Vous avez probablement vu en vous levant ce matin que les USA, le RU et la France avaient conjointement décidé, cette nuit, de lancer des frappes sur la Syrie en réponse à une attaque chimique sur des civils attribuée au régime de Bachar El-Assad, s'étant déroulée à Douma en début du mois d'Avril.
Sans vouloir juger de la pertinence d'un tel choix, il m'a semblé qu'il n'était pas spécialement bête de discuter des (nombreux) événements qui se sont déroulés en Syrie depuis 2011, des différents rapports de force, des enjeux, pourquoi la question syrienne est d'une grande complexité, et grosso modo ce qu'il se passe réellement là-bas, parce que j'ai l'impression en jaugeant d'autres personnes qu'il y en a très peu à savoir autre chose que "dictateur sanguinaire contre révolutionnaires libertaires", ce qui est dans ce cas loin de la vérité.
Bref, par ce topic je tenterais d'être assez précis pour que ceux qui l'ignorent soient plus ou moins au courant de la situation. Il m'est impossible d'être exhaustif vu la complexité du sujet, qui prendrait plusieurs volumes de gros livres pour être vraiment fidèle au réel, mais on fait avec les moyens du bord. Je ne suis pas en mesure de faire plus court, donc lisez en plusieurs fois si vous voulez mais accrochez vous à votre string !
De plus, de par cette complexité, je ne suis pas à l'abri de dire des approximations voire des bêtises, j'en appellerais dans ce cas à d'autres membres intéressés par le conflit et qui sauraient rétablir la vérité suite à mes erreurs.
Bien évidemment, c'est du gros pavé qui tâche, c'est moche mais c'est la vie
Tout d'abord, la question qui tue et qu'il faut clarifier d'entrée : la différence entre les
chiites et les
sunnites.
Cette distinction date de l'époque de la mort du prophète Mahomet. Basiquement, en l'an de grâce 632, les musulmans se sont divisés en deux communautés car ils avaient un avis divergeant sur la succession de leur prophète.
On va pas s'embrouiller avec les noms des protagonistes, sachez seulement que leur interprétation du Coran change (les chiites le considèrent comme une œuvre humaine, les sunnites comme une œuvre divine), et qu'ils ont des divergences sur leur façon de gouverner.
Bref, je vais pas m'étendre, c'est qu'une partie du sujet et pas la plus importante, il faut juste retenir que ce communautarisme millénaires a été le berceau des luttes dans cette région et ce depuis 632. Le plus important à savoir est qu'on trouve parmi les pays chiites l'
Iran et le
Liban, et parmi les pays sunnites l'
Arabie Saoudite, le
Qatar, l'
Afghanistan, l'
Égypte, &c.
La Syrie est un pays majoritairement sunnite mais Bachar El Assad fait partie de la communauté
alaouite, qui constitue environ 10% de la population syrienne, et qui est chiite en plus d'être une minorité majoritaire dans le régime de Damas.
Petite histoire du régime syrien
La Syrie est un pays millénaire qui a une histoire très riche et souvent passionnante. Certaines de ses villes comme Damas et Alep sont inscrites au patrimoine mondial de l'humanité. Les merveilles architecturales ne sont plus à présenter, comme d'ailleurs celles que l'on trouve dans toute l'Afrique du Nord/Moyen Orient.
Pour l'histoire moderne, le pays syrien que l'on connait est né du démantèlement de l'empire Ottoman à la fin de la Première Guerre Mondiale. Il est passé sous dominance française jusqu'à la fin de la Seconde Guerre Mondiale à peu prés puis a connu plusieurs régimes successifs. Bref, une situation politique chaotique.
Dans les années 60, le parti
Baath est créé, et dans les années 70, Hafez El-Assad, le père de Bachar, prend le pouvoir par un coup d'état. Un peu comme en Corée du Nord (loin de moi l'idée de comparer l'incomparable mais c'est pour mieux illustrer), le pouvoir passe dans les mains d'un clan familial qui fera profiter à sa communauté alaouite les bienfaits d'un tel pouvoir.
Cependant il ne faut pas oublier de mentionner que la Syrie était jusqu'à assez récemment un pays qui respectait beaucoup la laïcité (même plus qu'en France) et que Baath suivait une ligne économique libérale. De plus certaines grandes villes ont largement profité d'une (relative) prospérité économique et sociale, malgré le taux de chômage particulièrement élevé par là-bas.
On pourrait arguer que le régime de Damas a été un bouclier contre l'islamisme ce qui est vrai dans une certaine mesure mais un peu exagéré par El-Assad pour justifier son pouvoir.
La genèse du conflit
En 2010-2011, comme dans pratiquement toute l'Afrique du Nord et au Moyen-Orient, les peuples, épris d'idées démocrates libérales, hostiles à des régimes souvent corrompus et encore plus souvent dictatoriaux, décident de descendre dans les rues pour revendiquer leurs idées libertaires. Je présuppose que vous connaissez tous l'histoire.
Cette vague arrive en Syrie en 2011. Le point de départ est un fait troublant : plusieurs collégiens tracent un tag anti-régime sur un mur, ils sont envoyés en prison et torturés.
Les premières manifestations étaient différentes des autres manifestations du Printemps Arabe. Elles ne revendiquaient que la libération de ces adolescents et non la chute du régime en lui-même. C'est sans compter la paranoïa de Bachar El-Assad, qui a toujours craint le risque de perdre son pouvoir. Il envoie donc sur les manifestants ses forces armées qui tirent sur la population à balles réelles, faisant ainsi de nombreux morts, et allumant l'étincelle qui ne nécessitait pas grand chose pour être allumée. Ce cycle continue pendant des mois, pendant lesquels des manifestants eux-même prennent les fusils. Les policiers sont pris pour cible, les attaques dans l'un ou dans l'autre camp se multiplient ; on compte déjà des morts par milliers avant la fin 2011.
Le conflit devient vraiment une
guerre civile à partir du moment où se créer l'Armée Syrienne Libre (
ASL). Elle est à l'origine constituée d'anciens militaires qui ont quittés l'armée régulière du régime par opposition d'idée avec la répression de manifestants civils. Ces officiers déserteurs se proclament comme Armée Syrienne Libre depuis la Turquie et se joignent à la cause de ce que nous appellerons les "insurgés" (ou les rebelles). Le tournant stratégique de cette nouvelle armée se situe vers l'été 2012, par la prise de quartiers populaires à Alep (si vous vous souvenez des gros titres de l'époque lors de la chute d'Alep-Est, l'Alep-Est en question était la partie rebelle de la ville). De par sa situation géographique (Nord-Ouest de la Syrie), elle se trouve proche de la Turquie et permet par là au conflit d'être alimenté en armes et en vivres.
Les acteurs internes
On y comprend généralement rien du tout et je pense que je suis arrivé à un point où il est judicieux de les mettre sur le devant de la scène. Bref les voici, les deux premiers sont là depuis le début de la crise, les deux autres se sont greffés dessus soit par opportunisme soit par stratégie.
Le régime de Bachar El-Assad : Constamment acculé depuis le début des hostilités, il ne contrôle plus qu'une petite partie à l'ouest du pays. Il serait probablement tombé maintenant sans ses soutiens iraniens et russes (cf plus bas). Cela dit il garde sur les rebelles une écrasante supériorité aérienne. Sans parler des supposées attaques chimiques, on a déjà vu des hélicoptères du régime balancer des barils d'explosifs sur la tronche d'une ville certes remplie de rebelles mais aussi de civils.
L'
ASL, comme dit plus haut. A la base, l'ASL était constituée de vrais militants "pacifiques" (qui pacifient à coup de fusil mais bon), porteurs des idées révolutionnaires de 2011. Malheureusement, il y a deux bémols. Le premier, c'est que l'ASL n'est pas centralisée, c'est un conglomérat de milices qui n'ont pas tous les même intérêts, n'ont pas vraiment d'idées politiques sûres pour fixer un "après Bachar", bref, ils ne sont pas assez soudés pour redresser le pays avec une idée commune faisant consensus.
Le deuxième gros problème (le principal), c'est qu'il y a aujourd'hui peu de rebelles dits """"modérés"""" comme en 2011. Le gros de l'ASL est aujourd'hui largement constitué de djihadistes. Ces djihadistes ne viennent pas de l’État Islamique mais principalement des Frères Musulmans (organisation sunnite) et surtout des pétromonarchies du Golfe (Arabie Saoudite, Qatar,...) qui non seulement sont des usines à terrorisme mais ont également armés les différents groupes de rebelles. Je précise pour mentionner ici le fait que l'Occident aussi a armé quelques rebelles et que ces armes ont atterries dans les mains de djihadistes.
Quoi qu'il en soit il y a aujourd'hui une trentaines de milices rebelles différentes, toutes étant financées par différentes sources, avec une idée différente de la postérité de la guerre. Ce sont quelquefois des mercenaires, ou des combattants étrangers. Il y a de fortes chances que la majorité de ces combattants préconisent la charia si la guerre venait à se conclure avec la chute du régime de Damas.
Les
kurdes syriens, représentés par le "Parti de l'union démocratique" (
PYD). Vous avez sans doute vu des images de combattants kurdes contre Daech. Ceux ci sont les
YPG (prononcez "iépégué"), la branche armée du PYD. Ils s'appellent entre eux "peshmergas", et ils emploient pas mal de femmes dans leurs rangs, non seulement car la société kurde laisse une place importante aux femmes dans les affaires de la communauté (ce qui n'est pas commun dans cette partie du monde), et aussi car pour un djihadiste se faire tuer par une femme est un déshonneur.
Les kurdes sont principalement là pour profiter du chaos ambiant pour créer une vraie région autonome (le
Rojava). En effet, la communauté kurde syrienne s'était établie au nord de la Syrie (tout le long de la frontière turque). Avec le retrait des forces d'El-Assad de cette partie de la région, les kurdes ont eu soif de leur propre indépendance et ont rejoints la lutte. Difficile de dire ce qu'il adviendra d'eux dans le futur. Les occidentaux ont plutôt tendance à les laisser se débrouiller malgré leur soutien face à l'EI. Si les rebelles gagnent la guerre, il en sera probablement fini des kurdes.
Il ne faut pas se faire de fausses idées. Les kurdes ne combattent
PAS Bachar El-Assad. On pourrait même dire qu'ils s'en accommodent bien et que Bachar compte sur cette force pour donner du grain à moudre aux islamistes. Bref, on pourrait dire que les kurdes sont plutôt neutres vis à vis du régime de Bachar, mais qu'ils ont déjà eu à combattre des rebelles qui, comme je l'ai dit plus haut, sont plutôt majoritairement djihadistes.
A noter ce fait curieux et représentatif de l'absurdité du conflit : les kurdes ont été armés par l'occident pour combattre l'EI. Or, les kurdes combattant les rebelles occasionnellement, nous avons vu des groupes armés se combattre alors qu'ils ont été fournis par la même puissance. Je précise également, pour noircir un peu le tableau, que le penchant turc du PYD, le
PKK, est considéré comme une organisation terroriste par pas mal de pays occidentaux dont les USA. Donc les nord-américains ont fournis à une organisation terroriste des armes pour combattre des terroristes.
L’
État Islamique, bien évidemment. Ce groupe redoutable a passé la frontière irakienne en 2013. Le but avoué était d'étendre leur Califat en Syrie. Pour ce faire, ils ont simplement répandus la terreur et a mort sur leur passage, dictant aux civils des règles tyranniques (interdit de fumer, interdit à une femme de sortir non voilée, obligation de prier, &c...). C'est principalement à cause de cette intervention en Syrie que l'occident a commencé à attaquer les positions islamistes. En réponse à cela, les djihadistes de Daech ont eux même commencés à attaquer l'Occident, ce dont nous français ou belges avons soufferts particulièrement. Je tenais à dire ceci pour vous montrer que le conflit syrien s'étend partout et qu'il a une importance directe sur nos vies, peu importe l'éloignement géographiques des lieux.
Les rapports de force et les zones d'influence de chaque groupes sont précisés sur cette carte :
Vous pouvez voir l'évolution jour après jour sur ce site :
https://syria.liveuamap.com/Si vous ne savez pas où se trouve la Syrie dans le monde, ouvrez un livre de CE1
Les acteurs externes
Le conflit syrien est depuis longtemps devenu un problème international. Voici les principaux acteurs et pourquoi ils agissent comme ils le font. C'est ici que les enjeux et motivations géopolitiques sont les plus dures à suivre et à établir. Vous pouvez être sûr que je suis extrêmement loin de la vérité telle qu'elle est, mais je doute d'une seule tête puisse saisir toutes les motivations d'autant d'états aux intérêts aussi divers et variés.
La guerre, tout d'abord, impacte toute la région moyen-orientale, et pas qu'un peu. Les mouvements de réfugiés affluent en Turquie, au Liban, en Jordanie, &c. Ces exodes sont immenses, bien plus qu'en Europe, imagez donc les conséquences avec les populations autochtones.
Bachar El-Assad a les alliés suivants :L'
Iran. Comme je l'ai dit, l'Iran est majoritairement chiite, comme la communauté alaouite dont fait partie Bachar El-Assad. C'est la principale raison, puisque c'est politiquement assez cohérent de favoriser une alliance avec une communauté donnée (ici on parle souvent d'Axe Chiite vs Axe Sunnite).
Ce n'est pas la seule, on parle d'un accord qui a été fait entre l'Iran et Damas pour le transit de gaz naturel allant en Europe. Cet accord s'est fait au détriment des pétromonarchies (qui, rappelez vous, sont sunnites !). Difficile de voir une réelle corrélation entre ces accords et les alliances actuelles, mais l'Iran a une double raison de soutenir Bachar El-Assad.
Le
Hezbollah libanais a peu ou prou les même raisons que l'Iran d'intervenir en Syrie, excepté pour les histoires de gaz naturel. Ce sont des chiites qui ont tout à perdre à voir le pays devenir sunnite.
La Russie. La Russie est partenaire avec la Syrie depuis les années 50. Il n'y a pas réellement de raison que ça change, d'autant plus que Bachar El-Assad est son dernier allié dans la région. Autrement dit, Bachar El-Assad parti, Poutine perd un accès privilégié vers la Méditerranée. C'est d'autant plus important que la Russie a souffert des sanctions économiques émises après les histoires à Chypre et en Ukraine. Perdre un accès au Moyen-Orient, c'est une perte majeure pour le pays.
Mais il y a plus. L'arrivée de l'état islamique a considérablement motivé la Russie à continuer à soutenir Bachar El-Assad, car ils craignent réellement qu'un état islamique véritable et reconnu les prenne pour cible et répètent les mauvais souvenirs tchétchénes. La Russie a signé un accord similaire à celui fait avec l'Iran par rapport aux ressources naturelles, par dessus le marché.
Il va sans dire que sans l'aide de l'Iran et de la Russie, le régime de Damas n'existerait aujourd'hui plus. Déjà considérablement réduit dés la première année du conflit, les forces sur terre et les différents bombardements russes ont permis à El-Assad de sortir la tête de l'eau. Nous verrons à quel prix plus bas.
Voici les pays qui soutiennent les rebelles :Les pétromonarchies du Golfe, à savoir l'
Arabie Saoudite, le
Qatar, le
Koweït (dans une moindre mesure). Ces pays sont venus soutenir l'opposition pour la simple raison qu'ils sont sunnites ! Il n'est pas à préciser que la démocratie et les droits de l'Homme ne sont pas réellement leur priorité, leur seul intérêt est de voir une Syrie sunnite dans cette région du monde.
L'islamisation des groupes rebelles est une conséquence directe de cette alliance. En effet, au début de la guerre, l'Occident ne s'est pas prononcé sur leur soutien et ont laissé la situation empirer pendant trop longtemps. En définitive, les rebelles ont été armés et financés par les pays du Golfe. Il y a tout lieu de penser que si l'Occident avait armé l'opposition dés le départ, les idéologies islamistes héritées du wahhabisme saoudien (je rappelle que les terroristes du 11 septembre 2001 étaient saoudiens) n'auraient pas été au cœur de l'opposition syrienne.
A cause de cet état de fait, une majorité des syriens se sont rangés du côté de Baath, en tant que "moindre mal". De fait, il est aujourd'hui très compliqué de déterminer ce qui ferait le plus de mal au pays, ou le régime de Bachar, ou un état islamique pratiquant la charia ?
L'
Occident. Par là je parle surtout des USA, de la France et du Royaume-Uni. On nous le répète bien assez comme ça, les pays occidentaux voient Bachar comme un dictateur sanguinaire qu'il faut éliminer le plus vite possible. C'est un schéma déjà répété par le passé, notamment en Irak et en Libye (qui a été un bourbier monstre dans les deux cas), mais qui semble faire consensus dans l'opinion publique.
Un fait marquant cependant, la position de Barack Obama. A l'époque, Obama était bien évidemment contre El-Assad. L’ambiguïté vient du fait qu'au même moment se déroulait l'accord de Vienne. Pour la faire courte, il s'agissait de lever les sanctions économiques sur l'Iran, qui en contrepartie s'engageait à restreindre son programme nucléaire militaire. Cet accord correspond au volte face d'Obama sur la question syrienne. Dés lors il ne soutient pas plus le régime qu'avant, mais il est bien plus timide sur la réponse à donner aux exactions commises. Ça se traduit en annulation pure et simple de frappes de représailles qu'Obama avait menacé de faire si le régime avait recours aux armes chimiques. Il est bien évident que la raison profonde est de ne pas gâcher l'accord de Vienne.
Il y a une autre raison, ceci s'explique par le fait que l'administration Obama n'était pas réellement certaine de l'implication de Bachar El-Assad dans ces attaques chimiques. Ce questionnement est toujours d'actualité aujourd'hui : les certitudes ne se basent que sur des probabilités, et il existe au moins un cas où il est avéré que le gaz avait été envoyé par les rebelles (qui ont eux aussi des stocks de gaz sarin).
Les USA marqueront une petite pause due à la transition politique de l'élection Trump, et on a vu ce matin que Trump avait décidé de bombarder le régime, lui qui ne semblait pas si hostile à Poutine auparavant. A voir pour la suite.
Pour la France et le RU, la position a toujours été la même (Laurent Fabius sous Hollande disait face caméra que Bachar El-Assad ne méritait pas de vivre sur Terre), à savoir ébranler le régime. Il est assez flou de savoir quel est le plan à long terme, mais le court terme ne fait aucun doute. On a donc vu pour cela des armes européennes entre les mains de djihadistes, pour la seule raison qu'ils combattaient le régime de Damas. Armes qui se sont retrouvées, par groupe interposés, entre les mains de Daech. C'est tout ce que j'ai trouvé à dire pour souligner l'absurdité de ce conflit et des problèmes qu'ont, parfois, les pouvoirs occidentaux à gérer de telles crises.
Il est également de notoriété publique que les pays occidentaux sont largement alliés avec les pétromonarchies.
La
Turquie a changé sa veste, et n'est pas vraiment "pour" ni "contre". A l'origine, alors membre de l'OTAN et voulant toujours (plus ou moins) entrer dans l'Union Européenne, la Turquie était au départ plutôt contre et poussait le régime à écouter son peuple. Les turcs ont également accueillis une majorité de réfugiés syriens chez eux.
Cependant depuis le coup d'état contre Recep Tayyip Erdogan, les choses ont quelque peu changées. Erdogan s'est rallié à Poutine, le rendant moins critique à l'égard de Bachar El-Assad. La Turquie s'est depuis un peu éloigné des questions de régime pour se concentrer sur le "problème" kurde. Ils craignent en effet que les kurdes créent leur propre état, ce qui influerait considérablement sur leur propre politique intérieure : rappelez vous que le parti kurde en Turquie est considéré comme une organisation terroriste.
Israël suit ça d'un œil inquiet, car ils sont tout aussi bien contre le Hezbollah libanais, leur ennemi de toujours (chiite et soutien de Bachar) mais tout aussi contre l'islamisme de l'opposition.
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Je vais essayer de faire vite parce que j'ai déjà été très long et j'ai peur que la longueur de ce post en rebute plus d'un
Quel avenir pour la Syrie ? J'espère avoir mis en exergue qu'à cause de la pluralité des acteurs engagés, de leurs différentes motivations, de certaines ambiguïtés quant aux atrocités commises par le régime de Damas, sur la difficulté de démêler le vrai du faux dans ce bourbier monstrueux, il est extrêmement difficile de dresser un bilan clair et précis sur la guerre de Syrie.
On constate cependant ceci : les civils sont les grands perdants du conflit. Ils sont à cheval entre le régime, les rebelles islamistes, l'état islamique. La crise migratoire qui en découle dépasse tout ce qu'on peut imaginer en France (on parle de dizaines de bidonvilles qui ont une population de + de 10 000 habitants, donc Calais à côté est du pipi de chat). Les civils sont gazés (aussi bien par le régime que par les rebelles), bombardés, tués, par les uns, par les autres. Les écoles et les hôpitaux sont particulièrement ciblés par les forces en place (c'est monstrueux mais pas aberrant dans une stratégie de guerre). Il fait peu de doute que le régime de Damas a torturé (et ce jusqu'à la mort) des milliers d'opposants. Il y a de fortes probabilités qu'il ait eu recours aux armes chimiques (le seul point débattable par rapport à cela est sa motivation, car comme déjà dit la population syrienne est plutôt favorable à ce qu'il reste et en gazant il donne des raisons aux gens de se rebeller et de fait il affaiblit son pouvoir, ce qu'aucun dictateur ne souhaite. De plus il donne une raison d'être attaqué par des forces étrangères).
Il semble que si solution il y a, elle soit mauvaise quelle que soit l'issue. Il est actuellement question d'une transition politique, mais encore faut-il que le régime de Damas soit d'accord (ce qu'il n'est pas) ou que si les rebelles venaient à gagner, ceux ci soient d'accord pour instaurer une démocratie (ils ne le seront pas). Les manifestants originaux et ceux qui désirent faire évoluer le système politique de la Syrie ont imaginé faire une coalition en vue d'une transition politique. Le problème étant qu'ils n'ont aucune cohérence d'idée entre eux, ils sont totalement désorganisés, triste conséquence de 50 ans de dictature qui n'encourageait guère la formation de partis contestataires.
Bref, je m'arrête ici (enfin). Si vous avez trouvé ce post constructif et intéressant, sachez que j'y ai mis le temps
Je pense que la guerre a pris suffisamment de proportions pour qu'on y soit tous sensibilisés et c'était ici mon objectif.
Si vous n'avez pas d'avis sur la question, tant pis, sinon, n'hésitez pas à le partager ici même.
J'en profiterai également pour nourrir le topic suivant les événements qui se dérouleront à coup sûr dans un futur proche.
Je tiens à conclure sur le plus important. On compte à ce jour entre
350 000 et 500 000 morts, 2 000 000 de blessés, des sans-abris par paquet de 40, des centaines de milliers de réfugiés qui affluent jusqu'en Europe. Des destructions matérielles inestimables (temples antiques détruits par Daech, sans parler du souk d'Alep qui a été rasé alors qu'il était considéré comme le plus beau de tout le Moyen-Orient). 1 enfant sur 2 n'a jamais connu que la guerre.
Si vous êtes intéressés (et si vous êtes arrivés jusque là je suppose que vous l'êtes un peu), je vous mets des sources complètes (bien plus que moi en tout cas) !
http://www.bbc.com/news/world-middle-east-26116868https://www.aljazeera.com/news/2016/05/syria-civil-war-explained-160505084119966.htmlhttps://www.independent.co.uk/news/world/syrian-war-bashar-al-assad-isis-turkey-understanding-a7443701.htmlEt un docu assez passionnant sur le sujet, d'où j'ai tiré quelques infos. Attention y'a des images sensibles. :