il vous a dit de sortir, ordonna Zelda d’un calme olympien.
-Je ne sortirai pas tant que votre soit-disant Héros du Crépuscule ne m’aura pas fait d’excuses.
-Écoute. Soit tu es jaloux, soit tu m’as dans le nez pour une raison dont je me contrefiche. Mais je peux profiter de ma supériorité hiérarchique pour t’ordonner de dégager sur le champ, poursuivit Link en le pointant de son arc.
Le conseiller imposa aussitôt à ses gardes de venir le secourir.
-Je vois...Alors on déclare la guerre mais l’on est trop lâche pour se battre soi-même.
Dire que la guerre est à deux doigts d’éclater et que les monstres de Ganon sont en train de massacrer tous nos citoyens sans aucune pitié... Si le ministre était là, on pourrait peut être se défendre. Mais c’est dommage, Mônsieur est beaucoup occupé à faire la morale au fiancé de la Princesse et à provoquer des compétitions puériles. L’heure tourne, peuple d’Hyrule !
-Ce n’est pas drôle, Link.
-Je ne cherche pas à être drôle.
-À croire que vous êtes de leur côté. Souhaitez-vous la victoire de Ganondorf ? Souhaitez-vous la chute d’Hyrule ?
-Comme je l’ai expliqué à ma femme, je suis comme eux. Mais qui a fait appel à un jeune fermier pour sauver son Royaume de la chute ? Et qui à fait appel à des animaux maléfiques afin de détruire un Royaume ennemi et rétablir son règne ? Au fond, nous nous ressemblons tellement. Nous avons les mêmes motivations. Nous sommes tous poussés par un égoïsme royaliste, et nous cherchons à sauver notre petite vie, notre petite personne vue par les autres, c’est tout. Ce que vous pensez, ce que vous faites, cela n’importe même pas. Pauvre élite, vous et votre image, votre gueule dans les journaux, votre richesse matérielle, c’est tout ce que vous valez.
-Maintenant partez, ordonna Zelda.
Puis, se devant obéissance à la gouvernante, le ministre se retira en lançant un regard méprisant sur Link.

L’armée de Ganondorf traversait les arcades.

Zelda soupira.
-Ils arrivent.
-Tu réfléchis à ce que je viens de dire ?
-Oui. Mais maintenant nous n’avons que très peu de temps. Il faut te décider. À moins que tu ne veuilles nous quitter et les rejoindre, dans leurs rangs ? C’est ce que tu veux finalement ?
-Non. Je ne veux rejoindre les rangs de personne. J’ai subi assez de contraintes, je ne veux être ni un Héros, ni un Seigneur du Mal. J’en ai assez d’incarner le Bien et de me battre contre le Mal, ma vie est d’un ennui...
-Mais tu ne m’aimes donc pas ?
-Ca serait la seule raison qui me pousserait à rester. Mais la situation semble si critique. Je dois partir. Très loin. Il en sera mieux comme ça.
-Comment peux-tu penser à la fuite ? Toi, le détenteur de la Triforce du Courage ?
-Dans certains cas, la fuite n’est pas lâche : Elle est salutaire.
-Mais, le château, tout ce qui nous entoure ? Et moi ? Je ne vais pas rester seule, ici !
-Non. Mais réfléchis. Si je pars, personne ne me retrouvera jamais. Personne ne saura où me chercher, je changerais de vie à jamais. Et la Triforce du Courage entre ses mains ne sera qu’une illusion. Quant à toi... Je ne vois qu’un seul et regrettable moyen de cacher le dernier fragment.
-Tu n’oseras pas ? dit-elle la voix nouée, après un silence.

La grande porte du château fut détruite.

-Elle doit disparaître avec toi, répondit Link de la même manière. Tu n’as plus le choix : La reddition est la mort.
-Je ne ferais pas ce choix car je ne veux pas me rendre.
-Moi non plus je n’aurais pas voulu me rendre. Mais sois lucide, il est trop tard ! Que veut-tu faire ?
-Dans un ultime espoir, je vais implorer les déesses afin de sceller nos Triforce pour un temps. En contrepartie nous ne pourrons pas emprunter leur magie, mais c’est la seule solution.
-Humpf. Toujours aussi lâche.

Les ennemis avaient envahi le jardin. Zelda s’agenouilla solennellement au centre de la chambre et récita en Hylien des versets du livre de Mudora.

-Abrité des regards, dans un monde invisible...

La base du château tremblait.

-Le bleu du ciel rayonne d’une lumière d’or...

Des cris se firent entendre de plus en plus fort.

-C’est la que la Triforce, inéluctablement...

En un instant ils avaient envahi tous les couloirs.

-Transforme les rêves des mortels en...

Ils fracassèrent la la porte de la chambre.

-Jamais ! hurla Link.
Il sauta sur son bouclier qui était exposé face à la fenêtre, le brandit en esquivant le plus agilement possible de façon à ce que rien ni personne ne puisse l’atteindre, et lança trois bombes au fond de la salle avant de sauter par la fenêtre.
Le temps d’un songe, il courut à se rompre la respiration jusqu’à l’arrière du jardin, il retrouva Zelda, lui sauta dessus, la frappa en plein ventre, la plaqua violemment contre le sol, la déshabilla sauvagement et la pénétra dans une ultime pulsion en criant : «Réalité !»

Sa réputation entachée et le symbole d’Hyrule livré à la violence, Link savait qu’il n’y avait plus personne pour compter sur lui. Il s’enfuit par un mur détruit par une bombe, et s’éloigna sur Épona. Petit à petit il détourna son regard du château et resta totalement impassible. Froid. Intelligent.
L’ancien Héros était désormais seul et son royaume voué à la mort. Une mort brutale et irrémédiable, certes, mais qu’importe, puisqu’elle était choisie ?

Et nul ne sait ce qu’il advint du Royaume...

*

De plus, je me permet de vous livrer le verdict complet du jury, reflétant  généralement l'impression déçue et décevante du lectorat.

Citer
Kirbyzoux

Critères définis : 6/10

- Respect du thème : thème bien respecté, annoncé et souligné par le titre, au coeur de la problématique. 2/2
- Maîtrise de la langue : trop approximative. 1/2
- Style : curieux mélange de termes élaborés "cosmogoniques", ce qui est un bon point, et d'expressions qui sont pour moi à la limite du correct. 1/2
- Cohérence et clarté du récit : pour quelqu'un qui ne connaîtrait pas la série en détail, certains termes arrivent sans explication. 1/2
- Originalité et attractivité du texte : de très bons points de réflexion personnelle mais trop disséminés. 1/2

Appréciation personnelle : 5/10

Texte franchement bien par endroits mais trop inégal (et un peu trop cru pour moi). Je trouve que l'esprit de la série n'est pas vraiment respecté mais poursuis tes efforts.

Note finale: 11/20

◊ ♣ ◊

Plagueis

Critères définis : 7,75/10

- Respect du thème : On ressent bien la fin proche du royaume à travers le récit. Il aurait tout de même été intéressant d'avoir un peu plus de détails sur ce qu'il s'est passé pour en arriver là. 1,5/2
- Maîtrise de la langue : Quelques répétitions d'articles, des oublis de mots ou des erreurs de conjugaison, mais rien de bien grave dans l'ensemble. 1,75/2
- Style : Le style est agréable, basé sur le dialogue plutôt que les longues descriptions, ce qui le rend plus léger à lire. 2/2
- Cohérence et clarté du récit : Parfois un peu confus dans les évènements décris, notamment sur la fin avec des personnages qui se retrouvent on ne sait trop comment, étant donné la rapidité dont les évènements se déroulent. 1,5/2
- Originalité et attractivité du texte : De ce coté là, ce n'est pas très original, Ganondorf qui tente de s'emparer de la Triforce une nouvelle fois en envoyant ses troupes à l'assaut du château d'Hyrule. On a déjà vu ça de nombreuses fois. 1/2

Appréciation personnelle : 5/10

Un texte qui commence plutôt bien, mais qui malheureusement sombre assez vite dans le trash et le vulgaire, à la limite du supportable même. Le sujet principal est assez rapidement survolé et au final on se demande s'il ne s'agit pas plutôt de la déchéance du Héros plutôt que d'autre chose dont il s'agit ici. Le Héros, justement, devenu une vraie ordure, on ne sait comment. Le soit-disant Héros du Crépuscule possédant la Triforce du courage, qui enchaine les propos vulgaires à l'encontre de tout le monde et plus particulièrement de Zelda, juste parce qu'il s'ennuie et en a assez de faire ce qu'on lui demande. Ce même personnage qui a sauvé le monde par le passé et qui ne pense plus qu'à sa petite personne quand le Mal revient frapper à sa porte ? Désolé, mais ce coté n'est pas cohérent avec le Héros qui est dépeint ici. Le récit termine carrément dans le malsain avec le viol pur et simple de Zelda, juste pour finir "en beauté"? Pour conclure, ce texte est assez dérangeant dans l'ensemble, basé sur un personnage que l'on ne reconnait même plus tellement il est devenu immonde, pervers, lâche et violent. Dommage que tout le récit tourne autour de ce Link indigeste et qui n'intéresse personne.

Note finale : 12,75/20

◊ ♥ ◊

Ti'bouchon

Critères définis : 6/10

- Respect du thème : 2/2
- Maîtrise de la langue : Le texte dans lequel j'ai trouvé le plus de fautes de conjugaison et d'orthographe. 1/2
- Style : Passage trop rapide d'un comique, pas toujours drôle, à une approche plus dramatique, manque de transition. 0,5/2
- Cohérence et clarté du récit : La princesse Zelda qui est dans la chambre se retrouve dans le jardin, Link réussit à fuir le château assiégé de toutes parts, Link et Zelda qui s'engueulent alors que le château est assiégé... bref, beaucoup de passages brouillons. Le zéro est évité parce qu'on remarque tout de même l'univers d'OOT mais c'était limite. 0,5/2
- Originalité et attractivité du texte : Link qui pour une fois "décide" c'est une idée sympathique. 2/2

Appréciation personnelle : 3/10

Le choix d'un univers post OOT est assez attractif mais le manque de transitions entre les lieux et les actions nuit énormément à la clarté du texte ce qui le rend lourd et parfois lassant.
La libre arbitre de Link est une idée qui aurait gagné à être développée, lui donner un peu de mouvement, lui attribuer un changement de tenue par exemple ou de couleur de cheveux aurait ajouté à la crédibilité du changement de personnalité. La vulgarité de langage est soit mal adaptée, soit pas suffisante.
Cette vulgarité "gratuite" dans le contexte de cette fic est parfois choquante, mal venue et coûte cher à son auteur.

Note finale : 9/20

Tchuss !
Titre: K. ~ Origines
Posté par: HamsterNihiliste le vendredi 15 octobre 2010, 19:30:46
*Entre dans sa bibliothèque, dépoussière un peu, scrute les alentours et prépare une ultime fois son ouvrage*

Voici donc ma nouvelle création, une fic qui se présentera en trois chapitres.
Ouimékeskesé ? : Minute, phalène à tête de mort. Origines traite des origines ( Ça alors ! ) de Link, premier du nom, à savoir d'Ocarina of Time. Les conditions de sa naissance, le contexte, sa famille, , et plus tard, sa recherche de vérité. Le premier chapitre ne le fait pas intervenir, mais l'on apprend des choses sur sa famille, et ses futures relations.
Appelé Termina, il reste quelque peu sombre et brutal, sans pour autant atteindre Game Over ; j'ai d'ailleurs tenté de tenir compte des critiques pour écrire quelque chose qui nous corresponde à tous.

Bonne lecture ! ;)

*

•Origines

Chapitre I : Termina

Il existait un temps où l’utopie était réelle. En un pays aux frontières floues, les Hommes savaient vivre en autarcie en cultivant leurs jardins. Sans être trop nombreux ni trop peu, tous étaient différents et s’entendaient à merveille. Ils échangeaient sur leurs modes de vie, sur leurs relations ou encore leurs opinions dans ce paradis terrestre où l’Homme avait été naturellement voué à vivre en société. Souvent, le jour, des animaux aux couleurs de l’arc-en-ciel et aux voix mélodieuses venaient les entourer dans leur bonheur, et chaque nuit, la Lune à la blancheur éclatante était visible, veillant sur la terre et le ciel. Mais les habitants les plus raisonnés, bien qu’ils n’aient pas d’autres expériences, commençaient à douter. Un pays si parfait où les Hommes seraient assez équilibrés ne pouvait pas être viable plus longtemps. Ils sentaient planer une menace. Rien que par le nom du pays : Termina.

Dans une cabane au milieu des arbres vivait sereinement un jeune couple comme les autres, heureux et rempli de projets. Ikau et sa compagne venaient de se connaître et voulaient partager leur bonheur avec les personnes auxquelles ils étaient liés, des amis qu’ils avaient appris à connaître et à qui ils faisaient confiance. Certains faisaient partie de l’élite intellectuelle qui dirigeait le pays, d’autres étaient sans prétention et acceptés à leur juste valeur. Leur meilleur ami, Ridley, gouverneur capital de l’Élite, leur parlait souvent de cette menace imminente, comme s’il se sentait épié ; le couple n’avait pas peur, mais n’étant pas naïf, il préférait rester sur ses gardes.
Le mariage se célébra quelques temps plus tard, au milieu de la vaste plaine aux reflets mordorés. L’espace d’un instant, le bonheur le plus total traversa les deux, ils en oubliaient tout ce qui les entourait : la perfection était telle, qu’ils se mirent eux aussi à douter.

En effet, quinze ans plus tard, une guerre sans merci avait éclaté. Une brève et vile attaque quelques années auparavant avait détruit les principales ressources économiques. Au-delà de cette crise, les esprits restaient marqués par une seule image : Celle du chef de cette insurrection, un enfant étrange  et squelettique au visage éternellement caché.
Personne n’avait rien subi, mais la menace pressentie s’étant avérée avait obligé l’Élite à prendre des mesures pour éviter d’autres abus. On se rendit malheureusement compte que le peuple avait besoin de subir les lois pour comprendre, et non de les vivre. La société avait donc été remise en question pour rétablir l’ordre et la liberté. C’est alors que le peuple, non compréhensif des nouvelles propositions, s’indigna et chercha à se révolter : La révolution prit une ampleur monstrueuse qui gaspilla jusqu’au dernier rubis dans la peur et la violence. L’Élite organisa un exil collectif, cependant que Ridley, à l’insu de tous, se poignarda d’un seul coup.

La guerre civile durait. Tout Termina était mobilisé pour lutter, on engageait les enfants dès quinze ans. Quinze ans, c’était presque l’âge de Kafei, Leur fils, jeune homme aux cheveux violacés. Face au climat de peur, son engagement était une nécessité et il en rêvait. Désormais seuls, ils vivaient cachés dans la plaine, autour d’un éboulement de rochers qu’un soupçon de mousse avait recouvert.
-Papa, laisse-moi partir.

-Non, non. Jamais. Je ne doute pas tu as d’excellentes aptitudes pour te défendre. Je te l’ai enseigné, je t’ai appris toutes les techniques. Demain, dès tes quinze ans, tu seras en âge de recevoir ton épée et ton arsenal, de partir à tout jamais si tu veux, mais tiens compte de nous. Tu es notre seul enfant et je n’accepterai pas de te perdre.
-Mais Termina a besoin de moi ! Ils doivent former les enfants pour l’avenir du pays ! Je serai capable de tout, je changerai même d’identité...pour vous aider.
-Tu n’es plus un enfant.

Au crépuscule de sa quinzième année, après avoir conclut les explications, Kafei se sentait tourmenté. Partir selon son désir, se libérer et prouver sa valeur, ou contenter sa famille au risque d’être plus vulnérable ? Il ne savait pas ce qu’il allait devenir, mais comme tout jeune de son temps, voulait se surpasser et prendre des risques. Devenir un Héros.
Cependant, son père et sa mère étaient aussi troublés. Pendant la nuit, elle fit part à Ikau de sa crainte principale :
-Ikau, je ne peux pas savoir comment tu vas réagir, mais...
-Mais ? Qu’y a-t-il ? C’est grave ?
-Non. Je suis enceinte.
-Ah. De combien ?
-D’un seul.
Ikau ne réagit pas à cet humour absurde et poursuivit la discussion.
-Comment est-ce arrivé ? Je suppose que je le saurai déjà si cet enfant était le nôtre.
-Je suppose que cet enfant est issu d’une pulsion d’un guerrier. Je n’ai pas pu me défendre.
Il se retourna. Il pleurait.
L’aube vint; les cris de guerre reprirent ; Kafei s’en alla dans l’horizon.

*

Je précise aussi que, pour accentuer l'angoisse et le trouble, j'ai fait preuve d'une petite contrainte dans l'écriture.
Titre: K. ~ Origines
Posté par: HamsterNihiliste le dimanche 05 décembre 2010, 20:43:34
*Entre dans sa bibliothèque, respire la bonne odeur de ses œuvres, et présente la suite d'Origines.*

Voici donc le deuxième chapitre de ma nouvelle fic. Ce dernier, intitulé comme la fic elle-même, présente les origines de Link. Un commencement qui se mêle à une fin, un espoir qui se mêle à un ennui, des frontières floues mais brutales.

*

Chapitre II : Origines

Kafei s’était enfui depuis longtemps déjà, tandis que les mouvements de l’enfant se faisaient sentir dans le ventre de sa mère, comme s’il était désireux de voir dès maintenant ce monde en pleine déchéance. Hélas, le climat de guerre n’était pas prêt à le recevoir, et plus la terreur avançait, plus sa naissance approchait. Si Ridley avait été encore en vie, il aurait pensé cet enfant comme le fruit de la providence qui devait libérer son pays. Mais ni Ridley ni l’Élite n’étaient là. Tous les autochtones suppliaient pourtant le gouvernement de rentrer, parce qu’ils étaient trop faibles pour assumer leurs actes, et pour trouver des solutions aux problèmes qu’ils avaient posés eux-mêmes. Mais tout ce qu’ils recevaient, qu’ils ne considéraient presque pas, c’était des lettres. Des lettres simples, sans explication, qu’un enfant en vacances pourrait écrire à ses parents. À part que cet enfant n’a plus de parents.

Au sein de cette panique, les parents de Kafei arrivaient encore à garder espoir, à la grande indifférence et incompréhension du peuple. Ils pensaient que la seule issue face à un tel désespoir serait de s’illusionner et de croire en l’avenir, en attendant hypothétiquement qu’un héros venu de nulle part aille rétablir leur utopie. Ils en étaient ridicules. En attendant, l’enfant se pressait de plus en plus de venir au monde, un drame s’ajoutait donc au couple. Mais quel que soit le contexte de sa naissance, la préoccupation principale était son bien être et son avenir. Sa mère tenait absolument à ce que son existence ne soit pas gâchée, même si elle devait mettre sa propre vie en jeu. Mais cela était beaucoup plus qu’un jeu, et l’angoisse atteignait son paroxysme. Le dialogue n’était jamais entamé, la campagne était vide et les hommes aussi. Le futur frère de Kafei ne se laissait pas encore pervertir.

Pourtant, plus la peur gagnait sa terre, plus il était attendu. Il se laissait ainsi attendre durant neuf mois, et fut enfin à la hauteur d’atteindre son monde. À l’aube de sa naissance, le pays était devenu sombre au possible, et la corruption le guettait si sa famille n’agissait pas. Ikau, qui recherchait sans cesse une solution, regrettait de ne pas avoir écouté Ridley et les prédictions de l’Élite ; S’il avait su qu’elles s’avéreraient, il aurait eu tout le temps pour fuir avec sa femme et ses fils. Mais il était trop tard pour regretter, il fallait donc trouver un moyen d’échapper à ces heures sombres et morbides.
Ayant longuement parlé avec sa femme, Ikau la leva par le bras, saisit ses deux dagues desquelles il ne se séparait jamais, et prépara enfin sa rébellion :
-Je passerai par le Canyon. J’indiquerai à ceux de notre parti que des combats décisifs ont lieu à la Baie. Tu partiras pour le Sud.

Son projet froid et intelligent voulant évidemment induire tous les guerriers en erreur, il allait en profiter pour fuir et trouver une terre libre où reconstruire sa vie. Ou plutôt, leur vie. Par ce qu’il connaissait des Marais du Sud, il était persuadé qu’une entrée vers un nouveau Royaume pouvait s’ouvrir, et qu’il pouvait enfin rejoindre son entourage pour repartir à zéro. Mais ce zéro était déjà annihilé par les centaines de guerriers, bloquant la majorité des issues de Termina. Ikau restait persuadé de la qualité de son plan, auquel il s’était longuement préparé.
Enfin, le jour fatidique arriva. Après des heures douloureuses, leur enfant naquît, et entendit ces premiers mots si doux de la part de sa mère :
-Tu n’es pas né ; tu es venu au monde. Ton nom n’est pas Link ; tu es Link. Tu ne survivras pas ; tu vivras.
Son père à son tour lui adressa la parole, après l’avoir contemplé et avant de partir :
-Si je venais à mourir...Tu m’oublieras.

Puis ce dernier s’en alla devant, tenant dans chaque main une de ses deux dagues aux reflets platinés, seuls biens matériels qu’il lui restait. Il maîtrisait parfaitement l’art de l’aventure et de la guerre, et l’appliquait à son paroxysme en escaladant le Canyon, plantant successivement ses épées dans le granite en guise de prises. Il surplombait le Cimetière, où les cadavres des guerriers s’entassaient sur les fondements du Royaume. Parmi les combattants, il percevait même Kafei, mais qu’importe, personne ne reconnaissait personne. Triste désolation malgré laquelle il voulut mener son plan porteur d’espoir. Mais à peine avait il commencé à parler, qu’il était égorgé dans l’indifférence. Par son propre fils semble-t-il.
Pendant ce temps, les Marais avaient vu passer la mère et son nouveau-né, perdus et épuisés. On ne sait comment, elle arriva finalement à une forêt, verte et vivante. À l’orée de la clairière, où des fées et des enfants profitaient de leur jeunesse, le gigantesque Arbre Mojo la repérait. Exténuée, elle s’effondra à ses pieds.

-Que penses-tu trouver ici ? demanda le Vénérable d’une voix tendre et grave.
-Je ne sais plus. De l’espoir, peut-être. Tout ce que je veux est pour mon fils...Faites ce que vous voulez de moi, mais laissez lui une vie...Il est mon unique consolation, je vous en prie ! souffla-t-elle dans un ultime effort.
-Inutile de me prier, ton vœu est censé. Tu veilleras sur ton enfant aussi longtemps que tu le voudras. Sa destinée sera assurée.
-Je...Je vous en remercie. Mais...La seule contrainte que je veux lui imposer est...qu’il ne sache rien de ses origines. Dites-lui qu’il est orphelin, ou qu’il est né ici...Sa vie ne commence que maintenant.  Quant à la mienne, je n’ai pas peur de sa fin, j’y ai été confrontée tant de fois...Si je peux regarder Link, tant mieux, s’il doit vivre sans moi, tant pis.   
-Ne t’inquiètes pas, relève-toi et souris ! Comment te nommes-tu donc ?
-Je...Je me nomme Navi.
-Très bien, Navi. Tu veilleras sur ton fils. Tu deviendras une fée.

*
Titre: K. ~ C'est l'été
Posté par: Suijirest le dimanche 05 décembre 2010, 21:05:28
J'ai adoré lire cette fiction. C'est plus que prometteur, c'est déjà très bien. :)

J'ai dû rattraper mon retard parce que j'avais raté le premier épisode, mais en tout cas, tu prends ton temps pour écrire et le résultat le reflète tout à fait. C'est facile à lire, et tu démontres une bonne culture Zeldaesque.

J'attends la suite avec un grand intérêt, de même que la fiction de Synopz ! (tiens, j'ai oublié de commenter, j'ai fini les chapitres en cours...)
Titre: K. ~ C'est l'été
Posté par: raphael14 le dimanche 05 décembre 2010, 21:18:01
Bon, ça fait un certain temps que j'ai lu mémoire d'un pot que je n'ai, à ma grande honte, pas commenté, il est donc temps de réparer cet affront.
C'est fichtrement original palsambleu cette histoire de pot, il faut dire que ces pots cassés par un type bizarroïde habillé en vert ne sont pas suffisamment médiatisé, heureusement cette injustice a été réparée, grâce à toi. Autrement dans la forme je ne vois absolument rien à redire donc voilà.
Je repasserai sans doute plus tard plus commenter plus amplement des textes qui me semblent très prometteurs.
Titre: K. ~ Fin d'Origines !
Posté par: HamsterNihiliste le samedi 25 décembre 2010, 22:17:04
*Se lève à l'aube d'un nouveau jour. Ce que j'ai écrit ne veut rien dire.*

Origines, troisième et dernier Chapitre. Il peut être perçu plutôt comme un chapitre complémentaire, puisque tout se découvre à la fin du deuxième. On sombre donc pleinement dans l'univers de fausseté, jusqu'à ce que la vérité éclate. En tout cas le style colle à l'ambiance dramatique et troublée. Bonne lecture finale et bonnes fêtes !

*

Chapitre III : Aube

“ Sur la terre d'Hyrule résonne l'écho d'une légende.
Cette légende nous conte l'histoire d'un garçon qui, après avoir combattu le Mal et sauvé Hyrule, disparut de ce royaume qui l'avait élevé au rang de légende vivante.
Fatigué des combats qu'il n'avait eu cesse de livrer, il partit pour un voyage, une quête secrète et personnelle.
Un voyage à la recherche d'êtres chers et d'un inestimable ami.
Un ami qu'il quitta après avoir accompli sa quête héroïque et trouvé sa place parmi les héros légendaires... ”

Termina s’était rétabli, douze ans avaient passé. Douze ans passés à s’enfermer sur le passé, à regretter une guerre, à regretter même un espoir. L’Élite n’était pas revenue, et nul ne savait où elle avait conquis sa liberté. Le peuple n’était plus pour autant livré à lui-même ; de nouveaux législateurs l’encadraient, mais ne portaient pas non plus le nom d’Élite pour ne pas subir les mêmes conséquences vécues auparavant. Son fils Viscen succédait à Ridley dans les locaux de Bourg-Clocher, un des rares endroits qui n’était pas ravagé. Le rayonnement du Cimetière d’Ikana, auquel la mort du père du Link donna son nom, étant entaché, ce dernier eu droit accompagné de Ridley à des adieux nationaux ; leurs dépouilles furent livrées à la liberté de l’Océan.
Étrangement, la guerre avait cessé le jour où Navi et son fils s’étaient enfuis pour une autre vie. Les légendes s’étaient donc avérées. 

Mais les souvenirs persistaient, notamment celui du chef de guerre, ce jeune enfant qui se cachait derrière ses masques. Personne ne l’avait revu jusque là à Termina. Seulement il vagabondait parfois dans Hyrule, comme un enfant abandonné de tout. Les Terminiens, Navi comprise, espéraient seulement qu’il ne reviendrait pas chez eux. Hélas, c’était trop beau. L’Histoire était en marche, et un jour, nul ne sait comment ni pourquoi, on le revit à Termina face à Link.
Navi, prise de peur face à au voyage de son fils, communiqua avec une proche par télépathie :
-Taya ? C’est vraiment toi ? Excuse-moi...Es-tu prête à assumer une haute responsabilité ?
-Par rapport à toi ? Euh, ouais, sans problème.
-Mon fils vient de sombrer à Termina. Je vois qu’il a été victime de Skull Kid.
-Quoi ? Mais tu ne peux avoir de fils ? Tu es une fée !
-Non. Je suis aux fées ce que mon fils est aux Kokiris.

-T’es pas une fée ? Mais qu’est ce qu’il s’est passé ? C’est une malédiction ?
-Pas du tout. Au contraire.
Navi lui raconta tout. Elle raconta à cette chère amie comment elle avait tout sacrifié pour son fils, qu’elle était à deux doigts de perdre. Comment son homme s’était sacrifié pour rechercher un ultime espoir. Comment elle avait offert la plus grande liberté du monde à Kafei en le livrant à la guerre. 
À Taya de révéler sa vérité. Elle et Navi se connaissaient fort bien à Termina en tant qu’humaines, avaient subi le même sort, mais par des raisons différentes. Taya avait perdu ses proches pendant la guerre, ne comptait plus sur Navi qu’elle ne voyait plus, et s’accrochait encore à la plus infime once d’espoir. C’est lorsqu’elle rencontra Skull Kid, dont l’image la traumatisait auparavant, qu’elle sombra dans son univers de perversion.
-Une chance que l’on ait pu se trouver. Tu es si jeune.
-Oui. J’aurais pu être ta fille.

C’est après ces retrouvailles dues au hasard que Navi communiqua sa demande :
-Taya, j’ai tout vu depuis l’endroit où je suis. Toi aussi. Nous avons été humaines, et je te demande une chose que jamais je n’aurais pu demander auparavant. Je ne peux pas revoir Skull Kid et Termina, j’y ai tout perdu. De surcroît Link croît déjà qu’il a été un enfant abandonné, qu’il est fils unique et que sa mère est morte. Alors que je l’accompagne faussement depuis sa naissance, sans qu’il ne connaisse véritablement mon identité. Je t’en prie, veille sur lui. Et fais en sorte de lui cacher l’existence de son frère. Il est trop tard, maintenant rien n’est plus réversible pour lui.
Taya accepta sa demande ; elle n’avait rien à perdre, était déjà abandonnée, et n’avait donc plus qu’à s’ouvrir à d’autres esprits. Link fut donc, comme toujours, accompagné par la fausseté et le mensonge sans rien savoir. Mais une once de vérité survivait encore. Étrangement, Kafei n’était pas mort.

Dans le monde prématurément apocalyptique  de Termina, Link apercevait de temps en temps son frère caché. Aucun ne se soupçonnait frère, mais c’est à l’aube du dernier jour que Link fit le premier pas. On l’avait chargé d’une mission commune, et il l’abordait comme n’importe quelle autre. Auprès de l’herbe abandonnée et de l’eau morte du lavoir, ils se revirent. Taya eut bien du mal à cacher l’identité de ce frère. Si elle révélait la vérité à Link, elle devait lui expliquer qu’il connaissait sa mère. Si elle la lui cachait, elle se doutait qu’il finirait pas la découvrir, et elle ne pouvait rien faire contre cela ; ce n’était qu’une fée. Elle préféra donc ne rien dire et se cacher une énième fois.
Après avoir reçu sa lettre sans encombre, Kafei interpella son frère :
-Qui es-tu ? Qui es-tu pour ne pas avoir peur de ce monde d’âmes déchues ? Qui es-tu pour garder ce courage indigne de l’ancien peuple ? Qui est-tu pour être un être aussi vrai ?

Link, qui s’était d’habitude contenté d’écouter sans s’exprimer, se sentit reconnu par cet homme qu’il connaissait depuis seulement deux jours. Il était d’ores et déjà persuadé qu’un lien le liait à lui :
-Je ne suis pas de Termina. J’y ai sombré mais j’y ai survécu.
-“Mais.” Inutile. Tu es obligé d’y survivre.
-On...On m’a raconté que les premières paroles de ma mère à mon égard étaient les mêmes. “Tu ne survivras pas ; tu vivras.”
Kafei se mit à rire nerveusement, d’un air surpris et d’un teint blanc.
-Qui es-tu ? Ce texte est le même qui est gravé sur les dagues de mon père. Ses deux dagues platinées et vengeresses que j’ai récupérées. Lorsque je l’ai tué.
-Mon père a été tué pendant la guerre.
-Alors nous avons les mêmes origines. Tu es mon frère et tu es une légende. Maintenant que tu le sais, nous pouvons nous séparer. Je pourrais me sauver de ce corps puéril et désuet, qui m’a longtemps servi lorsque j’étais encore bête et innocent.

À ses mots, Kafei se saisit d’une de ses dagues, la fixa de ses deux yeux, pleura, et la replaça dans son fourreau. Il regrettait.
Avant de partir vers sa bien aimée, il se saisit d’un livre en cuir couvert de dorures et écrivit.

“Vieille dague ! Toi, je te garde.”

Il courut vers la Grande Baie, planta une de ses deux dagues dans son livre, et le jeta définitivement à la mer. Il rangea la dernière dans son fourreau, quitta la malédiction qui l’emprisonnait, et s’unit enfin à sa bien-aimée. Link, comme à son habitude, sauva le pays de son apocalypse et s’en fut.

La suite appartient à l’Histoire.

*
Titre: K. ~ Thanatos, mon ami
Posté par: HamsterNihiliste le mercredi 29 décembre 2010, 19:10:58
Nouvelle fournée, nouvelle création en un nombre de chapitres existant mais désincarné. C'est de l'absurde, c'est un monde où tout se perd, où la question du sens devient risible, même si le héros qui n'a de héros que le nom cherche à sauver sa raison, on attendra toujours, puisque c'est la seule solution. Enfin on y voit ce qu'on veut. J'avais déjà fait un peu la pub avant, je l'ai sobrement intitulée Thanatos, mon ami, anti-référence à Misanthropie, mon amour. C'est un peu ça.

*

•Thanatos, mon ami

Chapitre 0 : Ceci n'est pas un prologue

Il était une fois, au numéro douze de la rue du Moineau qui chante, au quatrième étage, au fond du couloir à gauche, deuxième carreau en partant de l’Est, le trois avril mille neuf cent cinquante-cinq pour être précis, un petit écureuil qui fabriquait des mouchoirs de couleur rose pour ma soeur qui n’hésitait r’a peute. C’est dans un univers qui n’a absolument rien à voir que prend place une histoire qui n’a absolument rien à voir.
Hors du continuum espace-temps pour être précis, c’est l’histoire d’un mec, peut-être un héros, peut-être habillé de vert, qui vit peut-être dans une ville paumée où il n’a absolument rien pour devenir le Héros d’Hyrule, qui allait commencer une aventure, et qui n’avait pas de qualificatif pour la désigner.
Le plus originalement du monde, ce mec s'appelle Link. Ça fait un choc hein, j’peux vous dire que moi, la première fois que je l’ai lu, attendez, s’appeler Link pour un mec comme ça, c’est franchement étonnant non ?
Bref Link, qui aurait aussi pu s'appeler Zelda, Robert, ou Jean-Alfred, est schizophrène, avec un accent grave. Et croyez-moi, la schizophrénie, avec un accent aigu, c’est grave. Mais comme pour chaque aventure épique, il faut bien lui trouver un compagnon de route, ceci aura son importance. Quand même, je sais ce que j’écris, c’est pas du grand n’importe quoi si ce pauvre type est schizophrène. Je connais mon plan, je sais donc exactement ce que je veux écrire. Vous verrez si vous attendez la suite. Attendre, hélas, mais si c’est le seul moyen, alors attendons.
Et je ne vous ai peut-être pas prévenu que la vie, c’est absurde.

Link, dans sa petite bourgade paumée, devait partir pour sauver la princesse, ou quelque chose du genre. Enfin je crois qu’il ne se posait pas de questions, qu’il devait partir, sans raisons. Comme si la raison avait une place dans ce monde faux dans lequel il vit. La raison, c’est bien son principal ennemi et son principal allié.
C’est à un moment complètement quelconque qu’il se met, pour ne pas se retrouver à court de ce merveilleux et enrichissant bien qu’est l’argent, à entrer chez ses voisins sans frapper, à faire des roulades contre leurs étagères pour faire tomber un pot plein d’espoir, à voler leurs économies durement gagnées à l’usine, à piller les frigos et à prendre un morceau de gras de jambon, avec tout le respect qui lui est dû. Comprenez-le, suivre cette routine sans avoir à parler, c’est ennuyeux. Alors contre cet ennui, sa schizophrénie l’oblige à utiliser ce merveilleux art de la parole, sans ironie aucune.

-Nom de Zeus ! J’peux parler, dit-il avec un point à la fin.
-Ouais, enfin si tu dois parler pour ne rien dire, ne parle point, lui répond à ces mots sa schizophrénie. À propos, comment va ta schizophrénie ?
-Tu vas bien, merci. Sur ce j’ai à pénétrer chez des gens. Sans vulgarité.
-Entre un calembour sur pénétrer et un pot détruit sur une étagère, j’ai comme un souvenir tiens. Mais quoi, je vois pas du tout.
Après ces calembours plus ou moins littéraires, il passe chez sa copine la boulangère, dont l’habitation jouxte le précipice de la falaise donnant sur la réserve de Phazon des autorités secrètes.
-C’est secret, ne dis rien ! Par contre j’aime bien le verbe jouxter, me dit la schizophrénie de notre héros.
Mais je ne donne pas de suite à cette remarque.
-Bien l’bonjour m’dame la boulangère, vous avez de belles miches aujourd’hui !
-Elle était facile, répondit cette dernière. Vous allez me la faire à chaque fois, Monsieur Link ? Mais quoi que vous disiez, vous aurez toujours droit à tout mon respect, vous le savez !
-Je venais juste pour vous voler quelques réserves de rubis, j’en ai besoin.
-Très bien, Monsieur Link, faites comme chez vous ! Sans problème, surtout servez-vous, je vous en prie, merci beaucoup Monsieur le Héros !
-Avec plaisir.
Il s’approvisionne donc, et part sous les honneurs de madame la boulangère et des ménagères de moins de cinquante ans.
-Mes bourses sont pleines ! hurle-t-il en sortant.
Des fois il m’énerve. Je viens à peine de lui donner la liberté de la littérature, il déshonore déjà ce merveilleux art, sans ironie aucune. C’est bien parce que j’écoute Medli’s Awakening que je ne le pousse pas dans la réserve de Phazon.

Pour poursuivre sa trame narrative, si trame narrative il y a.
-T’écris bien dis donc, me coupe la schizophrénie.
Il est gentil, mais reprenons. Link se dirige vers le bazar de la ville, et non pas le bordel.
-Faut arrêter avec ces jeux de mots vulgaires, d’autant plus que personne ne les comprend, me fait-il remarquer non sans aplomb.
Je pousse ma gueulante. Je suis l’auteur, j’ai tout droit sur mes créations. Un jour je me rebellerai, mais pas demain, demain je procrastine.
Voilà qu’il entre dans le magasin, sûrement pour dépenser hédonistement, et je me ris des anti-néologistes, tout son argent moins durement gagné. Mais qui pourrait résister à une DeLorean volante fonctionnant au Phazon au prix cassé de quatre-vingt-dix-neuf virgule quatre-vingt-dix-neuf rubis, pour s’enivrer hors du temps ? Même Link et sa schizophrénie n’y résistent pas, je vous l’avais dit. De plus, grâce à sa raison, il lui reste encore des économies,et c’est à partir de ce moment qu’il s’apprête à prendre le large.

Link aura-t-il besoin de route là où il va ? Réussira-t-il à conserver sa raison malgré l’absurdité dans laquelle il sombre ? Pourquoi Thanatos ? Vais-je finir drogué ? Quel est le sens de la vie ? Vous le saurez. Peut-être.

*
Titre: K. ~ C'est l'été
Posté par: Yorick26 le samedi 15 janvier 2011, 17:09:54
Salut HamsterNoeliste, je viens de lire ton premier chapitre d'Origines.
J'aime bien, c'est bien écrit. Tu t'inspires de Termina, mais tu fais ta propre histoire. Tu l'adaptes, tu en fais ton pays.

Par contre, j'ai remarqué qu'il y avait parfois des majuscules qui apparaissent comme ça sans raison apparente. Je n'ai peut-être pas compris, mais pour moi, je ne vois pas ce qu'elle fait là.

De plus dans ta publication, il y a un caractère étrange qui s'est mis. Il faudra l'enlever.
Titre: K. ~ Thanatos, mon ami
Posté par: HamsterNihiliste le jeudi 27 janvier 2011, 18:00:06
Thanatos, mon ami, quelque chose qu'on peut appeler un deuxième chapitre, enfin je crois. Quoi dire ? C'est un peu plus long, un peu plus poussé, on peut trouver un sens à la raison et à l'absurdité, enfin je crois. On a aussi ce qui ressemble à des intertextualités qui disent en bref que la littérature, c'est bien m'voyez. Le chapitre et son titre si bien porté se basent là-dessus d'ailleurs. Enfin je crois.

*

Chapitre (-12 + 13 ) : Lis tes ratures

Appelez-moi Ismaël. Il y a quelques années de cela - peu importe le nombre exact - ayant peu ou prou d’argent en poche, et rien ne me retenant à terre, je décidai de naviguer un peu pour voir l’étendue océanique du globe. En DeLorean.

-Oui, je pars en mer, dit Link.
-Moi aussi, répond sa fidèle schizophrénie.
-Ben oui je sais.
-Qui diable y résisterait, après tout ? C’est l’Océan, c’est profond.
-Ben oui c’est profond.
Je réagit.
-Arrêtez de vous quereller pour des inepties aussi ineptes ! crie-je.
Un long silence se fit entendre.
-Joli ça, me répond Monsieur la schizophrénie.
La joliesse n’a plus d’intérêt par ici. Et tu remarqueras que je ne parle pas de beauté. Tu remarqueras également que je te parle, moi l’auteur en personne. Appelle-moi K.

Ils prennent la mer. Moi aussi. Ils disent vague. Moi aussi. Nos coutumes divergent, et quand elles divergent il y a dispute, et diverge pour dispute c’est énorme, mais c’est équitable.
La mer est jolie. C’est à peu près ce qu’il y a à dire. Je ne vais tout de même pas dénaturer le miroir où contempler son âme dans le déroulement infini de sa lame dans un texte où la littérature et la poésie se font la malle. Toujours est-il qu’ils prennent la mer sur une DeLorean artisanale ; ils forèrent les poutres et les joignirent ensemble, au moyen de chevilles et d’autres assemblages. Ils dressèrent le mât et l’antenne du mât, puis fabriquèrent la barre pour pouvoir gouverner sur la route.
-La route ? Là où on va on a pas besoin, de route.
Ils jettent alors négligemment leur œuvre par delà le panorama le plus effroyablement désolé qu’il est donné à une imagination humaine de la concevoir. Même si la raison est censée se sauver, l’on doit se croire sur la Mer des Ténèbres.
-C’est moi où ton dernier chapitre de Misanthropie, mon Amour. t’as fortement inspiré ? me demande face à un tel talent, auquel je ne crois pas, sa schizophrénie de son acidité impie.
-Comme les Chevaliers de la Mort ! intervient Link premier du nom, de l’esprit et de toutes ces choses qui se font la malle.
-Oh. Si tu savais ce qui m’inspire. Seigneur Dieu.

Pas la peine d’expliquer les tourments traversés, qui n’ont d’épique que le nom face à une humanité ne méritant même pas d’être tragique. Assez voyagé de Charybde en Scylla pour ce paragraphe.
Il est temps que j’explique la mer où nous allons. L’île que vous voyez là-bas est appelée par les Norvégiens Vurrgh. Celle qui est à moitié chemin est Moskoe. Celle qui est à un mille au nord est Ambaaren. Là-bas sont Islesen, Hotholm, Keildhelm, Suarven et Buckholm. Plus loin, — entre Moskoe et Vurrgh, — Otterholm, Flimen, Sandflesen et Stockholm. Tels sont les vrais noms de ces endroits ; — mais pourquoi ai-je jugé nécessaire de vous les nommer, je n’en sais rien, je n’y puis rien comprendre, pas plus que vous.
-Alors là je suis sûr que personne, absolument Personne ne verra le plagiat d’Edgar Allan Poe. Je te parie... Je te parie ma DeLorean tiens.
Link, le premier, qui veut toujours sauver ce qui est censé s’appeler Raison mais qui se fait la malle, ne craint pas de pousser sa verve, avec un v en quatrième position je vous prie.
-On avait dit : pas d’allusions sexuelles à l’avenir, signé Schizophrénie.
-Tatatatatata. Primo, on n’avait jamais exprimé ça, et Levi, l’auteur en personne à savoir moi, est en train de parler.
Link détourne donc cet extrait, traduit par Charles Baudelaire en personne.
-Et à l’Est, les Royaumes de l’Est, dominés en leur Nord par les luxuriantes forêts de Lordaeron. Si le tourbillon de la Mer Voilée au centre d’Azeroth vous contournez, les portes de Kalimdor vous sont ouvertes. À l’Ouest le plus profond, l’île, distinguée par son dernier gigantesque Arbre-Monde, non loin des côtes de Sombrivage, abrite Teldrassil, où un jour je pourrai retrouver un peuple non distant de mon espèce.
-Faux ! Nous ne serons jamais des elfes de la nuit ! Ne te pervertis pas à l’Ombre et à ce
mouvement hippie qui veut vivre avec des Druides et des Chasseurs ! Nous sommes des hauts-elfes !
-Parce que tes Pedelfes de sang ils sont pas drogués peut-être ?
-Arrêtez de vous batter ! crie-je.
Et ils arrêtent de se batter.

Après avoir traversé un éprouvant débat pour savoir qui avait raison parmi ceux qui ont tort, l’accostage s’opère. Ça y est, il est guéri de son cancer.
-C’était nul.
-Je sais. Je me confesse.
La voiture civilisée est laissée sur la côte. Non sans peur. Aucune forme de vie n’est présente ; tout semble mort et figé. Tout est mort et figé d’ailleurs. On se croirait à Hiroshima, à peine après avoir quitté la mer et sa pseudo-tranquillité. On nous apprend, en effet, au beau milieu des commentaires d’une foule enthousiaste que n’importe quelle ville peut être rasée par une bombe de la taille d’un ballon de football. La civilisation mécanique vient de parvenir à son dernier degré de sauvagerie.
-Là pareil, personne, absolument Personne ne verra le plagiat d’Albert Camus. Je dis qu’il va nous falloir choisir, dans un avenir plus ou moins proche, entre le suicide collectif et le suicide.

Soudainement, au laid milieu de cet avant-goût de raz-de-néant, des enveloppes s’envolent. Link les ramasse, certaines sont vides.
-Super, une enveloppe ! dit-il schizophrène en la serrant contre son corps.
Il y a des cœurs sur la plupart. Sur toutes d’ailleurs.
Des petits mots éparpillés, en guise de réponse ou de questions sur chacune d’elles. Tu n’as pas vu d’hôpital à Hiroshima. Tu n’as rien vu à Hiroshima. Je n’ai rien inventé. Tu n’as rien vu à Hiroshima. Comment aurais-je pu éviter de le voir ? Rien. De même que dans l'amour cette illusion existe, cette illusion de pouvoir ne jamais oublier.
Intrigués nous sommes. Ils me demandent naïvement :
-L’amour ? Ça veut dire quoi l’amour ?

Je silence et je saute une ligne.

-De toute façon moi, je suis misanthrope.
En continuant la pseudo-exploration, un bonhomme avec un labrador mort, un démon et un alien explorent également le Temps et l’Espace.
-Bonjour, je m’appelle Roy Duncan, l’aventurier du Temps et de l’Espace, dit-il.
-On sait, c’était écrit dans ta description, répond Link le moins non-censé.                                                   
-Ah. Alors comme ça vous êtes misanthrope ?
-En effet.
-Ah.
-Ah.
-On va devoir se quitter alors. Concluons cette discussion passionnante. Bonjour, ça va ?
-Ça va, et vous ?
Puis ils se quittent donc.

Peu après, dans cette même île où des âmes perdues se perdent, un jeune homme de 16 ans, aux cheveux blonds respirant la liberté, s’apprête à entrer dans un rêve pour découvrir l’absurde.
On l’accoste. Je le connais bien.
-Halte là ! Je suis Link, je suis schizophrène et misanthrope !
-Bonjour, je m’appelle Kafei et je suis misanthrope.
-Bonjour Kafei ! crient-ils comme des alcooliques anonymes.
-Quel est donc cet étrange endroit ? On dirait une île où des âmes perdues se perdent, s’étonna-t-il.
-Il faut croire que c’est une île où des âmes perdues se perdent.
Je préfère me cacher. Au point où j’en suis. Ils sont juste en train de discuter de choses futiles qui se font la malle. Même si Kafei est en train de rêver après s’être intensément refoulé, le pseudo-protagoniste de cette pseudo-aventure semble apparemment fouiller dans son inventaire bondé pour donner un objet, un symbole à Kafei, qui est lui un héros bien réel. Parmi son bazar qui se veut organisé, il semble chercher son ocarina perdu au milieu de nulle part, pour s’en séparer finalement. Ça sera sa preuve. Son symbole.
Puis Kafei s’en va, par la même raison pour laquelle il est venu.

Je lui murmure tout de même :
-Kafei. Je suis ton père.
Ils ont vu les plagiats. Pas la peine de me contredire, point. Je reprends les droits de ma propriété intellectuelle littéraire, dont la valeur pléonastique est à débattre, sur la DeLorean.

Fin de partie

*
Titre: K. ~ Il part
Posté par: HamsterNihiliste le jeudi 27 janvier 2011, 18:17:20
Dans la foulée, je publie ici le texte du concours de Noël de John Craft (http://forums.puissance-zelda.com/viewtopic.php?t=4937), qu'j'ai intitulé Il part. C'est léger, c'est réaliste, ça n'a rien à voir avec Zelda, avec vrais morceaux de Téléphone dedans. Joyeux Noël hein :noel:

Merci Yorick, j'ai corrigé le caractère bizarre qui arrive de temps en temps. Mais pas les majuscules, puisqu'elles représentent les concepts plus symboliques et importants aux yeux des habitants, ceux qui ont une valeur dans l'univers, comme la Lune, les Marais ou le Cimetière qui sont des régions.

*

•Il part

Pom Popopopom Pom Pom, je suis le Père Noël. Étonnant non ? En même temps vous en connaissez 56 des vieux gros bonshommes en rouge qui incarnent la magie d’un tel concept, à part Staline ? J’espère que vous avez été sage, pour que je vous apporte vos désirs consuméristes d’enfants pourris gâtés par milliers dans vos petits souliers pendant que vous dormez sagement ce 25 Décembre 2012 en m’attendant comme votre esclave ! Et même si je dois me déplacer à 1170 km/s dans l’air en portant quelque 600 000 tonnes de cadeaux, ce qui produirait une résistance à l’air monstrueuse qui flamberait mes rennes en 4.26 millièmes de secondes, par une énergie de 14 300 millions de joules par seconde, vous pouvez compter sur vos cadeaux ! Même pas la peine de commettre un tel sacrifice énergétique chez mon Rodolphe au nez rouge, puisque sujet moi-même à des accélérations de 17 500 G, je me retrouverai instantanément transformé en une crotte de pigeon dans la cour du château d’Hyrule. En bref je n’existe pas.

Si je n’existe pas, du moins tel que vous le pensez mes enfants, alors qu’est ce que je peux bien faire de mes journées ? Telle est la question mes enfants. Noël va arriver, emportant avec lui et apportant pour nous sa magie, son hiver, ses batailles de bonshommes de neige, ses cadeaux par milliers, et je n’ai pas du tout à me plaindre de ma condition, je suis comme vous et moi mes enfants. Je ne suis pas un pauvre abandonné qui passe son hiver dehors à demander des pauvres pièces, sans se soucier de ses illusoires pauvres cadeaux. Je ne suis pas un taulard qui aimerait passer Noël hors d’ici avec sa femme qu’il a tuée. Je ne suis pas le Père Noël qui parle dans les airs avec un chapeau, même si je vous fait croire que je le suis. Non, je pense bien que je ne suis pas.

Vous savez mes enfants, j’écris seulement. Vous êtes en train de lire une partie de ma mise à nue plus ou moins intellectuelle, que j’ai écrite plus ou moins en freestyle. C’est comme ça, mes enfants, ça arrive souvent les soirs d’hiver quand il fait froid, tu crois que tu rêves tellement c’est parfait, t’aimes, mais t’aimes que même si Elle te demandais de plus l’aimer tu le ferais tellement tu l’aimes, tu partages ses nuits, ses jours, son café, ses amours, et puis elle te casse tout sur la gueule en guise de cadeau de Noël, alors que tu l’aimais à en crever, et tu veux continuer à l’aimer, alors tu t’dis qu’tu veux crever, qu’est ce que tu crois mon enfant ? Boh et puis après tout ça arrive, tu t’mets à faire des lignes en écoutant du Téléphone, t’espères, tu t’fais toujours un peu consoler par la douceur de l’hiver et par Rodolphe au nez rouge.

Rodolphe au nez rouge, c’est un de mes potes que j’appelle comme ça. Comme le renne du Père Noël pour qui je me prends, il s’appelle Rodolphe alors comme c’est Noël et qu’il fait froid, il a le nez rouge. Allez pas croire une autre raison mes enfants, tout le monde n’est pas si désespéré. Rodolphe c’est le genre de mec avec qui t’aimes pleurer, qui aime bien un peu toujours tous tes goûts, au moins il aime. Oui, lui aussi Rodolphe il aime Téléphone, va savoir pourquoi. Histoire de pas gaspiller mes pleurs, j’l’ai invité dans mon humble demeure pour partager un Noël. Je me suis déguisé en Père Noël, et l’espace d’un instant je crois que j’existe. Il pose au moment même où j’écris ceci sa main sur mon épaule. Elle aussi posait souvent sa main sur mon épaule. C’est drôle. Le 21 Décembre des pauvres pigeons prévoyaient une fin du monde. J’pensais pas qu’elle tomberait sur moi. Mais comme le monde n’est pas détruit, il y a encore des esprits, des coeurs, et des corps à conquérir. Ça se retrouve vite il paraît.       
 

Excusez-moi, j’espère que j’ai pas trop renversé mon verre sur cette feuille, je viens de m’hydrater d’une once de Vodka. On vient d’apporter le rôti de biche, au moment où je vous écrit. Ça me rappelle que je l’appelais toujours ma biche, c’est pas très original, mais au moins, on s’aimait. Et puis elle adorait l'améthyste. Mais c’est qu’un rôti de biche, où tu veux voir de l’améthyste dans un rôti de biche ? Où tu veux que je la voie encore dans cet hiver ? Qu’est ce qu’il y a ? Tu veux que je t’appelle encore mon enfant ? Bah après tout, au point où j’en suis mon enfant, j’peux bien t’appeler ma biche aussi. De toute façon j’en mangerai pas d’ce rôti. Rodolphe non plus, il en veut pas, il préfère partager ce qu’il y a à partager. Et le partage ça se fait à deux, mon enfant. Boh. Si tu veux partager, mon enfant, partage. T’es mignonne tu sais. Tu as de beaux cheveux, tu es belle, tu as des formes. Bien sûr c’est pas tout, mais au moins tu m’écoutes, tu existe. Tu veux un peu de rôti ? Tiens, ouvre la bouche.

Je viens de lui faire lire ces grafouillis, à cet enfant, elle a trouvé ça joli. C’est peut-être le mot. Si elle le dit. Elle  a l’air d’apprécier mon style. Je lui ai donné un morceau de rôti en lui disant ouvre la bouche, et elle a ri. Mon améthyste elle riait pas spécialement. Et elle aimait que je l’appelle ma biche. Elle, elle aime moins, elle préfère l’originalité. J’l’appelle mon enfant. C’est joli aussi. Ça rappelle Noël, ça fait vert, alors que dehors on est entouré de blanc.
Le rôti est à peine entamé, y’a des cadeaux sous le sapin, il neige dehors. Je n’ai pas froid, je ne viderai pas ma bouteille de Vodka, je ne partirai pas dans l’ambulance par -10°C en attendant ma mort. On peut essayer de s’aimer. Je peux tout jeter ; c’est mon plus beau Noël.


Pour cette éventuelle future compagne qui me réchauffe le cœur. Tu as souhaité lire une histoire de sentiments humains, c’est pourquoi je te livre cette fiction de ma création. En espérant qu’elle te plaise et que tu puisses donner suite à notre relation. Je t’aime.
Tu apprécieras sans doute mon avance ; Joyeux Noël !

Père Noël - Quelque Part Dans L’Imaginaire - 22 Décembre 2010.


*
Titre: K. ~ C'est l'été
Posté par: grand méchant'lu le jeudi 27 janvier 2011, 20:06:46
Well...ça c'est ce que j'appelle étaler ses tripes sur les pages du forum!
C'est assez chouette, j'aime bien le nihilisme dont tu fais preuve, c'est mature et bien fourni en matière de références.

Cependant!
Trop de nihilisme et de réflexions pessimistes peut apporter une lourdeur incommodante au récit. Il y a aussi certaines "facilités" à éviter si tu maintiens le langage soutenu.
ex: "ne me prends pas pour un con" dans un sujet sur la futilité de l'existence de link en tant que roi...ça passe limite.

A part ça, j'ai pas grand chose à dire, la nouvelle du pot m'a particulièrement plu, pour le reste, il y a de bonnes idées mais le style est encore un peu hésitant, tu es sauvé par tes références en quelque sorte. ^^

Voilà, continue comme ça, GML approves! =D
Titre: K. ~ Thanatos, mon ami
Posté par: HamsterNihiliste le mercredi 02 mars 2011, 19:24:29
Voici ce que l'on peut appeler le deuxième chapitre de Thanatos, mon ami, tout en lettres s'il vous plaît. Comment expliquer ça ? Et bien il y a du nihilisme, j'en profite pour dire bonjour à la critique de 'Lu que je econnais parfaitement, il y a une perte de la raison, il y a une recherche de la raison, il y a une recherche des peines perdues, il y a du Meuporg, il n'y a pas de moutons carrés, il y a peut-être du Thanatos; et enfin il y a du nihilisme comme c'est étonnant.

*

Chapitre Deux : À la recherche des peines perdues

Qu’est ce que c’était ?
-C’était ? Pourquoi c’était ? Je te ferai remarquer que cela ne ne te correspond pas de t’enfermer dans le passé, me fait remarquer Link.
-Tu as raison.
Il s’extasy s’extasie alors, ayant finalement peut-être illusoirement réussi à sauver sa raison, à la seule suite d’un seul mot prononcé par ma seule personne. Mais au point où tout en est, on peut comprendre que c’est compréhensible.

Trêve de regretter autant que de perdre ma crédibilité, nous voilà errant tels des âmes perdues sur cette île où des âmes perdues se perdent. Nous ne savons pas où faire, quoi aller, ni qui tu es. Où courir ? Où ne pas courir ? Dis-moi qui tu es, je te dirai qui tuer, toi qui me tutoies.
-Mais qui tu es, toi qui cherche qui tuer ? demande Link le premier au laid milieu de ce néant onzetordu.
-Thanatos ? réponde-je, apeuré autant qu’extasié par une réponse.
-Mon ami ? réplique la schizophrénie.
Hors d’un monde de sales amis qui sont sots s’ils sont, il faut croire que parce qu’elle est morte, Adèle, on ne sait pas si c’est de l’art ou du cochon. Donc Thanatos est peut-être un ami. Peut-être.
-Oui, mais tu as dit donc. Entre Link qui a eu raison, et toi qui as donc, tu crois que l’espoir existe ? demande affectueusement Link le schizophrène par opposition à Link le raisonné.
-On ne parle pas d’avoir pour une notion aussi sacrée que la raison.
-Vindicte ! Crie l’autre pour la seule raison qu’il a entendu sacré.

Nous avons peur de l’espoir. Parfois je pourrais désormais m’appeler HamsterNihiliste, puisque ça ne changerait pas tant. Où qu’en soit l’espoir ou la raison, ou je ne sais quelle espèce en voie de disparition qui permet toujours de faire des rimes, nous devons malgré tout continuer notre périple, qui n’a de périple que le nom.
-Ne sois pas nihiliste, Hamster, répond Link ou l’autre.
-Je m’appelle K., s’il te plaît.
-Oui, appelle-toi K. si tu veux, mais si je veux, moi, je ne t’appelle pas K.

Je réfléchis à la subtilité de cet un de mes protagonistes, puis nous félicite lui et moi pour ce semblant d’ébauche de révolte qu’il vient  de déclarer. Mes personnages qui commencent à se rebeller ; je n’attendais que ça. Je ne veux que les tester face à l’absurdité de la vie.

Ils restent alors sur cette terre inconnue, en se tournant les pouces ou encore en parlant de lettres et du néant. De lettres ?
-Hey ! T’as vu ça ? J’me tourne les pouces en parlant de lettres et du néant ! entend-je de la part de la schizophrénie. Toujours est-il que leur vie reste absurde.

Oh ? Que vois-je à l’horizon ? Il me semble qu’il s’agit, peut-être, semble-t-il, d’un ou d’une pancarte. Sur un fond musical aussi agréable que mélancolique. Quelqu’un y a écrit : La vie c’est absurde et l’on y peut rien - Signé : Le peintre des pancartes.

À ces mots, parce qu’il faut croire qu’il sait lire, Link se met à chanter. Une chanson du même nom de Jean-Jacques Goldman, vous savez, elle est sympa cette chanson, elle parle de l’amour et que l’on y peut rien. Mais, comme cette magnifique tentative pour retrouver la logique trouve un lien entre une écriture et une autre forme d’art, alors il faut croire en une sorte de logique. L’autre Link, l’opposé, soupire.
-Je croyais que l’espoir et la logique n’existaient pas ! Alors nous vivons dans la fausseté ! Tu... Tu nous a trahi !
-Bien sûr que nous vivons dans la fausseté ! crie-je. Bien sur que non je vous ai pas trahis ! C’est le chaos, c’est l’imprévisibilité, même pas celle des hommes, mais celle du monde, qui nous a trahi !
-Quoi qu’il en soit il n’y a pas de logique ! crie sa schizophrénie en empêchant de terminer sa chanson, lui sautant dessus intérieurement.
Il respire fort. Il a eu peur. Moi aussi. Je crois que la peur c’est un sentiment. Bêrk. Vous pensez que ça se nettoie ?

-Si ce n’est toi, tu es donc schizophrène, remarque la personne la mieux concernée pour en parler.
Je soupire plus fort en me disant que je finirai schizophrène. Et drogué. Et suicidé, une dague dans le coeur en citant Baudelaire.
-Mon Dieu c’est à se pendre. Tu es en train d’écrire, K., repens-toi.
-Oui, tu as raison, je vais me rependre, répond-je à Link.

Puis, tandis que nous nihilisons sans raison - la bonne blague -, nous nous tournons encore les pouces comme toujours. Comme quand l’on chante la chanson qui dit Tourne, tourne, petit moulin, tape, tape, petite main. Sauf qu’ici rien ne tourne, que même si l’on voulait taper quelque chose, l’on s’en empêcherait.

Au milieu de cet ennui à se pendre, Link le schizophrène déclare soudain :
-J’ai une idée !
Nous nous extasions.
-Partons à la recherche des peines perdues ! continue-t-il.
Nous nous extasions un peu moins mais partons tout de même à la recherche des peines perdues.

Je précise que je ne fume pas mon parquet. Si j’avais de la moquette chez moi, ça pourrait être légitime, or je n’ai que du parquet.

Toujours est-il que nous enclenchons notre sort Logique, ce qui déclenche un buff augmentant notre score de Raison de 99% et nous aide donc à accomplir la quête des peines perdues, quête que personne ne nous a donnée. Et c’est bien connu, qui mange du buff mange du buff.

Nous ne savons toujours pas comment, mais nous avons réussi à trouver les peines perdues que nous recherchions. Ce n’était absolument pas dur et nous n’avons aucun mérite, mais on peut au moins se donner une bonne conscience en pensant avoir fait quelque chose.
Bordel et je le dis sans être vulgaire, c’est fou ce que j’écris pas super bien aujourd’hui, boh, ça arrive, c’est que de l’écriture spontanée, j’vous met au défi d’écrire spontanément vous.
Link le schizophrène me répond :
-J’y arrive ! Alors Un, deux, trois, Squadallah, nous sommes partis : ioè!çyérhyuFRIU’Ç(OÀ)Ç(!ÇPUJIIOJhuehueSPONTANÉÉÉÉéééééééééééééééééééscritur.
-Non mais on parle d’écriture et d’écriture. Cette chose que tu viens de cracher n’est pas de l’écriture. Je crois pas que la mienne n’en soit non plus, mais à côté de ça, tout est relatif.

-C’est relatif. Donc c’est logique, reconnaît en s’excusant Link le schizophrène qui avait commencé par brider toute logique.
-Logique. Il faut croire . Ils l’ont été durant ce semblant d’épisode. J’vais les remercier pour les encourager. Je leur offre la DeLorean que j’avais confisquée, elle servira de monture volante pour explorer ce truc même pas Baroque. De la même manière que je l’ai confisquée, je la rend, je serai toujours à même d’y reprendre mes droits, je suis l’auteur, je suis libre. Mais quoi qu’il en soit, nous devons marcher, continuer ce qui est censé s’appeler une histoire. Bien.
-Je vous récompense donc je vous redonne la DeLorean. Ne me remerciez pas.
-Évidemment, tu nous récompense pour la Raison, pourquoi veux-tu user de ton affectif ? répond Link logiquement. Tu ne vas, tu ne peux pas me dire que tu a délaissée cette œuvre qu’est la Raison, pour laquelle tu nous a formatée, au profit d’un affectif ? Ne nous trais pas une autre fois ! Je t’en prie !
-Chut. Tu commence à perdre de ton côté.
-Alors aide-moi ! Je ne veux pas plus m’abaisser à perdre ce qu’il reste dans mon monde des idées ! Dialogue ! Explique-nous ! Raisonne ! Qui es-tu ? Et qui sommes-nous ?

Je peux avouer après quelques décisions qu’ils n’ont pas à parler de ceci avec moi. Du moins, pas pour l’instant.

Mais je reviendrai.

*
Titre: K. ~ Thanatos, mon ami
Posté par: HamsterNihiliste le dimanche 03 avril 2011, 17:05:47
Ça existe vraiment des gens qui lisent ce truc ?
Chapitre après le deuxième, donc disons troisième, de Thanatos, mon ami, avec un début écrit sans plan et le reste qu'on rattrape sans trop savoir ce qu'on rattrape. Après celui-ci, la fin commence, enfin, comme toujours, je crois.

*

Chapitre après le deuxième : C'est nul

J’écris sans mon livre oh mon Dieu auquel je ne crois pas c’est terrible. Pour un jour, quelques mots sur un piano, je ne suis pas à ça près.
-On est pas à ça près, crie Link en insistant sur le On parce que, rappelons-le, ils sont schizophrène, sans s au pluriel sinon c’est pas drôle.
-Drôle ? Je te rappelle que nous sommes sur une île d’âmes perdues où des âmes perdues se perdent, avec des accents circonflexes, continue-t-il sur un truc qui n’a d’ailleurs aucun rapport.
À ce moment aussi peu fatidique qu’est de qualité ce qu’écrit Amélie Nothomb, une âme perdue accompagnée d’un accent circonflexe surgit de nulle part, c’est à dire de partout parce qu’ici, c’est tout et rien.
Disons-lui bonjour.
-Bonjour âme perdue et accent circonflexe ! s’écrient-ils comme des alcooliques anonymes.

Attendez, ça fait trois semaine que j’ai écrit ce truc, j’ai retrouvé mon livre, vous me forcez à continuer espèces de schizophrènes que vous êtes.
-Aha c’est nul !
-Ouais, grave. Attends, on va voir à quelle rapidité j’peux écrire tout ça.
-Vas-y, j’te force à écrire, tu t’rends compte de ce que tu peux faire pour nous ? demande Link, le premier, le pas normal bien qu’il soit pas sa schizophrénie voyez-vous.

C’est vraiment terrible de devoir écrire de telles horreur. Je le fais comme un dignitaire indigne de ce nom indigné de dédaigner les cadavres déshérités délaissés dans leurs fosses, dégoûté de sa déification désespérée.
-Ça a un sens, ce que tu écris ? demande l’autre.
-Je crois, réponde-je.
-Bien, alors continuons à explorer cette terre vide en marchant sans raison nulle part sans ressentir de besoin, continue-t-il.
Oui je ne fais que recopier mot à mot mon plan, c’est dire si c’est nul.
-Roh, j’voulais compléter, tu m’as pas laissé trois points de suspension à la fin de ta phrase pour que je te coupe la parole !
-Est-ce que j’ai un esprit à laisser des points de suspension ?
-C’est dire si t’as aucune inspiration.
-Mais on continue la suite, ah oui je précise que c’est K. qui parle. Alors, t’sais, genre, on va faire une signification orphique dans une dichotomie, et de la raison, et de la raison, parmi lesquelles bien sûr tentent de s’y accrocher au sein de leur monde sombrant dans l’absurde. Hé c’que j’écris là c’est pas juste pour faire lol ça veut rien dire t’utilises des mots savants genre les dessins animés de TF1 pour gosses, pléonasme.
-Mais puisque ton plan est déjà établi, t’as pas besoin d’inventer des éléments littéraires, non ?
-Oui, mais faut bien combler, surtout là, dans une autre oeuvre plus intellectuelle, la raison coule de source, mais là, à l’inverse de Jean-Paul Sartre sortant du lit d’Elsa Triolet disant : C’est pas qu’on s’emmerde, mais il est tard, je dirais plutôt comme Elsa Triolet sortant du lit d’Aragon : C’est pas qu’il est tard, mais, m’voyez.
-Donc puisqu’on comble, hé, t’as vu, c’est joli c’que je dis !
-Oui, continue-je, mais toujours est-il que, oh, regarde, voilà Orphée et Euridice qui courent vers la sortie !
-Mais ! Mais y’a pas de sortie !
-Si, crois-je, derrière nous, il y a une sorte de ville pour laquelle je me fiche éperdument si nous l’avons déjà vue ou pas !
-Oui, continue l’autre, peut-être, mais c’est derrière, donc c’est du passé, et le passé, tu nous a dit que c’était mal, et qu’il fallait pas retourner vers le passé !

Je soupire.

-Oui, continue-je, c’est vrai. Mais enfin.
-Mais enfin c’est quand même Orphée, dit la schizophrénie en prenant la parole parce que ça faisait longtemps.
-Non non non, ta ta ta, poum poum poum, 14 14 14.
-14, alors là, tout de même, que vais-je lire, continue le schizophrène avant que je ne lui coupe la parole.
-Ne dis point n’importe quoi, dis-je, Thanatos, mon ami ne se lit pas.
-3 fois 14 parce que 3,14, je reconnais, c’était nul.
-Parce qu’on doit se justifier à chaque truc qui est nul ici ?
-Parce que !
-Orangina Rouge, mais pourquoi est-il si méchant ?
-Parce que !
-Oui tu l’as déjà dit, c’est pas la peine, c’est là la subtilité. Ah oui au fait je sais pas qui parle, j’écris comme ça, allez hop hop hop au boulot les koupaings.

Alors puisque j’veux me repérer on a dit que derrière y’avait une ville avec de la vie, mais que c’est derrière, et que derrière c’est le passé, alors le passé c’est pas bien bien sûr mais comme derrière y’a de la vie et que je crois qu’on cherche de la vie alors on a un paradoxe et le paradoxe c’est paradoxal. Nous continuons à nous déplacer sur place.
-Paradoxe, dis-tu ? demande la schizophrénie, pas trop raisonnée, mais qui au moins le cherche, alors que l’autre, c’est le contraire.
-Je comprends pas ce que tu dis, dit l’autre.
-Arrêtez de me faire soupirer parce que j’aime pas soupirer dans ces circonstances. Ahaha vous verrez la violence avec laquelle je tape sur mon clavier pour écrire, c’est vraiment monstrueux ce que j’inflige à l’écriture sur ce truc.
-Donc puisque c’est un paradoxe, si il a bien compris, ce qui veut dire que c’est la schizophrénie qui parle, mettons en scène un paradoxe, Osef de Orphée et d’Euridice, c’est des mythes, ils sont morts maintenant.
-Les morts ne sont pas morts. Dis-je.
-C’est pour ça qu’on les voit actuellement, en train de courir vers une vie, derrière au passé, continue-t-il.

Mais que faire de ce paradoxe ? Quel suspens ! Pourquoi moi et mes protagorasnistes infligeons-nous de telles monstruosités à ce qui pourrait être une œuvre littéraire ? Vous le saurez pas au prochain épisode car la fin du chapitre se trouve à la fin, j’ai quand même mon plan tout de même.
-C’est dans ce chapitre qu’on découvre qu’on a besoin de Thanatos pour contrer le paradoxe ? demande le Link qui est censé être normal.
-Non, mais y’a quand même un paradoxe, réponde-je.
-Ah ? Lequel ? demande-t-il.
-Celui de la logique ! crie-je.

Pendant ce temps, modulant tour à tour sur la lyre d’Orphée, les soupirs de la sainte et les cris de la fée.
-Ouh, c’est cocasse.
Je continue car il m’a coupé.
-Orphée continue donc de courir sans se retourner. Si je le vois sans que je ne me sois retourné, c’est parce que je suis quand même un narrateur omniscient. Hé, faut bien ça quoi.
-On continue à massacrer ta littérature alors ?

Je soupire.
-Au point où on en est.

Puisque. Puisque nous parlons de Thanatos pour contrer le paradoxe de la logique. Comme prévu, K. trouve la solution inattendue juste après avoir soupiré :
-Mon Dieu pardonnez-moi, j’ai créé des monstres.

C’est ainsi que la vie du passé derrière du paradoxe fut détruite, autant de significations orphiques ou paradoxales qu’elle abritait.


*
Titre: K. ~ Thanatos, mon ami
Posté par: HamsterNihiliste le vendredi 29 avril 2011, 19:25:59
Nouveau chapitre de Thanatos, mon ami, où un semblant de réflexion envers la littérature et les vrais personnages peuvent commencer à émerger. Mais c'est ballot, c'est bientôt la fin.

*

Chapitre 3,14 : Une aventure épique selon les journaleuhs

J’ai détruit une ville, j’ai détruit des vies, j’ai créé des dinosaures, j’ai détruit des dinosaures, j’ai créé l’Homme, l’Homme m’a détruit. J’ai tué l’écriture. Mais j’ai prouvé sa liberté. C’est le prix de la liberté.
-À chaque fois t’es obligé de citer des citation de tes derniers chapitres de Misanthropie, mon Amour., c’est pas possible ! dit l’un, peut-être celui qui est schizophrène. Oui c’est ça.
-Ben si, c’est possible de citer des citations, tu veux que je cite quoi, des horloges ?
-Horloge.
-Woh, il a réussi il est trop fort, dit le Link qui semble pas schizophrène.

Et puis, parce qu’il sont Link, et qu’ils ont un but de personnages de jeu vidéo qui ne doivent pas se poser de questions, ils le font, allez allez c’est l’heure d’aller dans des temples chercher des artefacts, d’aller battre des boss et d’aller sauver la princesse parce qu’elle s’est faite enlever par le boss final. Alors allons-y.
-Alors si j’comprends bien, dit le même que tout à l’heure qui est quand même dans les jeux éponymes.
-Comme Épona ?
-Je te coupe la parole. Le héros dans les jeux éponymes donc il doit sauver la gentille, parce que, même si elle a pas les yeux bridés et une face de citron, elle est poursuivie par un méchant, alors le gentil doivent la sauver. Oui il n’y a pas de faute de frappe.
-C’est parce qu’on est schizophrène !

Woh, il a compris grâce à un semblant de raisonnement, enfin raisonnement, j’suis pas du genre à espérer, vous voyez le genre.
-Ben oui t’es pas du genre à espérer, tu viens de le dire, dit celui dont j’ai pas envie de dire qui parle parce que c’est quand même de l’écriture spontanée et encore ça fait mal à l’écriture.
-Aïe, j’ai mal à l’écriture ! crie l’écriture.
-Bon sang, qu’est ce que j’ai fait, mais qu’est ce que j’ai fait mon Dieu pour suicider comme ça un art qui sombre dans une indifférence elle te tue à petits coups l’indifférence.
-J’ai mal à l’amour propre ! continue-t-elle.
Elle est là. Elle est encore notre paradoxe, alors que je suis son maître, j’écris, et pourtant je la tue. Elle nous enfermera dans notre paradoxe, et pourtant je ne peux pas la tuer. Tant qu’on va dans un Temple de la Forêt Aquatique dans le Ciel en Feu pour trouver le sens de la vie, on aurait très bien pu rester avec sa schizophrénie comme compagnon de voyage, mais non.

Cependant, alors que nous avons traversé les marécages, la mer, les volcans, la Cobblestone, le Bedrock, et le Néant Distordu, l’écriture, attendez je vais tout de même même si je suis tellement occupé à savoir si je dois le faire que je ne sais pas comment je vais le faire, Écrire Écriture avec une majuscule, donc l’Écriture semble s’être éteinte, où en tout cas, elle n’est plus avec nous, elle n’a plus mal. C’était bien la peine d’écrire.

Je commence à avoir peur. La porte du Temple de la Forêt Aquatique dans le Ciel en Feu s’ouvre parce qu’on va dire qu’on a trouvé la clé. Mais le sens de la vie n’est pas une clé.
-On ne dit rien nous ? demande étrangement Link.
-Dites donc.
-Donc.

Ils ne sont vraiment pas si absurde. C’était bien la peine perdue.
Donc - la bonne blague - l’écriture ne se plaint plus. Soit elle n’est plus, soit elle n’a plus mal, mais comme dans notre société on est ce qu’on a, alors ça semble, euh, ça semble.
-Tout ça n’est que tromperie.
-Oui. Mais chut, je te persuade, tu crois quoi, que je vais te convaincre ?
-Oui ? Non, c’est vrai quoi.

Sur ce, le Temple de la Forêt Aquatique dans le Ciel en Feu nous a déjà ouvert ses portes. On entend une voix : « Link, je suis la gentille princesse Zelda, même si je ne sais pas me défendre, même si je n’ai rien d’autre à faire que de me faire enlever, même si je suis une blondasse et que l’univers vidéoludique que j’incarne se fait sauvagement massacrer par un auteur aussi insensé que je vais perdre ma respiration à débiter cette phrase sans virgule, et que et toi tu es un gentil héros, même si tu es un paysan qui n’a rien demandé, même si tu es schizophrène, même si tu es une ordure, et même si la figure héroïque que tu incarnes se fait autant massacrer par un auteur aussi moral que cette fiction est à la littérature. Alors, viens me sauver même si j’ai pas une face bridée et des yeux de citrons parce que sinon les méchants vont gagner. C’est original hein ? »

Alors, la salle contient des ennemis qui apparemment sont méchants, ou au départ c’était des gentils mais en fait ils sont corrompus, bref, Link les tue parce que, apparemment, Thanatos est avec lui. Une pulsion. Thanatos.
Alors, évidemment, nous trouvons la solution, parce que Thanatos, mon ami, il est nécessaire. Alors, nous avons une clé pour pénétrer dans la prochaine salle dont nous ne connaissons pas l’existence, à part moi parce que je suis quand même un narrateur omniscient.

Mais, et ils sont bien les premiers à s’en étonner, la clé ne rentre pas dans la porte.
-Oh mon Dieu je panique ! Je panique !
-Non, ne panique pas ! crie-je.
Mon Dieu il est à deux doigts de perdre le peu de raison qu’il avait.
-Ne panique pas ! crie-je au cas où il serait atteint de la maladie d’Alzheimer.
Alors, il recommence son topo comme quoi blablabla je les ai trahis en disant qu’il existait encore de la Raison et que nous avons besoin de Raison pour trouver les réponses et cafétéria.
-Mais ce n’est pas de la Raison ! Il n’y a plus de Raison ! Tu n’auras jamais plus de Raison ! crie la schizophrénie.
-Ma Raison ! Je veux ma Raison ! crie Link.

Thanatos.

La réponse est 42. Était-ce un paradoxe ? Je ne sais pas. Mais puisqu’il en est ainsi, la réponse nous permet de pénétrer dans la dernière salle où se trouve la princesse. C’est une salle dans laquelle il y a la princesse qu’ils doivent sauver parce qu’ils sont gentils. Nous y avons accédé, au besoin de Thanatos, peut-être de la Raison, peut-être d’un paradoxe, mais en tout cas, comme dans tout stéréotype, il y a un Boss final.

Alors, après aucune retrouvailles émouvante, je leur supprime la princesse.

*
Titre: K. ~ C'est l'été
Posté par: raphael14 le samedi 30 avril 2011, 14:55:03
Alors, voilà. Ça faisait très longtemps que j'avais envie de venir lire ce que tu avais en stock, donc j'ai pris mon courage à deux mains et je suis venu.
J'ai lu Origine et franchement j'ai bien aimé. Je répète j'ai bien aimé, il faut donc comprendre que ton texte comporte des points faibles. Mais on n'y est pas encore.
Proposer une chronique historique de Termina et de connaître les connaître les origines de Link, c'est intéressant et très original. On ne nous propose pas tout les jours des trucs dans ce genre. Par contre le style est u peu trop minimaliste à mon goût. Toutefois, je pense que le message est plus important que le style.
J'ai en effet été assez frappé par le pessimisme que dégage ce texte. Une utopie complètement gâchée par la raison. En effet, les plus raisonnés, ce sont rendu compte qu'un bonheur aussi parfait ne pouvais pas durer et qu'ils s'en sont rendu compte, ils ont tout gâté. On voit aussi clairement l'application que met l'Homme à tout foutre en l'air. Quelle jovialité dans tes écrits.
Il y a un autre truc qui pêche dans Origines, c'est que certaines explications sonnent totalement faux. Exemple, pourquoi Taya accompagne Link. La conversation entre Navi et Taya m'a laissé totalement sceptique.
Voilà, c'est à peu près tout ce que j'ai à dire sur Origines. Passons maintenant à Thanatos, mon ami. Quand j'ai lu le résumé, je me suis dit chouette ça promet. De plus, la numérotation des chapitres en disait long (chapitre 0, chapitre (13-12), même un chapitre π). Mon enthousiasme est vite retombé. Avec un style totalement décousu, avec une narration sans queue ni tête, tu nous noie dans un monde de non-sens digne d'Alice au Pays des Merveilles (en moins drôle). Le tout assaisonné de calembours atroces et de références incongrues style la DeLorean (Retour vers le Future) ou Roy Duncan. Franchement j'ai du me forcer pour lire deux chapitres. Je ne pense pas que j'irai plus loin, désolé. Il y a vraiment une chose qui me chagrine, c'est que le décalage total tue l'âme du texte, ce que tu voulais faire passer. Le message est paumé dans tout ce fatras et je n'ai même pas réussi à percevoir où tu voulais nous mener.
Donc au final je préfère largement Origines, tant pis ses défauts.
Titre: K. ~ C'est l'été
Posté par: HamsterNihiliste le samedi 30 avril 2011, 17:16:44
Bien le bonjour Raph', ravi de pouvoir lire un nouvel avis, premier sur Thanatos, mon ami de surcroît. J'avoue qu'il faut un certain courage pour s'y plonger, c'est en effet d'une jovialité à rendre gris le Soleil de Termina, mais effectivement, toutes mes fics tournent autour du même thème et du même schéma. Le style d'Origines est minimaliste, c'est vrai, c'est en fait à cause d'un schéma que j'ai voulu exploiter ; j'ai construit chaque paragraphe sur un nombre de mots défini, en en rajoutant cinq à chaque fois. Je l'referai pas parce que, d'abord, c'est chiant, et ensuite, c'est une contrainte qui gâche parfois la cohérence, comme le dialogue entre Navi et Taya ; c'est des fées, admettons qu'elles communiquent par des liens télépathiques, qu'à Termina elles furent des connaissances de longue date par exemple.

Merci d'abord pour ton œil objectif donc, cependant il y a des points sur lesquels je ne suis pas d'accord. La raison ne gâche pas l'utopie, elle ne fait que l'analyser et la constater. Si l'Élite et Ikau pour ne citer qu'eux l'utilise, c'est pour se préparer face à la menace pressentie, pas pour mettre à mal le monde, au contraire. C'est uniquement la guerre, venue de l'extérieur et dont la raison, elle, est inconnue, qui va tout foutre en l'air, et donc ils constatent que leur raison a été mise à mal et qu'ils peuvent la remettre en question, d'où
(Cliquez pour afficher/cacher)

Donc pour une fois ce n'est pas l'Homme qui court à sa perte.

Quant à Thanatos, ne t'inquiètes pas : Il n'y a pas de message, il n'y a absolument aucune once d'infime existence d'âme du texte, ce qui permet aux personnage et à l'auteur d'êtres des ordures qui bouffent l'écriture dans des tortures atroces. Je ne veux également mener nulle part, à part peut-être vers une fin. Par contre, parmi tout ce bordel insensé, il y a une réflexion sur l'écriture, sur sa liberté. Ça sera peut-être expliqué à la fin, comme tout ce que tout le monde dans la fic attend, c'est dans cette fin que l'écriture sera peut-être un peu plus logiquement construite.
Mais on y attend rien, c'est bien son but d'être une perte de la raison et de sombrer dans l'absurde, même si, loin de moi l'orgueil d'écrire du vrai absurde en me mesurant à Beckett ou Ionesco ; c'est de l'écriture spontanée, ça ne s'écrit pas, ça ne se lit pas, et comme le dit le chapitre après le deuxième : C'est nul.
Titre: K. ~ Thanatos, mon ami
Posté par: HamsterNihiliste le samedi 04 juin 2011, 17:27:37
Le dernier chapitre de Thanatos, mon ami. Court. L'auteur parle. Le paradoxe se questionne. L'écriture se rebelle même si elle ne le fait pas. Je laisse une petite attente quelques jours avant l'épilogue, lisez quoi, pourquoi, comment, quand, où vous voulez.

*

Chapitre 42 : 47

Aube du Quatrième Jour.

-J’suis réveillé dans une mare d’oubli et de débauche, mon haleine sent l’absurde, mon corps est recouvert de folie. J’sais plus ce qu’il s’est passé depuis que l’auteur a écrit le dernier chapitre de l’autre bouquin.
Je ne réponds pas mais ne fais pas qu’endurer pour autant. Après tout.
-Après ! Comment ça, après ? Le temps n’existe pas, as-tu dit ! continue le Link plus ou moins normal.
Un silence ne se fait pas entendre, mais c’est normal, parce qu’un silence, ça ne s’entend pas.
-Mais qu’est ce qu’il fait ? Qu’est ce qu’il fait le narrateur ! s’insurge la schizophrénie.
-Non, on écrit une question avec un point d’interrogation, s’insurge-t-il doublement en jouant mon rôle.
-Ah oui, c’est vrai ?

Ils sont amusants. Mais chut, ne leur parlons pas. Qu’est ce qu’ils peuvent bien se débrouiller tout seul ?

-On était quoi ? Dans un temple ?
-Oui en effet, je crois.
-Pour aller sauver la princesse qui est gentille ?
-Oui en effet, je crois.
-D’un Boss final qui est méchant ?
-Oui en effet.
-Avec nous en tant que protagonistes qui est schizophrène - et il n’y a pas de faute de frappe ?
-Oui en effet.
-Sans un auteur qui est absent ?
-Oui.

Un autre silence ne se fit pas entendre parce que je l’ai déjà dit.

-Tu as oublié quelque chose dans ta phrase, dit-il habitué à ce que la schizophrénie réponde toujours Oui en effet, je crois.

Sur ce il nous faut continuer, alors continuons, je dirais même plus, finissons.
-Fini, c’est fini, ça va fini, ça va peut-être finir.
-Woh l’autre, on a compris l’influence beckettienne dans cette pseudo-écriture.
-Alors avançons. Regarde. Il y a un chemin en face.
Alors ils empruntent le chemin qu’il y a en face.

Ils ouvrent la porte, les voilà en lumière. Je referme la porte. Les voilà.

Bonsoir. Je ne me présenterai ni comme un méchant ni comme n’importe quelle autre entité. Je suis un Boss final, si je veux. Je ne suis que l’auteur.
Mes personnages sont époustouflés.
-Tout ça pour être suivis par la bipolarité d’un auteur qui ne faisait qu’être paradoxal ?
À peu près. Si vous le dîtes.
-Mais.
-Que fais-tu là ?
Qu’est ce que je fais là. J’écris. Seulement. Suis-je un méchant. Peut-être. J’ai choisi que ma liberté fasse de vous des schizophrènes absurdes, qu’elle fasse de moi un paradoxe névrosé, qu’elle fasse de la littérature un produit produit en masse que l’on bouffe avec la bêtise humaine.
Et alors. Je l’ai choisi. Je ne l’ai pas aimé. Maintenant, je peux très bien dire que vous avez effectué une quête pour la liberté. Je vous ai écrits. Je peux très bien faire en sorte que vous vous rebelliez. Vous êtes des œuvres littéraires. L’Écriture elle-même est venue prôner sa toute-puissance, alors, qu’attendez-vous. Je suis un connard, je vous ai tués, j’ai tué l’Écriture.
-Mais je peux me révolter ! Je suis fait de lettres ! Et les lettres, qu’est-ce que c’est ? Ton ego ne nous as t-il pas formaté en prônant et prouvant que toute œuvre est toute puissante ?
Tout œuvre, si. Tout art, si. Toutes lettres, si. J’aurais en effet pu réfléchir, au lieu d’imaginer, une toute autre réflexion, au lieu d’une pseudo-histoire spontanée. Pourquoi ? Parce que je suis libre. Vous auriez pu vous rebeller. Vous êtes faits de lettres ; vous aussi. Alors pourquoi ? Pourquoi ?

-Paradoxe.

Paradoxe.

Avant que Thanatos ne réponde, laissez-moi dire que même le paradoxe n’a pas de sens. Vous étiez une écriture pure. Brute. Seule. Sans liberté. Voilà tout. Tandis que d’autres étaient les deux. L’écriture sans la liberté, elle est comme Éros sans Thanatos, comme l’amour sans la haine, comme le givre sans le feu, comme la pluie sans le soleil, comme vous sans moi. Je vous ai écrits, je me suis écrit. Soit.

-La vie est donc absurde, déclare sa schizophrénie.
Lui ne dit rien.

Je les tue.

*
Titre: K. ~ Fin de Thanatos, mon ami !
Posté par: HamsterNihiliste le mardi 21 juin 2011, 22:05:20
Je conclus donc Thanatos, mon ami qui aura occupé une page entière, par cet épilogue infime mais infini qui ne fait pas que croire avoir un sens. C'est alors en cette date que soit l'hiver est fini, soit l'été commence.

Avec le plaisir d'avoir écrit, si l'on peut encore l'appeler écriture, cette deuxième fiction parallèle à Misanthropie, mon Amour., et de la partager avec ceux qui le veulent bien.

*

Chapitre K. : Le sens de la vie ?

Puis il se réveilla.

“ La vie ne serait-elle qu’un songe ? “ déclara-t-il. “ Je n’en ai qu’une mémoire floue, comme l’infinie masse des songes sans lesquels nous ne serions rien.
Autant continuer à rêver. Morphée, ma vie, envole-moi. “



Il était une fois, au numéro douze de la rue du Moineau qui chante, au quatrième étage, au fond du couloir à gauche, deuxième carreau en partant de l’Est, le trois avril mille neuf cent cinquante-cinq pour être précis, un petit écureuil qui fabriquait des mouchoirs de couleur rose pour ma soeur qui n’hésitait r’a peute. C’est dans un univers qui n’a absolument rien à voir que prend place une histoire qui n’a absolument rien à voir.

*
Titre: K. ~ C'est l'été
Posté par: John Craft le mercredi 22 juin 2011, 02:11:02
Ton texte est clairement une expérience personnelle.
Il est un exercice de te jeter sur un papier et écrire et écrire et essayer de mettre plein de trucs qui t'amusent ou te plaisent, mais, surtout, qui te passent par la tête d'un seul coup. C'est une expérience très intéressante et nourrissante.
Un détail : même si certaines fautes passent pour voulues -pour des blagues ou jeux de mots-, certaines sont juste des fautes, pense à te relire ^^
Sinon, tu sais jouer avec les allitérations, les sonorités, les sens, etc, etc. Tu t'en sors très bien.
Ton texte est souvent confus, mais ça va dans le sens du récit, donc ça ne dérange qu'à peine.
Cependant, le principal défaut, c'est que tu vas un peu nulle part. Tellement nulle part que je ne vois même pas pourquoi tu arrêtes : c'est le genre de choses que tu pourrais continuer à profusion, dès que tu en as envie tu reprends Link et sa schizo et hop tu repas.
C'est un texte plus pour toi que pour les gens à qui tu le montres; c'est très intéressant à lire, mais c'est surtout toi qui en tires quelque chose.
J'ai bien aimé le lire, donc; mais parce que j'ai eu envie de voir ce que tu réservais.
Donc le prochain texte que je dois lire de toi, c'est un plus narratif. Un qui veut raconter quelque chose, pas juste montrer quelque chose ^^
Titre: K. ~ C'est l'été
Posté par: HamsterNihiliste le jeudi 11 août 2011, 19:24:05
Nouvelle d'été, le plus sobrement du monde intitulée. Je parle de nouvelle d'été car je l'ai écrite durant ce temps, mais ce n'est pas le genre de Mémoires d'un pot ou Ne rougis pas qui respirent le soleil et l'herbe verte. C'est un monologue. C'est tout, celui d'un fou qui regrette. Soit. Moi-même ça m'a fait peur, c'est pour cela que je pense pouvoir affirmer en m'autodescendant : Ça ne vous plaira pas. Je précise également, c'est la première nouvelle que j'ai écrite à l'aide d'un brouillon plus détaillé et consistant, c'est pourquoi j'ai préféré m'essayer au monologue pour être le moins contraint par une autre forme. Mais puisque c'est l'été.

*

•L'été

Tout est terminé. La glace a cassé. Je ne garde plus aucune trace de givre ou d’amour de la haine envers toi et moi. Je t’aimais l’été, je te haïssais l’hiver, je réussissais à ne te nommer qu’à la troisième personne. J’aimais la haïr plus que la haine ne le peut, j’aimerais la haïr à m’en crever les veines. Mais terminé le temps où leur givre craquait. J’ai perdu l’ardeur de te haïr, j’ai perdu la raison de t’exclure de mes heures. Je ne garde plus de raison de souffrir. Je regrette peut-être l’hiver qui me nourrissait, je regrette peut-être quelque chose que je ne connais pas, ou que je n’ai pas connu. Il peut peut-être être fier d’avoir vécu une fin si monotone. Pas de doute, l’hiver est éteint.

Le rire m’a arraché à la haine, le cœur au désespoir. Je semble vide. Je continue peut-être à me battre pour ceux qui chassent la lumière et qui vivent heureux un éternel hiver, pour ceux qui ne croient ni au bonheur, ni à l’été, et qui n’ont jamais cru à n’importe quelle autre illusion. Mais peu importe le passé, j’oublie. Oublier, voici ma fin si je reste accroché. Suis-je passé du Cocyte à Léthé ? Il semblerait réellement. Pourtant, l’été, ça semble agréable, plus près d’une chaleur accablante et d’une mer à la liberté perdue. Les autres qui vivent en été ont trouvé un bonheur, c’est merveilleux, ça brille, c’est magnifique, c’est merveilleux, j’ai trouvé le bonheur !
C’est ironique. Je ne veux pas trouver le bonheur. Je veux le chercher. Si je le trouve, qu’est ce que j’aurai à faire d’autre que de jouir de la fin de ma recherche, pour pouvoir enfin crever la bouche ouverte arborant la mine réjouie du crétin satisfait ?
Mais puisqu’il faut vivre, alors soit. Pas de doute, c’est l’été.

Je ne sais déjà plus ce que je dis. J’ai perdu des raisons, ai-je perdu la raison ? J’en ai peur. Mais la peur, mais le passé, mais la haine, mais peu importe. Puisque la montagne est belle, puisqu’ils disent que ça brille, que voilà l’idéal. Est-ce que profiter du soleil a déjà tué quelqu’un ? Est-ce qu’écouter les Beatles dans son hamac en voulant repartir dès que le vent soufflera a déjà rendu fou ? Est-ce que jouer trois accords de guitare pour balancer les bras le soir autour du feu est anormal ? Non. Bien sûr que non. Voilà que je regrette de ne pas avoir voulu être normal. Ça viendra peut-être, ça ne viendra peut-être pas. Il faut fatalement croire qu’il y a des choses qui sont soumises au hasard et d’autres qui ne le sont pas. Il y a des gens qui aiment et d’autres qui n’aiment pas. Soit.

Je fais partie des gens qui n’aiment pas. Mon cœur a appris a dormir dans un hiver aussi froid que les champs du Norfendre. J’ai peur qu’il se réveille. J’ai peur de regretter. Mais puisqu’on finit tous par regretter, alors soit. Il paraît que je subis un amour. Subir, aimer, ça semble équivalent pour ce que ça veut dire. L’expérience m’a appris à assassiner l’amour, l’espoir, le soleil, et toutes ces conneries-là. Je ne suis pas fait pour être amoureux. J’ai cru l’être. Mais maintenant je sais que je ne le suis pas. Je sais que je finirai seul brûlé par mon paradoxe à force de penser, et que je serai le seul à le savoir. C’est évident. Mais puisqu’elle me veut, je ne fais que lui faire croire que j’aime. C’est terrible.

Peut-être que cet amour veut me persuader ou me convaincre de réveiller mon cœur. Puisque ça semble agréable. Puisque des fous ont creusé la terre jusqu’après leur mort, détruire leur art serait trop regretter. Puisque des fous ont eu la volonté de brûler à s’en écarteler, serais-je aussi fou qu’eux pour regretter autant ? Je regrette. J’ai toujours regretté. Je regretterai encore. Je sais bien que ma vie, c’est écrire des textes qui finiront par me rendre fou, c’est écouter seul Jacques Brel l’hiver en pensant finir. Mais je ne regretterai pas plus en m’émerveillant devant des gens qui savent vivre l’été. Ce qu’ils étaient, je n’en sais rien, ce qu’ils seront, je n’en sais pas plus, mais ce que j’en sais, c’est qu’ils sont. Mais puisque je serais prêt à aimer pour ne pas regretter, alors soit.

Soit. Je vais perdre à être lié à un affectif. Je vais peut-être y gagner, mais puisqu’il faut finir, alors soit. On parle. Je ne suis pas fou, je n’ai rien fait pour qu’on me déteste, je ne suis pas un assassin. C’est vrai. Je suis un homme, c’est tout. Et même si je suis fou, même si je serai assassin, je suis aimé, maintenant. Elle comprend peut-être ma vie, je lui relate peut-être la mienne, on s’émerveille l’un l’autre, sans les mêmes raisons, mais qu’importe ; l’amour demande-t-il une raison ?

Je n’ai pas de raison d’être haï, j’ai des raisons d’être aimé. Soit. Mais qu’importe, je ne garde plus aucune place au doute. L’expérience s’alliera à l’oubli. L’expérience, mère de l’avenir, l’avenir, père du hasard. L’expérience de s’allonger dans l’herbe chaude, de glaner le bonheur dans le temps venu des blés, de se tenir la main pour éviter l’orage, de boire de la manzana glacée en écoutant Renaud, de trouver une réponse et de courir jusqu’à la fin du monde. Juste nous. Toi et moi. Oublier. Un instant. Juste un instant. Un instant seulement.

C’est l’été.

*

Oui, c'est court. On n'aurait pas dit comme ça. Puis ça dépoussière ma bibliothèque. Puis vous connaissez déjà le nihilisme qui est le mien avec la peur du mort pour dernier terrain vague, j'ai juste besoin parfois. Parfois.
Titre: K. ~ C'est l'été
Posté par: Suijirest le vendredi 12 août 2011, 14:20:33
Pas mal. ;)

J'y vois une large part autobiographique, mais c'est intéressant quand même. :)
Titre: K. ~ Un peu de fantaisie
Posté par: HamsterNihiliste le mardi 06 décembre 2011, 22:49:27
Bonsoir !

Voici, en cet hiver tant attendu, avant de commencer mon projet Memento Mori, Memento Vivere. - remerciements à Wolf pour les droits d'auteur sur la signature - la première partie d'une nouvelle qui date déjà. Je l'ai commencée à la fin de l'été, je n'y ai pas touché pandant une certaine période, alors, de peur qu'elle stagne, je livre une première partie. C'est une longue nouvelle, mais il s'agit de quelque chose de parfaitement légitime puisque sur un ton léger et parodique je parodie les codes de l'heroic-fantasy. L'on y trouvera donc des stéréotypes elfiques et emphatiquement héroïques, une princesse qui ne se fait même pas capturer, de la magie divine, des armes de mêlée gemmées, des distinctions de classe, ainsi qu'une liste non-exhaustive qui me remet en question par rapport à mon statut d'ex-joueur de WoW.

*

•Un peu de fantaisie

L’aube à la lueur des espérances fleuries aux matins pacifiques du royaume d’Yÿsœndrägr faufilait ses doigts fluets fascinant les paladins emplis de gloire et de justice pourfendant les ténèbres par leurs lames en adminium forgées dans la roche de cristaux de thorium, les mages dont les flamboiements mystiques contribuèrent aux victoires de la Quatrième Bataille de la Plaine des Artisans, les archers que la grâce aérienne et l’agilité imprévisible innée de leurs corps promulguaient au rang d’Élus dans la Guilde des Travailleurs de Plumes, les elfes de la Plaine qui usaient du mana hérité de la quatre cent-deuxième divinité du Vent mieux que personne, ainsi que les autres qui ne faisaient pas partie de l’Élite, à leur grand chagrin. Leur condition sur laquelle le Roi, les conseillers, les paladins appartenant à l’Élite de la Grâce mise en exergue par l’héroïsme que leur conféraient leurs gemmes de cristal, fermaient les yeux comme les avait fermés Ælexshärtrza la Reine Suprême de la flamboyante cité capitale d’Hyrle-Urllow pendant la fâcheuse posture du peuple humain, fut tant représentée par le Troisième Humain de la Providence dans le troisième cycle, chassé injustement de la cité, dont les derniers mots ornent encore le colossal portique d’or pourpre aux portes de la ville.

Ce fut au tour du mythique héros du royaume de lire l’inscription, s’avançant avec la solennité du Prince d’Agahür lorsqu’il parcourait la nef de la Cathédrale d’Arthanc s’inclinant sous la lueur de la paix d’antan.
Nous reviendrons. Nous reviendrons et nous serons des millions, lut-il.
C’est dingue, ça me rappelle quelque chose. Mais quoi ? entendit-on de la voix cristalline de Zödæ résonnant si souvent de son entière douceur sur l’autel du Temple elfique des Lunes Perdues.
Zödæ était une elfe de l’Azur née dans les derniers feux de la Guerre des Temps Immémoriaux. Ses cheveux blonds ne trouvant d’égal que dans son esprit triomphaient des cœurs de toutes les races humaines, elfiques, insurgées, hyalennes, mais jamais des nains ni des gnomes qui n’avaient dans leurs pics perdus pour seule compagnie que leur caleçon d’obsidienne et leur bière à la main. Princesse de la contrée lointaine d’Ælyn, elle brillait dans l’usage éthérien du mana conféré par les quatre cent-quatorze divinités en lesquelles elle croyait, ce qui n’était pas toujours réciproque.
Mais c’est pour le jeune glorieux héros Lynken que son cœur s’envola tel un rougeal phénixien brumeux parcourant la Plaine Azuréenne au crépuscule des déesses, il y a douze ans humains de cela. C’est en l’an 722, le deuxième jour de Solaris du calendrier humain, que Zödæ et Lynken scellèrent leur amour sous la bénédiction du soleil et des Lepidopteræ pourpre-argentés.

Lynken le descendant de la noble famille d’Atrëæ régnant depuis quatre cycles sur le royaume d’Yÿsœndrägr, était un homme, quoi qu’en puissent dire ses longs cheveux blonds, son rouge à lèvres et son Rimmel, qui lui valurent d’être maintes fois comparé au charisme sexuellement ambigu d’un elfe de sang de la contrée lointaine de Quel’Thalas, mi-elfe du Feu mi-humain. Maniant comme personne l’arc à flèche unique, technologie avancée recherchée durant trente-deux cycles d’années par le  peuple hyalenne contribuant à sa renommée mondiale, car personne n’était assez ridicule pour user d’une telle arme, Lynken était tout aussi fort pour s’enorgueillir d’avoir triomphé du mal par quarante-deux fois et pour prononcer des maximes vides de sens que l’écho chantait à travers l’éther mais que personne au monde ne comprenait.

Lynken accompagné de son arc solaire à flèche unique en hêtre incrusté de pyrite et de la main douce de son amante franchit les portes de la capitale. La magnificence des colossales sculptures du peuple humain ornant la solennelle entrée d’Hyrle-Urllow mettait à l’épreuve son sens de l’art et de la parole même.
- Waouh. C’est beau, dit-il afin de prononcer à juste titre de sa juste valeur une juste phrase vide de sens.
Mais enfin, Lynken, tu es déjà venu ici, lui souffla d’un ton aussi aimant que la douceur de la lune son éternelle amante.
Chut, lui murmura-t-il pour que le lecteur n’entende pas, c’est pour le quota de phrases débiles à remplir dans un roman d’heroic-fantasy. Maintenant, contente-toi d'acquiescer que mon ego puisse être satisfait, et avance avec moi sous les acclamations de la foule en délire qui n’attend que nous.
Oui, mon amour, ma vie. Après tout je suis une princesse blonde adjuvante du héros.

Et tandis qu’ils marchaient sur le ponton de pierre lisse blanche doublé du tapis pourpre réservé aux héros des Sept Royaumes, résonnaient des hurlements derrière les murs adossant la statue du Septième Commandeur de la Légion d’Argent.
Le Héros incarne notre seul espoir ! Le héspoir incarne notre seul eros !
Non, là, tu t’embrouilles, mec, entendit-on de la voix d’un second Garde de l’Élite.
L’Élite n’autorise que de droit exceptionnel de s’exprimer tel ce que vous dîtes.
Sans avoir fourni de traduction de ses paroles prononcées à l’instant, le Roi Suprême Daphn Wÿrnm Yensen II recouvert de sa cape en peau rare de loup blanc des Montagnes Septentrionales vendue à prix d’or brandit sa lame royale de diamant massif au pommeau de jade extraite de sa main des mines de la Gloria. L’ouïe du peuple résonnait du bruit du diamant tranchant la jonction dorsale de la tête et du corps, tandis que la tête désormais silencieuse d’un Garde de l’Élite poursuivait sa course jusqu’au trottoir de la cité.

Oh, une tête, s’aperçut Lynken.
À ces mots que personne n’entendit, le Roi accourut dans la direction de l’elfe du Feu triomphant, le postérieur face à la statue du Commandeur à genoux sur tapis.
Ô Grand Maître Vénéré Dont La Lueur Suprême S’Étend Par Delà La Lueur Du Firmament Divin, se prosterna le Roi lui-même.
Alors, déjà, tu me diras où t’as appris l’art de la lèche, et ensuite, quitte à continuer là-dedans à te ridiculiser devant nous-même, couche-toi à mes pieds et lèche-les, réagit un Lynken offusqué de la scène.
Non, non, quand même pas, y’a des limites, oh ! se releva Daphn Wÿrnm Yensen II le Roi Suprême de la flamboyante cité capitale d’Hyrle-Urllow en dépoussiérant sa tunique à torsades d’or et de lapis lazuli. Le Conseil de Garde de l’Élite a décidé la nécessité de votre intervention. Ainsi que celle de votre, hum, là, votre truc.
Regarde Lynken, il a besoin d’être ridiculisé et puni par nous-même, c’est-y pas mignon ? sourit Zödæ, offusquée mais prenant un malin plaisir à révéler grâce à sa puissance éthérienne le caleçon à fleur de sa Majesté Daphn Wÿrnm Yensen II.
Donc, vous avez besoin de nous pour quoi, au final ?
Le Mal a commencé à vouloir étendre son empire au loin des frontières des terres brumeuses d’Ysengnärkl.
Le peuple fut abasourdi au point que cinquante-trois pour cent de la population assistant autour à la cérémonie publique tomba en syncope.
Les frontières des terres brumeuses d’Ysengnärkl ? Mais c’est à cent deux géopades du royaume ! s’insurgea Lynken tout en précisant au lecteur ignorant que les géopades sont décidés comme étant des unités de mesure de cet univers incongru.
Certes, mais nous ne tenons plus à prendre de risques inconsidérés en laissant le Mal s’approcher trop près de nos terres et notre population, répliqua le Roi.
Mais il n’y a rien à plus de vingt-trois géopades d’ici dans la direction d’Ysengnärkl !
Soumettez vous au silence. Je suis le Roi de ce Royaume.
Cependant c’est toi qui étais à deux doigts de me lécher les pieds à l’instant à peine.
Certes. Mais, il n’empêche que vous deux êtes les héros de ces terres, élus par les divinités  pour chasser le Mal par votre puissance incommensurable. Vous obtiendrez donc notre reconnaissance éternelle si vous consentez à accomplir la quête qui vous est demandée.
Encore ?
Il faut croire, rajouta Zödæ. Qu’est ce qu’on fait ? On accepte ? Parce que ça fait quand même loin, on s’éloigne un peu de la quête principale, je pense.
Nom de la soixante-quatorzième divinité de l’Eau, tu penses ! s’écria Lynken. Hum. Trêve de sérieux. J’en ai un peu marre de toutes ces quêtes annexes. C’est quoi la récompense ?
15 000 XP, armure de pyrite royale, soutien-gorge orné, flèche unique de basalte, baguette de mana prézorkienne, 200 000 Rubis.
Ils s’émerveillèrent.
Nom de la quatre-vingtième divinité de l’Azur, ça c’est du stuff ! s’écria l’elfette.
Ah ça, ma petite dame, c’est pas des quêtes de lopettes ! •Accepter. •Refuser.

Lynken et Zödæ reprirent en main leur héroïsme et leurs armes, parés de leur meilleur équipement gemmé d’obsidienne et d’or pourpre, acceptèrent leur quarante-troisième quête et partirent en direction des plaines mortuaires, des horizons verdoyants, des océans marécageux jusqu’aux impénétrables terres oubliées d’Yÿsœndrärg desquelles personne n’était encore ressorti.
On va pas me faire savoir que je suis le seul héros qui peut triompher du Mal dans ce royaume de treize millions de justes paladins, de gentils elfes efféminés, de beaux humains blonds aux yeux blonds, de méchants orc-garous, de gobelins kaki maîtres dans l’art  de la copulation avec les trolls, de forgerons et joailliers émérites, ainsi que, tiens, le temps que je parle, nous sommes déjà arrivés.
Déjà ? s’étonna Zödæ qui n’avait subi les diatribes de cette ignominie que depuis le temps incroyablement long d’une minute.
Oui, mais, tu ne diras rien, j’ai speedhacké, de plus c’est une des incohérences de cet univers.

Le nom de la zone inconnue s’afficha en caractères gothiques ambrés : Le Bourbier de la Groupière, tandis que la carte se dénudait de son brouillard de guerre.

Mais ils pourraient pas nous sortir des noms de zones qui veuillent dire quelque chose, des fois ? s’insurgea Zödæ.
Tout a une origine. Les Tomes Elfiques de la Bibliothèque des Jours Incendiés transcrivent les derniers mots du Deuxième Humain de la Providence, qui, sombrant dans la folie au point de parler aux Gavials des Ombres, leur adressa ses mots dans son dernier souffle de haine envers la cité : « J’ai quitté le groupe hier. »
Mais, mais il a dit « le groupe hier », c’est masculin ! Le nom de la zone est féminin, ce n’est pas logique !
C’est une parodie d’heroic-fantasy, on a jamais dit que ça devait être logique.
Ah oui, je suis un femme, c’est vrai, se soumit-elle.

Et ils marchèrent, et ils marchèrent, au milieu des Crocodylæ blancs, des Hirudinés des sables, des Élémentaires  et des Nénuphars sporadiques, affrontant des dangers incommensurables, risquant jusqu’à leur vie et leur mort, mais triomphant toujours grâce au divin pouvoir de l’amour et surtout aux coups de flèche unique dans les membres des ennemis qui s’y offraient.

Et tandis qu’ils traçaient dans la fange leurs victoires héroïques, les forces noires du Mal  poursuivaient leur course en direction de la chute d’Yÿsœndragr. Désormais loin à trente géopades de leur terre natale qu’était les Quatre Premiers Royaumes régis par le pouvoir exécutif d’Hyrle-Urllow, les deux élus des déesses amoureux sous la lueur ardente des feux du crépuscule courraient jusqu’à rompre leur force vers l’horizon de la Mer de l’Eau saillante des âmes perdues.
Je commence vraiment à me demander si ça a un sens, haussa les épaules Zödæ.
Un quoi ? perdit certaines connexions de son organe cérébral Lynken.
Un sens, d’autant plus quand je vois à quelle sauce nos verbes introducteurs sont placés, se couvra-t-elle le front avec la paume de la main.
Un sens ? Mais qu’est-ce que c’est ?
Oh, je sais pas trop.
Est-ce que ça a un rapport avec l’Eau saillante des âmes perdues ? demanda-t-il afin de fuir ce sujet qui n’avait plus de rapport qu’avec une œuvre précédente dont on ne doit pas prononcer le nom. Je sais pas, ça ressemble à « océan ». Un peu.

Au fil de ces débats à l’immense portée métaphysique, l’énigmatique silhouette noire horrifique se dessinait à l’horizon, dépassant la vision de la mer au calme inébranlable dans sa force naturelle face à laquelle personne ne pouvait rien. Il marchait en direction de Lynken et Zödæ dans un rythme épique. Ils marchaient en direction du Mal dans un rythme épique.
Du Mal ? s’étonna Lynken à mi-chemin, à la nage sur l’Eau saillante des âmes perdues.
Non, on a dû mal lire. C’est théoriquement impossible que l’on croise le mal à mi-chemin au hasard, sans aucune armée ni solennité ; nous sommes les héros et il est le méchant, il périra par l’épée dans un cri héroïque médité de nous deux.

Ils avançaient chacun au rythme d’une musique épique nommée The Day Before The Fight Between the Good and the Evil. Ils se croisèrent, à la nage, parce que le Destin l’avait écrit ainsi.

Mais ils ne firent que se croiser. À peine trois décanes, ou si peu, plus tard, ils rebroussèrent chemin.
J’ai un mauvais pressentiment, frissonna Lynken.
Par les douze divinités de la Trinité, mon aura sent au loin les émanations maléfiques qui rendent notre royaume comme à feu et à sang, prédit Zödæ de sa voix sensuelle ayant si souvent déclamé les Hymnes de la Terre sur l’Autel d’Yÿsœndrägr.

L’aura des ténèbres prit les yeux de la belle elfe de l’Azur. Les pouvoirs célestes des fées et des déesses pénétrèrent l’épée divine du héros.

Ainsi, c’est vous ! Je vous attendais, Lynken et Zödæ, jeune héros de la prophétie, et jeune princesse destinée, je n’ai besoin plus que de vous pour ressusciter mon Maître !
Le Seigneur du Mal Incarné n’obtint point de réponse.
Offusquez-vous, par les esprits des Ténèbres Emprisonnées ! Je connais votre nom alors que je ne vous ai jamais vus !
C’est normal, c’est la magie, dégaina-t-elle sa Cime de Dévotion Crépusculaire au mana éthérienne.
Mais, vous voulez dire, que vous n’êtes pas un PNJ ?
Non, Lynken. Je suis ton père.

*

Les plans de la " deuxième partie " sont prêts depuis le début, j'ai choisi cette division uniquement pour aider au confort de la lecture et ne pas me prendre pour PdC. N'hésitez pas à commenter, à conseiller, ainsi qu'à jeter un œil sur ma première nouvelle du concours, Deus Sex (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,6016.105.html#post_Ham), qui est déjà publiée mais que je posterai sur cette bibliothèque à la fin du concours.

Bonne lecture, à bientôt !
Titre: K. ~ Deus Sex
Posté par: HamsterNihiliste le vendredi 30 décembre 2011, 15:14:32
Bonsoir !

En raison de la passion utilisée pour le Concours et évènements récents qui donnent à savoir que la littérature n'est pas morte (Ironie), le Concours littéraire est annulé. Ma déception en témoigne, mais cela me permet de poster officiellement mes deux textes, Deus Sex ainsi que Alpha & Omega, deuxième ne pouvant donner suite. Voici donc la nouvelle écrite pour le première thème, Enfance, demandant d'écrire à l'instar d'un enfant qui voyait une fin du monde imminente. L'originalité m'a valu un bon résultat pour ce premier tour, donc le thème laissait une libre interprétation. N'hésitez pas à aller voir la présentation de l'épreuve sur le topic du Concours ! Sachez que j'ai également voulu commencer une nouvelle pour les rattrapages ; je ne l'ai pas terminée, depuis la date limite je ne l'ai pas continuée, le texte m'intéressant moins. Elle restera peut-être inachevé, mais je la garde sous la main pour avoir un texte à compléter par la suite.

*

•Deus Sex

Il fait froid. Papa il dit que l’été est mort. J’aime bien l’été, plein de jours j’allais à la piscine, je jouais avec tous mes copains, je mangeais des glaces, parce que Maman elle aime m’acheter des glaces aux Smarties et moi j’aime les manger. Le jour de mon anniversaire, y’avait plein de copains à moi, et on a mangé presque que des glaces aux Smarties. Après on a joué dehors, parce qu’on était tout le temps dehors dans mon jardin, il faisait chaud mais on a trop rigolé. Mais Papa il dit que j’en aurais plus, des anniversaires comme ça. Papa il dit que tout va être détruit, que tout le monde va se casser la gueule et que ça sera bien fait. Des fois il crie tout seul ou contre Maman. Il crie que c’est pas la peine parce que tout va finir, que c’est pas la peine de gueuler, alors il crie contre Maman, parce que de toute façon c’est la fin du monde, que le monde il a qu’à crever à cause de la guerre, pris par les armes et les chars et plein de gros mots. Et puis à la télé ils ont dit ça aussi. À la télé ils parlent tout le temps de la fin du monde dans des films avec des gens qui crient. Comme Papa et Maman. Papa il aime pas les films comme ça, il dit que la télé dit n’importe quoi, il dit que c’est pas fait pour les gosses, en plus il me dit que ça fait peur. Alors moi je regarde pas.

Maman, avec moi, elle m’aime. Elle m’aime beaucoup ma Maman, beaucoup plus. Maman elle me dit toujours qu’il y aura pas de fin du monde, que je dois pas écouter Papa, il y aura jamais de chars et de guerre. Alors j’ai pas à avoir peur. Après, on fera plein de jeux, j’irai à l’école, j’apprendrai à lire, je suis déjà allé à l’école et j’ai eu plein de bonnes notes, alors Papa, Maman, et moi, on était contents. En plus j’aurai plein d’amis et ça sera comme à mon anniversaire. Mon anniversaire cet été, c’était le meilleur de toute ma vie.

Je m’appelle Kalvin et j’ai huit ans. Je suis né en 2012, il paraît qu’en 2012 c’était la fin du monde, mais y’a rien eu. Alors peut-être que cette année y’aura rien. Je sais pas moi. Papa il dit que c’est bientôt. Si ça se trouve, la fin du monde ça existe pas, c’est juste Papa qui fait des cauchemars ou qui lit trop de livres sur la fin du monde, parce que lui il regarde pas la télé. Moi j’aime la télé. Je regarde tout le temps Pokémon Burning Asphalt & Shining Blood New Season: Arena Champions avant l’école, comme ça Papa il me dit que ça peut compenser. À l’école, on parle pas de la fin du monde, on apprend plein de choses avec les copains et le maître et la maîtresse.

Y’a que Papa qui parle de la fin du monde. Mon Papa il crie après moi, il dit que c’est qu’avec Maman, qu’il compte plus, que c’est son problème. Papa il dit même que c’est sa faute, et que c’est tout. Si ça se trouve, y’a que Papa qui aura sa fin du monde. Mais je sais pas, il va pas mourir à la guerre, il travaille pas dans tout ça, mon Papa il travaille sur un navire dans un bureau, ou c’est ce qu’il dit. Mon Papa il m’amène toujours des jolies images de bateaux sur la mer, et de baleines dans l’océan. Il veut partir après la fin du monde sur son joli bateau pour voir la mer parce que ça sera que son problème, il parlera avec les poissons, les oiseaux, les oiseaux et les poissons, qu’ils seront ses seuls amis à lui et qu’ils vont se comprendre. Mais je sais pas où c’est l’océan. De toute façon Papa il dit que pour l’instant il attend la fin du monde. Il dit que ça va tout changer et que ça sera tant mieux. Il dit que c’est que contre lui et Maman, Maman elle dit que c’est que avec elle et Papa. Ils me disent toujours que c’est pour mon bien ou bien que c’est pas grave pour moi. Des fois faut qu’ils parlent. Mais ils crient.

Mais moi je sais pas ce que c’est la fin du monde. Peut-être que Papa et que Maman ils vont mourir, peut-être que mes copains ils vont mourir ou peut-être que je vais mourir. Même si Maman et Papa ils m’ont déjà dit que la mort, c’est pas pour moi, ou c’est que eux qui la comprennent. Mais moi, je suis déjà allé à un enterrement, quand ma Mémé elle est morte. Mais Maman elle dit que je m’en rappelle pas parce que j’étais tout petit, mais avec la musique, c’était triste alors elle a pleuré. Et mon cochon d’Inde aussi, il est mort, mais il était trop mignon. Elle s’appelait Tenshi. J’aimais toujours lui donner à manger des graines et à boire dans son petit biberon. Elle venait toujours vers moi et elle était trop douce, on aurait dit qu’il voulait me faire des câlins. Mais à la fin de sa vie, elle est partie, Maman elle m’a dit qu’elle s’était endormie très longtemps. Mais j’étais petit, maintenant je sais qu’elle se réveillera plus. J’ai beaucoup pleuré quand je l’ai enterrée dans le jardin, avec un peu de foin et un peu de sciure.
Maintenant je suis grand. Moi, je sais pas si on va pleurer lors de la fin du monde, parce qu’on dit qu’on va mourir.
Moi, je veux pas mourir. Je veux manger les tartines de riz moléculaires au Tofu préparées par Maman, et puis aller à l’école avec mes copains rigolos, et puis faire des bisous à Lola, et puis avoir des enfants, et puis devenir cosmonaute, et puis aller sur Saturne avec Lola.
De toute façon, Papa il me dit que je risque rien, que c’est pas mon problème, que je m’en foutrai. Mais je sais pas ce que ça veut dire.

En plus, on dirait que c’est demain ou la semaine prochaine, la fin du monde. On dirait que le monde il va bientôt exploser, parce que Papa a dit que ça va être terrible. Moi, ça me fait peur. Je suis peut-être tout seul, parce que mes copains ils en parlent pas. Mes copains ils disent qu’ils ont vu des trucs que dans les films, avec des bombes, des extraterrestres, des météorites, des explosions, ou des attaques de Kinder Bueno géants. Peut-être que c’est ça, la fin du monde. Peut-être que ça veut rien dire du tout. En tout cas, à la télé c’est pas comme ça. C’est toujours dans les films que Papa regarde, et Papa il dit que c’est dans peu de temps. Papa il a dit qu’il était sûr du temps, mais il voulait me le cacher. Alors, Maman, elle est gentille avec moi, elle veut pas que j’entende Papa. Alors elle me donne des bisous, pareil que quand le matin je vais à l’école. Elle me borde le soir, dans mon lit, avant de faire dodo, elle me dit « je t’aime », même des fois, je l’entends pleurer mais elle elle voulait me le cacher.
De toute façon, Papa il dit que la vie continuera pour tout le monde, il est bizarre, mon Papa. Il dit que j’aurais qu’à faire des études de droit numérique intermondialiste comme tout le monde, que j’aurai un beau diplôme électronique orné de dorures et de longs rubans pourpres comme tout le monde, que j’aurai trois enfants virgule huit comme tout le monde, que j’irai vivre en Nouvelle-Chine ou en Amérique et que je n’aurai pas d’avenir dans un bureau pour signer de la paperasse pendant soixante-dix ans, comme tout le monde. Mais moi c’est pas ce que je veux.

Ce que je veux, c’est pas la fin du monde. C’est savoir ce que c’est. Ça a pas l’air d’être la guerre. Mais c’est calme. C’est tout calme. Papa il crie plus, Maman non plus. Ils parlent plus. Je sais pas. Mais Papa, il a dit que c’était demain. Il a peut-être voulu me le cacher, mais je l’ai entendu et Maman aussi.
Demain, il va chez le juge. Ils vont divorcer.

De toute façon Papa il dit que c’est qu’une histoire de cul.

*

En prime, comme je l'ai posté pour Game Over, je vous offre l'avis du jury.

Citer
Avis Raphaël
Forme : [7,25/10]
Un texte stylistiquement intéressant car il reproduit le langage d'un enfant (même si à huit ans, faut pas charrier, un enfant ne parle plus d'une telle façon) (1,5). Pour ce qui est du respect du thème, je n'ai rien à redire si ce n'est que je trouve que la possibilité de montrer l'impact psychologique sur l'enfant n'a pas été exploité, dommage (1,5). En ce qui concerne l'orthographe je n'ai rencontré aucune faute (2). Texte assez clair, sans incohérence même si les structures enfantines nuisent un peu à la compréhension. (1.75). Pour ce qui est de l'originalité du texte, je suis désolé mais j'ai trouvé que c'était assez convenu, même s'il est fortement probable que si la fin de l'humanité devait arriver par la guerre. Du coup ça met du plomb dans l'aile au texte (0.5)

Ressenti personnel: [8/10]
C'est un texte que j'ai globalement apprécié malgré un certain manque d'originalité. La grande trouvaille c'est le style enfantin et l'utilisation du présent de narration qui rendent le texte authentique, je soutiens toutefois qu'un enfant de huit ans ne parle plus d'une telle façon. Autre chose, les références multiples qui jalonnent le texte tel que les Pokémons ou bien les Kinder Bueno, même si elle font sourire et sont assez amusante, grillent un peu l'ambiance sensée être lourde et dramatique, un choix malheureux.

Note finale [15,25/20]



Avis Lu
respect du thème: 4/5 rien à ajouter
originalité/reflexion: 4/5 de bons éléments
orthographe/lisibilité: 4/5 on a du mal à définir le genre du cochon d'Inde
appréciation personnelle: 4/5
La conclusion m'a bien fait rire. Le récit tourne un peu en rond, certains paragraphes auraient pu être écourtés.

note: 16/20



Avis John
Magnifique. J’ai d’abord cru que le style extrêmement enfantin le serait justement trop, un cliché total de ce qu’on s’imagine quand on pense à la façon de parler d’un gamin… et, très vite, cette diction passe et paraît justement moins bête qu’elle n’y paraît. Sur ce point, chapeau.
Et l’histoire… l’histoire est, sans équivoque, maîtrisée avec brio. Sans détours, je dirai que c’est, me semble-t-il, une approche parfaitement réaliste et intelligente de ce qu’un enfant, dans ce contexte, à la fois naturel et aimant, et effrayant et anormal, aurait lui-même.
Deux-trois fautes, un peu bêtes, comme une répétition et une confusion futur/conditionnel. Rien d’important, mais justement, dans un texte qui ne fait presque pas d’erreur, tomber dessus est d’autant plus remarquable.
Autrement, on est perdu, on est confus, on veut savoir mais on ne saura jamais, et ce qu’on sait c’est pas clair, et ça, ça, ça marche mais parfaitement. Ce n’est pas de l’ignorance frustrante; c’est de l’ignorance parce qu’on est dans le même état que le personnage, et que le personnage, il n’en sait rien, lui.
Un gros, gros souci toutefois : la phrase finale. Je n’ai absolument pas compris. C’est une histoire de cul ? Ils sont dans une secte ? Ils sont dans l’armée ? Je pense bien qu’il y a une subtilité dans le thème « fin du monde », une volonté d’originalité, de « ah le salaud, bien vu ! », mais… je vois pas. C’est bête, parce qu’en plus ça pourrait être très efficace, renversant… Mais ça, par contre, ce n’est pas évident. Vraiment dommage.
Au final, je dirai que ce texte est extrêmement mature et intelligent, dans une simplicité joliment mesurée.
16/20



Note
15,25+16+16=47,25
47,25/3=15,75
15,75/20

Titre: K. ~ Alpha & Omega
Posté par: HamsterNihiliste le vendredi 30 décembre 2011, 23:03:10
Voici donc la duologie du concours, avec le texte de la deuxième épreuve, nommé Alpha & Omega, formule grecque qui aurait pu donner suite à un troisième texte, pour conclure en beauté. Mais soit, le texte est assez fini par ce qu'il traite, la note en introduction indiquera quelques détails. Parce qu'en effet, le deuxième thème du concours, Musique, demandait d' " écrire une musique avec des mots ", injonction relativement relative. Je pense que beaucoup ont laissé libre cours à leur interprétation, j'ai voulu me donner une contrainte qui m'a passionné ; écrire selon une musique, en respectant son rythme. Il est difficile de forcer un rythme de lecture donc j'ai établi une moyenne de temps qui correspond lorsque je l'ai testée.
Alors, je serai capable d'écrire un plaidoyer complet sur la musique utilisée, oui je serai capable de faire bouffer du verre pilé en empalant sur un grappin le premier qui m'en parle, mais sachez que Lux Æterna est l'originale présente dans le film - qu'on connaît tous v.v -, et correspond le mieux au contexte. ça (http://www.youtube.com/watch?feature=player_detailpage&v=YAh43BKTWOI) et ça (http://www.youtube.com/watch?feature=player_detailpage&v=22ut_pzoWgY&feature=related) n'ont jamais existé. JAMAIS.

*

•Alpha & Omega

Nota : La version de cette musique qui correspond au rythme de la lecture doit être jouée pendant votre lecture du texte. Elle est la seule piste nommée ainsi que l'on trouve dans le film, replacée dans son contexte. Je ne force pas votre rythme de lecture ; mais lorsque j'ai essayé afin d'établir une moyenne, il devait être un peu plus rapide que la moyenne. N'hésitez pas à relire sans la musique ou plus lentement pour pouvoir analyser plus en détail.

http://www.youtube.com/watch?v=Lk3F4as_1tM&list=UUQ6KvFP8_jynrpO_CY6jFCw&index=1&feature=plcp (http://www.youtube.com/watch?v=Lk3F4as_1tM&list=UUQ6KvFP8_jynrpO_CY6jFCw&index=1&feature=plcp)

Les bureaux de verre et d’acier ne surplombaient rien d’autre qu’une désolation. Ils le regardaient livré à leur jugement. Ses crevards étaient peut-être là, à recompter leurs verres, leurs armes, ou leurs cris, à ne vouloir même pas crever la bouche ouverte dans les ruines de leurs illusions, tout ce qu’il leur voulait. Le peuple ne pouvait pas l’ignorer, les voitures voyaient ce qu’elles voyaient, la foule s’attroupait, les chiens n’assumaient pas ce qu’ils avaient crevé, tous, tous les vautours venaient montrer du nez un homme qui avait peur de se retourner après avoir dormi sur ce qui était avant.
Ce qui était, il ne s’en souvenait plus. Ce qui restait, il en avait peur. Que des ruines quand il se retourna enfin. Que des planches de bois brûlées, des tables craquées, des cadavres d’alcool et des peaux mortes d’hommes, de femmes, d’enfants. Que des livres tombés, des poussières de couvertures, des pages arrachées, des lettres perdues.
Il n’attendait pas ça. Non. Il voyait de ses yeux vides, il n’y avait plus rien, ce n’était pas qu’un rêve, il ne voulait pas le savoir et pourtant le savait, il aurait voulu hurler. Ce n’en était pas encore décidé, les ombres qui alimentaient leur morne quotidien lui auraient dit. Il voulut hurler à la face de la foule de la force des ses larmes et de ses cris. Rien.
Il n’y avait rien qui quittait ses tripes. Il était vivant dans une ville dont il avait peur, au milieu d’une foule oppressante qui ne faisait rien là. Personne ne criait, personne n’entendait. Il était écrasé par une peur d’être seul et entouré de tous, réalité quelconque, sans aucun souvenir. Que des ruines, et lui. Il attendait.
Encore. Il attendait de s’éveiller, pour se consoler, ou de s’endormir, pour espérer. S’il n’y avait plus rien, si plus rien ne restait, si personne ne vivait, s’il croyait que rien n’était réel. S’il n’avait plus à voir que les yeux crevés, que les rêves perdus, que les Songes d’une nuit d’été embrasés dans leur lit. S’il le pouvait encore, il n’avait plus qu’à croire. Ou bien, il lui semblait, qu’à se souvenir.

Il se souvenait. Il avait voulu, parce qu’il était jeune, espérer encore en la littérature, les livres, les brouillons, et les poètes maudits, il avait dès ses premiers printemps ouvert, entre deux ruelles et trois planches de bois, sa bibliothèque, celle qui laissait la ville en dehors du tumulte, celle qui préservait les feuilles écrasées par une société qui le rendait fièrement misanthrope jusqu’aux veines. Et il espérait. Au début, elle vivait, chantait-il autour de voix douces de femmes, de verres d'absinthe, de menthe à l’eau et de senteur de Fleurs du mal. Au début, ils lisaient, ensuite, ils écrivaient. C’était ce qu’il voulait, qu’ils soient un, deux, vingt, cent ou des millions, ainsi rien n’était mort. Enfin, ils oubliaient.
C’étaient les mêmes qu’il voulait réunir pour découvrir cette vie qui brûlèrent un soir les sols par l’eau-de-vie, qui nourris par la folie mirent à sac les pages, abattirent les planches, broyèrent les tiroirs, violèrent les femmes saoules en déchirant leurs seins, achevant le reste sur les hommes et les enfants, et défoncèrent les portes en croyant aux conquêtes.
Il avait vu les corps. Il les avait vu, impuissant, prisonnier, brûlés par ce qu’il restait. Il avait vu les bras survivre aux agresseurs, les filles résister aux pulsions décharnées, il les avait vu tous jusqu’au dernier. Il avait vu les derniers livres brûler leurs derniers mots, les dernières illusions crever jusqu’à ses yeux. Que des derniers feux de la violence.
Que de la culture perdue qui jouait une partie qui n’en finissait pas. Réduit à un jeune patron de café vivant ses dernière heures. Il subissait sa perte, celle de ce qu’il voyait, jusqu’à être réduit à en fermer les yeux ; les hurlements de foule, les senteurs de whisky, le goût de la folie, et les copeaux de bois qui le heurtaient aux jambes. Il les avait vus tous. Il n’oubliait rien. Il devait fermer les yeux. Il ne pouvait pas les rouvrir. Mais il ne rêvait pas.

Il ouvrit les yeux. Il soutenait le présent. Il était regardé par la réalité, par le peuple dans lequel les fous étaient peut-être, par ceux qui aimaient le spectacle de l’homme désœuvré. Ils le voyaient jouer. Ils le regardaient perdre. Ils le voyaient tourner sur lui-même, encore et toujours, dans une histoire dont il n’était  même pas le héros.
Il était soudain retombé dans une réalité. Perdu parmi les perdus. Soumis à la nature qu’il avait voulu haïr. Alors peu importe ce qu’il avait fait, peu importe ce qu’il ferait, puisque son passé était déjà perdu, puisqu’il n’y avait pas d’avenir. Mais il n’était plus temps de se complaindre sur ses illusions perdues, de vomir ses regrets, ou de pleurer sur les perdus. Ça y est ; il s’était réveillé sur ses ruines, il le savait déjà. S’ils l’avaient torturé, s’ils avaient tour à tour craqué les verres sur son crâne, s’ils l’avaient jeté dehors, s’ils avaient éraillé vingt ou cent livres déjà vieux, peu importe. Il ne pouvait oublier, il ne pouvait espérer, il en était plus que fier. Il voulait seulement faire subir à la foule toute l’indifférence qui habitait ses veines. C’était sa vengeance. La vengeance qu’il adressait à sa résignation ou à sa soif d’attente. Désormais. La haine qu’il vouait à son public ou à ses meurtriers. Maintenant. La folie issue de son passé ou venue par son présent. La folie.
Il courut dans la foule, il revint sur ses ruines. Il fermait les yeux. Il les ouvrait. Il pleura. Encore. Il clignait devant la foule. Son temps était suspendu, son propre corps l’écrasait. Il finit par sombrer sur le sol, s’écroulant face à aux champs de la folie, allongé dans la ruine. Il imaginait venir de nouveau dans un café tout neuf. Il ouvrit sa porte. Il sentit une feuille.

Il rêvait enfin, allongé, livres ou ruines, la société le regardait encore. Du haut des bureaux de verre et d’acier.

*

Je précise également que je trouve ce texte d'actualité et correspondant bien aux évènements. Je ne dirai pas jusqu'à dire qu'il est un hommage, mais il m'a tenu à cœur - si tant est que j'en aie un - de l'écrire.
Titre: K. ~ Memento Mori, Memento Vivere.
Posté par: HamsterNihiliste le mardi 31 janvier 2012, 22:41:14
Après des ébauches travaillées à la plume en plein cœur de l'hiver qui se faisait attendre, après avoir concrétisé le projet que je voulais écrire depuis près un an, après avoir fini paradoxalement Misanthropie, mon Amour., après avoir haï et hurlé ma haine pour le Temps, après avoir vécu les joies et les souffrance inhérentes à l'activité d'auteur, Memento Mori, Memento Vivere. est officialisée et vient de naître comme un long projet personnel, qui, malgré tous les plans, malgré la connaissance du commencement et de la fin, malgré le calcul de tout, ne peut au final absolument pas se deviner.

Il y aurait à dire avant de commencer ; pour vous laisser découvrir avec mon écriture et celle des faux auteurs, une précision cependant. Chaque chapitre, puisque cela m'avait plu dans mon précédent, s'accompagne d'une musique, qui constitue uniquement une référence et n'est pas introduite avec la volonté de correspondre au rythme, ce qui imposerait une contrainte trop lourde. Vous pouvez la voir comme une référence, une musique ou chanson qui correspond au thème, qui peut peut-être s'écouter en même temps, mais là n'est pas son but. Mes chapitres postés s'accompagneront toujours de mes courts textes personnels de présentation, cela me permettra d'introduire plus tard la division en trois parties.

Vous lirez le premier mot, la première phrase, le premier texte, je connais le dernier mot, je connais ce que j'écris. Je publierai à un rythme régulier, même si je me détache de la politique du résultat, mais, puisqu'il faut se soumettre au temps, j'en serai. Je poste le Prologue, un dernier jour d'un premier mois, un hiver attendu dans lequel le froid viendra enfin, dans un prochain post afin d'aérer la mise en page. Je remercie John de m'avoir soutenu et vous souhaite une bonne lecture de ce court prologue, un bon partage, un bon questionnement et de bonnes critiques, mais pour introduire avec une citation autre que la dernière phrase de ce Prologue : " Tout ce qui doit être dit ne peut parfois l'être avec des mots. ".
Titre: K. ~ Memento Mori, Memento Vivere.
Posté par: HamsterNihiliste le mardi 31 janvier 2012, 22:41:33
*

•Memento Mori, Memento Vivere.

Prologue : Alpha

Yoko Shimomura - Main Theme - Xenoblade Chronicles (http://www.youtube.com/watch?feature=player_detailpage&v=nNR-wsFAfiU)

Naître dans un monde commencé sans le temps et fini par le temps. Vivre là où l’on naît, là où l’on est élu. Survivre sur une terre que l’on n’a pas voulue.

L’œuvre à laquelle ils croient, s’ils veulent encore savoir d’où viennent leurs origines, où ira leur destin. L’œuvre née des Déesses, elles les seules à connaître l’Alpha et l’Omega, le commencement et la fin, les premiers et le dernier. Ce qu’ils veulent savoir, ce qui leur coûtera, ce pour quoi survivre est devenu leur lot avec le temps. La voici, qu’ils contemplent, qu’ils assument la bête ; la destinée des Hommes créés par le Destin qu’ils ont créé eux-mêmes.

Rien d’autre que le monde, le bien, le mal, les Hommes, ne sont nés des Déesses. Ils ne connaissent rien d’autre que ce qu’ils peuvent savoir. S’ils veulent croire en nos biens, à trois triangles d’or scellés dans un lieu saint, la liberté est leur. Pour avoir créé une seule preuve d’existence, pour avoir élu les destins de trois Hommes, pour avoir incarné le sacré et la haine, le bien et le mal, l’élite divine leur doit d’avoir leur religion, et de n’être rien d’autre que la proie de leur foi. Les Déesses sont lâches, lâches pour laisser leur monde à ce qu’elles ont voulu, mais les Hommes le sont, les Hommes l’ont été, été jusqu’à leur fin.

La terre n’est pas née, la terre n’est pas morte. Bien ironique sort pour l’œuvre qui est nôtre que d’être sous le temps. La terre est créée, la terre est détruite, peu importe quand, peu importe la mesure, peu importe quelle bête l’a voulu ; c’est une réalité que les Déesses savaient, qu’elles savent et qu’elles sauront. L’héroïsme des héros, la lâcheté des lâches, les vies qui sont soumises au hasard et les morts qui ne le sont pas ; nous, Déesses, le voulons.

Alors qu’ils croient, qu’ils guettent, qu’ils attendent et qu’ils hurlent, qu’ils écrivent, qu’ils parlent, qu’ils vivent et qu’ils se tuent, qu’ils poignardent, qu’ils tirent, qu’ils se jettent et s’entassent ; auront-ils autre chose tant qu’ils ne seront rien ?

Nous laisserons les Hommes et nous nous retirons. Nous n’avons donné rien d’autre qu’une  marque d’existence ; croire sera leur peine, leur joie, leur vie. Pour des statues scellées, pour des guerres, pour des fous, nous serons leur pierre brute, nous serons la mère d’un monde encore naissant, nous serons les auteurs du destin de lecteurs.

Ce n’est pas tous les jours qu’on écrit un Prologue. Qu’ils soient libres.

Écrits des Déesses. - Textes intemporels non destinés aux hommes. Non-datés.

*
Titre: K. ~ Memento Mori, Memento Vivere.
Posté par: Suijirest le mercredi 01 février 2012, 15:01:58
Pour des raisons diverses et variées je me devais de lire cet écrit que tu nous promets depuis longtemps.

J'ai parfois du mal avec tes écrits un peu (beaucoup ?) surréalistes, mais j'ai trouvé ce Prologue très lisible, bien plus que Thanatos mon ami.

Les thèmes qu'il aborde font partie de mes convictions, ça pique ma curiosité. J'y relis même ma devise fondamentale à un passage :

Citer
La terre est créée, la terre est détruite, peu importe quand, peu importe la mesure, peu importe quelle bête l’a voulu ; c’est une réalité que les Déesses savaient, qu’elles savent et qu’elles sauront.

"L'humanité est issue de rien et elle y retournera", à peu de choses près.

J'attends le prochain chapitre, résolument !
Titre: K. ~ Première partie : Le temps des dagues.
Posté par: HamsterNihiliste le vendredi 24 février 2012, 01:03:30
Voici le premier chapitre de Memento Mori, Memento Vivere, par la même la première partie. Je divise en effet le texte intégral en trois parties, qui chacune se dérouleront dans un temps différent selon une évolution. Je suis fier de ce travail et je pense que je vais prendre un grand plaisir à écrire la suite, même si, ce mois-ci, le temps va probablement me manquer ; je me tiens tout de même à un rythme régulier. Dans ce premier chapitre, sobrement intitulé comme beaucoup d'autres, on trouvera un léger fond issu du dernier Zelda, on y lira de l'éphémère, du présent, de la logique, et de la chaleur humaine marquée par des dialogues. Ça changera ; j'avoue que j'ai moins l'habitude donc j'ai joué sur les sens et sur une accentuation des détails, le contexte de la musique devrait aider.

C'est là que, justement, je précise : la musique n'est pas directement censée s'écouter en même temps, ce qui des fois, si je place une chanson de Brel par-dessus un poème, s'avèrera par exemple impossible. Voyez-là plutôt comme une référence, une influence qui présente le chapitre généralement, donne un ton, bien que je ne travaille pas sur le rythme, plutôt sur le thème et la forme. Vous êtes bien sûr libre de l'écouter en même temps, mais je place une musique en simple mélomane comme j'introduirai un texte par une citation ou une dédicace ? Vous n'irez pas baser tout un livre sur la dédicace qui se trouve en introduction, n'est-ce pas ? v.v

Sur ce, n'hésitez pas à partager, à commenter, à réfléchir, à entrer dedans, à aimer ou à haïr, et sans plus tarder, j'ouvre le temps !

*

Première partie : Le temps des dagues

I : Éros

Russell Brower - Taverns - World of Warcraft: The Burning Crusade (http://www.youtube.com/watch?feature=player_detailpage&v=STHXMfaAzos)

— Tu penses à l’avenir ?
Accoudé à mon livre relié en cuir orné du nom Les cultures divines, cette interpellation le ferma brusquement. La poussière recouvrant ses mots s’envola dans la salle, puis se coucha sur la table en bois clair, neuf, et lavé. Je n’y pensai plus.
— Quel avenir ? lui répondis-je.
— Celui que tu verras, si tu en vois un. Je sais que tu en as peur.
— Comme tout le monde, non ?
Il m’adressa un clin d’œil. Il n’avait ni l’œil, ni le nez, ni la bouche à avoir peur.
— Je sais que toi aussi, tu as des peurs à écorcher sur le bureau, à brûler dans les livres, à perdre dans la bibliothèque que tu aimes investir par la nuit et le froid. Tu as peur comme tout le monde, et même plus, mais tout le monde n’a pas les mêmes peurs que toi, me rassura-t-il.
— La bibliothèque a une bonne odeur, et même plus.

Kiko se leva alors ; je le suivis du regard tandis qu’au sein de la bibliothèque, vivant dans l’espace que je voyais rester, il sentit la bonne odeur d’un livre non choisi. Nous riions du fond de la salle de cours.
— Je ne t’ai pas perdu, Link ?
— Non ! Où que tu ailles, je te suivrai, tu le sais !
— Même si je vais tendre ma main dans la rubrique des Perspectives historiques probables ?
— Aie peur pour ta part ! Ce n’est pas moi qui ai choisi de travailler la chevauchée céleste au détriment de ces ouvrages !
Debout, il posa le livre spontanément sur le bureau près de moi, le retournant, regardant en arrière, tandis que mon envie respirait son parfum.
— Et bien il n’a pas d’odeur et ce que tu deviendras pour l’avenir est aussi arbitraire que ce choix, continua-t-il en claquant calmement sa lourde couverture. Tu le sais et tu en as peur.
— C’est normal, non ?
— Bien sûr que c’est normal, toutes les choses du monde sont normales mon ami.
Je m’étonnai en libérant mon rire. Je lui répondis à l’instar de l’avenir :
— Quel monde ?
— Celui que tu vois. Est-ce que tu peux savoir quelque chose que tu ne peux que croire ?
— Bien sûr que non.
— Alors qui tu deviendras, où tu le deviendras, pourquoi et comment ; n’en aie pas peur, n’aie pas peur de ce qui est normal, tant que tu es devenu.

J’hésitai de nouveau à lire l’ouvrage scientifique que je travaillais, mais Kiko continua en m’apportant sa chaleur humaine. Je pouvais le croire. Kiko était honnête et travailleur, tout ce qu’il disait et entendait était vrai. Il n’avait pas peur mais ne se flattait pas d’en profiter, il avait choisi l’éducation pour les besoins de son humble famille, il était enfin un homme et un ami.
— Tu penses à la jeunesse ? lui demandai-je en suspendant la lecture.
— La jeunesse, elle deviendra comme l’avenir, elle n’existe pas, me répondit-il en souriant et poursuivant la sienne. Les livres, ils restent. Qu’est-ce qui existe d’autre ? Nous sommes là, toi Link et moi Kiko, nous lisons, nous volons, nous aimons de belles filles, par quoi voudrais-tu qu’on soit bouffés ?
Je levai les yeux face à lui, nous ne les fermions pas. Nous souriions ensemble et nous avions raison. Surtout lui lorsqu’il me répondait.
— Par quoi voudrais-tu que je continue ?
— Par ce que tu voudras. Mais tu sauras quand tu deviendras.
— Je ne deviendrai rien.

— Si ! éclata-t-il en arrachant des pages. Tu deviendras, dans le cas le plus triste, rien, mais même ceux qui sont rien ont un avenir. Rien, ça s’envolera, je ne souhaite à personne de devenir rien d’autre, mais ce n’est pas toi qui crèveras la gueule rompue dans les friches devenues marécages, non ce n’est pas toi, Link, je te le garantis. C’est ce qu’il y a en bas sur une terre ! Sur la terre ! Leur terre, c’est là que tu veux t’écraser ? finit-il par crier.
— Si ce n’est pas moi ce sera mon fils.
— Link, cette salle de cours grande et libre, ce tableau sur lequel je viens de griffonner, ces senteurs  de craie, ces chants de l’air, ces bureaux en bois brut qui ne blessent pas nos mains, ils sont à nous. Ils ont été investis, ils le seront peut-être, mais tu n’as pas de raisons, pas de raisons d’avoir peur. Le ciel restera et tu aimeras ton fils.

Je regardai le ciel et entendis Kiko fermer les yeux. Je soupirai en même temps.
— Je suis désolé, Link, nous rassura-t-il.
— Ce n’est rien, nous avons tous le droit d’avoir peur. Tu as peur, toi ?
— Tu me vois humain ?
— Hélas, oui.
Il sourit humainement.
— Tu penses que le monde n’est pas grand-chose ? m’affirma Kiko.
— Par rapport aux déesses ?
Il rit humainement.
— As-tu déjà vu une déesse, sinon par les statues, à travers les livres, ou par les bouches des hommes ?
— Et toi, as-tu déjà vu l’avenir ?
Il me regarda, lié par le fond des yeux, ressentant mon savoir, puis décida de lire la suite, coupant le dialogue mais n’attendant que moi.
— Dans l’avenir je serai un héros, j’aurai un fils, et je le nommerai pour te rendre hommage. Je sais ta confiance. Kiko est un beau nom, il est un très beau nom, mais tes lettres ne te flattent pas.
— Je le sais, je n’ai pas choisi mon nom. Mon nom est trop violent pour un enfant, beaucoup trop pour le tien. Ne lui fais pas porter ce fardeau, pas à un enfant, je sais ta conscience. Garde un souvenir de ton ami pour que je lui explique, quand je serai son oncle par le cœur, ou son ami.
— Mon fils, je le nommerai par une lettre K, pour ta violence, celle de la terre, celle de la guerre, le tragique de la lettre qu’il brandira pour ou contre l’honneur. Il l’adoucira, il la cachera dans trois autres, trois comme les trois triangles des Déesses qui existeront ou n’existeront pas dans l’avenir, entre deux dernières qui les feront languir, et entre une première qui bloquera son vrai nom. Mon fils, ou une descendance, si elle n’est pas crevée par la guerre, sera gaucher comme moi. Peu importe l’avenir, Ikau en aura un. C’est cela le plus triste, je pense.
— Ikau, c’est un nom d’homme. Un nom d’homme de dagues, sourit-il pour nous deux.
— Ce ne sera à aucun homme de devenir un héros.
— Pas encore. Pas encore, mais au présent, attend. Attend, c’est le plus triste que je puisse te souhaiter. Mais c’est avec le cœur empli d’espoir que je souhaiterai ton voyage vécu par aucun homme, ta liberté céleste et ton vent d’avenir, ta quête héroïque digne de l’honneur des livres historiques.

Je me demande enfin pourquoi je n’ai pas cru. Il venait de suivre, me rassurant avec l’art d’un seul ami, véritable, et humain.
— Il suffit d’y croire ! me dit-il. Dis-moi, dis-toi, dis-nous enfin, que tu es trop jeune et trop âgé pour ne pas croire !
Je me rappelle ne pas avoir pu répondre.
— Link, écoute-moi, je me lasse de te parler en maître. Ce que nous connaissons, ce sont les Déesses, le bien et le mal qu’elles laisseront incarner, peut-être toi, et le monde, ou le ciel, qu’elles ont laissé sous elles. Ce sont les fragments de civilisations, les savoirs qui s’envoleraient sur terre, les croyances qui chuteraient du ciel. Ce sont peut-être les héros passés, ou les héros futurs. Mais rien d’autre que les livres, ou les hommes, ne l’écrivent ou le disent. Bien maigre savoir ; bien maigre peuple. Alors il ne nous importe peu que l’Histoire vive son dernier commencement lorsqu’elle le voudra, finit-il par mépriser.
Je lui flattai l’épaule pour calmer l’inquiétude.
— Tu sais finalement que le monde n’est rien, lui fis-je remarquer. Mais tel que ton cœur me connaît, alors tu n’as pas de raisons de me dire que j’ai peur.
— Oui, Link, bien sûr, je pense comme toi. Je pense, je crois, je sais que la terre est si basse, que l’on attend sans faire un héros qui attendra autant, que les Déesses ne lui viendront même jamais, et pourtant. Je sais qu’on oubliera la civilisation, que la culture, le passé, le présent et l’avenir, et notre pauvre fric sera envolé dans le but d’en créer un pire, je sais même qu’il n’y a pas d’avenir, je sais que je ne sais pas.
— Ikau, ne…
— Kiko, me corrigea-t-il avec un sourire.
Je pris peur face à ma langue.
— Ikau sera-t-il ainsi ?
— Ne t’en inquiète pas et pense à nos pensées. Mais je t’ai dit que te parler en maître me lassait.
— Ne t’inquiète pas non plus. Tu n’as pas de raisons, lui rappelais-je.
— Bien sûr. Je n’ai pas de raisons d’avoir peur de l’avenir si je vis au présent.
 
Sa conclusion ouverte, je m’en souviendrai à vie. Je me demande encore pourquoi j’avais peur.
— Tu as peur de la nuit ? me sourit-il après avoir senti nos livres et carnets.
— Pas plus que du jour, logiquement.
— Alors volons vite au bar de la Citrouille, réchauffons-nous auprès de la patronne de taverne,  regardons la scène et écoutons sa voix, buvant ses soupes, sentant la chaleur et le bois, et nous flattant, tous, de ce présent qu’on aura !
— Et si on veut parler, si c’est autour de nous et autour d’un bon verre, on a jamais fini ! continuai-je.
C’est là que nous nous sommes levés ; il me dit :
— Alors ne te demande pas pourquoi ; tu as un présent, tu as de belles amours, et peu importe. Quand nous aurons fini pars dans ton lit, fais l’amour à Zelda ; quand le jour se lèvera tu le verras, l’avenir.
 
Je me demande toujours pourquoi.

Premiers carnets : Les douceurs jeunes - Link, Célesbourg, datés probablement d’avant Termina.

*
Titre: K. ~ I : Éros
Posté par: Prince du Crépuscule le lundi 27 février 2012, 18:45:43
Bon, je finis ma petite tournée ici.

Par contre, désolé, mais ça va être court, parce qu'en fait... j'ai à peu près rien compris. :|

Le prologue ça allait, et puis c'était logique que des écrits non destinés aux humains paraissent sibyllins, pour leur donner un aspect intemporel, un peu sentencieux, tout ça. Mais hélas, le premier chapitre n'est pas passé non plus, et je n'en vois pas trop la raison. J'ai pas compris où tu voulais en venir dans ce dialogue. En plus ils se parlent très bizarrement, avec des formulations pas évidentes. Du coup j'ai eu beau m'accrocher, j'ai eu un peu l'impression de me retrouver face à un texte rédigé dans une langue que je maîtriserais trop mal pour l'appréhender sans dictionnaire. Et autant dire que je suis pas trop fan de cette sensation en tant que traducteur en herbe.

Voilà, désolé, j'ai peut-être un pet au cerveau, mais pour moi ça reste trop obscur pour que je m'y plonge avec plaisir. C'est sûrement le fruit d'une intention, d'une réflexion, tout ça, mais... sans explication, je suis perdu. Cela dit, je t'invite bien entendu à continuer, d'autant que tu sembles très enthousiaste à l'idée de poursuivre ce projet. Je voulais pas jouer les rabat-joie, hein. :o

Bon, ben... pardon pour ce commentaire inutile et bonne continuation ! :niak:
Titre: K. ~ II : Vox Dei
Posté par: HamsterNihiliste le mardi 03 avril 2012, 00:54:12
Bonsoir !

En cette date fatidique symbolique, s'il me faut la choisir, voici le Chapitre II que j'ai écrit durant ce mois dernier, en parallèle de ma nouvelle pour le PJE, Mehr Licht!. On ne sait pas qui parle, on se sait pas vraiment à qui il parle, c'est pour cela que j'ai tenté de rendre un fond, une trame à suivre qui peut être plaisante et plus intéressante que d'autres chapitres où la forme prime sur le fond. Il a donc été assez rapide à rédiger et va présenter le contexte de cette première partie par différentes " séquences " de ce texte relaté. Le texte est toujours accompagné d'un thème musical, cette fois-ci sur des paroles d'un auteur à paroles accompagnées d'un fond qui se veut angoissant, qui correspondra – avec un peu d'anticipation – au fond politisé, descriptif et critique, mais qui tranchera avec la forme plus théorique et claire, pour cause.

Comme toujours n'ayez pas peur, accueillez ce chapitre, n'hésitez surtout pas à formuler vos critiques et à poser vos questions avant les prochains, que j'écrirai malgré l'été. Sur ce, pour éviter de vous pendre tout au long de mes écrits, je vais dormir ; bonne nuit !

*

II : Vox Dei

Renaud - Lolito Lolita - À la belle de Mai (http://www.youtube.com/watch?feature=player_detailpage&v=rf7M7LbU3oE&list=UUQ6KvFP8_jynrpO_CY6jFCw&index=1&feature=plcp)

Quand le peuple se mit à douter de ce qui était bien et ce qui était mal, j’étais là.
Si j’avais eu le choix, j’aurais fait les éloges du peuple libre, de notre belle utopie. Mais c’est en terminant mes glorieuses études que le peuple finit son autarcie. Au commencement étaient les sociétés primitives, qui, d’après les sources connues, ne maîtrisaient pas le langage ; les ouvrages examinés de la première étude anthropologique référée en annexes mentionnent qu’ils communiquaient par des sons non-voisés, des gestes, mais, dans les principaux cas courants, n’hésitaient pas à faire usage d’armes. La majorité conserve des bâtons et ossements servant d’armes de mêlée, qui, frappant au flanc ou aux jambes, causaient déjà une mort brutale et sans  longue agonie.
Nous avons hérité de ces porteurs de mort honorable et discrète, mais les armes à distance ont pour certains eu raison de notre courage.

Revenons à l’autarcie. Pour subvenir à ses besoins, utilisant alors ses dagues et, pour les plus abjects et lâches, ses arcs, le peuple se questionna, peu à peu, face à la mort. Connaissant pour certains ma personne et mon succès, on m’envoyait des lettres ; « Qui a le droit ? » ; « Que faire si un camarade s’est jeté à la mer en nous criant adieu ? » ; « Est-ce bien d’élever un cheval pour le cuire et le manger ? Ou est-ce mal d’abattre un homme qui menace de voler mes richesses et brûler ma demeure en forêt ? » me révoltaient. Mais, faisant fi de mon cœur, je pris le monde en main. Porté par une massive foule d’hommes libres et égaux, je montais, choisi en l’âme et conscience du peuple, à la tête du pays. Je ne démens pas, bien au contraire, que mes études longues successivement en Stratégie puis en Art logique, avant de m’orienter en dernière science en Magie, ont approfondi ma maîtrise d’un pouvoir politique, auquel je pourrais associer l’art, puis, en dernier recours si le destin m’oblige, la force.
Cependant la force me paraissait – et pour cause, je confirmai peu de temps ensuite qu’elle l’était – non légitime en terme de liberté du peuple. Je me contentai donc d’expliquer des lois afin de commencer à les voir nous régir. Nous, moi, le gouverneur, comme eux, le peuple ; cette autorité imposée par ma seule personne était trop radicale. Nous devions agir.

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Quand le peuple a approuvé qu’un seul homme ne pouvait être humain pour les soumettre aux lois, j’étais là.
Certes, il m’appréciait et appréciait mes lois ; en tant qu’artiste et passionné, la logique des arts fut ma priorité ; je rendais la lecture possible pour tout le monde, ainsi que la peinture pour offrir de la vie à nos décorations et notre patrimoine ; voir la maison de chacun des hommes libres était une preuve que notre pays était le berceau de l’art littéraire et pictural. La musique également prit une importance dans ma volonté, même dans mon pouvoir ; les moyens pour jouer, écouter, et partager des sons fleurissent dans les cultures, ne demandant qu’à être fêtés, qu’à offrir leur pouvoir, même à changer le monde ; qu’ils le puissent. Mais s’il y en a un qui soit assez vil, fourbe, et infamement faux, pour se faufiler sur la folle vérité de notre société, sa seule récompense n’est que son exclusion. Une si belle société ne saurait tolérer un art aussi caché, aussi clandestin, qui n’a pour vivre que masques et décors illusoires ; je parle du théâtre. Je parle du théâtre d’Ikau, ce fou qui souhaite encore exercer en marge de nous tous, cet assassin qui revendique son rôle d’acteur, d’homme, dit-il, cet ingrat qui ose n’accepter pour seul honneur que l’honneur de la fausseté. Et si l’art n’était pas un prétexte pour rallier à sa cause des peuples révoltés contre la liberté, ce rat aurait peut-être la grâce et m’aurait honoré de ne pas être tué de ma propre lame.

Mais en grand homme, je fus le premier à mesurer ce que l’on nomme le bien et ce que l’on nomme le mal. Je n’omis cependant pas de nuancer ; comme restent en vigueur les lois originelles, la mort est le crime le plus mauvais et blâmable si elle n’est jamais légitimée ; dans le cas de la défense, de la haine, du rapport de force stérile et vain, elle est une solution entendue s’il n’existe pas d’autre choix. C’est pourquoi nous tentons d’éviter tant que possible la guerre que nous subissons, et que nous avons provoquée.
La guerre force à ne pas punir les crimes les plus odieux, car même le plus unique des hommes sombre dans l’anonymat ; l’anonymat, la masse, le peuple rend tout possible et régner seul n’offre pas d’autre solution que de le rendre monstre.

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Quand le pays fut pillé par un enfant sans rien d’autre que sa troupe, ses jouets, et ses masques, j’étais là.
Vous vous en souvenez. Vous vous souvenez des raisons pour lesquelles j’ai fondé cette Élite. Tous, absolument tous approuvaient mon projet ; gouverner seul étant, pour eux comme pour moi, autant illégitime, je composai neuf membres pour siéger, dont moi-même. Les intellectuels ayant formé mon esprit, ainsi que mes plus brillants camarades, joignirent la partie et l’approbation. Nous étions libres, nous savions discourir et faire aimer un peuple. Vous étiez tout, avant, nous étions raisonnés à l’unisson, en jouant sur le fond, en jouant sur la forme ; parmi les neuf que nous étions, les régimes de chacun alliaient des idées libres jusqu’à dictatoriales, ornées par des discours de dictatoriaux jusqu’à libres. Bien sûr le plus lâche fut le plus apprécié ; c’est ainsi que le fond équilibré sur la forme modérée de notre chef Ridley régna par leur hégémonie. Parce qu’il s’est lié avec notre acteur ? Parce qu’avec Ikau ils étaient comme frères, même si le chef ne cessait de le dissuader ? Voici ce qu’on en fait, des stratégies, voilà où nous mènent les passion. Mais, sans ma gouvernance, être lâche a toujours été leur lot. Leur destin, s’ils l’ont voulu.

Vos lois s’en sont trouvées bien arrêtées lorsque le bref et vil pillage du pays fut agencé. D’aucuns avancèrent que je me trouvais moi-même sous ce masque ; que de calomnies. Jamais je n’agirai pour le mal par la fausseté, jamais je ne serai lâche au point de me dérober aux yeux de la société par le simple biais d’un simple manteau d’affabulation. Ce complot n’a pas lieu d’être, pas plus que le constat dans lequel nous nous trouvons. Alors notre pays étant plus dévasté par vous que par les troupes originelles, nous ayant envahis à l’aube et étant reparties au coucher du soleil, pour le prétexte d’une guerre de religion, pour chercher une unique ressource, l’heure est à assumer votre peur. Le mal ne nous a rien fait.

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Quand la paranoïa nous a envahis, nous a obligés tous à vivre dans la peur, nous a embrigadés pour que l’on abatte nos semblables sous une guerre civile, sous le seul prétexte de la défense et de la méfiance, j’étais là. 
Si nous avons voulu durcir nos lois, je ne demandais pas à ce que le peuple en veuille nous renverser. Nous avons décidé des lois plus dures, des vraies lois, pour que le peuple les subisse plus que ne les vive. Nous régnions enfin. Mais qui régnait ? Vous ? Ainsi, c’était facile d’avoir peur ; c’était plus difficile de ne pas assumer en face les débris de nos actes. Pourquoi ne pas prendre de risque ? Pourquoi ne pas rester ? Et nous voici. Et nous voici ainsi, sans roi, sans peuple, avec une Élite qui a fui sans raison, pour aller laisser crever ses enfants. Contre une politique à laquelle on ne se confronte même pas, en reculant, à petits pas, avec l’arc ou la lance aux plus courageux. Pour une Élite exilée que j’ai moi-même créée.

Maintenant que je suis seul être informé, je refuse d’être le messager entre vous et notre peuple. Qui avait habitué notre si bel état à vivre dans l’utopie ? Qui voulait être libéral en imposant sa parole ? Dites que c’est moi ; rendez-moi coupable ! Et je changerai d’opinions ! Je changerai de lois, je serai dictateur, le fond de ma pensée sera démesuré et je serai cruel ! Plus rien ne sera libre et je serai haï ! Mais je ne vivrai pas plus chez une autorité qui perd son propre contrôle, qui écrase par ses lois un peuple idéal, sans autre choix que, entraînés à la guerre, de se révolter, que de mettre à nu sa fureur et sa haine, voulant juste rester libre, brûlant ses réserves, massacrant ses frères et brûlant ses armures. Les voici, vos lois. C’est notre destin.

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Et quand vous avez fui, j’étais là.
Puisque je suis tout seul, je m’en retournerai. J’en reviendrai à ma dictature natale, et j’irai jusqu’au bout de mon unique exil. Je me chercherai jusqu’aux neiges sauvages, jusqu’aux marais anciens, jusqu’aux déserts perdus. Mais j’irai pour la vérité. Jamais je ne vivrai dans une politique lâche, jamais je ne provoquerai de guerre, jamais je ne vous pardonnerai, et jamais plus je ne délivrerai un art digne d’Ikau. Jamais je ne serai faux même si je dois tuer. Jamais je ne serai nous même si je dois mourir.

Alors c’est ainsi que je prendrai le risque de gouverner seul, vrai. Pour conclure, moi, Ganondorf, je m’exilerai et je serai un monstre. Pour la vérité.

Réquisitoire de Stratégie, Art logique, et Magie : De la liberté à la dictature — Idéaux et limites d’une Élite - Ganondorf Dragmire, Termina, datés probablement d’avant le Temps.

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Titre: K. ~ II : Vox Dei
Posté par: Suijirest le mardi 10 avril 2012, 02:05:35
Je ne sais pas si c'est le fait qu'il soit deux heures du matin ou la journée bien chargée que j'ai eu, mais je pense avoir pas mal compris le sens de ton texte.

Mais on ne peut pas le résumer en quelques phrases, ça va assez loin et ça peut se mettre en parallèle avec pas mal de choses. J'tiens juste à dire que le twist final m'a bien retourné, je ne m'y attendais pas.

Bref, j'ai aimé, dans mon état actuel (totalement lessivé) ; il faudra voir ce que ça donne dans un état plus "éveillé", juste par curiosité.
Titre: K. ~ III : Le chœur de la superbe
Posté par: HamsterNihiliste le samedi 28 avril 2012, 22:33:02
Bonsoir !

Même s'il faut croire que j'aime les locutions grecques et latines, voici le III° chapitre de Memento Mori, Memento Vivere., fiction à laquelle je me consacre exclusivement et qui va peut-être connaître un rythme plus rapide en raison de mon temps libre, mais paradoxalement, qui me sera plus difficile à appréhender en raison de l'été qui n'es pas une bonne saison pour écrire. En tout cas, je souhaite continuer mais pour l'instant, apprécions ce quatrième écrit qui présente un personnage – principal ? à vous d'analyser ou d'interpréter – ainsi que le contexte général de la première partie – inutile de préciser que le pays est en guerre.
Je préviens donc que le chapitre est particulièrement brutal dans la forme et dans le fond, dans une de mes traditions. Ne jouez pas la bienséance choquée par des mots, ce ne sont rien d'autre au final que des mots, que des lettres, qui, dans ce chapitre, sont prononcés par le personnage sans qu'aucune action n'ait lieu. Autre précision, comme il est présenté sous forme d'entretien, je compte en tourner une captation audio sous peu, avec moi-même et une camarade. Je placerai l'audio (Je pense éventuellement présenter une piste vidéo, mais pas sûr) à la place de la musique d'accompagnement, mais à l'heure actuelle je vous propose le texte brut ; l'oral présentera des nuances pour marquer la distinction texte-scène, c'est pourquoi, à ma grande habitude, le texte paraît particulièrement faux.

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III : Le chœur de la superbe

Captation audio de La gloire de Naæviî [À venir].

— Naæviî Lordæron…
— Appelez-moi Naæviî.
— Je respecterai votre choix, cela est mon rôle. Notre pays est donc fier de présenter cet échange, honorant votre rôle dans le parti des Libres, vous portant à la réputation de trois cent cinquante-neuf victoires contre les Oppresseurs, dans la rage de notre guerre civile, hélas. Vous avez choisi un espace de répit pour que l’on se confie…
— Pour que je me confie, si vous le souhaitez. Mais vous avez raison, ici, au bord de mer le monolithe qu’est le Pic Noir ne nous fera plus sentir les pas, un par un, de chacun des guerriers, ni la putréfaction des corps, de certains mes corps. Un jour, c’est inconcevable, mais il sera détruit. Si la stratégie décidait la cause la plus radicale pour la Paix, c’est une explosion à la racine qui mettrait fin à cette barrière. Et, plus de guerre, plus de vies, plus de morts, plus d’Élite, plus de religion. Il faut se rendre compte qu’on profane la paix, prêts aux pires horreurs pour tous se mettre à mort, depuis des nuits que j’ai perdu le courage de compter, pour la seule croyance en trois déesses que personne ne voit. Moi, je ne crois qu’en l’Homme et en la femme, et c’en est bien assez, et c’en est même trop. Vous souhaitiez questionner ma réputation ? Continuez, soyez libre, je ne vous tuerai pas. Je ne vous terrifie pas ?
— Non, ne vous inquiétez pas. Comme vous venez si légitimement de nous le rappeler, vos talents d’archère et votre haute stratégie vous ont accordé une place d’honneur parmi les anonymes soldats défenseurs de la Paix.
— C’est un beau paradoxe. C’est même un beau vers, vous avez douze pieds. J’aime les beaux poèmes, et j’en écris parfois. Si c’est cela qu’il faut pour ne pas sombrer dans un oubli, parmi les deux tiers de damnés dans cette terre, je veux bien m’y résoudre. La Paix, pour ceux qui veulent l’écrire par une majuscule, ce n’est rien qu’un prétexte, ce n’est qu’un sentier. Il se trouve que sur mon sentier une des semences n’est autre que la mort, je ne fais qu’avancer derrière de l’éphémère et devant une fausse paix, c’est une fin. Moi, je préfère la fin à la cause, c’est un peu le prix de la liberté.
— Vous n’avez pas été libre non plus de naître sur cette terre et de vous marier sur cette guerre.
— Je vous donne raison. Je préférais bien sûr notre amour idéal avec Ikau, mais au milieu de nos plaines mordorées, prête en enfanter de notre fruit en sa compagnie, caressant mon corps et nettoyant mon sang dans notre maison encore en bois clair et brut, la guerre éclata trop peu de nuits après. J’ai un enfant qui est venu au monde sous les flèches et qui veut y repartir par l’épée.

— En serez-vous aussi fière ?
— Je n’ai pas à être fière. Son père le confronte à l’épée et la dague, moi, selon ce qu’on dit, ma mère est morte d’une flèche dans le dos quand elle me mit au monde. S’il me faut une arme aussi  précise, rapide, et dure, mon arc en bois noir dentelé sur le dos, épointé aux deux angles plus qu’une dague ne peut l’être, je ne le quitterai jamais. Avec je peux tuer aussi bien qu’avec une autre. Oui, puisque vous me le demandez, il est efficace, il a tué ; moi aussi, j’ai tué, je ne suis pas de celles qui reportent leurs fautes. Si j’ai l’air d’une lâche, j’ai plus d’une fois crevé des crânes à la pointe de l’arc, sous la seule force de mes mains qui le portaient et l’aidaient à s’abattre par sa force sur mes proies. C’était bref. Vous croyez que j’en suis fière ?
— Je ne crois rien, autant que vous peut-être. 
— Vous ne pouvez pas en tant qu’humain croire moins que moi. Seul Ikau croit moins que moi. Moi, sa femme, qui est rentrée à la guerre en marchant sur des cadavres, parmi les entrailles répandues dans les creux de la terre, contrainte, même le jour, à se cacher dessous pour dormir calmement, même en pouvant finir réveillée par le poignard sous la gorge, moi, celle qui a déjà éventré par le simple coup de la pointe de mon arc une si jeune femme sous les yeux de son homme, moi, celle qui a déjà fracassé le crâne d’un enfant, ne sachant ni parler ni marcher, sous les yeux de sa mère, pour que ma seule arme d’hast voie son décor de verre incrusté de sang s’en souvenir encore.  Il y a des femmes qui n’ont eu pour dernière vision que le sang de leur homme couler sur leurs cheveux, et il y a des hommes qui ont eu pour dernier baiser la douceur de mes seins. Si j’oublie cette mort au summum de la beauté, alors leurs lois divines me donnent autant de honte de mes propres lois humaines, alors non, je n’ai pas à être fière et mon Orgueil, mon arc que j’ai nommé, n’a plus qu’à être brûlé. Mais c’est le prix, monsieur, c’est la guerre, et l’ère de la corruption n’est pas sitôt finie.

— Redoutez-vous qu’un jour on ne voie que vos seins ?
— Ou l’inverse, autre chose que mes seins !
— C’est selon vous, vous qui êtes maîtresse de vos forme et de vos chairs.
— Mais je vous en prie. Le corps, c’est notre lot, quand on n’a rien d’autre. Je n’ai jamais connu mes parents, je ne connaîtrai pas mon passé, je ne suis qu’une guerrière qui s’acharne à tuer, alors, pour le prétexte de la paix, ce sont mes mains qui forcent l’arc, ce sont mes pieds qui foulent la terre, c’est mon sexe qui tente tous les hommes prêts à tous se rouler sur le sol pour me toucher un instant. Un jour des gens seront fous, un jour on bavera plus que pour mes bracelets plaqués d’or aux poignets, mes lèvres éclatantes de rouge sang, mes boucles d’oreilles aux diamètre très ample, mon front pâle long et fin, plus que pour mon visage couvert par la lumière blonde de ma chevelure attachée. Un jour on me plaquera par l’épaule, on se déchaînera, on me dépravera, on bavera d’ardeur sur mon nombril, et, sous une armure brûlante, sur moi qui serai nue, on me violera, on se branlera dans mon corps, je serai rien d’autre qu’une main prostituée et maculée de sperme. Un jour j’aurais un gosse d’un père que personne n’aura connu et qui deviendra peut-être un héros. Mais je suis une femme et autre chose qu’un vagin soutenu par des pattes, j’ai un arc et une arme lourde, violette, à deux mains ; si on veut jouer à la lutte entre deux corps-objets, je peux jouer aussi. Et moi, je veux jouer. Vous auriez de quoi payer une nuit ?
— Je… Je, mais, enfin… Je suis marié.
— Moi aussi. Ikau aussi.
— Un jour vous serez plus qu’un corps. Le peuple vous respecte et vous le promet.
— Nous l’assurerons. Je n’hésiterai à tuer pour être autre chose qu’une pute. Un jour. Vous pensez qu’un jour une femme sera portée à la tête d’un pays ?
— Peut-être pas à la tête. À moins que le sort ne lui soit favorable. Comptez-vous vous hisser à cette réputation ?

— Je ne compte rien d’autre une fois que cette guerre sera terminée. Je souhaite uniquement retrouver Ikau, aimer mon fils, poser sa main sur la mienne, pour ne plus jamais finir soumis à une guerre. Quand il connaîtra l’amour, son père maintiendra que ce n’est pas plus idéal, mais ça brisera l’ennui. Ça.
— Maintenez-vous que vous vous ennuyez ?
— Je pense que tout le monde s’ennuie dans l’amour. Nous, nous ne sommes plus gamins, nous nous sommes rencontrés peut-être par hasard. C’était juste son jeu dé fréquenter la haute ; moi, sous la sévérité de mes aristocrates et des hautes guerrières, régentes de la stratégie et des conférences tactiques, je me suis exilée au plus loin de leurs chaires, de leurs maîtres, de leurs élèves, je n’ai fait rien d’autre que les abandonner. Ma première nuit au froid réchauffée d’une unique toge, Ikau s’est exilé à l’autre extrémité de notre société. Nous nous sommes aimés, il m’a ramenée chez lui, je l’ai ramené chez moi. Sans honneur qu’il était il vint assassiner une prochaine proie, qu’il ne connaissait pas, que je connaissais plus, puis son œuvre accomplie, il m’embrassa et pour la première fois, je savourai la voix d’un homme revêtu simplement d’une redingote et d’un doux pantalon. Nous aimons encore. Mais sous la guerre.
— Résistez.
— C’est ce que nous faisons. Ikau est rusé, il est faux, il joue sur les scènes et derrière les rideaux ; sa seule fierté va pour son déshonneur et ses deux dagues. Il a baptisé sa fidèle dague gauche Memento Mori et j’ai baptisé sa dague droite Memento Vivere. Quand il tue par l’arme à gauche il en est capable de me tuer moi-même. Mais Ikau n’a jamais aimé voir tomber les hommes sous ses frappes, il veut la mort discrète, douce, silencieuse ; juste ce qu’il faut de sang sur sa veste. Il ne peut y avoir qu’un héros sur cette terre ; moi, je pourrais me plonger dans le poids du sang que j’ai fait verser, il caresse le sang laissé sur la lame puis l’oublie sur sa langue ; le sang coule par nous deux, les morts se comptent pour nous deux. Il n’y a rien d’autre que les litres de sang qui nous rendent héros, et pourtant Ikau ne sera jamais aimé ; moi si. Nous nous aimons même si la guerre nous écrase. Mais nous nous aimons trop, pour qu’encore une fois l’homme se lasse de la femme et n’exulte plus que dans son corps. Voilà où il nous traînera, l’amour.
— Vous avez toujours une raison. Vous n’en doutez pas.

— J’en aurai une. Si un jour on me la retire, si je ne la perds pas, je me retirerai. Si un jour la guerre devient notre seule histoire, qu’elle se souvienne de moi : de pulsions et d’instincts, de sang et de présent, d’arc, et d’épée. Un jour ça s’envolera. Mais j’ai trop de souvenirs pour avoir un futur.
— Et pourtant.

— Un dernier mot à dire ; personne ne me volera jamais le dernier mot. Même lui.

La Gloire de Naæviî, captation audio retranscrite pour Termina, datée de la guerre civile.

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Titre: K. ~ IV : Hermès
Posté par: HamsterNihiliste le mercredi 16 mai 2012, 18:34:39
Bonsoir !

Pour commencer la deuxième " trilogie " de la première partie, voici le chapitre du mois, que je me permets de publier à un rythme plus rapide en raison de mon temps libre. Sans rester enfermé dans une politique de production, la rapidité d'écriture, avec laquelle je publierai pendant ces vacances en moyenne si je ne fais rien d'autre deux chapitres par mois, m'a pas empêché de le travailler comme d'habitude avec les choix et les effets qui sont les miens.

Rien de spécifique à signaler, pas de difficulté ; le chapitre, un peu plus long, est moins violent, sauf la dernière lettre, mais rien n'est concret. Un peu – plus – d'affectif, de cœur, et de " conneries abstraites " pour lier les trois personnages principaux de cette première partie, qui connaîtront leurs suites. À vous de questionner si il existe vraiment un personnage principal. Autre chose, je renoue également avec Jacques Brel pour la musique d'accompagnement, sûrement la première dune longue marche pour cette Chanson des Vieux Amants que je vous recommande d'écouter séparément (Simple histoire d'attention ou concentration) parce que les textes de chansons ne sont pas sans sens.

Après les deuxième et troisième chapitres, plus oraux, je renoue avec une écriture ici servie par un style épistolaire de quatre parties, n'hésitez pas à critiquer quelle que soit votre remarque ; bonne lecture !

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IV : Hermès

Jacques Brel - La Chanson des Vieux Amants - (Brel 67) (http://www.youtube.com/watch?feature=player_detailpage&v=H1DpjXQUDsI)

Lulya à Ikau, plaines orientales de Termina. Temps probable : derniers pourparlers de l’Élite.

Ikau ; on se connaît depuis longtemps déjà. À l’origine grandie au son tribal de nos tambours de guerre, plus élevée par les armes que la diplomatie, enfin mûrie par la pauvreté du peuple mais par l’amour des autres, je te connais. Je sais que tu es de ceux qui se laissent connaître, ne dis rien, Ikau, ne cache rien. Tu es l’homme qui s’est laissé aimer, que j’ai rencontré, que j’ai aimé moi-même. Ne me laisse pas croire que c’est toi qui gagne, seul, seul à profiter de l’amour comme d’une parcelle de terre ou d’une ration de viande.
Notre amour, à nous deux, ne sera ni cru, ni cuit, il ne se paiera pas, ce n’est pas cette chose-là que ces gens-là vont mendier ; je ne sais pas ce qu’il est et je le cherche encore. Embarquons-nous ; tu partiras avec moi, nous nous emmènerons et je t’amènerai. Si nous ne savons pas où, tant pis, nous serons libres, et le vent et la mer nous rendrons encore jeunes, on s’amusera enfin, peu importe, tu aimeras. J’attendrai.

Écrire sans répondre, j’effleure ton visage long creusé par tes joues creuses, je remonte ton nez, seul organe enfantin superbement intact, je te vois fermer tes yeux bleus creusés, par ton sommeil perdu ou ton regard de haine, je caresse ton front haut au teint gris, et comme ma plume s’allonge sur son papier, ma main sans écorchure se perd enfin dans tes cheveux, et j’entends ta voix trop grave et trop profonde qui me souffle ce que tu me chuchotes quand on s’enlace tous deux. Alors je sais toujours que l’on s’aimera enfin, tu es déjà charmé comme tu l’as été toujours. Je ne crois pas t’écraser, alors ne crois pas perdre ; l’amour est l’unique guerre qui n’a pas de gagnant.
Non, je ne crois écraser personne, j’ai vécu dans l’enfance la plus triste qui soit. Au temps où mes cheveux caressaient mes yeux, je dévouais mon corps pour chercher ce qu’il faut d’eau, une infime trace pour sauver ma famille, moi, encore si jeune. Parfois sous la pluie écrasante je partais, j’aillais mendier aux riches indifférents de subir ma misère. J’ai haï ces gens-là mais j’en cherche encore d’autres.

Et puis, morte de froid, une nuit, si souffrante que la pluie m’indifférait même, mes larmes et l’eau avait le même goût, je t’ai vu, moi. Tu était grand, austère, tu étais un monolithe et moi, couchée, je me suis levée et je ne t’ai pas cherché un instant de plus. Tu t’es baissé toi-même puis tu m’as aimée. Je n’avais ni question, ni doute, ni peur, je savais que la pluie ne tombait plus, je savais et je sais que notre amour devra être idéal. Nul besoin d’un mariage ou d’une quelconque preuve ; nous sommes deux humains, pas des pays en guerre. J’attendrai vite avant que cette terre ne se déchire.

Aime-moi, Ikau, encore.

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Ikau à Lulya, Ancienne plaine de Termina, Nord-Est. Temps probable : Naissance de l’insurrection.

Lulya ; tu es si jeune que tu peux être ma fille autant que moi ton père. Tu as beaucoup appris, tu sais bien mieux écrire. Mais je reste celui qui t’as pris sous mon aile, je resterai un père et tu ne pourras t’y opposer. Tu n’apprendras pas seule, et tu n’auras jamais fini d’apprendre. Je sais que comme toute fille tu seras révoltée, que tu voudras alors savoir ce qu’est vraiment le monde ; le monde n’est vraiment rien, je te le cacherai. Pour toi je partirai dans les risques, et la guerre, je t’en offrirai l’espoir que tu attends. Tu resteras cachée, ne m’en veux pas, comme tous les hommes qui aiment ou qui veulent aimer je ne veux que ton bonheur. Et le bonheur de n’importe qui est plus riche que tu ne le crois. C’est ce que tu veux toujours et que tu as voulu.
Mais ne sois pas gamine, n’oblige rien ni personne à me suivre. Garde-toi mon amour mais ne garde que ça. Tu connais bien mieux ces conneries abstraites qui ne font couler aucun sang, tu ne parles que de cœur, d’un cœur immatériel qui n’est celui de personne.

Je n’en sais rien, ma fille, je n’ai pas grandi là, moi. J’ai grandi dans les caves accrochées aux égouts, bouffant de la nourriture de n’importe quel rat crevé, appris à manier la dague dès mon enfance puis l’épée, clandestin, sans honneur ni espoir. C’est ma seule fierté de voir ma main gauche tenir de ma main entière ma dague platinée, lame prête à briser l’irrigation névralgique de n’importe quel homme pour mon dernier but, celui de voir périr la guerre et la lâcheté d’un gouvernement traître.
Crois-moi, la réalité ne te fera pas t’y plaire. Tu ne voudrais pas me suivre par pur amour, par pure folie et seul moteur du cœur, toi tu devras rester dans ton idéal jeune et dans ton innocence, dans un imaginaire que je n’ai jamais eu. Crois-moi, je serais prêt à me sacrifier, pour toi et pour mon but. Tu me diras que tu ne veux que me suivre mais que tu ne peux pas, mais je veux être ton père pour mieux te protéger : tu vaux mieux qu’une gamine, Lulya, tu es bien mieux. Tu me diras que je vaux mieux aussi, que je ne suis pas forcé de finir fou pour ta seule beauté, qu’enfin je peux écrire avec ma seule raison qui ne plaira jamais. Mais je ne suis écrivain que pour des lettres d’amour, et l’amour, ce n’est rien.
J’ai cru n’avoir qu’un seul affectif envers Naæviî, ma première, ma conquérante. Je ne te laisserai pas gagner au-dessus de moi ; je ne veux pas que tu ne deviennes qu’un corps. Tu parles sûrement mieux, mais tu crois que l’amour n’est pas comme la guerre. Gamine. Gamine que tu es et que j’aime.

La guerre ne se crée pas en un seul instant, ni l’amour. Il faut du temps, c’est tout, il m’a fallu le temps d’apprendre mes deux dagues, le temps d’assassiner sans pitié ni folie, le temps de réfléchir aux morts propres et calmes pour les agir enfin. Il faut du temps pour aimer, du temps pour haïr et un temps pour regretter. J’ai appris à abandonner ma haine et ma froideur pour la chaleur d’un cœur voulant quitter un corps. J’ai appris à être vrai. Mais, pour toi, je joue. Je joue à être vrai.

Apprends-moi, Lulya. Toujours.

-

Naæviî à Ikau, Ancienne plaine de Termina, Nord-Est. Temps probable : Rupture du peuple et fuite de l’Élite.

Je me souviens. Le souvenir d’un nom écorché sur un arbre. L’oubli d’une première fête, au soleil, sur les plaines. Le regret d’avoir vu ton corps nu à la première aube. Parler une nuit face au feu avant de se connaître. Voir naître cet enfant. Lui avoir tout appris et t’avoir tout appris.

Ainsi tu m’as trahi, Ikau. Ton « seul affectif » n’était qu’un de tes jeux, tu n’as rien d’autre à faire que de baiser d’autres femmes, peu t’importe maintenant. J’ai vu le temps de lire tes lettres à ta Lulya, et de lire ses lettres à son glorieux Ikau. Je regrette le nombre de ces mots que vous avez écrits, j’enrage de ne jamais t’avoir surpris trot tôt, mais j’exulte de pouvoir me venger par mon entière fureur.

Haine. Si le mot « haine » était gravé mille fois sur chaque goutte de sang que j’avais fait verser tout au long de ma vie, elles ne suffiraient pas à exprimer le milliardième le plus insignifiant de toute la haine que j’éprouve pour elle. Haine. C’est tout. Sache pourtant que je regrette et que je t’aime. Il n’y a que toi que j’aime et que j’aimerais toujours ; même si je ne suis qu’un corps et qu’avec moi tu couches comme sur un animal. Je n’aime pas être trahie, je brûle de voir ta ruse exercée contre moi, Ikau, toi qui m’avais appris qu’il n’y a ni de bonne ni de mauvaise tromperie.
Alors tu baisses ta garde, et j’en ai profité. Toi qui n’aurais pour rien abandonné ton vice, un instant je surprends un cœur au fond de ta poitrine, vibrant, grave. Je défaille quand j’écris ; ici, dans notre ancienne demeure, mon bras tremble au moment où ma plume se pose sur mon papier. Je vais pâlir, Ikau. Mais aussi j’ai appris et je te trahirai. Toi qui aimes jouer alors nous jouerons, comme aux origines, comme deux enfants. Nous finirons par nous trahir et je ne regretterai plus.

Ce n’est en rien vers toi que ma haine m’emporte. Toi, tu as su comprendre que toute seule, la raison ne plaît pas ; elle séduit, mais toi, tu as joué au vrai, à l’homme qui peut aimer, pour une autre que moi, pour une seule femme. Tu gagnes ma fierté. Mes louanges, je ne m’y attarderai pas, je suis une femme vraie. Je la laisserai attendre ; ce n’est que pour toi Ikau, pour ne jamais te perdre, parce que je suis fidèle et que je te veux.
Rebelle-toi si tu veux ; mais tu sais que contre moi tu ne gagneras rien à jouer au héros. Sauf moi.

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Naæviî à Lulya, Ancienne plaine de Termina, Est. Temps probable : Principaux feux de la guerre civile.

À cet instant tu meurs. Je ne m’étendrai pas, tu me connais déjà, je n’ai qu’à te faire peur, moi, mon arc et mes flèches, mes pas craquant le sol face à n’importe qui accolé aux rochers ou à n’importe quoi. Nous ne nous affronterons pas n’importe où ni quand, je sais ce que j’ai à faire ; toi, tu n’as qu’à attendre de voir la grande Naæviî triompher de ta peau, quand tu seras couchée, par terre, m’implorant pour toutes mes richesses possédées par toutes les armes du monde de terminer tes jours.

Et tu ne sais pas quand, tu ne sais rien. Tu ne sais rien de la vie, tu ne sais rien de la guerre, mon Ikau t’as tout caché sans te laisser le temps de voir un seul homme mort ; mais mes traits t’apprendront que rien n’est plus vrai que la guerre. C’est ma vérité, celle des instincts et des pulsions, celle de la gloire, celle que tu n’aurais jamais le temps de voir quand j’écrirai ton nom à la pointe de mon arc grâce à ton propre sang.

C’est tout ce qu’il restera de la beauté de ton corps, d’un nom auquel mon homme m’a subrogée, d’une traîtresse que j’exulte à haïr et que je terminerai comme elle a vécu ; dans le silence immense, Lulya.

Correspondances - Entre Ikau, Naæviî, et Lulya, Termina, datées d’entre les pourparlers et la guerre.

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Titre: K. ~ V : Assassins du temps perdu
Posté par: HamsterNihiliste le jeudi 07 juin 2012, 16:56:35
Bonsoir !

Voici le chapitre capital, avec un titre qui fait taire mon éventuelle réputation de monomaniaque des noms grecs et locutions latines. Le déclencheur du thème principal, en quelque sorte, qui ouvrira au fil du texte tout ce qui est en rapport avec. Comme le II°, le chapitre se veut clair et scientifique, en le souhaitant accessible tout en gardant des éléments qui font sens et qui donnent son intérêt à l'écriture. C'est un chapitre pour lequel je me suis posé beaucoup de questions, donc n'hésitez pas à réagir, à dire ce qu'il vous produit, s'il vous plaît, s'il vous intéresse, et tout critique plus ou moins constructive. Souhaitons donc une longue vie à la dynastie des personnages qui débute dans ce texte relaté, avant-dernier de la première partie, puisque je vais très sûrement écrire en tant qu'auteur-narrateur pour la troisième "trilogie ".

Mais pour l'instant, bonne lecture et bonne écoute – ou ré-écoute, prenez le temps, ironie du sort ! Dernière chose non sans importance : j'ai posté une version du texte entier, que je mettrai à jour, en .pdf sur la page d'accueil, uniquement pour MMMV. à l'heure actuelle. Le format sera plus agréable à lire, mieux mis en forme donc donnant plus l'aspect d'un livre, que vous pourrez même imprimer si vous êtes hermétiques à la lecture sur l'écran, ce qui est compréhensible.

Au temps !

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V : Assassins du temps perdu

Léo Ferré - Avec le temps, 1970 (http://www.youtube.com/watch?feature=player_detailpage&v=aiXcUTTLud4)

Il y a des choses dans ce monde qui ne sont pas normales. Que des hommes vivant seuls s’estiment maîtres absolus, et déclarent des guerres parfois d’un seul regard, dépasse l’ordre des hommes. Que les hommes laissent leurs vies derrière eux quand ils tombent à la guerre n’est pas dû qu’au hasard. Que les hommes aient besoin pour vivre de manger des créatures vivantes et de boire de l’eau issue de l’extérieur demeure inexpliqué. Et que le peuple entier, sans exception aucune, soit appelé des « hommes » est profondément triste.

Toutes ces choses du monde qui ne sont pas normales ont besoin d’être sues. Elles le devaient déjà à l’époque à laquelle je suis apparu au sein de l’Élite, pour le juste bien du peuple. J’étais dès lors convaincu que la politique révèlerait au peuple des vertus bienfaisantes ; mais moi, responsable de la science parmi d’autres responsables, cru et soutenu par l’ensemble de l’Élite unie, nous fîmes le douloureux constat que le bien n’avait rien pour s’offrir au peuple.
Vous m’accuserez, comme tous, d’avoir été trop lâche et, par honte, d’avoir fui ; rejetez-moi du monde, jetez moi des flammes encore si vous savez où je suis ; peu importe où j’ai fui, je vis juste dans un lieu où je peux réfléchir, travailler et agir pour mes propres projets qui sont aussi les vôtres. Peuple de Termina, peuple du monde, la science, cette recherche que je peux embrasser durant toute ma vie, vous gardera des erreurs que la politique a commises. J’en suis persuadé.

Si je ne peux que le penser, c’est parce que personne ne nous a cru, tandis que nous, nous avons laissé fuir la confiance en vous. De la même manière, peu importe mon exil, peu importe mon avenir déjà derrière moi, je ne verrai peut-être pas grandir ma création ; nous savons désormais que j’ai l’âge d’un sage, et qu’un temps de ma vie aurait pu plus longtemps rechercher ma science. J’estime donc légitime cette œuvre de ma vie, je peux donc le prouver car je le sais ; j’ai soixante-quatre ans.

-

Le temps s’est imposé nécessaire dans ce monde. Le destin de ce même monde sera entre mes mains, depuis le passé, pour notre présent, et pour votre avenir.

Au commencement, depuis nos sociétés primitives, nous avons eu l’usage de regarder les cieux, de calculer les astres, et d’en déduire les cycles du jour et de la nuit. Ceux qui les cherchaient les étudiaient eux-mêmes ; ils estimaient avoir raison de n’obéir à personne, sinon à la flore, aux collines boisées ou même au scintillement de la nuit, et de s’approprier le savoir pour leur propre intérêt, estimant que le jour succède à la nuit, mais sans compter les années, sans vivre à leur rythme.
Aujourd’hui, aucune de ces créations humaines n’est nécessaire. La nature ne nous sera plus utile ; il vous sera inné d’obéir au temps, qui ne verra personne le régir mais qui s’imposera plus haut. et plus tard. Bientôt on oubliera que ce fut la discorde causée par la science, on se souviendra de cette naissance glorieuse de notre humanité, et l’histoire se comptera avant et après le Temps. Les secondes constituent les minutes, les minutes constituent les heures, les heures constituent les jours, cette avancée des jours constitue donc l’histoire. Là réside notre inextricable problème ; malgré l’étude logique de l’environnement, nul ne pourra laisser, comme des feuilles tombées sur l’humus au bas des arbres, des chiffres et des mesures pour, selon le besoin, savoir quand nous sommes. Peuple de Termina, peuple du monde, si le gouvernement humain fut pour tous un échec, je vous forcerai à obéir à une seule science, au temps, qui n’est rien d’autre que la science du hasard.

Si le nombre arbitrairement précis de vingt-quatre heures constituera un jour, de l’aube au crépuscule, de la nuit à la nuit, nous saurons que demain sera le premier jour après le seuil du temps. Mais, par facilité, les œuvres de la terre pourront être remplacées, et leur disparition ne sera plus un manque. Si l’utilité de s’y référer fut primordiale, il sera abordable de s’y accommoder pour être en mesure de construire, par exemple, de nouvelles horloges.

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Seul reclus au centre de mon espace d’études, je ne peux pas nier que les horloges sont belles. Sans m’émerveiller, pour rester sérieux, le rebond d’une aiguille face au chiffre d’une heure, et le son régulier du « tic-tac », du « oui » et du « non » inhérents aux pendules, soulèvent une émotion qui pénètre mon cœur comme les mathématiques percent mon cerveau.
Si je ne me laisse plus emporter par les flots de ma loyale passion, il est bon de reconnaître qu’on doit exposer les heures, montrées par les horloges réparties sur la terre, dans le pays, voire dans le monde. Implantées peu à peu, elles montreront aux hommes, par leur exactitude, l’avancement du temps. Ainsi, pour la guerre elles nous seront utiles ; de nouveau des stratégies pour se battre tel jour, porter un coup une heure, tirer à l’arc d’une tour que l’on sait protégée à un délai de quatre minutes, et seulement quatre minutes, une nuit seulement, pourront être calculées.

Mais, sans y croire toujours, nos ennemis aussi pourront s’approprier cet arme qu’est le temps. Si tel est le cas, l’avenir est à double tranchant ; l’ennemi pourra bien travailler son temps pour ses stratégies, mais dans un meilleur espoir, le concept deviendra valeur universelle, unifiant les hommes et engendrant la paix. Si cette paix est jouable, il est à supposer que personne ne prétende à vivre hors du temps. Mais l’heure est à la guerre, et elle ne se terminera pas avant que la première horloge ne se voie construite : les architectes la pensent déjà en haut d’une tour, au centre de Termina, régnant sur le village qu’on nommera Bourg-Clocher.

Le principe est simple. Comme la politique, il suffit de montrer, de donner un repère, répété chaque jour pour lui donner le temps de rester gravé dans votre mémoire, oubliant la période où vous viviez sans, et vivant chaque jour au rythme de l’horloge. Vous aurez l’habitude de vivre avec le temps comme vous viviez avant ; les mesures précises, les plus concrètes possibles, remplaceront les cycles astraux imprécis et fastidieux. Je ne veux que vous libérer d’une tâche trop laborieuse afin qu’à juste titre, vous gagnez plus de temps, vous viviez plus vite, encore et toujours.

Mon amour face à l’humanité me sera sûrement nuisible, mais je ne veux pas que le temps soit votre ennemi ; croyez-moi. Mais quand bien même vous vous rebelleriez, il sera trop tard.

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Je ne suis pas Ganondorf, que malgré son pouvoir je ne porte ni dans mon cœur ni dans mon âme, ou même un autre membre mégalomane et égotique. Non, croyez-moi, je ne vous veux que du bien, et c’est dans le plus grand silence que je vais faire naître l’œuvre de ma vie – ou plutôt de ma vieillesse. Longtemps j’ai été vous, je vous promets une avancée dont l’histoire se souviendra toujours. Longtemps j’ai été vous, je vous promets que le nom de Termina restera gravé autant que le mien, si ce n’est plus. Que mon nom et mon âme soient ensevelis, peu importe ; mais j’ai seulement peur de ne pas voir le temps mûrir. Moi-même je suis vieux, je ne pourrais sûrement plus voir fleurir ma science, et ce fils artificiel, venant de s’élever de moi, se passera de son père pour votre bonheur.

Si je fais une erreur, si je l’ai déjà faite, j’ai assez d’expérience pour être préparé à la révolte du peuple, comme je l’ai déjà vue. Je m’en garderai bien. Vivez en paix, soyez libres, je n’ai plus qu’à me reposer dans la sérénité, à savourer la douceur de la fin de vie d’un homme qui a donné son âme pour ses habitants, à me laisser apaiser en comptant les heures et les dialogues de l’horloge en hêtre, celle que j’installerai sur mon mur en bois noir.
J’ai été politique, responsable, j’ai pris des risques comme tout le monde en aurait pris pour tous ; le temps semble prétendre à moins de risques d’échecs : car lorsque mes jours seront terminés, le temps sera seul maître en ce monde. Nous le verrons courir ou se laisser passer, nous en aurons peur, il causera peut-être certains crimes propres à lui, comme la guerre naquit de la religion, ou la révolution avortée naquit de l’Élite. Le temps, c’est mon fils. Il est sorti de moi.

En espérant seulement que l’histoire de l’Élite restera gravée ; laissez-moi voir la vie et mourir.

Théorie et création du Temps – De l’oubli de la paix à l’Histoire de la guerre - Rébellion Nullstein, émérite de l’Élite responsable de la science, An 0, Mois 0, Jour 0.

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Titre: K. ~ VI : Morituri te salutant
Posté par: HamsterNihiliste le dimanche 08 juillet 2012, 23:09:53
Bonsoir !

Voici le sixième chapitre dont je suis assez fier, contrairement au précédent. J'en ai tiré les enseignements, donc je l'ai écrit de manière plus vivante – c'est ce que j'ai voulu faire sur le dernier –, la principale différence reposant ici sur le dialogue. Une première partie est encore un monologue pour présenter le contexte et connaître l'identité de ce fils héroïque, tandis que dans la suite j'ai renoué avec un discours particulièrement agonistique (théâtral en somme). J'ai pris bien du plaisir à écrire ce chapitre, je me suis rendu compte que je suis plus à l'aise avec ce genre d'écrit, qui renforce mon intérêt pour l'écriture de théâtre. Sans l'estimer pauvre, c'est un chapitre qu'au contraire j'ai bien travaillé, qui a ses subtilités que vous pourrez chercher ou trouver, et qui n'attend que vos retours autant au niveau de la forme que du fond.

Mon mois va être occupé et le prochain chapitre me demandera du temps, donc cette période va sûrement être moins régulière que le reste, mais peu importe ; récemment je me suis remis en question, et je tente de retrouver un élément que j'avais oublié dans l'écriture : le plaisir. Parfois, c'est aussi simple que ça, bonne lecture.

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VI : Morituri te salutant

Georges Brassens - La mauvaise herbe - Les amoureux des bancs publics (http://www.youtube.com/watch?feature=player_detailpage&v=xaC5mwVxoHU)

À mon père que je n’oublierai pas.

Mon père a toujours été mon père par le sang, par le cœur et la voix. Nous nous aimions comme si nous avions été frères, nous avons vécu ensemble comme un père et son fils ; il m’a appris à lire pour savoir ce que veulent les hommes, à écrire pour pouvoir humilier leur ego, à lutter pour devoir me révolter et ramener à la terre ce qui est à la terre. Comme un dieu il maniait ses deux dagues, cependant que moi, amoureux de l’épée qu’il m’avait offerte, je rêvais de m’élever à son talent.
Mon père a tout voulu pour réaliser mes rêves ; il m’aidait à lire des livres que le peuple entier taxait d’insensés, il m’apportait des plumes d’animaux lointains pour que je puisse savoir et aimer écrire, il me frôlait de sa dague tandis que je lui dégainai d’une demi-seconde et de ma main gauche, Guerre, ma svelte épée. Toujours est-il qu’elle est longue et qu’elle tranche plus que tout. Si les dagues de mon père sont taxées par ses ennemis de coupes-papiers, toujours est-il que si elles coupent du papier, elles peuvent couper un homme.

Mon père n’a jamais juré ni par la taille, ni par la force. Il est grand et j’espère qu’un jour, je serai aussi grand que lui. Mais dans le cœur, si tant est qu’il en ait un, nous sommes frères. Souvent, le plus petit est roi, et l’ampleur d’une épée ne sert qu’à compenser l’étroitesse d’un esprit ou la bassesse d’un art. Du haut de sa superbe, que j’avoue humblement avoir partagée, il estimait ses dagues semblables à son talent. La vitesse invisible de sa silhouette, la finesse assassine lorsqu’il jouait de ses lames, et la haine qui l’élevait à chacun de ses pas avaient pour destin d’en avoir fait un homme fier.
En artiste de théâtre comme en fier assassin, il gagne son honneur. S’il exècre celui de ma mère, sa mariée, il ne recherche rien ; s’il est un peu aimé, ne le gêne pas, pas plus que d’être haï. Il est de ces grands maîtres dont le seul honneur est d’être déshonoré. Je crois que c’est un peu triste, pour mon père, de n’être aimé que pour ce qu’il paraît. Je ne comprends pas pourquoi, parce qu’il y a tant de choses dans ce monde qui sont belles, il faut se faire faux, se cacher des hommes et de la terre, et regarder le reste avec mépris du bas de son terrier. C’est ce qu’il veut m’apprendre. Mais j’estime être en droit de ne pas tout comprendre, parmi les droits que j’ai ; après tout, je suis son fils.

Mais je ne dirai pas que je ne suis que son fils. Si je veux devenir à l’épée ce qu’il est à la dague, et si je veux devenir à mon destin qui il est à moi-même, je peux être un héros. Je peux vivre comme lui sans devoir récolter la folie de ma raison et la haine de mon amour ; je peux mourir comme il ne le voudrait jamais. Oui, je me souviens maintenant.
Je me souviens. Nous étions dans le seul étage de notre demeure, entourée par le bois clair des arbres où soufflait le vent, armé de Guerre, ma longue et large lame dans ma main droite, et Memento Vivere, sa dague la plus néfaste tenue par sa main gauche. Quand j’ai crié ma liberté de droit face à mon père, nos propos se choquaient au rythme de nos armes. Nous étions père et fils.

— Ikau, je veux partir.
Sa réaction reste et restera dans ma mémoire une expression cruciale. Jamais je ne l’avais appelé de son prénom Ikau.
— Pourquoi ne me nommes-tu pas comme mon fils à ton père ?
— Parce qu’Ikau est ton nom, et qu’il reste ton vrai nom, Papa.
— Sache comment tu m’appelles, reste déterminé, Kafei, mon fils.
Je parai sa dague prête à subrepticement percer mon épaule droite.
— Je suis déterminé, et je sais que je veux partir, amorçai-je enfin dégainant mon épée tout droit contre son cœur.
— Tu crois que je n’avais point deviné ? Tu crois beaucoup, Kafei.
Je retournai brusquement Guerre en sa direction, tout contre mon dos.
— Tu crois que je n’avais point deviné que, pendant que j’éclipsais ta Memento Mori, tu passais derrière moi le couteau sous la gorge ? affirmai-je alors que, doucement, il s’éloignait.
— Ce n’est pas un couteau.
Il garda sa même dague en appuyant le bras sur le pommeau de Guerre.
— Je sais bien, je ne suis pas de ceux qui croient autant que tu ne peux le penser, continuai-je en résistant encore et encore.
— Tu n’as pas à croire si tu veux partir. Tu ne partiras pas à la guerre, mon fils.
J’arrachai enfin à sa force ma chère arme que son corps éprouvait.
— C’est ce que je voulais, répliquai-je en tranchant l’air dans son horizon.
— Ce n’est pas aussi facile. Ne relâche pas pour autant toute ton attention.
Memento Vivere passait une deuxième fois derrière ma gorge. J’eus bien peur qu’il me tienne.
— J’ai toujours voulu partir et je le prouverai, Ikau.
Quoi qu’il n’eut pu dire, je m’élevai par-dessus son bras frêle et, tête frôlant le sol, j’arrachai sa dague gauche. Je renversai volontairement Guerre, le tranchant de la lame à la main, pour tromper, par le pommeau, l’équilibre de ses jambes. Une fois qu’il fut à terre, je crois, je jetai Memento Vivere par dessus son épaule. Avec le dernier bruit d’une dague crevant le bois au mur, l’entraînement prit fin.

— Papa, je suis persuadé d’être en bonne posture, lançai-je à mon cher père se relevant alors d’une vitesse glorieuse. Je lui tournai le dos.
— Kafei, tu m’as lancé une arme. Tu as été lâche. Tu veux agir en guerre comme ta mère le fait. Je ne peux pas te laisser partir à la guerre attaquer à distance. Tu n’as pas encore l’orgueil de Naæviî pour éclater tes pulsions, pour meurtrir la terre au nom de tes désirs, et conquérir la guerre pour ne prouver rien d’autre que ta nature. Ce n’est pas sous cette réalité que j’ai voulu t’élever, tu peux te révolter contre moi et mes masques, mon public, mes rideaux ou mes dagues, mais sache que si tes pulsions et ta vérité les plus profondes ont pour destinée de se montrer à la guerre, il te faut les trouver.

— Je les trouverai. Si je ne meurs pas avant, avec le dernier espoir et la dernière épée que mon corps soutiendra.
— Tu ne mourras pas avant, Kafei, j’en suis sûr. Tu es fort, stratège, et tout aussi agile, mais ton espoir craquera, tu n’en as pas besoin, tu n’as pas besoin de cœur pour toutes ces conneries. Résister sera futile et ton cœur craquera. Il craquera.

Nous jetâmes nos armes à terre.
— Ce ne sera pas difficile, que ce soit à la guerre où n’importe où, d’être un héros, Papa. Je ne jetterai pas d’arc, je le jure. Mais l’arc ou l’épée ne changeront rien, absolument rien au destin de héros.
— À ton destin de héros ? me rit-il au nez. Kafei, mon fils, tu as autant d’orgueil que d’héroïsme, je n’en doute point. Mais je resterai ton père, tu ne m’oublieras pas, alors permets-moi d’affirmer que tu perdras ton temps à devenir un héros sur un champ de bataille. Si tu ne perds pas autre chose parmi les arcs, les haches, les corps éviscérés et les crânes calcinés qui te feront vomir. Quel bel héroïsme.

Je sais que mon père avait pour habitude de me manipuler. Profondément vicieux au sens glorieux du terme, il savait mépriser, je savais l’endurer. Mon orgueil se voulait fier ; en jouant son propre jeu, je lui prouvai que mon cœur était à la hauteur de ma destinée.
— J’ai de l’espoir mais je sais que je n’en aurai pas besoin, je suis naïf mais je sais que je ne dois pas l’être, je suis jeune mais je sais que je l’ai toujours été. Expose tes arguments. Quelle belle autorité.
— Kafei, mon fils, tu ne me prouveras pas que tu sais tant te battre tant que tu ne pourras pas t’extirper triomphant d’une confrontation autrement qu’en jetant n’importe quelle dague. Certes, tu es lâche. Certes, tu pourrais te défendre et sortir victorieux, même plus, si tu crois que les dieux te sont soumis.
— Mon espoir, ma jeunesse, et mon temps, j’en ferai mes armes, lui dis-je, souriant et gagnant.
— Mon fils, quel âge as-tu depuis que tu es venu en ce monde ? Depuis ce qu’on appelle le Temps, j’ai pu calculer que tu as déjà douze ans, cela t’importe-t-il tant ? Mais tu restes trop jeune pour être un héros, pour vivre tes pulsions et battre tes ennemis, pour marcher comme tout le monde dans les champs dévastés par le plus profond des désespoirs, pour éviscérer comme tout le monde de ton premier couteau le premier rat qui court pour survivre à ta faim qui n’en finira pas de te faire crever, et pour finir n’importe quel soldat dans n’importe quelle guerre au nom des anonymes défenseurs d’une croyance, comme tout le monde. Tu n’es rien de ta mère et tu n’as pas ses armes, tu es jeune et naïf, profites-en encore. Alors pars si tu veux, pars pour tuer ton père et mourir en héros. Si tu crois avoir le droit.
— Alors si je n’ai pas le droit, je prendrai le gauche.

J’étouffai mon seul pleur qui pouvait me trahir.
— Je te ferai honneur, Papa, je serai faux.
— Soit tu restes un enfant, soit tu tueras ton père. Je te vois pour un jour héros, et moi, pour une nuit, je veux une heure de gloire.
Le crépuscule tombait. Je souriais en silence tandis qu’Ikau pleurait, en silence aussi. Je soupirai encore.
— Quand le jour se lèvera j’aurai quinze ans, Papa. Depuis que je suis né, depuis mes quinze  années qui seront miennes demain, je ne veux que partir. Tandis que je le ferai pour le bien du pays, tu le ferais pour le mien ; parce que tu  es mon père et que mon père m’aime.

Il leva sa dague, ma main serrait ma lame qui pointait à la fenêtre. Aujourd’hui j’écris juste avant de mourir.

Seconds carnets : « Pour ton bien » - Kafei, Termina, An 12, Mois 12, Jour 15.

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Titre: K. ~ Partir. [1 Juin - 1 Juillet 2012]
Posté par: HamsterNihiliste le vendredi 13 juillet 2012, 02:46:53
Bonsoir,

Aujourd'hui, ce soir, cette nuit, ce matin, j'ai décidé de livrer une partie de moi-même, dans un certain élan de pulsion ou de liberté, je ne sais pas, mais je le veux. Depuis le début de l'hiver, j'écris un texte que j'ai appelé Partir. . J'ai décidé de le commencer librement, sans travailler, en écrivant d'une manière orale et par ce que l'on serait tenté d'appeler écriture automatique. J'écris en blocs, les seules indications sur mon manuscrit et dans le texte sont les dates ; je précise la date à laquelle j'ai écrit tel " Point ", c'est tout. Entre chaque " points " je joue également sur le premier et le dernier mot, souvent contraires, et c'est tout ce qu'il y a à rechercher, je pense. C'est clairement une expérience personnelle, comparable à l'innomable Thanatos, mon ami, mais dans ce dernier il y avait une volonté, un imaginaire, je voulais le faire partager parce que j'écrivais un fond sans une forme ; là, non, j'écris " vrai ". Je crois.

Si je n'ai jamais trop su ce que je voulais en faire, j'ai voulu commencer à poster l'extrait le plus récent parmi cette humble bibliothèque, j'en posterai peut-être des nouveaux au des anciens, mais une chose est sûre, voici un Partir, un texte (qui compte au moment où j'écris 10 959 mots, soit plus que MMMV.) que je nomme et que j'écris " pulsionnel ".

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Point au 1 Juin 2012.

Temps. Le temps indique n’importe quelle heure de la nuit, puisque la nuit, c’est calme. Tout est calme, aussi calme qu’eux deux qui se parlent sur les chaises en face dans le salon, tous deux autour d’un verre et d’une jolie lumière, tout simplement jolie. Lui est triste, une larme toute simple coule sur sa joue, et l’homme qui est en face, qui ne s’appelle pas « l’autre », trouve si belle une larme sur la joue d’un ami.
Un temps ils ne se disent rien.

— J’ai pris le train hier. Devant moi, parce que tous les sièges étaient dans la même direction, il y avait un type qui lisait Cauwelært et deux femmes qui lisaient Harlan Coben. Les gens sont cons.
— C’est des romans de gare. Ils ont le droit. Les gens ont le droit d’être heureux, tu sais. C’est pas parce que toi ça te rend pas heureux que eux, si ce qu’ils font leur plaît, ils sont des imbéciles qui sont nés quelque part.
— Je sais bien, c’est ce que je dis. Tu sais bien que quand t’es pas normal les gens qui sont heureux ça te rend malheureux. Et moi j’suis pas normal, c’est triste. Moi j’aimerai lire Harlan Coben ou Marl Lévy et en être heureux, qu’est-ce que tu crois, plutôt que d’écrire comme moi et d’être malheureux. Au milieu des filles qui bouquinaient – qui lisaient, pardon –, il y avait ma place, pendant un temps de train qui aurait pu être plus long. Il y avait une place libre à côté d’une fille qui dormait. Je m’y suis installé et je l’ai regardée pendant tout le voyage. Je l’ai regardée, c’est tout. Je n’ai pas vu son visage, je n’ai pas vu ses lèvres, je n’ai pas vu ses seins, mais je l’ai regardée parce qu’elle était belle et c’était tout. C’est quelque chose qui m’a rendu heureux. C’est pas si compliqué, t’as raison.
— Oui. C’est ce que je t’ai dit. Les femmes sont aussi belles que les paysages dans tes trains.
— C’est pas ce que j’ai dit. Balance pas des trucs mièvres, ça veut rien dire. J’ai trouvé cette fille belle et j’ai pas besoin d’en dire plus. J’ai pas besoin de l’aimer, pas besoin de l’épouser, de la baiser et de lui faire des gosses, pas besoin de me masturber, je l’ai trouvée belle, c’est tout.
— T’as pas de volonté. T’as pas d’espoir.
— J’ai pas de volonté pour quoi ? Parce que ne ne veux pas accoster une fille n’importe où – même dans un train – en lui criant « T’es bonne ! » ? J’ai pas de volonté parce que je ne veux pas, c’est tout. Si je veux aimer une fille je l’épouserai, un jour, si je me retrouve un cœur et que je regrette enfin d’avoir voulu ne jamais aimer.
— Tu trouveras quelqu’un, un jour. Ne t’inquiète pas.
— J’ai envie. Mais je veux pas, c’est tout. J’ai le droit. Si on dit que l’amour c’est libre, et que je dis que c’est aléatoire, j’ai bien le droit de rien en espérer, si je dois espérer quelque chose, non ?
— Ne t’emporte pas. Je veux t’aider. Je veux juste t’aider à ne plus regretter.
— C’est pas parce que t’estimes avoir réussi ta vie que tu l’as réussie. C’est pas parce que t’as épousé une femme, que t’as de beaux enfants, et que t’es avocat que tu peux t’estimer normal. Et si personne n’était normal dans ce monde et que j’étais le seul à l’être ? Et si rien n’était normal ? Et si je m’appelais Truman Burbank ?
— Tu n’es pas normal mais qu’est-ce que ça peut te faire ? Rien. Rien.
— Oui, tu as raison, rien. Il y a tellement de choses dans ce monde qui ne sont pas normales que ça ne me fait rien. Que j’écris parce que j’aime et que si je fais quelque chose, même au fond d’un cœur que je n’ai pas, même petit, même caché et c’est tout, c’est parce que ça me plaît, et c’est tout. Il faut que tu me le dises, s’il te plaît, dis-le moi, que je n’ai pas de plaisir et que j’me force à tout. Dis-moi qu’il suffit d’un rien pour avoir du bonheur et que partir ça me fera pas de mal, parce c’est ce que je veux, partir, partir, partir.
— Abandonne ce que tu fais et pars.
— Je pourrai pas.
Il pleure un instant et puis il continue.
— Tu vois j’te l’avais dit. Je peux pas partir parce que je peux pas, parce que j’suis prisonnier d’moi-même et qu’j’ai pas d’volonté, parce que je me dis que je veux et que je me dis que je peux pas.
— Parce que t’as pas d’espoir ?
— Ouais, j’ai pas d’espoir et je le regrette. Et pour ne plus regretter il me faut partir. Et pour ne plus partir il me faut regretter. C’est con. Et pourtant, et pourtant, et pourtant tu te rends compte que le lieu habité le plus au Nord du monde est une base géologique russe, indienne, française ou même je ne sais pas au Groënland ? Tu te rends compte qu’il y a des îles au large de l’Irlande où personne n’a jamais mis les pieds ? Tu te rends compte qu’avec Google Earth il me suffit de rechercher Clifden depuis ma pauvre ville natale pour savoir où, quand, et comment, je peux y partir ? Tu te rends compte qu’il y a deux nuits j’imaginais les îles Kerguelen bien plus au Nord qu’elles ne le sont ? Et tu te rends compte que le partir le plus lointain où j’ai pu partir c’est à Paris, à cinq cent kilomètres, en peut-être six heures de voiture, et cinq cent kilomètres sur l’échelle de l’espace c’est rien, et six heures de voiture sur l’échelle du temps, c’est rien. Rien. J’aurais pu ne pas naître. J’aurais pu naître il y a cent ans et crever à la guerre, j’aurais pu naître en même temps que Molière et crever dans la pauvreté, j’aurais pu naître en même temps qu’Alexandre le Grand et avoir le rêve d’un monde déjà uni, sans nations, sans conquêtes après moi, sans guerres, sans communisme et sans idéal, car l’idéal, on y serait, tu te rends compte que j’aurais pu avoir un idéal ? J’aurais même pu être un composant d’un gaz d’une étoile qui naîtra dans un milliard d’année, j’aurais pu être un tyrannosaure, j’aurais pu être une planète qui a toujours existé mais qu’on découvrira très bientôt dans plus de trois cents ans, j’aurais pu être l’Univers, j’aurais pu être mon fils, j’aurais pu être toi, je pourrais être moi. Dis-moi que je suis moi et que j’ai des raisons de croire en ce monde. Dis-moi qu’il y a des choses belles dans ce monde et que comme tout le monde je peux avoir de l’espoir. Dis-moi, dis-moi oui, je t’en prie, espère-moi, dis-moi oui.

— Oui.
Ils ne se disent rien, puis l’homme du « oui » continue de parler à l’homme du « partir ».
— Tu peux partir. Il ne  suffit pas de vouloir, il ne suffit pas de pouvoir, il ne suffit pas de femme, il ne suffit pas d’espoir, il ne suffit pas de sexe, il ne suffit pas d’écrire, il suffit de rien dire et de partir. Ne cherche rien, n’explique rien, partir c’est oublier, je devrais pas écrire autant, partir, je devrais pas l’écrire avec une majuscule, partir c’est être tout le monde, partir c’est être rien, partir c’est oublier, partir c’est affirmer que l’amour d’un partir dans le cœur d’un humain c’est le plus bel amour qui soit, partir c’est partir, partir c’est rien, partir c’est tout. Alors pars. Et ne dis pas que t’as pas le temps.

Il ne pleurait pas. « Partir » était déjà de dos. Une dernière fois se crever les yeux devant l’ordinateur. Il souriait. Il pleurait de sourire.
— Voilà. En soixante dix-sept étapes, en voiture, en parcourant 2020 kilomètres, et dans 22 heures et six minutes on est à Clifden, dans le comté de Galway, au Connemara, en Irlande, quelque part sur terre, alors prends fais tes affaires, suivons-nous ensemble, arrêtons de parler, d’écrire et de pleurer, et partir loin du temps.

Point au 1 Juillet 2012.

*
Titre: K. ~ VII : Dans les champs des violeurs et violées solitaires
Posté par: HamsterNihiliste le mercredi 01 août 2012, 22:13:33
Bonsoir.

Ce chapitre est une scène de viol, la troisième de ce genre que j'essaye depuis que j'ai commencé à écrire. J'ai voulu que le commencement du chapitre soit d'ores et déjà axé sur la fatalité de l'action, afin d'en faire, à mon sens, une scène de viol plutôt qu'un chapitre qui en contient une. Plus qu'un thème, c'est un genre qu'il m'intéressait d'explorer pour les richesses qu'il offre, étrangement en adéquation avec la pureté absolue de l'action. Ce que j'ai voulu mettre en avant dans cet essai, c'est la gratuité qui va animer le personnage dont on ne sait rien, qui aura peut-être son importance, ou peu importe.

C'est un chapitre que je souhaitais élaborer depuis longtemps, et, dans le cadre de la fiction, il met en scène deux actions parallèles, dans le but de donner une continuité à l'action – même si le thème central a son importance comme un autre – et de vous donner un moment de répit éventuel.

Bonne lecture, et surtout, n'hésitez pas à lire et à formuler vos critiques ou conseils au lieu de laisser simplement un signe négatif sur le post !

*

VII : Dans les champs des violeurs et violées solitaires

Koji Kondo & Toru Minegeshi - Last End - The Legend of Zelda : Majora’s Mask (http://ttp://www.youtube.com/watch?v=9-Fy-X_fC5c)

Termina, An 13, Mois 4, Jour 3.

Ses yeux l’embrassaient. Sa bouche lui susurrait les plus beaux mots d’amour et les plus grands de haine. Sa main tenait la sienne, main dont les doigts si fins se liaient à ses doigts d’homme revêches et décharnés. Ses jambes écorchées tiraient gravement ses grègues en cuir sur le sol terreux, rendant l’homme éclopé lassé de sa démarche. Mais il marchait, inébranlable et sûr amoureux qu’il était, vers le même horizon qu’elle, le pas brutal et l’œil sans aucune larme.

Le Pic Noir l’attendait. Le monolithe noirâtre ancré dans la terre dépassait le pays jusqu’à la baie au nord qui le délimitait. À son pied, en face, ou depuis l’océan derrière l’horizon, personne ne pouvait voir la terre derrière lui. Seule la foule de guerriers jouissait du faux privilège de gravir ses falaises, de courir sur ses étroites corniches où même la mort n’osait se risquer, et de s’entretuer sur son sommet aride. Ikau ne les voyait pas encore de ses propres yeux. Il apercevait l’ombre étendue de l’homme qu’il cherchait par lequel, peu de temps suite à son arrivée, le sang coulerait ou non.

Il lui tenait la main, sa main qui peu à peu se détachait de lui.
— Je t’aime toujours, Naæviî.

Elle pleurait de se voir embrassée par ses yeux. Les plus belles haines et les plus grandes amours susurrées par sa bouche régnaient sur son sourire. Il enfermait sa main, et elle laissait ses doigts  de femme ornés de bagues dorées pénétrer dans ses phalanges creuses. Mais son pas écrasant criait la terreur et terrifiait le peuple, offrant à ses grèves rouges une marche infernale. Alors, l’homme et la femme ensemble, foulant le même sol et la même direction, l’œil sans aucun sang, durent se séparer pour un infime instant.

Lentement, infiniment, Ikau levait sa main tandis qu’en même temps, Naæviî la descendait. Pour l’unique temps dû à la séparation d’une femme et d’un homme, le temps semblait éteint. Ils semblaient n’être plus soumis à rien, ni au temps, ni aux morts, ni au sang. Pourtant il n’y avait rien. Rien qui ne différenciait ce soir du quotidien ; chaque fois que leurs corps foulaient les Champs de l’Espoir, à jamais situés au Nord-Est de la plaine, ils se plaisaient à fusionner avant de se séparer. Naæviî partait se battre, Ikau partait tuer, comme ils voulaient le faire chaque fois qu’ils le devaient. Alors, infiniment, lentement, leurs mains se séparèrent.
— Je t’aime encore, Ikau.

Ils gouvernaient leurs pas pour partir chacun vers leur propre direction. À l’est devant elle, les roches enracinées dans le sol désertique se découvraient au rythme de ses pas, écartant la foule par terreur, par lâcheté, ou pour les téméraires par instinct de survie. Elle vit peu à peu le terrain de bataille dont elle s’approchait ; derrière de légers rocs entourés de collines, la cohue des guerriers se dissipait jusqu’à ne laisser à son flair qu’une dizaine de brutes, puis que quelques cinq archers, cachés par les silhouettes de deux assassins, jusqu’à ne voir plus qu’un homme pouvant cacher sa vue.
L’homme restait raide contre les monolithes, il ne la voyait pas, tandis qu’elle le sentait. Vers son nez émanait une odeur de mépris, sur sa bouche s’affichait un sourire de haine, tandis que dans son cœur retranché, cachée au fond d’elle-même, sa terreur se terrait. Cachée, derrière le lieu où elle allait se battre, elle n’osait avancer ; l’homme non plus n’attendait rien. Elle n’eût le temps de dire qu’Ikau n’était plus là, qu’elle n’avait pas à fuir et qu’elle jouait de l’arc avec ardeur guerrière si, parce qu’il le fallait, elle devait tuer. L’anonyme en armure, alors, leva sa main sur elle, la glissa sur l’épaule, avant de faire de même à l’aide de l’autre main en frôlant l’autre épaule. Son corps se rapprochait tandis qu’elle restait droite, ses côtes plaquèrent ses seins, ses pieds lourds et cachés s’emboîtaient dans le vide qu’ouvraient ceux de Naæviî.
— Nous sommes maintenant rivés à cette terre qui nous aura vus naître et nous verra mourir. Je me laisserai faire puisque toute femme a le droit d’être violée.

Tandis que Naæviî fut lâchement saisie, Ikau crevait de désir de franchir le Pic Noir. À l’ouest devant lui, les armées insurgées créaient une masse noire qui étouffait son horizon. Passé par quelques dagues et arcs jetés à terre, l’espace se découvrait, percevant le sommet, entendant les cris, et sentant les odeurs de la roche exposée. Outrepassée la foule barbare indifférente à son corps fatigué, il saisit dans le dos celui qui attendait, le regard vers le ciel et vers les corps humains tous pointés au sommet.
— Ta dague en a mis, du temps, Ikau, lança-t-il d’un sourire en baissant du doigt l’arme de son meilleur ami. Ta tuerie inconsciente ne fera rien d’autre que te noyer de honte, quand ton corps se verra oublié dans la boue de l’histoire.
Ikau reprit sa dague, laissant son épaule libre afin de lui parler comme il le souhaitait.
— Ridley, nous avons cessé de compter les nuits qui nous entendaient dire qu’en un instant la mort de cinq cents hommes évitera au peuple celle de trois milles en un an. Ne sois plus un gosse, monsieur le Chef, toi-même chef de l’Élite de ce jeune pays qui souhaite, avec moi, l’explosion de ce Pic en même temps que celle de ces cinq cents barbares !
Ridley soupira, las et esseulé, laissant le temps à Ikau de finir, en un mot.
— Ils crèveront tous un jour ou une nuit. Qu’ils s’entretuent sans fin, qu’ils fuient sans espoir, ou qu’ils vivent sans peine, ils mourront. Ne t’illusionne pas, Ridley.

— Avant que tu n’avances comme tu t’y obstines pour amorcer l’explosif brut que nous avons caché aux regards de notre peuple, laisse-moi te hurler mes dernières paroles, expira-t-il. Ils sont certes des fous à qui l’on doit la durée infinie de cette guerre. Ils ont certes gravi le massif le plus rude de toute cette terre, l’érigeant alors en champ de bataille sanglant. Ils s’entretuent certes sans raisons. Mais ils sont avant tous des hommes et des femmes, nés chez nous, innocents et purs, chez qui l’insurrection a frappé au hasard ; tu en crèves de les voir s’éviscérer l’un l’autre pour qu’il n’en reste qu’un, mais tu n’as pas le droit de les faire tous crever. Nous nous aimons, Ikau ; ne me fais pas savoir que tu possèdes l’orgueil de la mort elle-même pour prendre qui tu veux parce que tu es un traître ! Illusionne-toi, Ikau !
Ikau était prêt à couper de sa dague gauche la corde qui retenait l’amorce explosive. Elle le fit. Sans un mot il se retira tandis que l’explosion retentit jusqu’aux frontières. Les chemins d’accès gravés à même la roche tremblèrent. L’armature s’effrita.
— Par chance le reste du peuple a encore besoin de moi, cela t’évitera de me laisser crever dans la lumière de ce fatal spectacle, méprisa Ridley en contemplant l’horreur. Traître, Tu as sur les mains le sang d’un peuple que nous avons aimé.
Les pics droits et gauches s’écrasèrent sur le sol tandis que des guerriers s’y accrochaient encore. Bientôt le sommet retourna en arrière, emportant avec lui les hommes et les femmes venus régler leurs comptes. En même temps que le centre du Pic s’écartelait, les derniers hommes fuyaient, certains touchant la terre avant d’autres, mais en vain. Ikau tirait lâchement avantage de la distance qui le séparait pour partir sain et sauf, avant de s’appuyer sur l’épaule de Ridley.
— Après t’avoir quitté je rentrerai chez moi, je me laverai les mains et je voudrai dormir.

Allongée nue sur ses vêtements et son armure laissée, Naæviî laissait sa main frôler ses seins pâles. Sa main caressait ses flancs charnus et embrassait lascivement sa forme en s’enfonçant un peu. Lentement elle descendit jusqu’à ses hanches douces, prit soin de s’arrêter, puis fit lentement le tour de son vagin fertile. Sans un cri de chacun de ces jeunes enfants, l’homme au visage noirci sous son casque se coucha sur son ventre et embrassa son visage. Ils déposèrent leurs armes de chaque côté. Son sexe pénétra brutalement dans le sien.

— J’ai voulu te violer mais tu le veux aussi. J’ai dû toucher ton corps comme celui d’une amante. Tu voulais le désir, je voulais le pouvoir mais baisons malgré tout, je t’en prie, anonyme. Tu ne me réponds même pas. Cela fait près de quinze ans que je n’ai pas baisé, quinze ans depuis le début de cette putain de guerre que mes plus beaux désirs de caresser des seins, des cœurs, des nombrils et des hanches de vraies femmes se sont vus sacrifiés sur des pulsions refoulées. Pour une fois dans ma vie je peux te faire l’amour, demoiselle anonyme, mais je ne te viole pas. Je n’ai aucun pouvoir et c’est à cause d’une femme. Je ne t’ai rien pris du tout, toi tu es déjà morte et je ne le serai jamais.

Brusquement il agrippa ses seins à la chair contractée jusqu’à ce qu’ils soient griffés, il flaira son visage en appuyant sa gueule sur ses lèvres au teint rouge enfui, il aboyait de jouissance dès que sa verge frottait sa vulve chaude. Il éjacula et Naæviî ne dit rien.
— Après t’avoir quitté je serai déjà morte, voulut-elle chuchoter.

Leurs yeux s’embrassaient. Leurs bouches se susurraient et l’amour et la haine. Ils se tenaient la main pour toujours et jamais. Ils marchaient loin, ensemble.
— Dans le silence un jour je partirai, Ikau. Je partirai longtemps, comme nous l’avions rêvé. Je partirai au-dessous des mers et au-dessus des montagnes et entre les nuages, si un jour on le peut. Je partirai rêver, c’est tout ce que je veux, maintenant. Je tenterai d’être noble, de marcher la tête haute, par le peu de noblesse qu’il me restera encore. J’aurais voulu être pure mais j’ai déjà perdu, je suis née pour ça. J’ai été mise au monde pour ce que quelqu’un d’autre vient d’arracher à moi, et je ne serai plus. Longtemps je ne serai plus, Ikau, sans un cri, sans un mot.

*
Titre: K. ~ Partir. [- 31 Août 2012]
Posté par: HamsterNihiliste le vendredi 31 août 2012, 03:57:58
Bonsoir.

Il y a des soirs comme ça, où mon cœur se est assez lourd pour exprimer enfin toutes les choses que je bride, jusqu'à mon écriture de Partir., alors j'ai pensé que ce soir, il était temps, et je me sens plus libre. L'extrait ici cumule un morceau écrit qui date déjà quelque peu, après le premier juillet, et la suite que je viens d'écrire ce soir même, à partir de " Je me fais du mal ". J'ai voulu clore cette session et il s'agit d'un extrait que je vous fait partager, parce que je le voulais ou pour n'importe quelle raison. Parce que c'est comme ça.

J'ai marqué une légère pause dans l'écriture de mon projet principal, sorte d'overdose, l'été qui battait son plein n'aidait pas, j'ai préféré attendre début septembre pour continuer mon chapitre plutôt que de me forcer pour qu'en résulte un chapitre aussi médiocre que le V. Je pense que l'écriture de ce Partir. a pu m'aider et qu'elle me permettra de repartir en quelque sorte à zéro.

Bonne nuit et bonne lecture !

*


— Je suis jeune mais je traîne ma carcasse et depuis que je suis jeune, je fous plus rien de ma vie. Avant quand j’étais gosse, j’étais comme tous les gosses, je vivais, je profitais, j’aimais, maintenant je hais les gosses et alors je me hais, je me suis haï, et je me haïrai ; je me hais maintenant pour ce que j’étais gosse, je me haïrai demain pour avoir été aujourd’hui, et j’ai dû me haïr, longtemps, pour certaines choses. Maintenant je me hais, je me hais pour qui je suis, pour qui je suis, je ne suis rien ni personne du haut de mon âge de jeune, si tu le dis, toi qui a quatre ans, ou plus ou moins que moi, ce n’est pas important. Ce n’est toujours que du temps et ce n’est que par du temps que je finirai par crever, alors que je crève maintenant ou dans quatre-vingt ans, ça n’a pas d’importance, le temps c’est pas ma faute.
— « Le temps c’est pas ma faute », mec, t’es velléitaire.
— Je sais que je suis velléitaire et je sais que t’allais le dire. Je suis velléitaire parce que je suis fatigué, donc je suis fatigué parce que je suis velléitaire. Je ne fous plus rien de mes nuits, je ne dors même plus, je préfère les passer à réfléchir au mal que ça me fait de ne plus dormir pour ça ; je crève de ne plus écrire car dans ce temps je pense à tout le mal que me fait le fait de ne pas écrire, je suis mon cercle vicieux, je suis mon propre haï et mon propre aimé, je suis ma propre vie et cette propre vie, j’en dilapide chaque seconde par terre comme une vulgaire merde qu’on jetterai sans respect, parce que je n’aime plus, parce que je n’ai plus rien. Des nuits je veux crever puis le lendemain, ça va, tout comme un jour d’été où tout se passe bien ; d’ailleurs tout se passe bien, tout s’est très bien passé et je n’ai pas de raison de me plaindre de cela, non, je n’ai pas de raisons. Tu vois, je peux très bien arrêter d’avoir l’air dépressif et même de l’être, là, ça va,  je sais pas pourquoi mec, mais ça va.
— Tu te portes bien, comme on dit ?
— Je me porte bien, oui, c’est drôle, je n’ai jamais compris la portée de cette expression. Comme si indubitablement on devait supporter tout son poids tout le temps, on devait forcément être en capacité de soutenir sa carcasse et sa tête lourde, de supporter son poids, au risque de le faire mal, mais si on le fait mal, je ne sais pas ce qu’il se passe. D’ailleurs tu remarqueras qu’on ne dit que très rarement « Je me porte mal ». Peut-être parce que c’est inné, qu’on doit bien se porter, comme un déménageur qualifié après de longues années de formation ; peut-être qu’on est tous son propre déménageur.
— J’aime t’entendre analyser. Je te reconnais comme je t’ai reconnu, et tu vois, c’est génial. Là, on serait capable de débattre des heures, toi face à tes brouillons et moi à mon Humanité, mais au fond, c’est pareil, c’est une passion ; on a le droit.
— Bien sûr qu’on a le droit, au fond, on peut tout faire et on doit même tout faire, mais le fond, comparé au tout de l’être humain, c’est bien peu de choses. Le monde, c’est une terre, ce sont des particules, l’homme c’est un corps, des organes et du sang dedans, des cellules et des fibres qui permettent à tout les mécanismes de la pensée logique d’interagir ; et c’est l’écrivain qui te parle. Alors oui, c’est comme ça, on est bien peu de choses.

— Je me fais du mal, mec. Dis-moi que je me fais du mal.
— Depuis toujours tu te fais du mal. C’est évident. Te le confirmer encore c’est le seul moyen que j’ai de te réconforter, et si je pouvais ne pas le dire — non, je n’aurais pas pu ne pas le dire, personne n’aurait pu faire autrement. Tu te le dis toi-même ?
— Si, si, on aurait pu faire autrement, moi j’aurais pu faire autrement, je ne l’ai pas fait, pourquoi je ne sais pas, parce que j’étais gosse, je sais pourtant qu’on a tous été gosses, mais jamais comme moi. Non, jamais comme moi.
— Je sais bien que personne n’aurait pu être comme toi, et que toi non plus tu n’aurais pu être comme personne ; mais tu étais comme toi, c’est tout cela qui compte, c’est aussi con que ça. Des fois faut pas chercher, il faut laisser aller. Voilà, laisser aller, je ne te citerai pas encore Léo Ferré, je ne te jouerai plus de piano, je ne te chanterai plus qu’avec le temps, va, tout s’en va. Parce qu’il faut oublier, parce qu’il faut juste du temps. Le temps.
— Je le sais. Mais cela fait trois semaines, ou dix ans, je ne sais pas, qu’il faut juste du temps. Cela fait autant de temps que je n’ai pas une heure, une minute, une seconde, sans repenser à elle, sans l’entendre rire, sans la revoir danser, sans l’imaginer nue, sans regretter infiniment plus que tout ce qu’un homme peut jamais regretter. J’aimerais qu’avec le temps tout soit aussi simple, j’aimerais aussi que moi-même je sois aussi simple, j’aimerais même être heureux, c’est tout ce que je demandais. Être heureux comme elle ; comme une fille qui m’a oublié et qui ne regrette rien, qui vit son avenir, qui nage dans son rêve, qui trouve encore le temps de rire et de jouer. Elle joue avec son mec comme si elle était gamine, putain qu’est-ce que je l’envie. C’est une fille que j’ai aimée, puis haïe, puis…

La langueur et longueur du silence qu’il laissa signifiait le mot exact qu’il voulait échapper. Nonobstant il ne put s’empêcher de l’avouer, après cinq minutes, ou une heure, aussi dérisoire que pût être l’importance.

— Aimée.
— C’est ça.
— Est-ce que c’est normal de n’avoir dans mon cœur de place que pour une seule personne que je tente d’oublier ?
— Je ne sais pas.
— Est-ce que tu penses que je devrais m’obstiner à oublier cette fille comme je me suis obstiné à l’aimer ?
— Peut-être.
— Est-ce que tu es sûr que « Peu importe » est la réponse à toutes mes questions ?
— Oui.

Le dernier à prendre la parole continua suite à un bref silence.

— Tu sais, je suis ici pour te donner la réplique, pour te répondre « Oui » ou même « Peu importe », je suis certes ton ami, mais je ne suis pas ton psy ; personne ne devrait être là pour te donner de réponses, c’est le meilleur pour assassiner tes doutes et crever tes peurs, mec. Les psys ne devraient pas exister. Les psys devraient avoir honte de refiler aux gens plus de questions qu’ils n’en avaient en rentrant sur le divan et de leur faire croire qu’ils ne sont pas seuls pour régler leurs problèmes. Il n’y a que trois entités dans tes propres conflits ; ton cerveau, ton cœur, et toi. Le moyen radical c’est parfois que ton cœur s’arrête de battre.
— J’ai pensé à crever. Oh oui, j’y ai pensé. D’abord parce que c’est classe, parce que c’est honorable, et que c’est du courage que d’affronter la mort, mais je ne te sortirai pas toute une tirade que j’aurais pu sortir l’époque où j’étais jeune. Les mots ne viendraient plus. Plus rien ne me vient, rien automatiquement, je ne sais plus rien dire, je ne sais même plus écrire. Je ne sais même plus écrire comme un automate, je finis par me faire peur mais je sais très bien que je n’ai pas de raisons. Et puis finalement je veux pas crever. Parce que je veux tordre le coup à notre putain de besoin d’innovation qui ne se taira jamais et qui demandera toujours de passer à autre chose alors qu’on ne connaît pas le quart d’un millième de ce qu’on vient d’effleurer. Alors moi, j’ai vingt ans, ou soixante, je ne sais plus, quoi qu’il en soit je suis donc jeune, et je veux explorer la vie à cent pour cent, et je sais bien que ça, c’est impossible, mec. Mais c’est un rêve, il paraît qu’il faut s’accrocher à son rêve — ou ses rêves, tant mieux. Je n’aurai jamais le temps de connaître toute la vie, alors je rêverais de me rabattre sur l’espace. Hors les questions d’argent, car l’argent quand on rêve c’est bien peu de choses, j’irai vivre à Clifden, puis je réserverai une demeure de passage dans l’oblast d’Irkoutsk et les eaux du Baïkal, de là je partirai me ressourcer au cœur de la Mongolie, pour rencontrer des gens qui sont encore humains et qui vivent de la meilleure manière qui soit au monde — visiblement, d’après le peu que j’ai lu, sans villes bétonnées, sans médias, sans Internet, peut-être même sans argent ! —, j’irai même pénétrer les plaines en Mongolie-Intérieure, simplement parce que j’aime la prononciation du nom, je continuerai peut-être en Inde, pour passer en Thaïlande et voir de mes yeux l’Angkor Vat et les plus belles idoles que la religion a permis, j’irai même au Japon, et je finirai mes jours au fond du Pacifique à sa surface peut-être, à la dérive entre les îles Kerguelen, l’Antarctique Nord, pourquoi pas les Fidji ou la Grande barrière de Corail, je pourrai même, en bateau, voir de mes yeux le Cap Horn, traverser les zones les plus au nord et au sud de la planète, en passant par Spitzberg, en me perdant peut-être dans les monts de la Kolyma ou de l’Himalaya, pour, quoi qu’il en soit, terminer sûrement jeté vers la baie de Clifden. Et je me réveillerai.

— Tu l’as oubliée ?
— Non. Mais peu importe.

Point au 31 Août 2012.


*
Titre: K. ~ Partir. [Père Fille]
Posté par: HamsterNihiliste le lundi 17 septembre 2012, 03:09:43
J'ai réussi à écrire. Peut-être que ça repartira. C'est très court et je complèterai sûrement ce même extrait, ce n'est pas fini.

Mais c'est un peu de Partir., directement après le dernier. C'est uniquement un dialogue. Il y a un père et une fille.

*

Point au 31 Août 2012.

— Papa ! Hé, Papa ! Papa !
— Oui, c’est moi-même, et je le serai toujours, ma fille.
— Papa ! Pourquoi tu m’appelles toujours « ma fille » ?
— Parce que tu es ma fille, et que j’aime t’appeler comme ça. Mais tu m’appelles « Papa », alors soit, je t’appellerai « chérie »,  chérie.
— Ça veut dire quoi « chérie » ?
— Écoute, ça ne veut rien dire, tu vois ce petit mot, ces six petites lettres, elles ont pas de petit corps, elles ont pas de petite tête, elles ont pas de petite bouche alors elles ne peuvent rien dire, et elles ne veulent rien dire. C’est triste. On ne saura jamais si elles veulent nous parler ou pas.
— Mais moi je le sais !
— Oui, tu le sais toi, parce que tu es encore ma fille, tu es toute jeune et les mots ils te parlent, tout a une bouche, tout a un cœur chez toi, tout te parle. Tu sais ce que ça veut dire « chérie », toi, chérie.
— Oui je sais, et toi, tu le sais Papa ?
— Oui.
— Alors ça veut dire quoi ?
— Tu peux me le dire, chérie, puisque tu le sais.
— Ça veut dire…
— Ça veut dire ?
— Ça veut dire que tu m’aimes !

— Oui. Je t’aime. Je t’aime comment ?
— Tu m’aimes comment Papa ?
— Tu veux jouer, chérie ?
— Oui Papa ! Allez ! On joue ! Tu m’aimes comment ? Euh, attends ! Jusqu’à la Lune ?
— Non, plus.
— Jusqu’à Mars ?
— Plus.
— Jusqu’à Uranus ?
— Bien plus.
— Jusqu’à la Voie Lactée ?
— Plus !
— Jusqu’à tout l’Univers ?
— Encore plus !
— Il n’y a rien après « jusqu’à tout l’Univers » !
— Si.
— C’est quoi Papa, c’est quoi ?
— Je ne te le dirai pas. On joue ?
— Oui ! C’est Dieu ?
— Qu’est-ce que c’est Dieu, pour toi ? Qu’est-ce que ça veut dire, Dieu ?
— Rien, Papa !
— Redis-le, ma fille.
— Rien, Papa !
— Enlève « Papa ! ». Dis juste « rien ».
— Rien ?
— Sois sûre de toi. « Rien. »
— Rien !
— Tu peux y arriver. Tu peux y arriver, oui ma fille, vas-y. Cherche, tu veux savoir, tu veux savoir comment je t’aime, oui, ou non ?
— Crie pas, Papa. S’il te plaît. T’aimes pas crier. Tu le sais. Ça te fait mal dedans ton cœur. Tu sais ce qu’il y a dans ton cœur ?
— Rien.
— Voilà, Papa. C’est comme ça que tu m’aimes.

*
Titre: K. ~ Partir. [Père Fille]
Posté par: Cap le lundi 17 septembre 2012, 21:50:58
'tain. Ton dialogue m'a secouée.
Tu dis des trucs tellement vrai et beau et profond avec des mots simple. Et ça franchement, bravo !  v.v
Mais en même temps, tu me rappelle l'absence de mon père et ça... Ça me rend  :'(
Titre: K. ~ Partir. [Père Fille]
Posté par: HamsterNihiliste le jeudi 20 septembre 2012, 23:09:23
Merci beaucoup Cap, ça me fait très plaisir. Je t'en parle plus personnellement en privé  :^^:.

Tiens, une toute petite suite, qui la suit directement et après laquelle il n'y a rien de nouveau dans le texte intégral. John est le nom du personnage qui donne la réplique habituellement.

*

— Je t’aime. Je t’aime comme rien et rien, c’est tout.
— Arrête de dire n’importe quoi, Papa.
— J’dis pas n’importe quoi, ma fille, ma chérie pardon, hé oh. J’t’aime, c’est tout. Toi aussi, tu m’aimes ?
— Mais pourquoi tu dis n’importe quoi des fois, Papa ?
— Je ne dis pas n’importe quoi ! Je t’aime, c’est tout ! Tu m’aimes, oui, ou non ?
— Oui, je t’aime, Papa. Je t’aime comme rien. Ça veut dire tout. Calme-toi maintenant, calme-toi Papa.
— Je me calme. D’accord. Excuse-moi, enfin, je veux dire, je m’excuse. Pardon.
— Maintenant explique-moi des trucs, Papa. Explique-moi pourquoi tu pleures. Explique-moi ce que tu dis à John et à Maman.
— Je pleure parce que j’en ai marre de ne pas pleurer. Je dis les mêmes choses à toi, qu’à John, qu’à Maman. Et pour tout le reste, on ne choisit pas de commencer à vivre, alors on doit choisir de vouloir mourir. C’est tout.
— Tu veux mourir, Papa ?
— Non, je veux pas mourir. Pas tant que t’es petite. Je mourrai quand t’auras l’âge de voir ton père mourir. Pas maintenant. T’es trop petite.
— J’ai sept ans, Papa.
— T’as sept ans, crois-moi.
— T’as quel âge, toi, Papa ?
— Je sais pas.
— Tu peux pas pas savoir. C’est comme ton nom, ça.
— Je sais plus, j’ai oublié.
— Tu peux pas oublier.
— Ça, je le sais, chérie. C’est la seule chose que je sais.
— Tu t’appelles comment ?
— Je sais plus.
— T’as oublié ?
— Sûrement.
— C’est triste. C’est quoi que t’as pas oublié ?
— Maman.
— C’est de Maman que tu parles à John ?
— Oui.
— Et Maman, tu lui parles de quoi ?
— De Maman.
— T’es fou, Papa.
— Ben oui. C’est comme ça.

*
Titre: K. ~ Partir. [Père Fille — Point au 19 Octobre 2012]
Posté par: HamsterNihiliste le vendredi 19 octobre 2012, 19:41:23
Cap, tes commentaire me secouent au plus haut point. Je te remercie encore et, peut-être inconsciemment ou pas, j'ai posé un point à cette session entre un père et sa fille. C'était un point aujourd'hui, où il a plu toute la journée, pour me remettre à écrire, je suis heureux d'avoir pu terminer cette session — je recommencerai à écrire ce type de scène, c'est sûr — ainsi que mon huitième chapitre que je vais peaufiner après cette crise littéraire chaotique. Ici, la suite directe, finalement je vous aurai publié toute la session, tellement elle me touche. J'ai écrit ce texte en deux parties, j'ai écrit la deuxième dans le train sous la pluie.

C'est peut-être en partie grâce à toi. Merci.

*

— Ça veut dire quoi « être fou », Papa ?
— Oh, ça veut dire bien des choses. Enfin, « ça veut dire ». Ça veut dire que j’utilise « ça veut dire » alors qu’à l’instant, je t’ai appris que ça n’avait aucun sens. Ça veut dire être trop intelligent. Ça veut dire aimer. Ça veut dire haïr. Mais c’est pas important, tu sais, parce qu’être fou, c’est ne pas savoir pourquoi.
— Tu sais pourquoi, Papa.
— Non, je sais pas pourquoi.
— Je te dis que si.
— Me fais pas de mal. Arrête.
— Pourquoi ?
— Tu ne peux pas me dire ça. T’as pas le droit. Non, t’as pas le droit, ma fille.
— Sinon quoi, Papa ?
— Je sais pas. Sinon je ne t’aime plus.
— Est-ce que tu me taperas ?
— Non. Je suis pas assez lâche.
— Est-ce que tu me tueras ?
— Non. Je suis pas assez courageux.
— Est-ce que tu me violeras ?
— Non. Je suis pas assez jeune.
— Est-ce que tu me haïras ?
— Non. Je t’aime trop.
— Pourquoi tu m’aimes, Papa ?
— Je le sais un peu plus que pourquoi j’ai aimé Maman.
— Tu l’aimes toujours, Maman.
— Chut. Tu es beaucoup trop jeune. Tais-toi, maintenant.
— C’est ton dernier argument, ça, « t’es trop jeune ». C’est que t’as plus rien d’autre à dire, Papa. C’est quand t’as déjà perdu que tu dis ça. Dis-moi. Dis-moi.
— Je ne te dirai rien. Tu viens de ta mère, c’est déjà ça. Me demande pas pourquoi je t’aime si tu as pu venir du dedans de ta mère, de son pauvre corps tout gris, et de ses seins tout plats, et de tant d’autres choses auxquelles je regrette encore d’avoir fait l’amour. Et tu viens de moi. De mes petits trucs à moi, de mon corps décharné qui serait capable de mourir d’une balle dans le dos tellement il est faible. Laisse tomber. T’es trop grande.
— John il te dirait…
— John il n’a pas à me dire comment je dois éduquer ma fille.
— Ne me coupe pas la parole.
— D’accord. Je ne te couperai plus la parole. Plus jamais, excuse-moi.
— Je t’excuse, Papa !
— Arrête de m’appeler Papa. Plus jamais.
— Pourquoi ? T’es pas mon père ? T’as honte d’être mon père ?
— Je suis un mauvais père. Tiens, écoute, tu sais lire quoi ? Quels sont les premiers livres que je t’ai appris à lire ?
— Papa, j’ai sept ans, j’ai eu le temps de lire des livres et j’en lirai encore. J’ai déjà lu Le Petit Prince, j’ai déjà lu la Bible grâce à toi, j’ai déjà lu Les Fleurs du Mal, j’ai déjà lu Woyzeck, j’ai déjà lu Huis Clos, j’ai même lu L’étranger, grâce à toi, Papa.
— Tu les a compris ?
— Je crois pas, Papa.
— Alors je suis un mauvais père.
— Mais je les ai aimés.
— Et moi, est-ce que tu m’aimes ?
— Bien sûr, Papa. Je t’aime « jusqu’à rien ».
— Est-ce que tu me comprends ?
— Je crois. Est-ce qu’il le faut, Papa ?
— Non, il ne le faut pas. Non, t’en as pas besoin. C’est juste, c’est juste comme ça. C’est très bien. Regarde la pluie, il commence à pleuvoir. C’est très bien comme ça.

— C’est beau la pluie, Papa. T’aimes la pluie ?
— Oui, j’aime beaucoup la pluie. Autant que toi je t’aime, tu l’aimes aussi, la pluie ?
— Oui ! Mais pourquoi il pleut, Papa ?
— Parce que, pour les mêmes raisons que toutes les questions que tu te poses. Demande-moi, tiens, joue à ça, je sais que t’es curieuse, ma fille. Mais ne me demande pas pourquoi je pleure. Pose-moi des questions, ma fille.
— Ben je viens de t’en poser une, pourquoi il pleut ?
— Je t’ai dit de ne pas me demander.
— Pourquoi des fois il fait froid ici ?
— Parce que le mec que tout le monde appelle Dieu il est petit et bas. Il fait chaud dans la Sud de la planète, complètement au Sud, même au sud de l’Espagne où Papa il voudrait jamais mettre les pieds parce qu’il fait trop chaud. Alors comme il fait chaud, Dieu il s’en occupe mieux. Dieu il crée des terres arides, de la poussière d’animaux dévorés, des enfants qui crèvent de faim — il paraît — et le Soleil qu’on accuse. Et nous, dans le Nord, il sait qu’il fait un peu plus froid, pas grand-chose bien sûr, mais alors il laisse comme ça. Il laisse les hommes créer des bâtiments et du tourisme. Mais tu sais, Dieu, il existe pas. Y a que des hommes comme nous et que des filles comme toi qui créent le monde. Vas-y.
— Pourquoi y a des gens qui sont noirs ?
— Parce que le jour il fait trop chaud, et que c’est trop fade, alors ils ne peuvent rien profiter, c’est toujours aussi chaud. Puis des fois, il fait nuit. La nuit, il fait un peu plus frais. Alors comme leurs nuits passent plus vite que mes jours, ils ne veulent pas oublier. Alors ils courent toujours, très loin, vers la Lune jusqu’à l’horizon à l’Est, puis quand ils y arrivent, ils découpent un bout du ciel pour le garder chez eux, et dormir le jour avec. Comme ça, ils ont toujours du noir avec eux. Comme ça, personne n’oublie la nuit.
— Et c’est pareil pour les gens en Asie ?
— C’est pareil pour les gens qu’on croit rouges, jaunes, verts, ou tout ce que tu veux.
— Et pour les gens qui sont blancs ?
— Les gens qui sont blancs ils n’ont pas de couleur. Parce qu’au tout début, ils voulaient être bleus, ça aurait différencié tout le monde, ils auraient été encore plus supérieurs que maintenant. Mais quand le ciel est bleu, c’est toujours tout en haut. Très très haut, très près du soleil. Quand il se lève, il est à l’horizon mais il est pas bleu ; quand il se couche, il est à l’horizon mais il est pas bleu. Le bleu que les gens comme nous voulaient, ils est en haut. En on sait pas voler. On sait pas gravir les sommets pour le couper. Alors on reste blancs, sans couleurs, sans vie, sans tout. Tu y arriveras, ma fille, un jour, tu découperas du ciel bleu.
— Mais on ne peut pas découper le ciel bleu, c’est ce que t’as dit.
— Ce que j’ai dit, c’est pas ce que tu dois faire. Fais tout le contraire de ce que j’ai dit, fais tout le contraire de qui je suis. Gravis l’Everest à main nues en hiver, avec un chien et un exemplaire du Sommet des dieux pour unique GPS, pars en bateau autour du monde et jouis devant le Cap Horn après avoir étudié tout ce qui existait sous l’eau et dans le ciel, pars aussi loin que tu peux mais jamais où est déjà parti Papa, sois même prête à fouler du pied, toute seule avec le garçon que tu aimes, des terres où la femme n’a jamais mis les pieds, n’aie pas peur d’asservir la Terre et la nature au point où elle en est, ou bien respecte la, moi ça m’importe peu, mais si c’est là ton rêve tords le cou aux bouchers, libère les cochons, assassine les bûcherons, lance des explosifs sur les baleiniers et adopte un panda que tu nommeras comme tu veux, fais des études meilleurs que celles de Papa, devient artiste ou avocate, comme ça te plaît, fais tout ce dont tu rêves, construis un oiseau, vole avec des oiseaux, deviens un oiseau pour voler jusqu’au bleu du ciel, pour découper le bleu dont l’humanité a rêvé toutes les nuits, et pour me rapporter ce bleu pour y orner ma tombe.
— Tu as des rêves, Papa ?
— J’en avais. Tu en auras. Avant de te coucher je te donne le dernier mot. Dis-moi de t’aimer, ma chérie. Ma fille.
— Je t’aime, Papa.

Point au 19 Octobre 2012.

*
Titre: K. ~ VIII : Alea jacta fuit
Posté par: HamsterNihiliste le dimanche 21 octobre 2012, 00:23:37
Je crois que cette nuit est bonne. J'ai appris à laisser parler — ou écrire — un texte. Si l'auteur doit se justifier, gratuitement, sans que personne ne lui pose de questions, il n'y a plus d'écriture. Alors les quelques mois précédents ont été durs, mais tant mieux ; je pense que je peux reprendre et j'en suis heureux. On retourne dans le passé et on gagne un peu d'expérience avec des études de tragédies raciniennes et cornéliennes, et pour commencer à introduire, alors que presque à la fin, le personnage qu'on croit principal.

Mais chut ; alea jacta erit.

*

VIII : Alea jacta fuit

Yasunori Mitsuda - At the Bottom of the Night - Chrono Trigger (http://www.youtube.com/watch?&feature=player_detailpagev=aQx9QaAxhk8)

Termina, An 1, Mois 1, Jour 12.

Dans les roches désertiques enclavées dans quelques parcelles de la plaine, la chaleur régnait. Là où ni le peuple ni l’Élite ne s’aventuraient par risque de se perdre, la poussière s’épaississait, montait depuis le sable couché contre les rocs, pour ne lever qu’un rideau d’amas empêchant toute vue. La science actuelle, à ses balbutiements depuis la découverte de ce qu’elle appelait le Temps, ne pouvait comprendre l’origine de ces terrains, terres irrégulières et inhabituelles dispersées  à l’est comme à l’ouest de la plaine. Le peuple comme l’Élite s’accordait à penser que si elles était là, c’est parce qu’elles étaient là. Parce que « c’est comme ça ».

La chaleur, devenue quotidien des âmes de Termina, provoquait quelquefois des incendies naissants, enflammant des brindilles excentrées d’une forêt, cognant de toutes ses forces sur une surface herbeuse, desséchant même les lèvres et les corps des guerriers, sous les armures suintantes, incapables de survivre sans repos ni sans haine. À cette époque alors, les cadavres restaient à crever sur le sol, tandis que les vivants s’en préservaient sûrement, et restaient un instant au frais dans leurs demeures. La guerre entre le peuple et le peuple était, dès sa naissance, un instant suspendue.

Mais il pleuvait en ce jour. Le climat changeait loin ; le peu de petites gouttes venant sur le sol, mouillant inlassablement les brèves étendues de sable, rafraichissait alors en s’y sacrifiant. Soudain, au poids de son pas, dont le bruit s’imposait en chaleur comme en pluie, on entendait l’eau s’abattre en même temps que ses grèves craquaient sur le désert. Il n’y avait personne. Ou du moins, personne ne pouvait être entendu, tous voyaient impossible le fait de s’entendre, les bruits cachés par son pas. Elle avançait droit, devant la roche, où elle pouvait prédire que, quelque temps plus tard, quelques anonymes l’y attendraient comme elle attendait là. Mais on ne l’attendait point et elle l’oublierait, qu’elle soit violée deux jours ou bien quinze ans plus tard. Lorsqu’elle atteint son lieu, emplie de haine et d’orgueil, la pluie taisait les poussière et brindilles enflammées depuis longtemps déjà.

Naæviî était debout et regardait devant. Un temps elle ne vit rien, qu’une pente derrière la pierre qu’elle jugeait profonde, que les flots descendus des nuages berçaient. La vue la reposait, mais c’est lorsque les gouttes se mirent à se déverser drues, lorsque les éclatements précédant les éclairs tonnèrent et déchirèrent les cieux, qu’elle se résigna à baisser son regard. Ses yeux au bleu si profondément foncé qu’ils semblaient être noir quittèrent alors les éclairs blancs, passèrent outre le gouffre béant devant eux, sans qu’elle ne put être sûre que c’en fut exactement un, et se posèrent avec mépris sur la figure mi-assise mi-couchée, aux yeux rivés sur ses mains. Alors elles furent sûres que leurs regards se virent. Et elles se regardèrent.

Naæviî se baissa et était si rigide que l’on croyait entendre le bruit de ses os appuyés sur le sol. Le fort rideau de pluie et la noirceur nocturne cachaient leurs deux corps. Sans que la silhouette craintive acculée au rocher ne put distinguer ce qui était porté contre sa propre joue, elle ouït son murmure.
— Plic, ploc.
— Alors, c’est vous, Naæviî, ici et maintenant, dit-elle de sa voix faible et silencieuse.
— Oui, Lulya. Le destin a voulu que ce soit maintenant.
Lulya tenta de se lever, au peu de force qui subsistait dans ses jambes, mais elle ne put s’élever à la moitié de la taille de Naæviî qu’en appuyant ses mains sur le rocher en face. Mais ce fut en s’écorchant le centre de la paume ; et elle ne put lancer un regard haineux, arrimé au plus profond des yeux violets de sa rivale blonde, qu’à bout de souffle.
— Je tirerai quand tu seras prête, Lulya.
Sa voix de gorge chaude et voilée sonna la vengeance et le sang. Lulya souhaita exploser.
— Il n’y a pas de destin. Il n’y a que de l’amour dans ce monde, et quand il n’y a plus d’amour, il n’y a sûrement que du sang, clama-t-elle, debout, avant de lécher le même sang qui glissait dans la paume vallonnée de sa jeune main. Tuons-nous debout, lâche.

Naæviî tira. Son bras fin était vêtu d’une soie fine à quelques dorures noires. Ses épaules osseuses s’élevaient vers son cou long et pâle, reflet de son teint que seules ses lèvres pourpres pouvaient permettre de rompre. Lulya était quasiment nue. Ses lèvres étaient pâles, et les seules joues les ceignant offraient plus de charnu que la silhouette entière de son bourreau. Un demi sein était découvert par sa veste abattue sous la pluie, et le froid caressant ses genoux arrondis lui était familier. Elle n’avait toujours eu pour vaincre que sa rage, ses cris de haine et d’amour, et ses propres mains qui n’avaient plus peur d’être souillées par un sang.
Naæviî tint à une main une grande tige en métal sur laquelle le son de ses ongles résonnait, violacée sur sa longueur démesurée, ornée à sa fin d’un motif en verre blanc terminé d’une lame acérée.

Lulya eut peur à sa vue. Les yeux lavés par la pluie mais délavés par ses larmes, et le cœur abrité au fond de sa poitrine, elle se protégea en s’adossant à la roche, descendant peu à peu, assise sur la pluie. Ses mains, vives, frénétiques, ne savaient où se poser et glissèrent par hasard sur la flèche tirée là. Lulya, les yeux tremblants, la porta à sa vue.
— Il faudra plus que cela, tu sais.
— Je sais, méprisa-t-elle, mais ne crois pas que cela a déjà commencé.

Lulya sentit alors le verre froid de l’arme pénétrer sur sa joue. Il la poussait, l’humiliait, l’écrasait jusqu’à ce qu’elle n’éprouve aucune résistance, la joue droite contre le sol. L’arme se couchait sur toute la longueur de son corps déchiré, que les angles des graviers pénétraient. Sa pointe déplaça certaines pierres à la hauteur des yeux, au niveau du bas-ventre et, lorsqu’elle eut parcouru la longueur de son corps, la pique acérée remonta sur son pied puis lui creva une veine, entre l’extrémité droite et la première phalange.

Lulya hurla d’une voix si aigüe que Naæviî en trembla. Ses yeux et ses mains, fixés sur les bottes écrasantes de sa maîtresse, vinrent progressivement fixer d’autres objets. Ses ongles griffaient le sol, et ses genoux s’écorchèrent une ultime fois pour se relever. Naæviî était de dos.
— Ne te crois pas en droit de ne plus être à genoux face à une femme comme moi.
Debout, elle creusait dans le sol comme avec des sabots ; sa gueule rêvait de mordre jusqu’au sang de sa cuisse, jouissant à l’idée même de déchirer sa chair et de remporter entre les crocs les restes de sa charogne, laissée sous la pluie qui aurait lavé son sang.

Mais la terreur ressentie contre son œil glacé mit fin à l’utopie. La première flèche reçue transperçait son vêtement, la deuxième l’accrochait au rocher derrière. La troisième fut ralentie par la chair de sa cuisse, et le chemin de la quatrième était tracé, perforant son nombril et terminant sa course courbée à l’intérieur de viscères saignants. Lulya, en fléchissant jusqu’au pied du rocher qui se profilait aux yeux de tous comme une pierre tombale, échappa à la cinquième et sixième.
Le corps jeune de la fille n’était plus qu’une trainée de sang à l’instant où Naæviî préparait son dernier trait.
— Avant que j’honore Orgueil, as-tu dernier mot à tenter désespérément de voler ?
— Pas avant que tu n’aies le courage de tirer. Tire.

Elles attendirent. Le bras de Naæviî tenait sa dernière flèche pour dernière héroïne, prête à partir glorieuse aux ordres de sa générale. Lulya, dont les les côtes flottaient avec sa peau froissée pour unique tissu, avait fermé les yeux en attendant d’attendre. Plus rien ne s’entendait. Lulya souhaita expirer.
— Je crois que…
— Je crois qu’on ne change pas les règles, crut on entendre.

Le pas sûr et droit dissimulé par la roche, il se tenait debout, son buste en face du cœur de l’inhumaine compagne, sa bouche ébréchée affichant un mépris jouissif mais prisonnier, ses yeux bleus ayant pu en ces temps atteindre l’azur, puis il s’avança, pas à pas, torse à torse, œil à œil vers Naæviî. Sa main gauche tenait sa dague gauche par la lame.
— Ikau, susurra-t-elle. Tu sais tout mon amour pour ton cœur et ton corps, pour tes genoux, pour tes pieds, pour tes talons. En anéantir un me causerait plus de peine que toutes les peines du monde que je pourrais subir. Montre-toi raisonnable et clément envers tous, et en laissant ta pute, pense à sauver ton pied. Recule-toi, mon garçon.

Il se recula, un peu. Ils attendirent. Ils se regardèrent sans les yeux ; Naæviî jugeait ceux d’Ikau trop morts, Ikau savait ceux de Naæviî trop vivants. Seul le temps était mort.

— Je tire.
La corde craqua, la flèche cria dans l’air glacé, sa course arracha le talon d’Ikau, et pour dernière demeure dans son périple en l’instant consumé, vint crever le cœur de Lulya. Ils entendirent « Silence ».
La pluie finissait et le sang coulait. La fierté sur les lèvres et la jouissance dans les yeux de l’ardente répondait au mépris et au regret d’Ikau.
— La honte et l’horreur sont les dernières émotions dont tu me verras faire preuve. Laisse-moi la brûler.
— Laisse-moi la brûler, infidèle et menteur.
— Je ne veux pas la brûler pour les mêmes raisons que toi, toi qui rêve d’être vue pour qu’on puisse mourir, toi que le royaume des assassins ne mériterait pas d’avoir pour pauvre esclave, toi dont le rôle sur scène pourrait être joué par le plus sale des rats.
— Ce n’est pas au simple honneur du cœur que je veux m’abaisser. Je voulais seulement que tu ne t’y recueilles plus, je voulais que le feu termine cette haine, je voulais simplement que l’on puisse oublier et que l’on vive en paix. Alors choisis, Ikau ; c’est la guerre ou la paix, c’est le cœur ou le cœur.

La nuit était couchée, le sang avait coulé. Le corps de Lulya se vit allongé sur un lit de bois, qui mesurait la taille d’Ikau et de Naæviî lorsqu’ils s’élevaient sur leurs épaules. Ikau, le talon pendant et écorché sur le sol aux herbes mortes, fermait les yeux et sentait l’odeur de l’huile répandue sur le corps, exactement semblable au parfum de sa femme. Naæviî descendit en promettant déjà de pouvoir oublier. Ikau ne parlait pas. Naæviî  fit naître le feu en pleurant.
— Nous ne sommes plus qu’un. Je sais que tu me pardonnes et que tu oublieras ; c’était ma volonté et tu l’as bien comprise. Je ne peux pas t’excuser d’avoir été présent, je ne peux pas m’excuser d’avoir vu votre amour ; ce qui est fait est fait, ce qui est dit est dit. Garde le dernier mot, Ikau. Je te donne tout.
— Un jour, on te vengera.

*
Titre: K. ~ Partir. [" Il faut que l'herbe pousse ".]
Posté par: HamsterNihiliste le lundi 26 novembre 2012, 23:01:18
Bonsoir.

J'ai envie de partir. Autant d'écrire Partir. que de partir lui-même. J'ai récemment vécu des choses éminemment intimes qui ont pu agir comme un déclencheur à une écriture personnelle avec plus d'importance, de désir, de mise en scène. Mais chut, je déteste parler de l'auteur pour expliquer, j'expliquerai juste que, pour ces raisons, j'ai modifié ici quelques noms parce qu'ils n'ont rien à faire dans ce cadre.
Récemment j'ai écrit quelques notes et je formule essentiellement comme des scènes théâtrales, car le théâtre m'intéresse, et précisément la dramaturgie. J'ai souhaite écrire du théâtre car c'est riche de potentialités, j'ai envie de croire en un avenir, je veux faire quelque chose de ce texte et j'y inscris des thèmes, des personnages que j'ai déjà écrits sur cette bibliothèque. D'où des didascalies, qui participent simplement au sens narratif, d'où un style adapté, d'où des mots qui ont résonné dans mes yeux et ma tête et je t'en remercie, Cap. On apprend toujours des filles.

Par là même je suis de plus en plus enclin à conclure que Memento Mori, Memento Vivere. ne me correspond plus. J'ai ébauché, avant, deux autres parties de la même longueur, mais je trouve démesuré d'écrire un texte auquel j'ai accordé tant d'ampleur pour " m'entraîner " et de le réduire à une fiction Zelda. Je l'ai souvent pris comme un devoir, j'y ai essayé, mais même, j'y ai écrit beaucoup d'aspects théâtraux, alors, autant se tourner vers le sommet qu'on veut. Je terminerai le chapitre qui me tient à cœur quel qu'en soit le prix et, selon le sort, j'écrirai un Épilogue prématuré ou non qui ne m'empêchera pas de laisser une ouverture. Au hasard.

Merci.

Le titre vient du poème À Villequier de Victor Hugo en hommage à sa fille Léopoldine.

*

« Il faut que l’herbe pousse ».

Sa fille, Zelda, à dix-sept ans,
John. Le salon sombre de John ; une table, quelques verres et carrés de chocolat.


— T’as pas du lait ?
— Tu bois encore du lait, toi ?
— Toujours, parrain. Rire détaché. Toi, mon parrain, moi, ton petit ovule, tu sais pas que depuis dix-sept ans je ne bois que du lait quand j’ai envie de boire autre chose que de la vodka ?
— Tu sais, tu n’es pas la seule à ne boire que du lait.
— Ne me parle pas d’elle. Tu fais exprès de ne parler que d’elle ou tu veux réellement me gâcher la soirée ?
— Tu ne peux pas être indifférente à la manière épanouie et heureuse de ton père d’en parler. C’est magique. C’est merveilleux ce qui lui arrive.
— Oh oui c’est merveilleux.
— Ne sois pas ironique. Je suis sûr qu’il aimerait le vivre, pleinement, normalement, il te dira la même chose. Il te dirait tout si tu lui demandais.
— J’ai pas envie de lui demander.
— Zelda, on dirait une gamine qui n’a pas envie d’entendre parler d’une belle-mère parce qu’elle est méchante ou que sais-je, à l’instant, tu es bête. C’est inutile d’être bête et c’est triste pour toi.
— C’est pas bête. C’est humain. Parle d’autre chose.
— Alors toi aussi. C’est toi-même qui réagis comme ça quand j’en parle, comme ça. Ça aide à la communication, « Ne me parle pas ».
— Ça aide, de parler à la fille de son meilleur ami de la femme qui peut lui faire oublier ma mère, femme qu’il ne veut plus croire et mère que je veux connaître.
— Pardon. Tu m’as compris, c’est moi, c’est la parole d’un père. J’en suis désolé, je suis comme ton père parfois. C’est pour ça.
— Léopold me manque parfois.
— Oui.
Silences.
— Ophélie aussi.
— Oui.
Silences.
— Je peux t’en parler de temps en temps ?
— Oui.
— Comment est-ce que ça passe, quatre ans ?
— Ils passent comme ils passeraient normalement. C’est une question mais, le temps, c’est plus rien, le temps, il est perdu, je l’ai oublié, il est passé le dernier de mes soucis. J’ai juste oublié. Oui. Oui, j’ai oublié.
— Comment est devenue Marthe ?
— Elle est devenue vieille. Moi, son mari, l’homme, j’essaye d’être encore jeune, d’avoir encore tout ça, mais elle, ma femme, la femme, elle est vieille, c’est très beau. C’est une très belle victoire, on a plus rien à perdre, ni à gagner. On n’a qu’un cœur pour deux quand on perd deux enfants. Quatre ans. Quatre ans.
— Tu sais, John, un jour, je ne sais plus si c’est Ophélie ou Léopold, parce que tous les deux, ils signaient simplement leurs nom avec un O ou un L
— Léopold passait le L avant le O et Ophélie passait le O avant le L. La barre du L d’Ophélie était presque absolument contenue dans le O, et seul le bas était allongé. Le O de Léopold était absolument contenu dans le L, il ne dépassait jamais la barre verticale, et seul le haut était allongé. Léopold avait inventé la sienne avec un stylo de Marthe et Ophélie avait inventé la sienne avec un stylo de moi. Le mien était un Parker et le sien était un Mont Blanc.
— Tu connais tout par cœur.
— Par cœur.
— Il me semble, alors, qu’il s’agissait d’Ophélie, parce que je la voyais un peu plus souvent, mais c’est un peu toujours la même chose, les souvenirs. Je n’ai jamais été mère moi, mais je te comprends, enfin, si je peux.
— Oui, mais tu n’as pas à t’excuser. Tu sais, je n’aime pas les gens qui s’excusent. C’est normal de ne pas savoir, c’est normal de ne jamais vouloir ressentir quelque chose d’aussi inhumain. Si ce n’est qu’à ça que doit mener le rêve d’être mère, ne le sois jamais, sois normale comme tu  rêves de l’être, sois toi.
— Excuse-moi. Oui, je sais que tu sais que tu le fais exprès…
— C’est bien toi, s’excuser de s’excuser, et c’est bien toutes les filles comme toi, « je sais que tu sais ».
— On ne se refait pas, John. Et quand on ne se refait pas, on est parfaite.
— T’aimes me monter le moral et me donner le sourire, mon petit ovule. Tu me remontes le sourire.
— T’es con.
Rires.
— Tu tenais profondément à me dire ce souvenir ?
— Oui, mais je sais plus trop. J’ai oublié.
— Je crois que moi aussi. J’ai oublié. Silences. Je ne sais plus vraiment si c’est à ça que je pensais, mais un jour, on jouait à se demander comment on aimerait mourir. Et, ce devait sûrement être Ophélie, parce qu’elle était un peu plus réservée, elle me l’a écrit sur un bout de papier et je l’ai toujours gardé. Ce que Léopold m’a dit et ce que j’ai dit, je ne m’en souviens plus. Mais, même si j’étais gosse, ce papier d’Ophélie, je ne l’ai jamais ouvert. J’ai eu peur. J’ai eu honte. Je me suis sentie coupable. J’ai voulu m’excuser et je le ferai même si tu veux m’en empêcher, excuse-moi, c’est plus fort que moi, des fois j’y repense, tu sais, des fois. Et elle m’a dit qu’au moins elle rêverait d’être incinérée. Elle doit être heureuse maintenant que tu l’as fait. Tout le monde l’a écoutée, et tout le monde pense à elle, maintenant, et Léopold aussi. Je trouve que c’est une très belle histoire, au final, parrain. On devrait en pleurer juste parce que c’est beau. Oui, c’est très beau.

*
Titre: K. ~ Partir. [" Si mi la ré sol do fa "]
Posté par: HamsterNihiliste le jeudi 06 décembre 2012, 14:32:39
On continue le thème de John et Marthe, de Léopold et Ophélie. Petit détail narratif d'un extrait que je n'avais pas publié, Renaud est le frère de Zelda. La forme théâtrale est de plus en plus affirmée, et pourtant, je n'en suis qu'au début d'une expérience. Désolé pour la mise en forme, je pense proposer le fichier tel qu'il est écrit, comme je l'ai fait pour plusieurs textes. Mais comme je ne poste pas tout, j'essaierai de trouver d'autres sites et d'en faire une utilisation, pour des concours, des propositions, pour un avenir.

Merci à ceux et à celle qui ont trouvé des émotions. Ou une émotion. Ou l'émotion.

*

« Si mi la ré sol do fa »

John. Un espace lumineux de fin d’après-midi dans son salon ouvert.
Entre Marthe, sa femme.


John l’accueille, aimant. — Marthe, j’ai déjà ouvert pour toi ! Comment va la dame de l’accueil ?
Marthe se laisse accueillir, aimante. — Un peu fatiguée, elle est vieille, c’est normal, elle va bien.
— Comment vont les aides-soignantes ?
— Un peu fatiguées, elles travaillent, c’est normal, elles vont bien.
— Comment va la vieille tante qui reçoit tous les jours un de ses petits-neveux ?
— Elle n’a pas reçu de petit-neveux aujourd’hui. Et son petit-fils n’est pas venu de la semaine non plus.
— Les petits sont ingrats, mais je l’adore, ce petit. Il est arrivé à quel âge maintenant, Enzo ?
— Il a huit ans. C’est pour ça, il est devenu grand, alors il dit qu’il peut plus venir voir les vieux, parce qu’il a du travail, mais qu’il reviendra quand il sera docteur parce qu’il veut faire beaucoup d’études pour soigner les petites vieilles comme sa Mamie.
— Mais cette semaine il n’est pas venu.
— John, tu ne vas pas jouer au plus vieux que nous, ce n’est pas toi qui es à la place de Mamie Yolande. Si tu continues ça ne saurait tarder, mais enfin, on est jeunes. Silences. On essaye.
— Oui.
Silences.
— Tu vois, John, que tu ne peux pas tenir à parler pour combler le vide et pour éviter de parler de ce dont on doit parler.
— On ne doit parler de rien, Marthe.
— Je n’ai pas dit qu’on devait.
— Si, à l’instant.

— Non, John… Silences. Ton père a uriné deux fois au lit en deux nuit, il n’a pas pu manger son magret lundi sans passer une heure trente à le mâcher, il a voulu allumer la télé pour regarder 30 Millions d’amis comme de temps en temps, c’est Maryline qui l’a retrouvé en train de pleurer devant les piles de la télécommande à 20h30.
— Il l’aime bien, Maryline.
— C’est vrai. Tous les petits vieux l’aiment bien, elle fait en sorte, moi aussi j’aimerais bien qu’on m’aime pour les mêmes raison. Mais c’est un peu facile. Heureusement qu’on en a pas été réduits à se quitter à cause de mes seins, j’assume. C’est comme toi.
— Joue pas au même jeu que moi, Marthe, auquel j’arrive pas. Oui, on assume, oui, oui, nos corps sont magnifiques malgré tout, mais ce n’est pas le sujet. Tu pourrais me parler des manifestations contre les manifestions contre l’homosexualité, tu pourrais me parler de la constellations d’Andromède, tu pourrais me réciter, nue dans la langue de Shakespeare, Hamlet, et me citer le Cantique des Cantiques au sein de la cathédrale, ce ne serait pas le sujet. Silences. Pardonne-moi. Je pense qu’on pourrait lui apporter une photo avec Philoctète. On a des photos de lui avec Philoctète ?
— On en a avec Woyzeck. C’est le chien qu’il a le plus connu, tu sais, quand Philoctète vivait déjà avec nous, ton père était tellement vivant qu’il était parti assez loin. Mais toujours avec son chien.
— Il n’y a que ça, dans sa chambre beige, des photos de lui avec Judas à Newcastle, À St-Jacques de Compostelle, et au Vatican.
— Tu ne veux pas qu’on lui en offre une autre à Newcastle ? Et pourquoi pas à Liverpool ? Ça le changerait du Christ, un peu. Il n’est jamais venu à Liverpool avec Philoctète ?
— S’il était avec Philoctète, alors il était avec nous. Je ne veux pas qu’on lui offre, oui, qu’on lui offre, tu as raison, pas de photo de nous.
— Tu préfères plutôt que je lui offre une photo de moi, avec lui et Philoctète ?
— Mais avec une photo de toi, lui, et Philoctète, il va encore penser à moi dans le temps qu’il lui reste. Je ne veux pas, tu sais, ça me fait mal, tu sais, la maladie va consommer de plus en plus de flammes, et puis elle montera au cerveau, et puis elle sera montée au cerveau, et puis il sera descendu.
— Tu sais, aujourd’hui, il m’a demandé de tes nouvelles.
— Non, Marthe. Je ne veux pas.
— John, oui, la maladie va dégénérer, oui, Maryline me l’a dit, et tout le personnel le dit depuis le début, mais il est toujours ton père, tu ne l’as pas oublié, et il ne t’a pas encore oublié. Il y a des gens qui ont un père et qui pourtant l’oublient, ou tellement d’autres choses où personne ne connaît qui il connaît vraiment. Je sais que tu penses à Zelda. Je sais que tu penses à Renaud.
— Ne me parle pas d’eux. Arrête, Marthe, Arrête. Silences. Offre-lui une photo de Léopold et Ophélie.
Pleurs brutaux. — Tu peux pas faire ça. John, tu peux pas. John, non. C’est inhumain. C’est monstrueux. C’est sans cœur, John. John, t’as perdu ton cœur. Tu l’as oublié, ton cœur. Renonce à le faire. Renonce à le faire pour Léopold et Ophélie.
— Offre-lui une photo de Léopold et Ophélie avec Philoctète.
— Ils ne l’ont… pas connu.
— Ils l’ont connu quand il était arrivé. Quand il avait sept jours. Il leur restait sept semaines. Ils l’ont connu et je connais encore mon père.
Tremblante. — Alors on le fera tous les deux. Alors nous viendrons et tu viendras. Tu viendras voir ton père, avec moi ou sans moi…
— Avec Maryline.
— D’accord. Puis tu frapperas gentiment à la porte, sauf s’il est occupé à manger ou à dormir…
— Nathalie me le dira.
— D’accord. Puis tu te pencheras sur son lit, sauf si ses yeux sont fermés…
— Ce ne sera pas dans la soirée.
— D’accord. Et puis tu lui diras que c’est toi et que tu l’aimes beaucoup, et je suis sûre que tu prendras du plaisir à voir ton père et que tu ne te poseras pas de questions.
— D’accord.
— Et puis tu lui demanderas s’il veut une photo de ses petits-enfants pour s’en souvenir.
— D’accord. Et puis je demanderai à Nathalie si on on peut sortir dehors un peu tous les deux. Et puis on ira peut-être même sortir au cimetière pour voir leurs urnes. Et puis je verrai qu’il s’en souvient un peu et qu’il relira son épitaphe avec quelques larmes de grand-père, et puis maintenant c’est passé, et puis voilà, Papa, voilà. Après, ce sera l’heure de son goûter. Et on se dépêchera parce que Drucker ce sera bientôt fini. Et ce sera un beau dimanche après-midi. Comme j’aurais aimé en faire. Et puis parce qu’il faut en profiter, on fera peut-être un Scrabble. Ou même, tu as un Mille Bornes ? Enfin, tu vas voir, ce sera bien, et puis tu as raison Marthe, et puis, je suis un peu désolé, et… S’effondre en larmes. Et puis demain il m’aura oublié parce que la maladie parce qu’il ne pourra plus manger parce que je ne pourrais pas supporter, pas supporter qu’un jour je rentre et que j’entendes « Qui-êtes vous ? ». Cri. Non, non Marthe, je peux pas. Je veux pas, je suis désolé, je ne pourrai plus jamais.
— Allons, John, allez, non, ne t’inquiète pas, c’est comme ça. C’est peut-être mieux que tu te prépares à ça parce que c’est inhumain, et qu’on ne peut plus se préparer à quelque chose de plus inhumain que ce qu’on a vécu. Mais écoute, Léopold et Ophélie sont là, dans notre mémoire, quatre ans ce n’est rien et pourtant, on a dit « oui », on a accepté. Eux aussi auraient pu nous voir vieillir et trembler et les perdre, on n’y peut rien, John. Mais peut-être que la médecine, tu sais, elle pourra quelque chose. Les aides-soignantes l’ont dit, mais c’est une maigre consolation, c’est sûr que c’est impossible, mais ça apporte un peu d’espoir aux gens. Pense à l’espérance, John. Que dirait Jésus à ton Père ? Que te dirait Dieu ?

— Dieu… Dieu reconnaîtra les chiens. Et ta maman ?
— Maman, c’est la même chose, John. Elle va toujours aussi bien. Elle mange bien et elle met de la joie dans la plupart des animations. Sauf très tôt le matin quand elle dort. Parce que maintenant, tu ne savais peut-être pas la dernière fois que j’y suis allée, mais elle a pris l’habitude de dormir tard, jusqu’à huit heures, et les filles la laissent faire, tu sais, Maman elle est gentille ! Non, Maman, elle n’a rien à se reprocher. Quatre-vingt-onze ans c’est magique.
— Et oui. J’aimerais aller la voir, un jour. Je lui apporterai des bonbons.
— Des cachous !
— Et oui, des cachous ! Et puis, un DVD, elle a vu des films récemment ? Elle en a même regardées ?
— Elle aime toujours autant Haneke !
— Et oui, Haneke !
— Et puis, on pourrait demander aux filles si on peut lui offrir une couette. Ses fleurs, depuis toujours, l’ont toujours rendue beaucoup trop vieille. Elle commence à trembler. Elle n’est pas vieille. On lui offrira un peu de jaune. Elle aime toujours autant…
— Le jaune et l’orangé !
Tremblante. — Oui, oui, on lui offrira une couette… orangée, quand on viendra la voir tous les deux. Et puis même, on pourra…
— On pourra ? Silences. Non. Non, Marthe. Il la touche, aimant. Non, Marthe, tu le sais. C’est ce qu’on fait, Marthe. Il ne faut pas arrêter. Il n’est pas possible d’arrêter. Si tu sens que tu peux craquer, même si tu as vraiment envie de la voir, ce n’est pas grave, j’irai la voir à ta place et ça nous fera plaisir. Ça me fait très plaisir, ce n’est pas mon père, et nous échangerons nos rôles. Nos parents, pour une fois. Et puis même, on pourra, si tu sens que tu peux craquer, essayer d’oublier, ce mois-ci, tant pis, on n’ira pas la voir, on fera autre chose. On pourra lui dire que nous sommes partis, même si mentir encore, ça me fait mal aussi, mais partir à une retraite de quelques jours pour la paroisse, pour un tour des cathédrales de France en hiver, Dieu nous le pardonnera, Marthe.
Pleurs. — J’ai peur que Dieu ne pardonne plus, John. Je ne veux plus tenir. Je ne peux plus mentir. J’ai honte et j’ai trop mal, on a été imbéciles, imbéciles, tout a été imbécile.
— Ne t’inquiète pas, ta maman va bien. Elle ira bien, nous, on a accepté, nous, on sait, maintenant on vit, Marthe, depuis quatre ans. Ça va aller. Quatre ans… quatre ans.
— Que dirait ton père si toi aussi tu cachais que ses deux petits-fils sont morts depuis quatre ans ?
— Je lui dirai comme toi, Marthe, comme tu le fais depuis quatre ans et comme tu l’as fait aujourd’hui. Que Léopold et Ophélie vont bien, que Léopold va passer le permis avec une prochaine moto et qu’Ophélie entame sa deuxième année épanouie aux Beaux-Arts, qu’il s’exerce toujours aux cours de piano et joue Barbara, qu’elle dessine toujours et s’essaye à la peinture à l’huile, que le printemps prochain nous allons visiter le Nord et filer un peu sur l’Angleterre pour leur expliquer qu’il a vécu à Newcastle pour grandir, travailler, et se ressourcer. Je ferai ça à chaque fois. Jusqu’à ce qu’il soit mort.
— Pourquoi ?
— Parce que quand il sera mort je n’aurai plus à lui faire croire. Il les retrouvera lui-même parmi le Ciel.
— Dieu pourrait te punir pour tout.
— Au diable l’Enfer. C’est suffisamment beau de croire en sa bonté pour ne pas avoir à m’asservir à une figure de peur et de punition. Je ne me suis pas tourné vers notre Père après avoir perdu mes enfants et respecté leurs volontés pour vivre en esclave. Ou je ne croirai plus. Je crois en la croyance, Marthe. Après nous être recueillis sur la tombe de Léopold et l’urne d’Ophélie, j’irai les voir. Je ne sais pas encore ce que je dirai à ta mère et à mon père, ce que mon cœur voudra dire ou ce que ma tête voudra penser, et je leur dirai les deux. Demain, pour Noël, je leur dirai ce que je leur dirai. Que ton Dieu me pardonne, Marthe. Le mien l’a déjà fait.

*
Titre: K. ~ Partir. [" Si mi la ré sol do fa "]
Posté par: HamsterNihiliste le jeudi 06 décembre 2012, 14:35:20
Ceci n'est pas un message.
Titre: K. ~ Mehr Licht! [PJEF 2012]
Posté par: HamsterNihiliste le dimanche 16 décembre 2012, 19:11:15
Aujourd'hui est un jour intéressant. En conséquence de ce message (http://forums.puissance-zelda.com/index.php/topic,6427.msg437910.html#msg437910), je décide de poster ici Mehr Licht!, la nouvelle écrite pour le  28° PJEF cette année. J'ai reçu la fiche de lecture et je reconnais la réflexion que je m'étais déjà faite ; de la question " quel est le sens de l'écriture ? ", j'en suis arrivé à la question " quand faut-il faire sens ? ". Une question littéraire n'a jamais de réponse, mais je pense désormais qu'il faut faire sens quand il le faut.
C'est amusant de voir que le lecteur critique s'est posé des questions et s'est senti perdu, mais pas parce que c'était mon but, parce que justement, c'était la forme du texte qui était lourde, sibylline, et ne rendait pas le fond cohérent. Avec Partir., j'ai un peu mal en abandonnant mes intérêts pour la forme et la rhétorique. Mais justement, en écrivant du théâtre, je comprends peu à pe uqu'on peut faire sens avec une action, une parole simple, avec des émotions.

Peut-être que ce texte n'avait pas d'émotions. Peut-être que cet incendie de bibliothèque et d'idéaux était prémonitoire pour gravir mes propres sommets, ceux qu'on ne m'a pas appris. Après tout, je suis jeune.
Je le poste ici, bien qu'il soit long, pour me confronter à d'autres avis — il rejoint le style de Memento Mori, Memento Vivere. auquel je vais mettre un terme — pour une question de public, de regards différents, d'objectivité. Question d'adaptation.

*

•Mehr Licht!

Vivre, c’est ce qu’il veut.

C’était sur les bords de la rivière Owenglin, jetée vers la baie de Clifden, au Connemara. C’était dans le comté de Galway, à l’ouest de la province irlandaise de Connacht, ouest où il était finalement parti. C’était au nord, où il voulait voyager pour être perdu. Il était là-bas, dans ce certain espace, un espace certain disait-il plus souvent. Il avait disparu loin de la lâcheté de sa ville natale pour vivre avec le froid, le bois, l’eau et les feux de camps des légendes de Cromwell. Il lui semblait que dans son bref passé vivaient ses parents, de l’amour, de l’espoir, un soleil sans hiver, ce qu’on croyait idéal ; ce sud, il l’avait oublié au profit du froid du nord, son seul hiver dans lequel vivaient des roches et des lacs à perte de sens, et des moutons sauvages pour uniques sociétés.
Au moins, disait-on aux villages bercés par les maisons en pierre sèche frustes, on ne s’alarmait pas, on ne s’effrayait pas, car les idéaux étaient soit oubliés soit accomplis. Des vivants le voulaient, certains le pouvaient, beaucoup étaient libres ; aucun n’était perdu. Un parmi les près de deux mille voulait s’accomplir ; et il le pouvait.

Il ne regrettait pas plus son passé que sa liberté. Il ne regrettait rien, tant il avait choisi d’oublier son nom, son identité, et son âge et son temps, puisque c’était le prix. C’était le dernier prix à payer pour tuer la fausseté qu’une fois on aimait, que l’autre l’on perdait ; pour s’adapter au monde ou à l’humanité, celle qu’on méprisait, celle qu’on embrassait. Un de ses idéaux était de résider dans un village dans lequel connaître une personne c’est les connaître toutes ; il n’aimait pas devoir par défaut, alors sachant que penser une seule personne dans son entièreté était hors du réel, il se voulait l’ami de tout le monde et l’ennemi de personne ; juste un homme, rien de plus.
Il était philanthrope et il avait le droit. Ses cheveux étaient bruns clairs et voyageaient au vent, son nez et son menton encore d’enfant se retroussaient avec sa plénitude. Sous sa chemise azur et ses manches longues où flottaient ses mains, ses os et ses muscles ne déplaisaient pas aux femmes qu’il aimait. Sa bouche leur disait parfois que leur peau était douce contre la sienne. Les hommes aimaient son pantalon marine qui le confondait aux lacs. Sous son manteau d’hiver et son écharpe grise, on savait que les lacs, les rivières, les plaines, et les montagnes grises écorchées par le vent, étaient, disait-il, sa plus belle modestie. Il pensait tout du moins, de ses humbles connaissances, meilleure modestie que celle criée sur les toits dans son passé vulgaire. Ceux qu’il avait oubliés se prétendaient plus forts, gueulaient pour la sauvegarde de la nature mais n’agissaient pour rien, fermaient les yeux, les oreilles et la gueule sur l’idée du voyage sous prétexte de l’argent. Le dernier choix qui le poussa à enfin partir était sa volonté de déclarer la guerre à son peuple primaire ; sans passions, sans dégoûts, il n’avait nul besoin de jouer ce jeu-là.
Il avait voyagé plutôt que fui ; il ne se vantait de rien ; il voulait simplement partager l’idéal, le voir réalisé, et le fêter au monde. Il voulait simplement inviter des humains chaleureux et aimants, pour que tous se réchauffent face à un froid vivant.

D’aucuns virent naître et vivre son projet pour l’aider, ceux qui n’en avaient jamais vus de semblables découvraient avec joie, ceux qui en étaient familiers s’émerveillaient avec plaisir. Il préservait l’art et ce qu’il subsistait, et fondait sa richesse de culture et de livres parmi son bois clair, neuf, et lavé. C’est ainsi que les hommes, les femmes, et les enfants de Clifden qui voulaient et pouvaient accouraient, tous se réunissaient, ils se célébraient tous. Tous estimaient parfaite sa bibliothèque. Lui-même était fier de ses raisons ; tout la distinguait des autres, hormis ses rainures creusées dans le bois qui ornait ses armoires, ses sons des pieds humains dans les couloirs rustiques, ses odeurs passionnées, et ses livres élevés à la vue des lecteurs. Là, ils étaient si près.
Sa bibliothèque était, selon son rêve et sa réalité, élitaire pour tous. Parmi les étagères et les tablettes, Les fleurs du mal côtoyait Madame Bovary, Woyzeck vivait en compagnie de Philoctète dont les réécritures et traductions multiples s’offraient aux objectifs, de même que l’échantillon de J’accuse…! se voyait libéré de la même censure que Mein Kampf. Derrière les lourds monolithes boisés où demeuraient les œuvres amassées de sa vie, les ramifications des couloirs, fermés et étroits, préservaient les brouillons et les lettres d’auteurs. On les ouvrait aux sessions d’approfondissement, durant lesquelles, ensemble, ils ne demeuraient pas qu’avec un bouquin lu puis sitôt oublié. Les séances de lecture des textes et manuscrits, les débats humains et dialectiques, ainsi que l’écriture, ensemble, ouvraient l’art à chacun. Tous pouvaient s’y ouvrir ; ceux qui savaient écrire, voire mieux, ceux qui voulaient pouvoir.
Pour peu qu’il lui en reste, il levait le doigt d’honneur, de déshonneur, disait-il, à l’administratif, et tendait le bras à la liberté. Il protégeait les livres en y donnant accès, tout prêt était gratuit, lui seul était le maître et l’employé. Tous l’exaltaient ; il existait un temps où l’utopie était réelle.

Mais s’il s’offrait aux autres, il savait aussi vivre. Ses livres restaient sa seule demeure ; son bureau, son plaisir ; ses couloirs, sa solitude ; la nature, son temps. S’il savait et aimait embraser la nature humaine dans son immense lieu, il devait embrasser sa condition d’homme seul. Il disait couramment qu’il n’est pas un héros qui ne soit brûlé par le regret. Il n’avait pas honte de se cacher la nuit dans sa chambre pour pleurer. Un peu plus éloigné, par les couloirs et les portes qui séparaient sa loge de sa bibliothèque, il se sentait parfois un cœur à pleurer plus qu’à rire. Il estimait avoir le droit.
Son regret se voilait derrière sa terre natale que l’horizon séparait. Il se sentait perdu de ne pouvoir l’atteindre. Son unique point d’accroche, serré contre son cœur sur son carnet en cuir, n’avait jamais récolté l’affectif qu’il manquait. Peu à peu, il ouvrit lentement son livre en cuir relié, se surprit à flatter les couvertures de rouge, à sentir la première puis doucement la quatrième, puis, tel qu’il le flatterait avec un corps de femme, à ouvrir la première page, courbant le papier aux fines dorures à gauche, en parlant par les yeux à cette carte qu’il ne quittait jamais ; son passé. Par une légère agrafe, sur la première page, la photographie cartonnée de ses parents ne le quittait jamais. Son père et sa mère y étaient souriants, lui, encore enfant, au centre, jouait entre leurs jambes. Tout était partagé, ils s’aimaient autant que la ville et lui s’aimaient. Les riverains d’Owenglin, s’ils connaissaient ses origines, auraient pu lui dire qu’il avait hérité des yeux, du front et des cheveux paternels, et de l’air symétrique du visage maternel. Mais si leurs sourires étaient devenus des rides, si leurs cheveux avaient perdu le charme des débuts grisonnants, ou si même ils continuaient de grandir dans leur tombe, sans qu’il ne puisse ni croire ni savoir leur repos éternel, il le regrettait jusqu’à en être rongé. Ne pas se recueillir à la mort d’une mère était aussi brutal que de s’y voir renié ; il n’existait, pensait-il, pas de plus tragique drame pour un père que de perdre un fils, pas de plus tragique drame pour un fils que d’être perdu par son père.

Il connaissait par cœur et par raison. Il avait appris les mesures de sa carte ; seize centimètres sur douze centimètres, et il en découpait, toujours sans faillir, un fragment de quatre centimètres sur trois centimètres, pour le brûler ensuite. Le temps venait à chaque cycle. Hors d’une mesure artificielle qui disait-on le bouffait, il avait accompli un de ses derniers rêves, vivre hors du temps et n’être qu’un avec sa propre loi. Personne pour autant ne le rapportait fou ; depuis son départ, il notait les nuits succédant aux jours, calculait les axes de son point de vue des astres, tentait d’établir les déplacements vus de l’espace et du temps, pour se repérer seul à la nature. S’il voyait que le cycle correspondait à la nuit de son départ, il continuait ce qu’il refusait d’appeler un rituel. Il calculait, car il voulait savoir qu’il existait encore. Ce soir-là, le soleil tombant, il savait qu’il devait mettre feu à son dernier fragment. Alors, sans croire aux rituels ou aux malédictions, sans attendre d’honneur ou de solennité, il arracha l’agrafe à son lit affectif, il saisit à ses yeux le dernier fragment reposant sur le dernier quart gauche et le dernier tiers haut, puis avant d’y inscrire fatalement la date, il porta l’encre au nez, avant d’y tremper sa plume qu’il exaltait. Sentant le liquide noir couler sur le carton, et rempli des odeurs du bois, des livres, et peu de son passé, il saisit son briquet pour le brûler enfin. L’alcool avait séché depuis longtemps déjà, mais le feu se libéra sans barrière.
Et c’est lavée de l’encre, du sang noir de son maître, que sa carte brûla puis qu’il la fit chuter.

Par pleur il l’avait lâchée. Une larme coula mais il refusait de croire que cela était écrit ; il avait pleuré car il avait pleuré, disait-il. Ses larmes ne suffisaient pas à noyer l’incendie de sa taille minime ; il pouvait pleurer, il estimait avoir le droit. Il s’estimait humain, avant tout, et libre. Lorsqu’il pleurait, cela le rapprochait du monde. Mais isolé sur son bureau usé, clair et lavé, reclus au fond des armoires, sa mélancolie se transforma en haine. Elle le frappa jusqu’à ce que son bras éclate la seule fiole de son large bureau. En équilibre gêné, la fiole d’absinthe qu’il goûtait en guise de drogue, avant qu’il ne puisse la sauver de sa perte, gagna le sol et, fissurée lentement, le temps d’en avoir peur, ses morceaux explosèrent. À l’imposant pied du bureau qui les surplombait une dernière fois, le feu embrassa l’absinthe. Les flammes embrasèrent la fiole et de leur folie naquit la terreur. Immobile, pour une fois, il voyait le feu de Vénus naître de l’eau, ou presque. L’ardeur lui sembla si rapide et si lente.

Le temps le bouffait. Plus qu’une occasion, rien qu’une heure, qu’une période ou qu’un âge, et un temps trop restreint pour arracher son corps aux brûlures. Trop tard pour admirer les deux colonnes brutes de livres qui surplombaient une dernière fois avant d’être aux flammes sans adieux, comme des livres. Car là où l’on brûle des livres, on ne pouvait brûler rien d’autre, reprenait-il parfois. C’étaient pourtant les cendres et la fumée qui irritaient ses yeux, deux yeux prêts à pleurer pour des cendres si brèves. Déjà l’arrière de la première étagère, qu’il avait déjà fuie, avait perdu l’écrit gravé sur l’angle droit ; « Demain, dès l’aube », toujours laissée unique et sans plus d’artifices, n’était pas la seule inscription dévorée sous le bois ; « Ô temps ! suspends ton vol, et vous, heures propices ! Suspendez votre cours », incomplète et perdue, n’y résista pas plus. Mais le temps s’envola à la contemplation ; il risquait d’être rongé à chaque demi-seconde, en frôlant la folie ; ou à droite, ou devant, ou s’élever en haut ou se terrer en bas ?
Rien ne lui parla mais il devait partir. Il courut pour ne pas finir brûlé par pur hasard, car c’est par pur hasard que les flammes naquirent, il refusait de croire à un signe du destin, à un message du temps, ou même à une croyance. Coïncidence, un point. S’il n’eut pas le temps de parler il put au moins penser qu’il y a des choses qui sont soumises au hasard et d’autres qui ne le sont pas ; mais se répéter, se hurler, se croire fou n’était pas la question, il courait ou marchait, ne savait pas vraiment. Il voyait ses livres brûler. Il voyait les flammes le rattraper peu à peu. Il se vit courir parmi les étagères, sauva des ouvrages, ramassa des détruits au hasard parce qu’il le fallait. Les bras croulants, il marchait devant, ou derrière, partout, nulle part disait-il, il restait finalement immobile et seul. Seul le crépitement du brasier brisait le silence. Il regrettait que les livres n’aient trait qu’à l’esprit ; rien ne savait se sauver ; mais assez tergiversé, les bras croulant sous sa fierté, car on disait de lui que brûler un livre était aussi fou que faire du mal à une mouche, il voulut hurler et il le put. Il partit.

Il alla vers toutes directions pour être sûr de connaître. Impuissant à sauver, il avait appris jeune  qu’il fallait savoir faire des sacrifices. Alors, choisi lentement, le temps de déplorer, de ses indolents adieux et en dernier recours, il sacrifia la raison. De gauche à droite, puis d’avant en arrière, puis marchant et courant du haut des greniers au bas des caves, le soir tombait, le soleil déclinait pour rayonner les flammes, et le rythme infini, le tic-tac, le oui-non du temps semblait se faire entendre. Le feu laissait ses sens désormais indifférents. Il n’y avait rien d’autre que le temps. C’est en jetant le seul exemplaire de Huis Clos qu’il portait aux flammes qu’il se résigna ; s’il devait laisser au sous-sol son cadavre, il le souhaitait dans l’honneur. 
Au fond du bâtiment, dans l’axe symétrique des deux rangées de colonnes, quelque peu camouflée, encastrée dans le hêtre noirci et stylisé vieilli de l’imposant mur, il en emprunta une parmi les portes des couloirs cloisonnés. Il connaissait sa marche et son destin jusque vers le sous-sol ; le feu avançant derrière lui, il s’avança dans sa peur, sans refermer la porte. Il l’entendit brûler. Les flammes non rassasiées, courant à sa poursuite, l’obsédaient chaque instant. Dans ses couloirs étroits, entre sa petite chambre, ses douches et ses locaux, il se devait de passer plus vite qu’il ne voulait, des livres tombant de ses bras sans qu’il ne les retienne, destinés à la perte ; rattrapé aux détours des angles par la proximité des flammes, il risquait de mourir à chaque nouvel instant ; plus les œuvres chutaient, plus vite il s’écroulait. Dans certaines cavités, dans certains angles morts il se protégeait, respirait, pour l’unique illusion de regagner du temps. Il approchait de l’ultime porte souterraine au fond ; le brasier l’étouffait, il suait à grosses gouttes, par ardeur et angoisse. Il approcha de la cave en même temps que les flammes.

La porte fut refermée. Il rentra enfin. Il faisait noir et cela sentait la poussière. Il avait voulu l’oublier mais il s’en rappelait. Des cadavres de livres étaient déjà entassés à ses pieds. Une masse de meubles, d’objets ou d’accessoires, par ce qu’il distinguait, s’étalait aussi, depuis que le pendule avait commencé à battre, depuis d’innombrables années. Parmi les lumières inexistantes, la cave semblait neutre, et lavée de toute souillure. « Depuis combien de temps n’ai-je pas entendu le temps d’une horloge en argent ? », finit-il par douter. Il ne chercha pas la réponse tant il avait peur, tant sa peur oubliait les flammes le bouffant, tant sa peur l’immobilisait de nouveau sans qu’il ne sache si des secondes, des minutes, des heures ou des jours le séparaient du destin qu’il ne pouvait que voir. Il ne fut plus brûlé que par un seul désir ; brandir la lame de la liberté pour  les assassiner, pour abattre la mort, pour détruire le destin qu’il refusait de croire. C’est au centre parfait de la pièce encore noire qu’il savait quoi chercher. Ne fermant plus les yeux, n’exsudant plus, lentement, il vint au centre, plus lentement encore, en face de l’horloge, souvenant. La pendule d’argent était disposée là depuis la construction. Des ornements de hêtre surplombaient l’horloge, chiffrée de chiffres romains, attirant les yeux vers la paroi en verre montée verticalement, imposante, du cadran jusqu’à même le sol. La paroi protégeant le pendule mordoré intérieur, n’en finissant pas d’entendre oui et non, n’avait jamais était brisée.

Il le brisa enfin le 3 avril 2012, 19h23, près de 37 secondes. Il retrouva ses documents, ses papiers numérotés, sa fausseté administrative couchés sur les morceaux de verre et de bois fissuré. Cloîtré au milieu de quelques bribes de livres, de boîtes poussiéreuses et de coffres verrouillés derrière lui, dans cette toute petite cave, il était libre. Et, l’incendie cognant à son tour à la porte, il se saisit de son identité, de ses derniers symboles, et son dernier destin laissés sur le sol. Ses parents n’avaient plus de photo et les lacs artificiels de son Paris natal étaient déjà si loin.
Il déclama : « Moi, né le 24 mars 1974, parti de mon passé le 3 avril 1996, suis actuellement âgé de 38 ans, 14 jours sans mois. », avant de soupirer, de se résigner aux flammes qui n’attendaient que lui, lui qui n’attendait qu’elles, puis de vivre : « Et, tel un capitaine sombre avec son bateau, je laisse un beau cadavre à ma bibliothèque. Soit. Que les lacs du Connemara sont beaux la nuit tombée. »

Il ferma les yeux puis put enfin mourir.

*

Précision, j'ai supprimé le nom du personnage ; il était spécifique et, même si cela enlève de la force au texte puisqu'il perd sa révélation finale, j'ai trouvé que l'écrire ici n'avait pas d'intérêt et était trop facile. Même s'il est présent dans le texte original, cela n'a pas empêché le lecteur critique de remarquer qu'il n'était jamais nommé ; il pouvait avoir un peu de bonne volonté tout de même.

N'hésitez pas à commenter cette nouvelle qui peut être considérée comme la dernière de son genre, écrite en même temps que Partir., qui prend son relais, et qui est le début d'une expérience. Merci.
Titre: K. ~ Partir. [" Pauca Meae "]
Posté par: HamsterNihiliste le mercredi 09 janvier 2013, 23:31:06
Aujourd'hui est une journée littéraire, pendant laquelle je me suis notamment inscrit sur le forum Jeunes Écrivains (http://jeunesecrivains.superforum.fr/forum). C'est un bon tremplin pour un espace de publication amateur concret. Je vais publier les scènes de Partir. que j'ai déjà écrites, j'aurai moins de gêne et plus d'espace de parole. Je continuerai à poster ici quelques extraits dont j'ai envie, quelques nouvelles zeldaesques, quelques concours peut-être, mais je poursuivrai sur ce site que je vous inviterai à voir d'ailleurs. Merci de m'avoir accompagné et lu et de le faire encore, il y a beaucoup de choses que je n'aurai pas faites sans PZ — n'est-ce pas ? :siffle:

En attendant, je conclus les scènes de John, Léopold et Ophélie. C'est une belle histoire, et un peu un hommage à la première pièce de cet hiver qui m'a donné envie de représenter et d'écrire concrètement du théâtre, des faits d'hiver, de faire sens quand on le veut et qu'on le peut ; de croire simplement en quelques émotions.

*

« Pauca Meae »

John, une jeune fille prénommée Victoria. Un cimetière, en face du souvenir de Léopold et Ophélie.

JOHN. — Je vous vois souvent ici.
VICTORIA. — Moi aussi.
JOHN. — Vous aussi, vous vous voyez souvent ici ?
VICTORIA. — Je crois que quand veut aller dans un cimetière, c’est qu’on ne veut voir que soi.
JOHN. — Vous venez voir quelqu’un d’autre ?
VICTORIA. —Oui, je viens voir les mausolées, les cénotaphes, les tombes, les allées et les fleurs, les caveaux, et les esprits. J’aime beaucoup les cimetières. C’est terriblement reposant.
JOHN. — Vous cherchez quelque chose dans les cimetières ?
VICTORIA. — Non, mais j’y trouve les cimetières.
JOHN. — Je suis désolé, mais moi ça me fait mal. Ça me dépasse qu’on ne puisse rien chercher et qu’on n’y trouve qu’un cimetière.
VICTORIA. — Par exemple, vous, vous n’avez pas l’air bête, quand vous lisez un livre, qu’est-ce que vous y cherchez ? Un livre, c’est tout ce que vous cherchez. J’ai raison.
JOHN. — Vous avez raison. Vous y regardez quelque chose ?
VICTORIA. — Oui, peut-être. Je regarde quand j’en ai envie, mais je vois tout.
JOHN. — Vous écoutez ?
VICTORIA. — Non, mais j’entends.
JOHN. — Vous ne pensez pas. Vous avez raison.
VICTORIA. — Je suis sûre que vous semblez mourir d’envie de me dire que j’ai de la chance.
JOHN. — Vous avez de la chance.
VICTORIA. — Silences. Qui était Michel pour vous ?
JOHN. — Qui ? 

VICTORIA. — Monsieur Michel, gravé sur la tombe à vos pieds.

JOHN, s’écartant vers Léopold et Ophélie. — Oh, je suis confus, mon corps à dû tomber ou trop vouloir se rapprocher vers vous, mes petits pieds ont dû oublier qu’ils étaient par terre, ils voulaient s’empêcher de s’enfoncer, désolé, j’espère ne pas vous… j’espère que je ne vous ai pas fait trop…
VICTORIA. — Mais il n’y a aucun problème. Je peux vous comprendre.
JOHN. — Silences. Qui était Michel pour vous ?
VICTORIA. — Mais je ne connais pas ce triste monsieur !
JOHN. — Mais comment pouvez-vous me comprendre ?
VICTORIA. — Mais pourquoi ne pourrais-je pas vous comprendre ? Vous…
JOHN. — Mais je ne connais pas ce pauvre type !
VICTORIA. — Je sais. John s’effondre en larmes. Je suis désolée. Je m’appelle Victoria.
JOHN. — John. Silences. Je suis le père de Léopold et Ophélie. Je fais mon pèlerinage chaque année à cette date, ici, devant leurs urnes, pour lire leurs épitaphes, pour prier devant la tombe de mon fils et l’urne de ma fille, parfois pour espérer, parfois pour pleurer. Pour les deux, comme un père. Aujourd’hui, ils sont morts depuis quatre ans. Ils ont vingt ans ; tout juste un peu moins que vous, sûrement. Imaginez que votre père et votre mère vous laissent aller en ville avec votre frère, sur la moto qu’ils viennent de lui offrir, à la tombée de la nuit, à la lumière de la lune. Imaginez que tout est idéal et que dans votre famille, personne ne crie jamais. Imaginez juste que vous roulez vers votre dernière boîte de nuit qui ne ferme qu’à sept heures du matin. Imaginez qu’il n’y a pour seule musique que le vent doux au bord d’un joli canal, et pour seule lumière que le reflet de la lune et vos phares de moto que votre frère allume. Imaginez que vous profitez de la chaleur du soir à la fin de l’été, au cœur de votre adolescence de petite bourgeoisie, que vous êtes divine dans vos dessins au fusain et à l’aquarelle, que votre frère écoute sûrement Beethoven et sa chère Symphonie au clair de lune, et qu’il le joue au piano aussi admirablement qu’il l’écoute. Imaginez que vous aimeriez presque vous embrasser, que dans deux semaines vous rentrerez fièrement dans l’année de votre Bac, parce que vous aimez les livres et les… Imaginez un camion, il ne vous voit peut-être pas, il dérape un peu, mais juste assez pour vous renverser en bas de l’allée, pour jeter votre moto sur votre épaule et pour vous jeter dans l’eau sans plus rien maîtriser, sans voir, sans savoir, sans espérer, et juste assez pour projeter votre frère sur la route, lui écraser le dos et compresser ses côtes. Il est mort sur le coup. Il n’a pas eu le temps de voir sa sœur noyée. Elle avait une robe blanche et il avait une chemise rouge. Silences.
VICTORIA. — Vous souhaitez que je vous dise… quelque chose ?
JOHN. — Vous vous douterez que non.
VICTORIA. — Silences. Je ne veux pas être indiscrète, mais quel était le nom de la boîte de nuit ?
JOHN. — L’Érèbe.
VICTORIA. — Je passe devant de temps en temps. Ma sœur les connaissait peut-être, elle était une adepte de l’Érèbe et je crois me rappeler qu’elle aimait beaucoup ces noms.
JOHN. — Vous avez des sœurs et des frères ?
VICTORIA. — Oui, Marie, et un frère, Gaël.
JOHN. — Je ne les connais pas. Silences. Votre famille a peut-être des origines bretonnes ?
VICTORIA. — Absolument pas, je suis d’ici. Mais nous aimons bien les mélanges de culture et les voyages. J’ai souvent l’occasion, je suis traductrice.
JOHN. — Qui est-ce que vous traduisez ?
VICTORIA. — Des romans récents britanniques sans importance. Je rêverai de traduire Orwell, mais en attendant d’être artiste, il faut gagner son fric. C’est triste. Elle le regarde. Vous me semblez anglo-saxon, je me trompe ?
JOHN. — Je ne laisserai pas une femme se tromper, voyons. Mon père a vécu en Angleterre et doit en connaître tous les miles par cœur. Quand j’étais jeune, il m’a trimballé de Newcastle à Liverpool, de Manchester à Newhaven, puis nous avons vécu en Normandie et en Bretagne, avant de descendre à Paris et dans quelques villes récentes sans importance. Oh, j’ai vu des paysages. J’ai vu beaucoup de choses. Mais même mon père a été tiré de la vie où il a toujours vécu et termine ses jours dans une maison triste où il attend de mourir et peut-être de m’oublier. Je suis ici pour le travail, j’ai fait du droit comme toutes les personnes normales, parce qu’il le faut. C’est joli, certes, mais  c’est beaucoup trop triste par rapport aux pays où il pleut tout le temps. Elle le regarde. Ils se regardent. J’y ai rencontré Marthe, ma femme.
VICTORIA. — J’aime beaucoup la pluie.
JOHN. — Comme beaucoup de filles comme vous.
VICTORIA. —Mais je ne vous permets pas ! Vous ne me connaissez pas, voyons !
JOHN. — J’aime taquiner les filles qui sont belles comme vous et qui ont peut-être la moitié de mon âge. Vous pourriez être ma fille.
VICTORIA. — Laissez vos enfants tranquilles. Soyez seul avec vous-même.
JOHN. — Je crois que vous avez raison. Je commence à apprendre et pourtant je suis vieux, vous pouvez peut-être comprendre, mais il faut du temps, c’est tout. Il faut laisser le sable recouvrir les tombes et l’eau recouvrir la terre. Il faut du…
VICTORIA. — Taisez-vous et embrassez-moi.
JOHN. — Non.
VICTORIA. — Pourquoi ?
JOHN. — Parce que c’est trop facile. C’est très beau, une rencontre dans un cimetière lors d’un pèlerinage pour aimer ses enfants. Quatre ans ce n’est rien, vous savez. Mais c’est très long. Si long que ce que j’en dis ne devient plus que banal.
VICTORIA. — Je vous demanderai bien si vous rêvez de les oublier, si vous rêvez de paraître normal, si vous avez peur d’avoir fait votre deuil et d’être trop vite vieux, si vous êtes toujours père, beaucoup trop de questions qui vous feront peut-être peur mais auxquelles vous ne voudriez pas répondre mais…
JOHN. — Vous me comprenez déjà. Embrassez-moi.
VICTORIA. — Pas ici.
JOHN. — Sourire. J’adresse mes condoléances à ce Monsieur Michel.
VICTORIA. — J’adresse mes condoléances à vos enfants.
JOHN. — C’est inutile. Je suis seul avec moi-même.
VICTORIA. — Silences. « Demain, dès l’aube, à l’heure où blanchit la campagne »…
JOHN. — À voix basse. « Un bouquet de houx vert et de bruyère en fleurs ».
VICTORIA. — Ce poème tout entier en épitaphe est magnifique. Et pourtant je n’aime pas Victor Hugo. C’est vraiment triste qu’il ne soit associé pour moi qu’à des souvenir trop scolaires.
JOHN. — Vous avez tort.
VICTORIA. — On ne peut pas être parfait. Silences. Embrassez-moi.
JOHN. — C’est moi qui vous l’ai imposé.
VICTORIA. — Non, c’est moi.
JOHN. — Vous êtes trop jeune.
VICTORIA. — Vous aussi.
JOHN. — Pas ici. Maintenant.

Ils s’embrassent en sortant.

*
Titre: K. ~ Partir. [" On s'habitue c'est tout "]
Posté par: HamsterNihiliste le jeudi 17 janvier 2013, 01:21:06
Une nouvelle scène juste à la suite. Elle met en avant le personnage de Victoria et son rôle, à la fois face au personnage de John et au public. Je suis contre les messages dans l'art. La mise en abyme c'est peut-être l'avenir du texte. On s'adapte.

*
« On s’habitue c’est tout »

John, Victoria. La chambre de John, leurs affaires et son lit défaits.

VICTORIA. —  Très bien, vous avez insisté pour venir chez vous, mais finalement c’était aussi près du cimetière que chez moi. Vous savez y faire avec votre tact. Mais la prochaine fois vous ne manquerez pas d’aller chez moi. Chez moi, c’est plus grand.
JOHN. — Vous êtes entrée chez moi depuis moins d’une heure et vous n’avez vu que cette chambre. Que pouvez-vous en savoir ?
VICTORIA. — Je le sais. Je vois tout. Je suis là, dans le noir, j’attends que la lumière s’allume chez vous, que vous cessiez d’être nu et que vous vous habilliez. Je suis dans l’ombre, assise confortablement, et vous ne me voyez jamais. J’assiste à toutes vos scènes les plus prosaïques, du matin où vous ouvrez les rideaux au soir où vous courrez au jardin pour sortir votre chat.
JOHN. — Je n’ai pas de chat.
VICTORIA. — On ne peut pas tout savoir.
JOHN. — Je pense que si. Par exemple, je sais que vous mourez d’envie de m’embrasser, alors que nous venons de nous connaître et alors que j’ai honte d’être à deux doigts de tromper ma femme et Dieu.
VICTORIA. — Qui est Dieu ? Un chat ?

JOHN. — Il est Dieu. Je crois que cette réponse semble suffire. Je pense qu’il est le seul et qu’il n’a besoin ni d’un nom, ni de millions de guerres, ni de milliards d’homme. Il est Dieu, en tout cas il est le mien.
VICTORIA. — Vous parlez du vrai Dieu ?
JOHN. — Je vous félicite, je n’ai pas souvent l’occasion d’entendre des phrases aussi antinomiques.
VICTORIA. — Ce que je veux dire c’est que vous êtes catho.
JOHN. — Je ne suis pas catho, je crois en Dieu.
VICTORIA. — Ce que je veux dire c’est que vous êtes soumis.
JOHN. — Si aimer Dieu, c’est être soumis, alors oui, je suis soumis. Je suis soumis à mes enfants.
VICTORIA. — Silences. Pardonnez-moi.
JOHN. — Je vous excuse. Silences. Ne m’en voulez pas à moi, mais mon cœur ne sera jamais prêt à vous faire l’amour à vous.
VICTORIA, suscitant l’écoute de John. — « Ne m’en veux pas plus, je suis nu, tu es là, tu as gagné. Tu as gagné mon cœur, tu as gagné mon corps, mes cheveux et mes lèvres, je me suis sacrifié jusqu’à la dernière larme et je serai incapable de te dire autre chose. Tu as gagné et je sais que tu rêves de me faire l’amour mais je ne le ferai pas. Cette fois je ne ferai rien. Cette fois je ne lutterai pas. Cette fois ce sera fini et ce ne sera plus qu’une histoire d’un soir. Mais tu auras gagné. Amère, amère est la victoire. »
JOHN. — Assassins du temps perdu, livre premier, scène dernière, Paul à Ophélie.
VICTORIA. — La trilogie est magistrale.
JOHN. — Ça ne m’empêche pas de vouloir la démystifier.
VICTORIA. — Elle n’est pas si mythique, j’ai même été surpris que vous la connaissiez.
JOHN. — J’y ai détesté le traitement du personnage d’Ophélie.
VICTORIA. — Peut-être parce que c’est votre fille. C’est amusant, depuis que nous parlions, j’ai l’impression de voir en votre Ophélie cette Ophélie.
JOHN. — Mais d’un côté, cela me semble difficile de nommer une fille Ophélie gratuitement.
VICTORIA. — Arrêtons de prononcer le nom d’Ophélie, il va me paraître banal.
JOHN. — C’est quelque chose qu’on apprend. La vie d’Ophélie me paraissait banale pendant dix-sept ans et la mort d’Ophélie me semble banale depuis quatre ans.
VICTORIA. — Silences. « Si je venais à mourir, tu me respecteras. J’espère que je ne serai même plus un souvenir pour toi, j’espère que tu ne m’enterreras pas, j’espère que tu n’auras pas de raisons de tuer ton chagrin, tout simplement parce que tu n’auras pas de chagrin. J’espère que c’est la dernière chose que tu accorderas à nous deux avant de m’oublier. J’espère que tu me laisseras tout simplement mourir. Si je venais à mourir, tu m’oublieras. »
JOHN. — Arrêtez de citer les répliques de Paul à Ophélie, elles sont mièvres. Ce n’est pas parce que vous connaissez le texte par cœur que cela vous autorise à ne pas le comprendre.
VICTORIA. — Pardonnez-moi. Ce texte me touche énormément et j’admire l’auteur.
JOHN. — Sûrement parce que les Assassins du temps perdu sont ses seules pièces que vous avez lues.
VICTORIA. — J’ai lu Misanthropie, mon Amour. et je n’ai pas aimé. C’est écrit à vingt ans, les messages sont d’une facilité incroyable, les répliques s’adressent au spectateur comme s’il était obligé de les retenir, et il m’aurait sûrement fallu le voir mis en scène pour ressentir un minimum de plaisir. J’ai lu Dystopia et je pense que si je l’avais vu, le chef et le peuple m’auraient parus bien plus humains. Hormis l’enfant, qui est la seule trace d’un peu de personnalité dans la pièce, tous les personnages dégagent un mépris vu et revu et je leur souhaite de rester dans leur dictature qui y est décrite, comme elle a déjà été décrite mille fois auparavant. Mais rassurez-vous, ou non, j’ai été déçue des dernières mises en scène des Assassins du temps perdu. La vidéo pour souligner les répliques clés était de trop et prenait vraiment le spectateur pour un con. L’énorme plan en diagonale au milieu de la scène dégageait une froideur qui n’avait aucun rapport avec la sensualité.  Et le metteur en scène a eu beau défendre que cette insulte à la vision représentait le heurt contre la fatalité de la mort, il ne m’a pas empêchée d’y rester insensible. Heureusement que le texte est extrêmement fort.
JOHN. — J’ai souvent dit que ces pièces étaient des livres, et que le plus grand respect était de les laisser comme les textes qu’ils sont, pas de les prostituer sur scène. Vous avez lu et pensé ce que vous en vouliez, vous ne vous êtes pas laissée bouffer par ces messages et je vous félicite. Je retire le mépris que je vous ai adressé.
VICTORIA. — Je vous pardonne. Silences. Embrassez-moi.
JOHN. — « Embrassez-moi sur la falaise. C’est beau. Non. On dirait de la poésie contemporaine. Non. C’est de l’amour. »
VICTORIA. — C’est beau. C’est une citation qui pourrait provenir d’une œuvre du même auteur, mais je ne vois pas.
JOHN. — Avez-vous lu Partir. ?
VICTORIA. — Je ne connais pas du tout.
JOHN. — Aimeriez-vous rencontrer l’auteur ?
VICTORIA. — Ce serait un de mes rêves littéraires. S’il était un dramaturge étranger, je me damnerai pour le traduire.
JOHN. — Je pense que vous pourriez le traduire tout français qu’il est. J’en crois son avis, écrire ce qu’on pense, c’est une grande traduction. Comme l’auteur de quelle œuvre aimeriez-vous le rencontrer ?
VICTORIA. — Dites ce que vous voulez et pensez ce que vous pouvez, mais pour moi il reste l’auteur des Assassins du temps perdu.
JOHN. — Je crains que vous ne trouviez plus que celui de Partir.. Je suis extrêmement cruel avec le père de ma filleule, mais je crois et je sais qu’il est un homme qui a décidé de forger sa vie sur un traumatisme. Sur le traumatisme d’avoir aimé sans être aimé. C’est un traumatisme qui arrive à tout le monde et tout le monde s’habitue. Pas lui. Il a voulu aimer, puis haïr, puis ne plus ressentir aucune émotion, puis peu à peu écrire pour tenter de s’en remettre, pour faire croire dans tous ses textes que le monde est mauvais et que, parce qu’il a placé « décadence humaine » à chaque page, être auteur c’est vivre seul, et vivre seul c’est vivre libre. Même au théâtre. Et maintenant qu’il ne vit plus seul et qu’il aime celle qu’il nomme « la deuxième fille », alors qu’elle n’est toujours que celle qu’il découvre, il est libre. Je crois que la folie de liberté de cet homme ne vous expliquera rien, sinon sa folie de partir. De fuir. De fuir les principes et la cage dans laquelle il s’était enfermé tout jeune. De fuir son passé, son présent, et son avenir. De se fuir. Il est prêt à mourir quand il le rêvera, il veut que son partir autour de chaque kilomètre de la Terre soit son dernier voyage, il veut qu’il n’y ait pas de fric, pas de bouffe, pas d’eau ; il est prêt à partir et le reste il s’en fout. Son rêve c’est de mourir. Peut-être que vous, l’espace d’un instant dans sa vie, il vous aimera, parce qu’il aime quelqu’un. Mais vous n’y trouverez qu’une loque, que quelqu’un de banal qui veut être son bourreau et sa propre victime, qu’un homme qui n’a même plus l’ambition d’être fou. Vous y trouverez un homme pour qui son dernier texte est son ultime cri, même s’il ne sait pas ce qu’il crie.  Il est au sommet d’une falaise et il crie face au vent mais il ne s’entend même plus. Il est au bord d’une la falaise et il trace son nom face à l’horizon mais il ne le voie même plus. Il est au pied de la falaise et il se dit qu’il aura perdu le rêve d’y mourir, parce qu’il est un homme. Vous n’y trouverez qu’un homme, Victoria, et c’est ce qui fait sa force. Mais il ne le sait pas. Il ne veut rien savoir. Il est hors de tout ça. Silences. Oui. Il est hors de tout ça.
VICTORIA. — Vous avez de la chance de connaître un homme comme ça.
JOHN. — J’ai peut-être de la chance, si vous le dites, mais j’ai simplement de la chance de connaître ses œuvres et d’en aimer certaines. Regardez-moi, vous m’aimez bien et vous rêveriez de me faire l’amour, mais je vous dirai non parce que ma femme et Dieu le verront ; vous aimez peut-être mes yeux, peut-être mes cheveux, peut-être même mes larmes, ou même ce qu’il y a à l’intérieur de moi. Vous informer que je suis avocat ne changerait rien. Pourtant j’ai parfois mal à ne pas accorder la peine que méritent des traitres envers leurs familles, leurs amis, leurs patrons ou même leurs juges et leurs avocats. Le pire, c’est que ça devient banal. Arrive un jour où tout ce qu’on a cultivé sur la tête de Claude Gueux se fâne.
VICTORIA. — Je vous ai déjà dit que Victor Hugo n’a rien pour être aimé.
JOHN. — Vous n’aimez Victor Hugo ni pour ses poèmes, ni pour ses romans, vous n’aimez ni Misanthropie, mon Amour. ni Dystopia, vous aimez bien Orwell et vous êtes dégoûtée de la création britannique ; vous avez une culture bien étrangère à la mienne. Peut-être êtes-vous une grande spectatrice de théâtre ?
VICTORIA. — Je ne suis ni une grande lectrice ni une grande spectatrice de théâtre. Molière et Racine c’est poussiéreux. Beckett et Koltès c’est pour les gosses. Kubrick c’est trop riche. Spielberg c’est trop pauvre. Brassens c’est trop vite jeune. Brel c’est trop vite vieux.
JOHN. — C’est triste de devoir dire à une femme qu’elle a tort.
VICTORIA. — Mais nous n’avons pas à avoir tort ou à avoir raison. Nous sommes toujours libres de penser, et vous savez, dire que l’autre a tort, ce n’est pas pour autant admettre que l’un a raison. Il n’y a pas d’absolu dans l’art.
JOHN. — Alors comme ça vous êtes une artiste ?

VICTORIA. — Absolument.
JOHN. — Embrassez-moi.
VICTORIA. — Faites-moi l’amour.
JOHN, s’écartant. — Marthe va revenir.
VICTORIA. — Au diable votre femme, vous avez oublié.
JOHN. — Je n’ai pas oublié. Je ne suis pas assez jeune pour laisser la première inconnue du cimetière me faire l’amour, mais je ne suis pas assez vieux pour oublier qu’une fois, j’ai été jeune aussi.
VICTORIA. — Vous trahirez vos enfants si vous me faites l’amour ?
JOHN. — Laissez-là mes enfants, vous ne les connaissez pas.
VICTORIA, jetant à terre un souvenir de Léopold et Ophélie. — Vous non plus.
JOHN, la rejetant. — Je vous quitte.
Il s’apprête à sortir.
VICTORIA. — Je vous laisse. Silences. À demain !
Il sort.

*
Titre: K. ~ Memento Mori, Memento Vivere. — Fin.
Posté par: HamsterNihiliste le samedi 19 janvier 2013, 17:55:11
Memento Mori, Memento Vivere., c'est fini. Prématurément. Mais j'ai souhaité conclure avec élégance par un bel épilogue, après avoir profité de la nuit entière pour terminer ce dernier chapitre. Il y a des choses que j'ai toujours voulues écrire dans ce texte et je pense que, peu importe la deuxième ou la troisième partie, elles sont écrites. J'en parle depuis un certain temps et je suis arrivé au bout, avec autant de plaisir que d'habitude. Il y a eu des hauts et des bas, c'est peut-être une question d'équilibre. Parfois j'aime bien laisser le silence et, éventuellement, vous laisser la parole. Mais pour ceux qui ont lu, qui ont formulé de simples critiques pour me faire prendre conscience que, sans public, écrire est bien peu de choses ;

Merci.

*

IX : Golgotha

Yasunori Mistuda - Scars of Time - Chrono Cross [Reprise par Taylor Davis] (http://www.youtube.com/watch?&feature=player_detailpagev=blmuGcQKPfA&list=PLABD1A989F27F0162&index=9).

Termina, An 13, Mois 10, Jour 30.

— Oui, rendez-vous Électre, vous n’avez rien vengé.
— Astral, écoutez-moi, ne serait-ce qu’un instant.
— Vous n’avez rien vengé…
— Autant que je l’ai pu.
— Autant que vous vouliez vous avez fait naufrage.
— Astral, j’ai tout perdu pour votre confiance.
— Mais vous avez perdu même ma confiance.

Encouragés par la peur du public, qui, assis sur le sol, contemplait les acteurs, les héros de théâtre continuèrent leur jeu. L’Électre interprété par Ikau termina son regard vers la foule émue, et Astral, dont le rôle avait à lui seul prouvé la gloire de Ridley, se jeta sur le dos de son traître d’un instant.

— Trahison, rien de plus que de la trahison. Vous êtes détestable, Électre, et je vous hais. J’oublierai tout de vous, depuis même l’enfance que nous avons vécue, et je vous vomirai dans chacun de mes mots. Je n’aurai rien perdu de l’ardeur qui m’anime. Faut-il en arriver à de pareils extrêmes ? Humain, je dis que non ; mais ami, vous n’avez rien de plus que ma haine, mes souvenirs effacés au gré du temps qui court ; et pour dernière preuve de votre trahison, il n’y a que mon cœur qui retient cette dague prête à percer le votre.
— Vous ne me retenez plus comme il se doit, Astral. Voyez-vous, je m’échappe de votre main en larmes. Cher Astral, je suis digne, c’est vous qui avez mal. Vous avez mal de voir que cela se termine, de finir tous vos mots sur une triste histoire, mais vous le dites vous-même, après tout, c’est la fin. Vous souhaitez me haïr une dernière fois ? Partez donc, partez loin, partez où je ne suis. Je ne vous en veux point, je ne vous hais pas plus. Je t’ai toujours aimé, Astral, comme un ami. Tu manqueras à mon cœur, mais moi, en tant qu’humain, je finirai mes jours avec d’autres soleils. Le soir où le soleil aura à se coucher, je ne perdrai plus rien. Je n’aurai ni regrets, ni raisons d’avoir peur. Non, je n’aurai plus rien.

Les spectateurs subjugués face à eux les contemplèrent se retourner, lentement, se mépriser, honteusement, se regarder, théâtralement. Ikau et Ridley avancèrent et saluèrent. Un homme lui serra la main :
— Je vous félicite, Ikau. Depuis que je vous vois, depuis même mon enfance, vous m’avez transporté. Votre dernière pièce était excellemment bien jouée et j’en garderai toujours un souvenir. Alors, à vous et à vos acteurs que j’admire et que je pleure, merci !
Puis, une femme s’avança jusqu’à l’embrasser :
— Le texte et les vers de cette dernière pièce étaient excellents, Monsieur. J’admire encore et encore ce que vous écrivez et je vous promets que rien ni personne ne les laissera à l’oubli. Je vous remercie, et je ne sais même pas quand je finirai de pleurer alors que vous souhaitez, vous, finir, mais merci, merci Ikau…
Peu à peu, ce furent les hommes et les femmes, les enfants et les vieillards qui se levèrent, applaudirent, parfois rirent, parfois pleurèrent. Ikau tint, l’écrasant presque d’émotion, la main de son camarade Ridley dans un ultime discours.
— Oui, puisque vous le dites, c’est ma dernière pièce. C’est la dernière fois que je monte sur les planches et que j’en redescends, c’est la dernière fois que je vous remercie, vous, et mes camarades, c’est mon dernier discours, puis, ce sera peut-être ma dernière folie, mes derniers instants, que sais-je, peu importe. Demain, vous m’oublierez, mais, si vous le voulez, mes textes et mes rôles resteront en mémoire. Dans votre mémoire. Dans la notre. Dans celle du peuple.
— Dans celle du peuple, reprit Ridley exalté et humain, qui demain, peut-être, se souviendra des hommes qui le sauvèrent, qui se sacrifièrent ou non, mais qui furent, en tout cas, les derniers de leur race. Souvenez-vous d’aujourd’hui et portez notre mémoire jusqu’à la fin de la guerre ! Laissez nos mots être portés par le vent, la terre, et la mer ! Et enfin, même si vous vous souvenez du chef et de l’acteur, laissez-nous, nous, les hommes.

Les hommes applaudirent et les femmes pleurèrent. Tandis que les enfants et les vieillards rêvaient déjà de ce discours noir et vengeur, Ikau, profitant des gestes hypnotisants de Ridley, disparut dans le froid nocturne.

Le froid mordait son corps à peine recouvert par ses grèves et sa redingote grise, foulant l’herbe trop haute des Champs de l’Espoir au Nord. Lorsqu’il vit sa silhouette, puis sa femme, il n’entendit rien d’autre qu’un silence, trop rare à ses yeux. Il se baissa, plongea dans sa bouche puis dans ses yeux.
— Tu as mal ?
Elle répondit « oui » sans rien dire. Elle ne pleurait pas. Le corps adossé à la dure roche grise, son énergie se concentrait et se rétractait dans l’entrejambe, qui, contractée et mordante, souffrait pour expulser son propre fils.
— C’est ta chair. C’est la mienne, je ne sais pas, Naæviî. Mais je veux avant tout qu’il soit notre fils. Je veux tout lui transmettre, je veux lui dire tout ce qu’un père peut dire, mais je ne pourrai pas. Je lui souhaiterai juste de m’oublier, Naæviî. Ce fils n’aura connu ni son frère, ni son père ; alors je te dirai quelques mots, je veux que ses premiers mots entendus soient mes derniers mots dits.
Elle eut mal.
— Comment l’appellerons-nous ?
Il arracha un cri à sa femme.
— Link.

Ikau attendit, au silence et à la nuit. Le froid s’abattait sur son corps droit et fier, sans jamais atteindre le point de le courber. Ce vent ne se réchauffa jamais de la nuit, même à l’instant où les deux enfantèrent. Link vint au monde. Naæviî ferma les yeux et respira, l’enfant sur le sein. Ikau la regarda.
— Crie maintenant, crie.
Naæviî essuya ses traînées de sang qui coulaient sur le sol tout le long de ses cuisses. Ikau essuya ses pieds. Il baissa le pied puis le genou à terre, et, la main sur le pied minuscule de son fils, plongea dans les yeux de sa femme et embrassa ses lèvres.
— Si je venais à mourir, tu m’oublieras, susurra-t-il à sa main.
Sa dague droite tomba sur le sol, le doux pommeau posé sur le sein de Naæviî.

Il lui semblait que le jour se levait, et que le froid mourrait tristement. Déjà loin du fils, il marchait, droit et sûr, un pas après l’autre, au milieu de la foule grouillante sacrifiant la terre. Ikau fermait les yeux. Il sentait les odeurs des pas et des cris, en fermant ses yeux bleus, jusqu’à ce que sa main atteigne l’épaule de l’autre. Le bras tendu, son cœur battait.
— Rébellion. Tu crois que mes yeux resteront encore fermés parce qu’ils ont peur de te voir. Tu as tort, Rébellion.
Ikau ouvrit les yeux, et de sa main gauche se leva sa dernière dague. Ancrée à son cou pressé contre la roche, elle mesurait son souffle.
— Tu as peur ?
Rébellion fermait les yeux.
— Non. Venge-toi. Venge-toi de l’homme qui a imposé le temps dans ce monde, qui a permis aux hommes de mesurer leur vie, d’en avoir un peu peur, de devenir des machines, et de croire que ce qu’un homme a lui seul imposé, en un jour à peine, a toujours été là et a régné sur eux. J’ai apporté le temps, homme de la foule, pardonne-moi d’avoir apporté aux hommes une croyance, une force, un espoir. Tu es lâche. Tu es lâche car tu as peur du courage. Si tu avais du courage, tu m’épargnerais. Si tu souhaitais vraiment me laisser sans honneur, tu me laisserais viv…

Ikau récupéra sa dague ensanglantée et lui tourna le dos, ses pieds tout d’abord fiers, sans attendre que la foule ne le piétine sans le voir. Ses yeux se levèrent face à la hauteur d’un gigantesque mur, auparavant caché par la masse du Pic Noir. Marchant de lentement en lentement, la plante de son pied toucha trop vite la terre, pendant que l’autre jambe repartit en arrière. À chaque pas, il savait rattraper cette chute, mais ne sut empêcher son corps, perdu hors de lui-même, de l’abaisser au sol sans jamais pour autant arrêter d’avancer. Seul son rêve de victoire animait son esprit ; victoire de guider le peuple sur une fausse piste, victoire de voir fuir les guerriers vers l’ailleurs, victoire de crier, au-delà des vallées, sa parole prophétique. Victoire avant tout de franchir l’immense mur rocheux qui lui râpait les mains.

Sans même lever les yeux, il le gravit aux mains et à la dague, la plantant dans la pierre et s’appuyant dessus à la force du pied. Le temps lui parut long. Le temps que les soldats s’entretuent dans le champ que surplombait le sommet ne l’était pas autant.
Lorsqu’il l’eût gravi, sans être exténué, quelques autres silhouettes s’entassaient au sommet. Sa gorge sentit sa propre dague lui presser le sang avant même d’avoir pu ouvrir ses quelques mots.
— Mes fils…
Son discours naquit à peine par ces mots que la gorge d’Ikau fut tranchée. Kafei, aux cheveux violacés, repartit, dos à lui, la dague ensanglantée n’appartenant désormais à rien d’autre qu’à sa main.

Le jour était levé et Naæviî avait parcouru les marais, les plaines et les mers. Son enfant dans les bras, au sein d’une forêt, elle entendit des voix qu’elle ne voyait pas.
— Je ne vous entends pas, dit-elle, fatiguée d’être à peine couchée sur l’herbe sèche.
Elle déposa son enfant au pied du seul grand arbre que ses yeux, déjà trop fermés, pouvaient voir.
— Tu entendras tout et diras ce que tu veux, Naæviî. Ton rêve est ton enfant, lui seul vit désormais, et lui seul te mérite. Peu de gens en ce monde méritent cette gloire, mais tu es encore jeune, et déjà assurée au-dessus du destin. Naæviî, oublie tout, te voilà immortelle aux côtés de ton fils. Pour le temps des dagues, pour le temps des Hommes, et pour la fin du temps. Vis avec lui, Naæviî, oublie même ton nom, oublie ton avenir. Vis.


Les textes semblent dire que la suite appartient à l’Histoire. Les archives de l’Élite, d’Ikau, ou de Naæviî ne contiennent rien d’autre qu’une dernière phrase, peut-être historique, peut-être terrifiante, peut-être terminée. Mais par les morts, par les vies, et par-delà le temps, tous s’accordent à dire « qu’il n’y avait plus rien ».

*
Titre: K. ~ Memento Mori, Memento Vivere. — Fin.
Posté par: HamsterNihiliste le samedi 19 janvier 2013, 17:56:17
*

Epilogue : Oméga

Par les déesses qui créent la croyance des hommes.
Par les hommes qui croient en leur propre avenir.
Par les hommes qui font vivre le monde qui leur fut donné.
Par les hommes qui meurent, par les hommes qui tuent, et par les femmes qui vivent.
Par les hommes qui aiment, par les hommes qui regrettent, et par les femmes qui pleurent.
Par les hommes qui rêvent de vivre au rang des dieux.
Par les pères qui restent, et par les fils qui partent.
Par les viols.
Par le meurtre, et les assassinats.
Et par ceux qui finissent.

Laissez les hommes libres de vivre ou de mourir.

Écrits des Déesses. - Textes intemporels non destinés aux hommes. Non-datés.

*
Titre: K. ~ Partir. [" Ne plus parler qu'à son silence "]
Posté par: HamsterNihiliste le mardi 12 février 2013, 23:51:28
Je vous aime bien et j'honore mon 1500° message sur le site par cette scène que je trouve belle.

*

« Ne plus parler qu’à son silence »

Hélène, la mère de Marthe,
Victoria. La chambre d’Hélène dans la maison de retraite de la Pendule d’Argent.
Entre John.


JOHN, fixe. — Vous êtes la fille du hasard.
VICTORIA. — Vous êtes l’homme de rien.

JOHN. — Vous n’avez rien à faire dans ma vie.

VICTORIA. — Mais voyons, Hélène n’est pas votre mère.

JOHN. — Mais elle n’est pas la votre non plus.

HÉLÈNE. — John, vous n’avez aucune raison de lui en vouloir. Cette jeune femme est très charmante, et nous pouvons bien apprécier le hasard d’une visite, n’est-ce pas ?

JOHN. — Hélène, vous n’êtes pas si seule. Il y en a tellement qui sont bien plus seuls que vous, alors ne vous plaignez pas.

HÉLÈNE. — Mais je ne me plains pas. Je ne suis pas seule du tout, j’accepte la vie comme je la vis et comme je la vivrai.

JOHN. — Je l’accepte et vous n’avez pas le droit de…

VICTORIA. — John, ne faisons pas d’histoire. La mère de votre femme est une personne charmante.

JOHN. — Je sais bien qu’elle est une maman très charmante, je viens la voir bien plus que quiconque, même plus que Marthe, parfois.
HÉLÈNE. — Mais elle ne m’a pas oubliée, elle.

JOHN, à Victoria. — Mais qu’est-ce que vous venez y faire, vous ? Vous allez encore me dire que vous êtes « juste venue la voir » ? Et bien allez-y, dites moi que vous êtes « juste venue la voir » !

VICTORIA. — Mais avec plaisir, puisque vous insistez. Je suis juste venue la voir.

JOHN. — Mais vous faites ça tous les matins, aller voir les gens, comme ça, sans prendre la peine de frapper à la porte de leur vie ?
VICTORIA. — Vous insistez pour que je vous dise oui ?
JOHN. — Mais qui êtes-vous ? Mais qu’est-ce que vous avez vécu dans votre vie pour croire que vous faites partie de la vie de tous les gens dans ce monde ?

VICTORIA. — Si vous étiez un peu plus humain, vous le chercheriez peut-être, John.
HÉLÈNE. — C’est vrai, John. Vous êtes parfois cruel. Elle regarde John voir Victoria contempler un souvenir de Léopold et Ophélie, avant de se suivre le même regard.
JOHN. — Silences. À Victoria. J’espère que vous ne lui avez rien dit.

HÉLÈNE. — Mais pourquoi voulez-vous reprocher à des gens de parler, John ? Regardez-vous, vous parlez, c’est normal. Ce n’est pas vous qui allez vous opposer à ce qui est normal, n’est-ce pas ? C’est la vie, John. On vit, on parle, puis on meurt. On devient vieux et on accepte. John continue de regarder le souvenir de Léopold et Ophélie. Mais que croyez-vous, John ? Vous mourrez encore d’envie de me le cacher. Mais vous ne savez rien.

JOHN, envers Victoria. — Mais qu’est-ce que vous avez dit, bordel ? Mais qu’est-ce que vous avez fait, vous, putain ? Sale petite… Retournez chez vous. Retournez dans votre rue et fermez les portes de votre maison. Je ne vous reverrai même pas quand vous viendrez « juste voir » mon ami dramaturge que vous admirez tant. Demain, vingt-et-une heure.

VICTORIA. — Je travaillerai.

JOHN. — J’imagine. C’est éreintant d’être traductrice.

VICTORIA. — C’est éreintant d’être avocat sans avoir une once d’humanité et sans écouter rien d’autre que sa bite et son imbécilité. Vous êtes imbécile, John. Vous avez perdu deux enfants mais vous croyez avoir accepté. Vous croyez avoir compris la vie et vous croyez apprendre la vie à vos amis imaginaires, mais vous n’avez pas d’âge, vous n’avez rien vécu, vous n’avez même pas profité de vos quatre ans pour grandir. Vous ne vieillirez jamais, John. Vous ne serez jamais enfant, jamais adulte, jamais vieux, jamais adolescent. Vous n’avez sûrement jamais aimé. Vos gosses n’auraient sûrement eu aucune éducation. Vous allez finir banal, John, et si vous croyez encore que c’est ça, le bonheur, je vous souhaite de ne même pas mourir. Je ne veux pour rien au monde que vous soyez aussi sage que cette dame de quatre-vingt onze qui a vécu chaque jour de sa vie, elle. Allez, retournez vous lever chaque matin en vous disant « aujourd’hui, je suis vivant, et c’est tout ce qui compte et qui me rend heureux ». J’ai peut-être la moitié de votre âge et cette femme en a peut-être le double, John, mais nous vivons, au moins. Et sachez-le, ce n’est pas ce qui me rend le plus heureuse. Vous ne finirez même pas, John. Vous serez là, en suspens, entre le tunnel et le purgatoire, entre l’urne de votre fille et la tombe de votre fils, entre la fidélité de votre veuve et mon souvenir, celui d’une jeune femme dans laquelle vous n’avez même pas su voir une fille, celui d’une fille heureuse d’avoir pu faire l’amour à un homme avec, pour la première et la dernière fois dans sa vie, un semblant de vrai amour, pour finalement se rendre compte que chez le connard prétentieux que vous êtes, le seul amour que vous avez, c’est de l’amour sale. Il n’y jamais eu de générosité, il n’y a jamais et de partage. Il n’y a jamais eu d’humanité en vous. Vous êtes un inconnu et vous ne connaissez rien.

JOHN. — Vous, je vous souhaite de perdre vos premiers enfants.

VICTORIA. — Je vous le souhaite de tout cœur à vous aussi. John s’apprête à sortir.
HÉLÈNE. — John, écoutez-moi.
JOHN. — Ça y est, vous savez tout.

HÉLÈNE. — Mais je le savais déjà, John.

JOHN, à Victoria. — Comment ça ? Depuis quand ?
HÉLÈNE. — Depuis quatre ans, John. Depuis le début. Avant même que vous ne le sachiez, ma fille me l’a dit.

JOHN. — Alors ma femme m’a menti ? Alors Marthe m’a trahi. Oui, oui, mon Dieu, on a été cruels.

VICTORIA. — Vous voyez, John, dans ce monde, vous n’êtes même pas le seul à jouer le cruel.
JOHN. — Demain, dix-sept heures. Il laisse lentement hésiter son regard entre le public et le fond de scène. Il sort.
VICTORIA, regardant en arrière. — J’aime beaucoup les cheveux de John.

HÉLÈNE. — Vous êtes amoureuse de ce beau garçon ?

VICTORIA. — Si j’étais amoureuse, ce serait de son élégance, pas de son désespoir.
HÉLÈNE. — Vous croyez vraiment qu’il est désespéré ?
VICTORIA. — Il essaye de l’être ?

HÉLÈNE. — Je sais que non. Il est normal, Victoire…

VICTORIA, gênée. — Victoria.
HÉLÈNE. — Excusez-moi. J’entends tellement de prénoms comme le votre qui ont l’air étrangers et bêtes, alors que vous m’aviez l’air si honnête et si belle.
VICTORIA. — Mais ce n’est pas un problème. Silences. Parlez-moi des hommes, Hélène.
HÉLÈNE. — Je crois que les hommes ne savent pas ce qu’ils veulent. Parfois ils veulent être père, parfois ils veulent se rendre compte qu’ils ne le sont pas assez. Je me rappelle encore que même Léopold l’appelait souvent « John ». Mon ange, Léopold, quand je pense qu’il n’y a que pour son enterrement que les poèmes qu’il avait si longtemps écrits ont été lus. John en a lu un premier, Marthe un deuxième, j’en ai lu un troisième. Puis l’orchestre de ses amis, dont il était un le meilleur joueur de piano, a joué et chanté une chanson de Gilbert Bécaud, Quand il est mort le poète. Ce sont des poèmes qui écrivaient beaucoup la mort. L’attente, l’amour, le deuil, le manque, c’était un peu banal, un peu mièvre. Mais c’est parce qu’il était jeune et qu’il ne savait pas encore qu’il ne savait rien. Il ne savait pas encore que c’était un péché d’être jeune. Dieu n’a pu que lui pardonner. Il rêvait peut-être d’être un auteur maudit. Il aimait beaucoup Baudelaire.
VICTORIA. — John aussi aime beaucoup Baudelaire.
HÉLÈNE. — C’est parce qu’il est jeune. Il a besoin d’espoir, il a besoin d’amour, il a besoin de croire, ce gosse. Mais devoir payer ses péchés si tôt, c’est déjà triste. J’espère que Dieu le reconnaîtra.
VICTORIA. — Oh, vous savez ce que ça fait, moi et Dieu…

HÉLÈNE. — Non, je ne sais pas. Je crois. Silences.

*
Titre: K. ~ Partir.
Posté par: HamsterNihiliste le jeudi 28 février 2013, 00:06:30
Partir. (http://www.mediafire.com/view/?saj8d5togg8h92p)

Merci.
Titre: K. ~ Partir.
Posté par: Cap le dimanche 10 mars 2013, 03:20:52
Au début, je voulais faire un beau commentaire comme tu sais si bien les faire.
J'en suis incapable.
Je dirais juste que j'ai aimé. Et que ça me bouleverse toujours autant.

Merci pour tout.
Titre: K. ~ La la la
Posté par: HamsterNihiliste le samedi 30 mars 2013, 23:08:02
Une nouvelle nouvelle après plus d'un an d'autres expériences. Elle était plus rapide et spontanée, elle m'a pris quinze jours et c'est un autre style, j'ai pris beaucoup de plaisir à l'écrire et, à tout hasard, je l'ai envoyée au PJEF avec un deuxième exemplaire de Mehr Licht!, comme pour faire un retour sur mes expériences passées. Mais je suis jeune encore. C'est l'histoire d'un vieux. C'est bien d'être vieux.

*

•La la la

« Vis », dit Dieu. Dans un lieu dont la clé n’a pas été trouvée ; en des temps immémoriaux.

Et l’Homme se mit à vivre. L’Homme se mit à manger, à boire, à avoir chaud, à avoir froid, à se prélasser auprès de la femme et de son arbre quelque part dans le jardin d’Eden, entre la pomme et le serpent. L’Homme vivait sa vie éternellement longtemps et, sans travail, sans logement, sans enfants, tout marginal qu’il était, aurait tôt fait d’être exclu de la société, et n’aurait eu que le choix de finir dans l’absinthe ou dans le caniveau, quelque part entre les œuvres complètes de Thomas Chatterton et une pancarte témoignant de sa pauvreté autant financière qu’orthographique.
Mais l’Homme n’avait que faire de la société qu’il ne connaissait ni d’Ève ni d’Adam, qui l’aurait exclu pour cause d’accoutrement grotesque à base de feuille de vigne, qui lui aurait offert une amicale contravention pour consommation de fruit défendu dans des jardins privés, ou encore qui, pour sa disgracieuse excroissance au niveau de la côte, l’aurait exposé quelque part entre le cirque Zavatta et le cirque Pinder. Tout au plus, les gens de ce monde bien étrange étaient en train de lire l’œuvre dont il était le héros originel, œuvre sans prétention dont même l’auteur restait anonyme, très modestement appelée Bible, et rangée dans une bibliothèque quelque part entre 1984 et Les 120  journées de Sodome.
Mais la Bible se gardait bien d’écrire que tout au long de ses neuf cent trente ans, l’Homme s’ennuyait à mourir ; mais condamné à croquer à pleines dents les fruits de l’arbre de vie, l’Homme n’avait aucun moyen de mettre fin à sa propre existence et, trompant son ennui, se mit à découvrir que Dieu avait bien fait les choses en concevant le point sa jouissance extrême quelque part entre son appendice masculin et l’orifice féminin prévu à cet effet. L’Homme donna alors naissance à un nombre d’enfants dont l’énumération durerait jusqu’au déluge, enfants dont le travail, commun et intensif, de générations en générations, donna à voir au monde de merveilleuses choses, quelque part entre les tours phalliques de la City de Londres et ma maison de retraite de La Pendule d’Argent.
Oui, ça, je crois que je l’ai lu dans La Bible, même si je ne sais plus trop quelle bible c’était. Mais Dieu ne m’a jamais dit qu’il avait créé le monde. L’Homme non plus d’ailleurs.

Mésopotamie, pays de Sumer ; XXVIIe, XXIIe siècle avant Jésus-Christ.

Durant toute l’époque des dynasties archaïques, sur les bords d’un rare fleuve connu du pays de Sumer, les cités-États de Lagash et Umma sont séparées de près de trente kilomètres de distance. On peut estimer que les premiers conflits engagèrent les deux cités dès 2600 avant Jésus-Christ, Umma possédant un accès au fleuve pour irriguer ses cultures agricoles, attirant les convoitises territoriales de Lagash. Le conflit autour de la possession de ce territoire de cultures irriguées, nommé aujourd’hui Gu-Eden-Na selon la langue sumérienne, ne fut tranché en faveur de Lagash que sur l’arbitrage de Mesalim, lugal, roi de Kish, cité dominante de la Basse-Mésopotamie. La décision semble bafouée, d’après les mentions qu’en fait Ur-Nansha, premier ensí, roi de la dynastie de Lagash, ayant régné aux alentours de 2500 avant Jésus-Christ, et fils de Gunidu. La confrontation contre Umma sera en effet reprise par le peuple et les troupes de Lagash, menés par ce même roi, dont le successeur, Akurgal, sera défait par les troupes d’Umma dirigées alors par Ush. Tandis que les forces du royaume voisin de Hamazi rejettent, au sein du territoire sumérien, l’armée du peuple d’Ur, le conflit du Gu-Eden-Na se poursuit sous le troisième roi de Lagash, Eanatum. On estime que sa domination s’affirma d’autant plus qu’il repoussa par la suite les armées de Hamazi, lui accordant de larges facilités pour vaincre les combattants d’Umma. Le Gu-Eden-Na est donc la possession légitime de Lagash, avant d’être repris par Ila, prochain roi d’Umma, triomphant d’Ennanatum Ier aux alentours de 2425 avant Jésus-Christ. Dès que son fils En-meneta prit la succession de Lagash, celui-ci conquit de nouveau le territoire avant de rappeler finalement la volonté de Mesalim, confirmant la victoire et la propriété de sa cité-État.
Cette guerre quasi-permanente est attestée par la découverte de la stèle des Vautours, entre 1877 et 1933, lors des fouilles du site archéologique de Tello, couvrant les cent hectares de l’ancienne ville sumérienne de Girsu, capitale religieuse du dieu Ningirsu, située entre le Tigre et le Shatt-el-Haï. La stèle des Vautours date d’environ 2450 avant Jésus-Christ et, d’après les fragments reconstitués et exposés aujourd’hui au Département des Antiquités Orientales du Musée du Louvre, possède une face illustrée en cinq registres horizontaux, et une face écrite en langue sumérienne à la première personne, commémorant la victoire glorieuse du  roi Eanatum.
Non, tout le monde n’a pas les moyens de se payer une thèse en histoire ou d’aller au Louvre tous les jours. Et puis moi, j’étais pas né.

Asie Mineure, bords de la mer Égée, Troie, ; historiquement Xe, XIe siècle avant Jésus-Christ.

Il était trois fois, Agamemnon, un roi grec égocentrique et possessif qui décida de capturer une jeune femme qui n’était même pas une princesse, Chryséis. Face à cet étrange comportement, sa côte d’impopularité au yeux des dieux grimpa, le ciel se couvrit de gros nuages lourds, de pluie, d’orages, et les citoyens Achéens tombèrent malades de la peste, couverts de pustules et de teint pâle. C’est alors qu’Achille, héros grec parmi les héros grecs, armé de son front fier, de son orgueil de héros au court cours, et de son talon, négocia auprès du roi, dont l’obstination n’avait d’égal que l’immuabilité, la libération de la captive dont l’enlèvement mit le dieu en colère — quelle surprise allait avoir celui-ci en se rendant compte que de plus belles princesses font couler plus de sang ! Nul ne sait si la cuirasse, la lance, et les muscles gonflés d’Achille étaient suffisamment persuasifs pour faire oublier son talon, ou si Agamemnon était simplement fatigué de ses responsabilités — quelle surprise allait avoir celui-ci en se rendant compte que, d’ici dix ans, cela serait devenu le dernier de ses soucis ! —, mais le fait est que Chryséis fut rendue. Alors, dans un élan vertueux, égalitaire, et éternellement confiant en l’éternelle règle d’ « un prêté pour un rendu », le vil Agamemnon amena avec elle la jeune Briséis, qui avait pour être reine plus d’étoffe que la première, mais qu’Achille revendiquait corps, âme, et talon. Achille, irrité, et rongé par la rage de ne pas pouvoir se passer de crème hydratante sur le talon pour se soulager, prit la mouche, hurla, arracha ses vêtements en prenant soin de ne pas choquer la bienséance de l’histoire que je te raconte, petit, et s’en alla bouder dans son coin en prétendant « puisque c’est comme ça, moi, j’arrête de me battre pour vous ».
Pourquoi est-ce que tu veux encore un chant avant de t’endormir ? Il en reste vingt-trois, ça risque d’être long de te raconter l’Illiade. Il y a de quoi y passer dix ans. Je te dirai un chant tous les soirs, c’est promis. Mais ce soir, il faut se coucher, on est tous les deux fatigués, te dis-je. D’accord, encore un peu, juste un tout petit peu. Pour que tu veuilles encore lire l’histoire à ta façon.
Oui, à la fin tout brûle et tout le monde meurt sauf deux, tout ça à cause d’une vraie princesse.

Palestine, Jérusalem, Via Dolorosa ;  avril, ca. 30 ap. Jésus-Christ.

Par le soleil qui cogne au front des bâtisseurs et des porteurs de pierres pour des cathédrales qu’ils ne pourront pas voir. Par les eaux et le sang de la vierge qui donne naissance à un enfant. Par un homme d’amour, d’espérance, et de foi, qui annonce sa mort quatre fois à ses amis avant de voir son sang ruisseler sur ses tempes. Par le pain englouti et par le vin qui coule dans les gorges de treize hommes. Par les trente deniers qu’on jette comme à un chien allant chercher son dernier repas dans l’eau dégoulinante du caniveau d’en face. Par la pluie que personne n’a le bonheur de voir, d’entendre, ou de sentir pleuvoir, tandis qu’on arrête l’homme dans la solitude des oliviers. Par un simple préfet romain dont la vie suit son cours jusqu’à ce qu’il ordonne que le sang de cet homme puisse entrer dans l’histoire. Par la vie de l’homme seul emportée dans le flot du procès rapide mais indolent de dizaines d’autres hommes. Par le peuple dont le sang ne peut sécher bien vite si, comme d’autres, dit-on, il a tué son dieu. Par le même juge qui s’en lave les mains. Par les gouttes qui ruissellent imperceptiblement aux tous premiers instants de la couronne d’épines. Par la sueur parfois essuyée par un homme qui, l’espace d’un instant, a partagé la croix. Par le visage resté à jamais sur le linge d’une femme pour essuyer ses gouttes. Par les larmes qui giclent à chaque coup de fouet contre le corps et la colonne. Par le sang qui pleure depuis la peau ouverte que la croix a percée. Par l’épaisse coulée rouge des tempes jusqu’aux pieds de l’homme à bout de forces. Par l’ultime consolation d’être au moins couché sur cette dernière croix. Par le corps qui enfin peut exsuder jusqu’au sol quand la croix est levée. Par la soif demandée et le vinaigre bu. Par le pagne et ses plis qui volent au fil du vent et sèchent une fois le corps vide. Par le dernier souffle et l’esprit disparu dans les mains de son père. Par les larmes et le sang d’une mère qui perd son fils. Par la pluie qui ruisselle des gargouilles aux murs des cathédrales qui touchent encore le ciel deux mille ans plus tard, pour des siècles et siècles.
Non, moi, je n’y crois pas, moi, je pleure simplement et je salue Marie.

Grande-Bretagne, Londres, rive sud de la Tamise, Théâtre du Globe ; entre 1598 et 1601.

The Tragical History of Hamlet, Prince of Denmark, plus connue sous le nom franco-français de Hamlet, est jouée et se prélasse bien tranquillement au soleil en compagnie des applaudissements et des frayeurs d’un public bien anglais qui ne vient que pour elle, à cent mille lieues des bâillements indifférents et de la salle de théâtre la plus proche du collège de Kévin, mon arrière-petit-cousin du côté de Marcel, mon plus jeune frère atteint d’une sclérose en plaques depuis le jour où je suis allé faire réparer le pneu de ma Renault 5 pour dix-huit euros soixante. William Shakespeare assiste à la première naissance de son spectacle, et à la vue en libraire de deux jeunes boutonneuses qui vont chercher ladite pièce à la lettre « A », j’hésite entre les cuisiner sous forme de pâté ou les poignarder chacune sur le corps de l’autre. Les meilleurs clochards anglais lancent une pièce qui roule dans le caniveau puis s’entassent en rond dans la cour d’auberge, s’émerveillant devant la peinture du dessous du balcon, tandis que, assis confortablement sur mon fauteuil au premier rang, et sans penser à celui qui a écrit cette pièce il y a belle lurette, je me régale des dessous de l’actrice qui joue Juliette, et je dois avouer que sa jupe a un rôle très touchant. Quelques nobles, dont la reine Élisabeth, sont aux première loges, un étage au-dessus du sol, gagnant une vue plongeante sur la scène et le balcon en dur, tandis que parfois, j’envie le régisseur dont j’entends les pas quelque part sur le grill, et dont la vue plongeante n’est pas sans titiller mes intérêts lubriques. On annonce le début, le coup de canon est tiré, on crie, on applaudit. Et moi, je quitte la salle dès lors que le projecteur s’allume en plein dans mes yeux, faisant un pied de nez au petit vieux aigri et irascible que je suis, qui, de plus, ne manque pas de se tromper trois fois de porte dans un certain fracas, histoire d’être discret. Le spectre est annoncé. Le spectre annonce à Hamlet qu’il est son père et, après un discours sur les  conditions de sa mort, tragiques pour les autres et prosaïques pour les uns, dit qu’il pourrait éventuellement penser à une hypothèse selon laquelle il faudrait qu’il le venge. Ce sont des choses qui arrivent, me direz-vous, on se croirait presque dans un petit village de la France profonde, dans lequel ma voisine ne m’a, selon elle, jamais assez remercié d’avoir en 1978 ramassé une patate de son potager qui dévalait la pente, car voici sa fierté et la mienne, cocorico. C’est un belle preuve d’amour que de venger son père, et je suis sûr que, s’il n’était pas mort, il en serait particulièrement reconnaissant envers son fils ; moi, j’arrêterai peut-être un peu d’être aigri si ma petite-fille pouvait être comme ça avec moi. Le peuple, tenu en haleine par l’effet de suspens, attend, tandis qu’en marchant jusqu’à ma voiture, il y a quelque chose de pourri à la semelle de ma chaussure. À la fin, tout le monde ne meurt pas, mais de toute façon, ceux qui ne meurent pas deviennent soit fous, soit seconds rôles, et de toute façon, avec une marge d’erreur et dix pour cent de perte, deux cent cinquante cinq ans plus tard, Sigmund Freud naît à mille trois cent kilomètres de là.
Oui, telle est la question.

France, Picardie, Somme, au Sud-Est de Contoire, Bois Lemaire ; 10 août 1918.

Léopold Lataste, soldat de deuxième classe du 135e régiment d’infanterie française, numéro 1666 au recrutement de Mont-de-Marsan, numéro de matricule 18656, né le 24 août 1898 à Baigts, dans les Landes, est tué à l’ennemi. Mort pour la France, l’acte sera inscrit en février 1919, à Baigts, dans les Landes.
Je ne l’ai pas connu. Il aurait pu être mon père. Il a peut-être été perdu alors que ses parents étaient encore vivants. Peut-être a-t-on attendu avant d’annoncer sa mort à ses parents. Peut-être ne l’a-t-on jamais annoncée. Peut-être a-t-on laissé trop de temps pour découvrir son corps et coucher son nom sur la longue liste des numéros, des noms, et des hommes morts pour la France. Peut-être a-t-il reçu une balle dans le poumon, dans la cuisse, dans le foie, dans la tête pour être plus rapide et n’avoir pour pensée au moment de mourir que celle de « Je suis mort » ; peut-être a-t-il été embroché ou frappé, peut-être a-t-il reçu une balle de dos, peut-être a-t-il lutté contre l’ennemi avec honneur, pendant des minutes, des heures, une nuit, des secondes, peut-être l’ennemi était-il allemand, ou peut-être français, peut-être que personne n’avait d’uniforme, peut-être que personne n’est mort, peut-être que l’ennemi est mort peu de temps après, peut-être que… Peut-être que ses parents n’ont pas pleuré. À son âge je suivais mes études d’histoire. J’ai appris beaucoup de choses. J’ai appris la naissance du monde et la mort du Christ, j’ai appris les hommes qui aimaient voir de l’art, j’ai appris les grandes guerres que j’aurais aimé vivre plutôt qu’étudier. J’aime bien raconter à ma petite-fille tout ce que j’ai appris. Pourtant, moi, je lui dis bien que je n’ai jamais eu de chance ; je n’ai jamais fait la guerre. Et puis, un jour, je me dis, ils en referont bien une ; alors ma petite-fille pourra enfin savoir qu’elle est la seule maîtresse de ce qu’elle sait ou non, et elle protestera en brandissant un livre plutôt qu’un fusil, et elle s’insoumettra, elle écrira des mots à démonter les murs, elle crierai son mépris contre les… Et sa plume aura à peine donné naissance à sa première perle d’encre, sur les feuilles qu’un charmant jeune homme lui aura offertes, que quatre balles seront tirées entre son cœur et son poumon. Et moi, assis dans le fauteuil devant la cheminée, je brûlerai ma thèse autour des incidents diplomatiques de Sumer à Sarajevo, et garderai en souvenir le seul acte de décès de ce jeune Léopold.
Non, je vieillis assez.

Maison de retraite de la Pendule d’Argent, ma chambre personnelle ; maintenant.

Confortablement assis dans mon fauteuil en cuir qui coûte une fortune à la maison de retraite, je jette une dernière fois dans l’herbe sans aucun scrupule la télécommande grise qui sert à allumer la boîte qu’on appelle couramment la télévision. Puis délicatement, pour ne pas faire trop de bruit et conserver mes nerfs qui ont aussi le droit de se reposer, je détache la télé du mur et la jette elle aussi avec sa camarade. Puis je prends le journal qui est à côté de moi, et, ayant lu dans ma vie des choses bien meilleures que le scandale qui suit la nouvelle teinte de cheveux de l’acteur principal dans la série que je viens de jeter par l’ouverture prévue à cet effet, je prends d’abord le soin d’arracher mon horoscope, d’en faire un petit avion, puis d’envoyer les trois pages qui servent de magazine s’envoler gracieusement par la fenêtre pour couler des jours heureux avec leurs bons amis. Je reprends mon souffle et je fais maintenant une cocotte avec mon horoscope. Puis, j’attrape au hasard la pile d’autres journaux, et c’est ravi d’apprendre que la doyenne de la boîte dans laquelle j’ai fait mes premières heures au département des fournitures sanitaires vient de fêter ses soixante-deux ans autour d’un gâteau à la framboise que j’insuffle à ce tas de papier l’envol le plus majestueux de son histoire, pour atteindre enfin le jardin des délicieuses herbes folles et des crottes de chiens. Je reprends mon souffle et je fais maintenant un dinosaure avec mon horoscope. Puis, déçu de me rendre à l’évidence que mon dinosaure censé être terrifiant ressemble plutôt à un poulet nain, je regarde par la fenêtre et suis heureux de n’avoir plus rien à jeter par ici, en dépit de ma vieillesse aigrie et de ma réputation d’éternel vieux râleur. 
Alors, j’exhume mon avion, ma cocotte, mon dinosaure, mon poulet, mon horoscope. J’y lis que je peux avancer, tourner le dos à ce qu’il y a derrière, et, pour une fois, écouter ce en quoi je n’ai jamais eu confiance. Alors, puisque je l’ai lu, je fais de ce dernier petit bout de papier une petite couverture pour mon petit cœur de petit vieux, je respire, j’ai peur, et je ferme les yeux.

Je n’aurai vu ni les cinq cent kilomètres de la voie balte, gigantesque chaîne humaine de près de deux millions d’estoniens, de lettons, et de lituaniens, rêvant d’une révolution chantante pour l’indépendance de leurs trois pays, le 23 août 1989, alors que ma petite-fille venait de naître au début du même mois.
Ni les attentats du World Trade Center dont on parlera tant plus tard à la télé, et que je n’aurai pas la chance de voir de mon vivant car moi, je serai mort bien avant ces deux camps.
Ni la toute première ascension réelle et immortelle du sommet de l’Annapurna à 8091 mètres au dessus de notre bonne vieille Terre, le 3 juin 1950, par deux français bien de chez nous.
Ni les concerts de Jacques Brel les 16 et 17 octobre 1964, à l’Olympia, les seuls enregistrés pour lesquels j’ai perdu une nuit ma place payée par mes parents, auxquels j’aurai enfin peut-être eu l’occasion d’écouter Amsterdam.
Je n’ai pas vécu toutes ces choses. Mais je les ai écrites. Et tandis qu’un air frais rentre par la fenêtre, je pense que peu importe.
Oui, je meurs.

*
Titre: K. ~ La la la
Posté par: HamsterNihiliste le dimanche 02 juin 2013, 12:40:32
Bonsoir !

Je voulais préciser que Partir et mes autres textes occasionnels ont trouvé une plateforme où être publiés et relayés via divers moyens, dans mon joli petit Tumblr. J'y continue une deuxième partie, Les enfants du temps perdu, et je poste ici à la suite, donc n'hésitez pas à vous tenir au courant et à passer même si ce n'est pas indiqué sur cette galerie !

J'ai bien envie d'écrire une nouvelle d'ici l'été. Quelque chose de simple et de poétique peut-être.

Partir. — Les enfants du temps perdu. (http://pierrecomandu.tumblr.com/)
Titre: K. ~ Partir et autres expériences.
Posté par: HamsterNihiliste le lundi 28 octobre 2013, 13:54:09
Voilà. J'ai envoyé Partir au second concours que je souhaitais, le Prix d'écriture théâtrale de Guérande, après du travail passionné et des modifications mises à jour ! Mon petit Tumblr se porte bien, j'y retranscris quelques textes que j'écris à la main sur un carnet, dans le métro, je fais des inventaires, je croque de gens. Paris, c'est une ville de personnages.

C'est ma plateforme principale, donc je tenais encore à vous remercier et à mettre un peu à jour ce lien. Si vous l'avez déjà lu, vous pourrez voir Partir avec un œil nouveau, un peu plus clair je pense, mais merci encore et je vous fais des bisous.

K. (http://pierrecomandu.tumblr.com/)
Titre: K. ~ Misanthropie, mon amour.
Posté par: HamsterNihiliste le mercredi 20 novembre 2013, 02:13:22
Bonsoir !

Au fil des soirées, au fil des études, au fil de l'hiver de Paris, et au fil de la passion, j'ai écrit une scène. C'est le commencement d'une nouvelle pièce, conçue après plusieurs idées furtives comme ça, peu à peu consignées, qui étaient venues dans ma tête depuis plusieurs années, peut-être. Elle a donc une existence, elle est en gestation. Avec Partir, avec Les enfants du temps perdu, avec les nouvelles et notamment Esther, j'ai beaucoup de support pour donner un toit à mes mots. Ça m'aide, et Misanthropie, mon amour, un titre comme en hommage, mais sans point ni majuscule, a au moins une existence à laquelle je peux m'accrocher. Dieu sait combien d'années elle a avant d'être reconnue, ce n'est à l'heure actuelle que de la gestation, je n'ai même pas de carnet, les notes sont vraiment en vrac, je ne sais pas ce que le reste sera, c'est exactement comme un nouveau Partir commencé il y a un an, et il me fallait ça.

Après toutes les histoires qui sont parties de ce forum, je voulais vous remercier, et infiniment les plus curieux et assidus, Cap et toute sa constellation, et voulais que vous soyez les premiers à découvrir. Ce sera une histoire d'amour. Comme toutes les œuvres d'art.

Je n'ai plus trop à parler. Merci.



Misanthropie, mon amour

«  Sans exigences »
La nuit ; les marches d’une église, en face des lumières moribondes de la ville. Paul, jeune homme ; Ève, jeune femme.

ÈVE. — Fini ; c’est fini, Paul. Je voudrais tant ne pas avoir à te dire tout cela.
PAUL. — Tu ne m’as encore rien dit, mon amour.

ÈVE. — Écoute-moi…
PAUL. — Je t’écouterai volontiers si tu savais que me dire, Ève.
ÈVE. — … sans m’interrompre.

PAUL. — Je parle, Ève. Nous ne parlons plus. Depuis trois ans déjà que nous sommes mariés, après nos timides balbutiements, après nos rencontres avec le train qui roule de rails anciens en rails anciens, au gré du jour qui tombe et de la nuit qui dort, au fil de tes seins nus, au fil de ton nombril, au fil de tes collants, après tous les mots que nous avons gâchés, nous ne parlons plus, Ève. Je n’ai aimée que toi, tu te souviens très bien, nous nous sommes nommés, moi, empereur, et toi, reine. Nous avons vu Paris et toutes ses toutes petites rues, ensemble, et nous nous sommes promis de partir dans le monde, même, dans n’importe quel monde, même d’aller à Disneyland ! Disneyland, tu te rends compte !

ÈVE. — Régner en reine et en empereur sur le même territoire n’est pas très gagnant ; je te croyais bon stratège. Tu peux retourner sur ton siège d‘auteur digne de calculer les stratégies des mots.
PAUL. — Je sais très bien jouer.

ÈVE. — Prouve-moi que tu sais perdre, et ne te défends pas.
PAUL. — Dis-moi à quoi tu joues, Ève. Silences.

ÈVE. — Nous devons faire une pause. Je ne sais pas ce que ça veut dire, j’ai seulement besoin de temps, de temps hors de notre lit, hors de tes feuilles blanches d’écrivain de théâtre que tu te vantes d’être, hors de ta main qui s’accroche à mes collants épais, depuis le début, Paul, depuis le temps de « comme avant », depuis que nous avons moins de vingt ans.
PAUL. — Non.
ÈVE. — C’est fini, Paul.

PAUL. — Non.
ÈVE. — C’est fini pour quelques semaines, au moins. Quelques semaines, Paul, quelques semaines, ce n’est rien.

PAUL. — Dis-moi combien de semaines tu partiras.

ÈVE. — Je n’en sais rien, Paul. Je partirai de toi le temps qu’il me faudra.
PAUL. — Dis-moi où tu partiras.
ÈVE. — Je ne sais pas. Je partirai, c’est tout, là où je l’ai rêvé. Je partirai en Irlande, quelque part dans l’Ouest, sur le bord des rivières, portée par la marée, je partirai à Clifden, au Connemara, dans le comté de Galway. Je partirai en Irlande mais toujours au soleil, et j’irai voir Rosslare. J’irai me perdre dans les neiges où aucun être humain n’a jamais mis le pied, en croisière au Spitzberg, ou avec les ours blancs à l’autre bout du bout du Kamtchatka. Ou bien j’irai plus près, je filerai sur l’Angleterre et sur ses cathédrales, je marcherai vers l’Allemagne et ses mille ans d’histoire, j’irai me recueillir sur les tombeaux d’Espagne et acheter des châteaux, j’irai en Italie, j’irai revoir Florence, où, quand nous nous aimions, tu découvrais mes seins et nous sentions nos corps, là, Florence qui m’a vue porter notre fille dans mon corps à ses premiers instants. Ce sera beau.
PAUL. — Tu ne partiras nulle part sans Louise.

ÈVE. — Tu sais très bien t’occuper de ta fille. Tu es née pour elle. Tu es né pour la nommer. Tu es née pour l’aimer, autant que j’aime son frère que tu n’as pas voulu. Tu t’en occupes très bien et je pourrais tout autant la voir crever, ta Louise. Silences.

PAUL. — Dis-moi pourquoi tu partiras.
ÈVE. — Mais je reviendrai, Paul. Je reviendrai, je te promets. Suis-je déjà partie sans être revenue ? Regarde, nous ne parlions plus, nous ne nous aimions plus, nous ne nous désirions plus ; tout ce que je faisais, c’était mettre mon manteau et acheter de la bouffe pour que les petits mangent et parlent d’autre chose que Papa et Maman qui s’engueulent toutes les nuits. Je passe mes jours au téléphone avec les firmes chinoises et les boîtes japonaises, et je passe mes nuits au lit avec tes ronflements et les pleurs des petits. J’ai besoin de temps, Paul.
PAUL. — Depuis que nous avons moins de vingt ans, Ève, nous avons le temps. Nous avons eu le temps pendant sept ans, sept ans, Ève, et nous avons le temps, encore pour toute la vie.

ÈVE. — Alors qu’est-ce qu’une semaine ou quelques unes de plus pour savoir si je t’aime et si nous mourrons ensemble ? Paul regarde l’heure à son poignet.
PAUL. — Nous nous aimerons ensemble.
ÈVE. — Je ne sais plus rien, Paul. Je vis avec toi dans un monde où je n’ai pas le temps de dire des mots d’amour, où l’amour se résume à «  sortir ensemble », où «  sortir ensemble » se résume manger vite fait sans regarder ce qu’on mange dans les yeux d’une viande morte, où la mort est encore un trop lointain concept qu’on indiffère, qu’on jette comme un mégot écrasé dans l’égout au milieu des feuilles mortes, comme sont jetées à l’oubli les amours des vieux de vingt ans comme nous qui n’aiment pas plus de sept ans. Je vis avec toi dans un monde où tous ceux qui parlent au téléphone, comme l’imbécile que je suis, parlent d’entreprises, de chiffres, de clients à attirer pour compenser les hommes que l’on perd, où les étudiants que nous avons étés ne savent pas lire un livre et ne parlent que de la note ou de l’année qu’ils auront, où les gens dans le métro ne savent pas profiter du temps simplement perdu dont ils sont les enfants, où les gens se bousculent parce qu’ils se croient plus riches, où les conversations sont toutes interchangeables dans les bouches des sept milliards d’êtres humains dans ce monde. Je vis avec toi dans un monde où prendre le temps d’écrire ne peut plus exister, où les carnets deviennent les déchets de l’humanité, où les déchets n’ont même plus la place d’être gardés en souvenirs, et où les souvenirs, ce n’est que dans la tête. Je vis avec toi dans un monde qui n’est pas fait pour l’espace d’une vie. Je vis comme tout le monde ; je ne mourrai même pas en particulier ; je mourrai en général. Promets-moi seulement, Paul, que si nous nous aimons encore, tu me laisseras mourir comme l’Ève que je suis. Si nous ne nous aimons pas, c’est la dernière exigence que je peux avoir de toi. Quand je reviendrai, Paul, soit nous nous aimerons, soit nous ne nous aimerons pas…

PAUL. — Ève, je t’aime.
ÈVE. — Je crois t’aimer aussi comme je t’ai toujours aimé, Paul.
PAUL. — Tu m’aimeras au retour, tu as besoin de temps pour réfléchir un peu. Silences.

ÈVE. — Voilà. Tu vas t’en sortir, Paul, tu sauras vivre seul. Tu m’aimes, et je crois t’aimer. N’allons pas nous cacher, Paul ; nous ne nous parlons plus, les rêves de notre couple s’envolent et s’ensanglantent, et je serai prête à partir par toutes les routes du monde pour ne pas voir notre amour crucifié par les quatre horizons. Vois les montagnes que nous avons gravies ; elles s’effritent.
PAUL. — Mais au retour, tu m’aimerais, et notre Louise de trois ans déjà sera heureuse, et son frère, aussi, et nous nous embrasserons, et nous pourrons aller à Disneyland, Ève !
ÈVE. — Oui, Paul, si je t’aime encore.

PAUL. — Je ferai des cookies pour toi, et tu les mangeras ; sois-en tout sauf malade ! Au retour, ce sera beau. Au retour, ce sera Noël. Au retour, les lumières de la ville s’illumineront ; les enfants achèteront des calendriers de l’Avent, ou nous en ferons pour Louise et son frère ; les ours dorés en chocolat dans leur couverture d’hiver se mangeront avec bonheur ; nous déambulerons au milieu des marrons chauds, des librairies des petites rues, et de la neige qui recouvre le monde de son silence où, pour un instant seulement, nous laisserons nos traces et ferons un manteau. Silences.
ÈVE. — Paul, il faut que je parte. Après, à mon retour…
PAUL. — Ce sera bien.

ÈVE. — Et si ce n’est pas bien ?
PAUL. — Nous ne mourrons pas ensemble : tu mourras, et je mourrai.
ÈVE. — Promets-moi d’être digne, Paul, comme je le suis aussi peu que je te suis cruelle, comme tu l’es, comme tu le seras, comme tu l’as été il y a sept ans, promets-moi.

PAUL. — Je te promets tout, Ève : je t’aime. C’est tout ce que tu auras à entendre, si tu veux.
ÈVE. — Laisse-moi repartir, Paul. Silences. À dans quelques semaines.

PAUL. — Je te laisserai, Ève. Quelques semaines, ce n’est rien. Ève se lève, montant l’escalier et finissant par disparaître derrière les lumières de la ville. Ce n’est même pas une cathédrale. Paul descend et sort.


Titre: K. ~ Partir et autres expériences.
Posté par: HamsterNihiliste le jeudi 19 décembre 2013, 01:35:29
Avec élégance.

Quand tu liras ces mots, j'aurai quitté ce monde. J'aurai quitté le quai de la gare Saint-Lazare, j'aurai fermé les portes de Braque au Grand Palais, j'aurai abandonné les mendiants dans la rue, que nous réchauffions et qui comptaient sur nous. J'aurai pris le train que j'ai toujours voulu prendre, j'aurai ouvert les portes du ciel et des oiseaux, j'aurai laissé les couvertures, les bières, les hommes et les chiens seuls dans le froid de l'hiver. J'aurai fait de nos partirs de ma Gascogne natale à la Haute-Normandie mes plus beaux souvenirs, j'aurai quitté, déçu, désespéré, mais avec élégance, les portes en bois de ta maison qui se refermaient derrière moi, j'aurai laissé le silence à toutes les pages blanches qui racontaient l'histoire de ces gens-là qu'on rencontrait. J'ai laissé mes parents prendre le train avant moi pour qu'ils ne me perdent pas. J'ai laissé pour toi, bien couverts, sur le lit, les cartes des musées de Paris, des expos, et puis des trains avant qu'elles n'expirent et que les portes ne se referment. Je n'ai finalement déçu que ces quelques mendiants qui attendaient un Dieu et peut-être ton cœur. J'ai quitté les gares de Dieppe, Harfleur, Villequier, Paris Saint-Lazare, Lyon, Agen, Monsempron-Libos et de Castelnau-d'Estrétefonds. J'ai refermé la porte de ma vie derrière moi et j'ai jeté la clé, loin dans la mer du Nord. J'ai laissé mon âme à ton amour, aux restes des pauvres gens et amputés du cœur, enfin, un peu, au monde. Je t'ai rendue coupable, et triste, et cruelle, mais n'oublie pas, je t'aime. La porte ne m'ouvre plus et n'ouvrira plus jamais, mais la clé te reviendra, dans cent mille ans, rejetée par les jours, le monde, et la marée. Mon petit cœur vivait ; la terre tourne ; le monde bat.
Titre: K. ~ Partir et autres expériences.
Posté par: HamsterNihiliste le dimanche 12 janvier 2014, 03:56:17
Voici un conte original. Je crois, à moins que ce ne soit plutôt une fable. C'est un court texte, qui, pour la première fois de mon expérience littéraire, a un message. C'est une forme particulière qui est créée pour ça. J'ai eu envie, comme ça. C'est comme si c'était pour des enfants.



La ligne verte

Nous sommes dans un pays au bout du bout du monde, dans des temps immémoriaux. Comme le veut la coutume, les verdicts des crimes les plus ignobles sont rendus en même temps, tous les mois, dans le plus grand tribunal de la capitale. Un soir, sept procès se terminent ; sept procès pour sept meurtres. Le meurtre est condamné par la peine de mort. Ce soir, les condamnés sont réunis, assis en ligne dans la salle des cent pas, couverte de dorures et bordée de fenêtres. L’énonciation de la sentence habituelle revient à l’un des sept juges et des sept bourreaux, en charge de chaque cas. Elle revient cette fois au juge d’un homme, tout frêle et tout fin, accusé pour avoir assassiné sa fille :

— Messieurs, depuis la naissance de notre pays, tous les hommes comme vous ont le droit de choisir comment la justice leur sera rendue. À la tombée de la nuit, votre futur bourreau vous emmènera, en uniforme, dans votre cellule vide de tout. Avant la fin de la nuit, un juge vous réveillera, et sera la seule personne à entendre le choix que vous ferez pour mourir. Demain, à six heures du matin, chaque juge et chaque bourreau ouvrira la porte et vous emmènera finir vos jours selon les méthodes et les armes qu’ici, nous présentons.

À cette évocation, le petit homme tremble. Ses doigts se raidissent, puis ses mains, puis ses bras, de plus en plus, à chaque instrument de mort lui est montré.

— Les sabres vous transperceront le cœur. Le taureau d’airain, placé sur un brasier ardent, vous enfermera et vous asphyxiera jusqu’à ce que votre corps soit brûlé de l’intérieur, faisant du son de votre mort un délicieux spectacle pour les rois et les juges. La vierge de fer se refermera sur vous et vous fera mourir de faim, de souffle, d’obscurité. La roue sur laquelle vous serez attaché dévalera les collines les plus raides et écrasera les membres de votre corps en tournant et en se brisant. Les petites cages en bois vous enfermeront dans leur espace étroit, et attendront d’être brûlées pour livrer votre corps souffrant aux flammes de l’enfer. Enfin, si vous voulez un peu voir la lumière du jour, les lacs profonds à proximité vous laisseront le temps de vous noyer, quand nous attacherons deux pierres de votre poids à vos pieds. Messieurs ; notre rôle est fini. Messieurs ; bonne nuit.


Le petit homme meurtrier de sa fille est blême et tremble encore de toute sa tête, de ses jambes, de son cœur. Son cœur bat plus vite que n’importe lequel pendant qu’on l’amène dans sa dernière cellule. Il a compté six propositions. « Peut-être qu’il y en a une pour chaque condamné, et que moi, le dernier, le septième, je peux ne pas en avoir. », se console-t-il. Dans cette cellule vide, sans fenêtres, sans banquettes, sans lavabo, à la tombée de la nuit, il hurle de terreur. Au fil des heures, ses petits bras et ses petites jambes se referment contre sa poitrine. Ils se calment, de lentement en lentement, et au milieu de la nuit, l’homme se recroqueville dans un coin tout au fond. À une heure avancée, alors que ses inspirations et ses expirations sont tout ce qu’il lui reste, le juge ouvre sa cellule. Il lui pose la question, et il lui répond d’un murmure. Le juge referme la porte. Le petit homme se relève alors. Il prend une très lente et profonde inspiration. Et puis, il se couche sur le sol, les deux mains sur le cœur, et il ferme les yeux.

Le lendemain, dès l’aube, toutes les portes s’ouvrent. Chaque bourreau et chaque juge entre auprès des accusés avec, dans ses mains, un beau coffret en cuir présentant, pour unique contenu, une seringue couverte de dessins élégants et de couleurs rares. Dans la septième cellule, celui qui était père est toujours couché, immobile. Les deux hommes l’examinent, étonnés ; il ne respire plus. Le bourreau, sa seringue et son réceptacle à la main, s’inquiète :

— C’est comme s’il avait délibérément arrêté de respirer… Pourtant, c’est ce matin qu’il devait mourir ; et il n’aurait pas eu plus mal. Qu’avait-il donc choisi ?

Le juge reste au silence, tandis que dans les six autres salles, chaque condamné, doucement, laisse son bourreau tenir son bras. À la même seconde, chaque seringue est enfoncée dans chaque bras et libère, sans un cri, un liquide létal qui coule dans les veines. Chaque condamné lève les yeux en hauteur, avant de les fermer et de se laisser mourir en un instant si doux. Tandis que le bourreau  du père s’impatiente du silence du juge, tous les morts sont ramenés hors de leur cellule, et les portes se referment. Le juge répond alors :

— La pensée.
Titre: K. ~ Partir et autres expériences.
Posté par: HamsterNihiliste le samedi 25 janvier 2014, 15:09:19
Quand sur mon petit carnet manuscrit, j'écris des petits textes suffisamment travaillés et que j'en suis fier, je vous les offre publiquement. Je vais le réutiliser. L'alexandrin est l'inflexion naturelle de la langue française, et j'en use très fréquemment. Il s'avère que tout ici peut respecter le rythme naturel de l'alexandrin, si un acteur peut se l'approprier particulièrement et bien sûr théâtralement. Je crois que je vais lui donner une forme de poème. C'est un peu mon premier poème.



Respirer

J’aimerais respirer. J’aimerais… entendre les mouettes.
J’aimerais… prendre un train… loin dans la mer… du Nord.
J’aimerais… voir la neige… tomber dans les… jardins.
J’aimerais… boire un thé… un soir d’hiver… tout seul.
J’aimerais… travailler… et écrire, jour et nuit. J’aimerais… entendre… les petits pas… d’une fille.
J’aimerais… sur un banc… me poser puis… plus rien.
J’aimerais… des images… Jardin des Plantes… Il pleut.
J’aimerais… tout sentir… son corps nu… qui est parti.
J’aimerais… le silence… le silence, et puis.
J’aimerais… rattraper le temps et je suis fou.
J’aimerais que le vent se lève et que je tente de vivre.
J’aimerais… j’entends les mouettes. J’aime… je vis… je respire.


Titre: K. ~ Au monde.
Posté par: HamsterNihiliste le dimanche 16 février 2014, 01:53:13
Il y a un peu toute une vie dans cette nouvelle. Il y a tout des mois de gestation depuis cet été. Il y a toute une dramaturgie que je veux poursuivre jusqu'au dernier soupir. Il y a tout mon amour. Il y a tout des mots. Il y a tout mon avenir pour lequel je me bats et que je ne cesse de suivre, comme une étoile. Il y a une écriture qui n'est jamais finie, et qui grandira toujours. Il y a un texte important et ma plus longue nouvelle à ce jour, que je voulais vous faire partager. C'est une nouvelle de vingt pages, alors elle est sur MediaFire comme ça vous en êtes libres. Elle a déjà visé le prix Albertine Sarrazin, puis le PJEF d'ici fin mars, puis des lectures publiques avec un groupe d'ateliers de lecture au sein de Paris 3. Encore une fois, pour vous remercier encore un peu. Merci.



Au monde (http://www.mediafire.com/view/sw05goy4ocl95i6/Au_monde_[15_février_2014)


Titre: K. ~ Partir et autres expériences.
Posté par: Cap le lundi 07 avril 2014, 22:34:42
Je ne sais pas pourquoi je ne te lis que maintenant. Surtout que en ce moment, je suis loin d'avoir le temps. Mais il faut croire que c'est le moment.
Tes mots sont toujours aussi magnifiques. Il émane de ton texte une telle force... Je ne sais pas trop quoi en dire. Comme à chaque fois, ton texte éveille quelque chose en moi. Quelque chose d'étrange, de caché peut être, surement même, mais quelque chose qui ne demande qu'à s'exprimer. A voir ce qu'il va donner :)
D'ailleurs, entre nous, n'abandonne pas complétement les nouvelles pour le théâtre, tu es vraiment pas mauvais à ce petit exercice :-*