Alaïa, 21juillet
Je descendais joyeusement la rue, Alabaross à mes côtés et Öhlraj me suivant de près, un sourire gigantesque sur mon visage. Je sentais le regard fier d’Alabaross se poser sur moi, bien que celui-ci ne l’avouerait jamais. Je ne sais ce que j’aurais fais sans Öhlraj ! Je lui dois toute cette réussite ! Il ne me restait plus qu’à continuer sur cette voie jusqu’à la fin des événements. Une fois dans le repère, Alabaross me félicita à nouveau, puis me dit d’attendre le soir, où Aube rencontrerait les nouvelles recrues. J’accepta en souriant, puis me mis à errer dans les souterrains qui constituaient le repère de la Guilde des Voleurs. Je me suis alors assise dans un coin, prenant Öhlraj sur mes genoux. Il avait sa forme Gento, et je le caressais tranquillement entre les oreilles. Vu son expression, il n’avait pas l’air d’aimer ça, et me jettait un regard assez mécontent. Néanmoins, il restait immobile, se laissant caresser et lançant un regard accusateur. Soudainement, je senti la main d’Alabaross se poser sur mon épaule.
“C’est l’heure, dit il. Prête à enfin adresser la parole à Aube ?
-Je suis prête, répondi je, un air angoissé dans ma voix.”
Oui, Aube me terrifait. Malgré sa petite taille, malgré le fait que ces yeux ne soient jamais posés sur moi, ou qu’aucune de ses paroles ne m’ait jamais été adressé. Il émanait d’elle quelque chose, une sorte d’aura qui faisait en sorte qu’on ne pouvait que la respecter, voir la craindre. Et c’est exactement ce que j’ai ressenti lorsque je suis entré dans la pièce où elle nous attendait, moi et les autres recrues. Celle-ci était simple, comprenant seulement quelques sièges et une estrade où se dressait la naine. Premièrement, elle nous félicita de notre réussite, puis nous souhaita la bienvenue dans la Guilde des Voleurs. Elle nous expliqua en quoi celle-ci devait être comme une nouvelle famille, comment nous devions la protéger, et d’autres choses encore que j’avais déjà entendu. Ensuite, elle descendit vers nous, afin d’expliquer à chacun le rôle auquel il serait assigné. Lorsque ses yeux, ces yeux qui ressemblaient à deux saphirs étincelants, se posèrent sur moi, une immense angoisse s’empara de mon corps. J’avais l’impression qu’elle ne regardait pas qu’une enveloppe charnelle, mais qu’elle scondait tout mon être, toute mon histoire, cherchant une qualité quelconque à exploiter du mieux qu’elle pouvait. C’est alors qu’elle leva une main, et se mit à caresser ma joue.
“Petite, dit elle alors… Tu as une peau pâle comme la Lune, et douce comme de la soie. Dans tes yeux, on voit l’incarnation de l’innocence, et tout ton corps dégage une immense pureté. Tu n’as vraiment pas l’air d’une voleuse… c’est parfait ! Tu sera assignée à l’équipe d’Alabaross, qui prépare le vol de la Tiare de Sanderline. Ton rôle sera d’être engagée en tant que domestique à, l’intérieur du manoir Montaliet. Avec ton physique de poupée, cela devrait être une chose aisée… Alabaross t’expliquera ton rôle par la suite.”
Ces yeux se posèrent ensuite sur Öhlraj. Elle posa sa main sur son crâne, et je senti alors ses griffes s’incruster dans ma chair, et son petit corps trembler sous les doigts d’Aube.
“Quel bel animal, dit elle alors, l’air songeur.”
Son masque, qui m’empêchait de déceler la moindre émotion sur son visage, ne faisait qu'amplifier l’étrangeté de la situation. Elle finit par partir, après avoir vu chacunes des recrues indépendamment. Je rejoignit alors Alabaross, afin de savoir ce que je devais faire.
Imielda, 23 juillet, le soir
J’attendais tranquillement devant les portes du théâtre, légèrement excitées en pensant aux événements futurs : avec l’aide de Sylvanyël, le retour de Dazzrug s’annonçait imminent, voir immédiat. Je n’en pouvais plus d’attendre. Pour l’occasion, j’arborais ma robe préférée : volée à une reine il y a plusieurs années, elle était de couleur rouge sang. Ma longue chevelure noire de jais ondulait derrière moi, et j’arborais sur mon crâne la couronne sertie de diamants qui s’accompagnait de la robe, le poignet également orné de différents bijoux. Sylvanyël se présenta enfin, aux côtés d’Alklebath.
“Hey ! Sylvanyël, la saluai je ! C’est tellement génial que tu sois venue, cela me ravie !
-J’en suis très heureuse, répondit elle”
Il semblait y avoir un problème avec elle : elle semblait… contenir quelque chose.
“Tu es superbe, dit elle alors.
-Je te remercie ! Ce soir est celui où l’incantation portera enfin ses fruits…. quelque chose ne va pas ?
-Non, non, tout va bien je t’assure ! J’ai juste..un peu froid, mais ça ira mieux.
-Parfait… suis moi alors !”
Je l’introduit alors à l’intérieur du théâtre abandonné, à l’intérieur duquel nous attendaient tous les membres du Conseil des Ombres. Cette immense assemblée n’avait qu’un seul objectif: assouvir le mien. Accompagnée par Sylvanyël, je m’avançais vers ma place habituelle. Jamais les membres n’étaient venus aussi nombreux. Je pris la main de celle qui deviendrait mon associée, un sourire gigantesque, l’un des premiers à ne pas être un faux depuis fort longtemps, et prit la parole :
“Mes très chers frères, mes très chères soeures ! L’heure du retour de Dazzrug est arrivée ! Avec l’aide de Sylvanyël, ici à mes côtés, nous arriverons à le faire revenir ! Ainsi, vous obtiendrez tout ce que vous désirerez : l’argent, la gloire, l’amour… il vous l’offrira, en gage de son immense gratitude ! Mais trêves de paroles : ammenez le sacrifice !”
Aussitôt, ledit sacrifice fut ammené :il s’agissait du directeur du Collégium, Sir Kaylipt. Même si sa puissance avait baissé, elle restait néanmoins assez grande pour ramener Dazzrug. Je mis les bras en croix, et commença l’incantation, incitant Sylvanyël à me suivre.
“Ektal Kwal Jürdun…
-Imielda, arrêtes ça immédiatement !”
A peine avais je commencé à parler que la voix de Sylvanyël avait résonné, me laissant consternée. Je la regardais avec stupéfaction, tandis qu’elle s’avançait vers moi :
“Ecoutes moi Imielda, dit elle. Tu n’as pas à faire ça. J’ignore les raisons qui te poussent à agir ainsi, mais crois moi, c’est une erreur que tu ne veux pas commettre. Et tu es en train de dépasser les limites. Dazzrug est un démon très puissant, et tu n’arrivera jamais à le contrôler. Si tu faiblis un seul instant les conséquences seront dramatiques, j’en sais quelque chose… Allez, abandonnes maintenant, et rien ne se saura !
-Que… comment ? Abandonner ? Mais.. c’est le seul, c’est le seul intérêt que j’ai à vivre, répondis je. Tu.. tu ne comprends pas, tu… tu étais de notre côté ! Pourquoi nous trahir, je...
-Ecoutes, dit elle en mettant ses mains sur mes épaules, je sais ce que tu ressens : tu as envie de faire tes preuves, tu veux montrer que tu es capable de faire quelque chose. Mais ce n’est pas une bonne..
-Tu ne comprends rien , hurlai je ! Je vis pour lui, depuis plus de trois siècles ! Alors il reviendra à la vie, avec ou sans ton aide !”
Aussitôt, je fis apparaître des flammes sur mes mains, que je dirigea vers Sylvanyël. Avec une extrême rapidité, elle se saisit d’une dague qu’elle avait caché dans une manche de son vêtement, et me l’enfonça dans le coeur.
“Navrée Imielda, s’excusa-t-elle. Mais je ne peux pas laisser un deuxième démon s’échapper de sa prison..
-Tu, suffocai je. Tu… Tu n’es vraiment qu’une idiote, Sylvanyël.”
Devant son regard horrifié, je retirai lentement la lame de ce coeur qui avait cessé de battre, et le jetai à ses pieds. Profitant de sa stupeur, je l’envoyai de toutes mes forces valser contre le mûr. Aussitôt, quelques membres du Conseil des Ombres s’empressèrent de la maintenir en place. Je repris alors mon incantation :
“Ektal Kwal Jurdün Dazzrug, nuelstra yal delekteral offere ! Redictal amior nuelstra !”
Aussitôt, le corps du pauvre directeur fut dévoré par les flammes, ne laissant pas même des cendres. Ces flammes, qui avaient surgi de manière soudaine, commencèrent alors à s’assembler, commençant ainsi à former un corps, petit à petit. Je me suis alors avancé vers Sylvanyël, qui hurlait, me suppliant d’arrêter, et semblant se débattre.
“Pauvre petite chose, lui ai je dis. A part l’invocation, tu n’as vraiment rien pour toi. Maintenant, tout cela va enfin pouvoir s’achever. Ce rôle, cette école stupide… je suis enfin libre. Dazzrug va revenir, et tu ne pourra rien faire pour empêcher cela !”
Je découvris alors mes crocs. La jeune femme me lança alors un regard empli d’une leur de défi.
“Tu penses vraiment pouvoir m’arrêter ? Tu ne peux rien contre moi !
-Elle non, mais moi si !”
La voix avait surgit de nulle part. Je me suis retournée rapidement, pour faire face à Althanéa Liadon, qui se fondit sur moi, une épée à la main. J’esquivais son attaque, avant de me retourner vers elle.
“Althanéa… ainsi, tu oses me faire face ?
-Imielda,me fit elle sur un ton agressif. Si tu n’arrêtes pas ça immédiatement, je n’hésiterai pas à te faire du mal !
-Je t’en prie essaye, rétorquai je en dégageant d’avantage mes crocs. Althanéa tenta d’abord de m’abasourdir à l’aide d’un sort de confusion, mais un bouclier efficace sut l’en empêcher. Je me fondis sur elle, rugissant, mes crocs en avant afin de la mordre. Celle-ci sortit alors un pieu, avec lequel elle tenta de m’assener un coup. Je l’esquivais rapidement, puis donna un coup de pied dans sa main, ce qui la poussa à faire tomber le pieu. Je lançai alors une incantation, et de l’électricité se mit à jaillir de mes mains. Tous mes fidèles s’étaient réunis autour de nous. Ils tentaient d’atteinfre la Haute Elfe, mais celle-ci esquiva chaque coup, neutralisant chaque élève sans pour autant leur faire de mal. Notre combat faisait rage, mes poings enragés frappant contre les boucliers qu’elle ne cessait d’invoquer, quand elle réussit à me repousser en arrière. Profitant de cette occasion, Sylvanyël, qui avait réussi à se dérober à mes fidèles, se fondit sur le pieu, le ramassa, et l’enfonça dans ma poitrine.
Imielda tituba, faisant quelques pas en arrière. Elle porta la main sur le pieu qui lui transperçait le coeur. Elle s’écroula sur le sol, avant de prononcer un dernier mot, qui l’accompagnerait dans la mort : “ Dazzrug…”
Aussitôt, sa peau, ses organes devinrent poussière. Imielda ne laissa de son passage que ses os, et un crâne, aux canines prohéminants. Tous les fidèles du Conseil des Ombres avaient été neutralisés, mais les flammes continuaient à former le corps du démon. Althanéa tendit une main à l’invocatrice, et l’aida à se relever. Elle prit le crâne de la défunte Imielda, et l’enfourna dans son sac, comme gage de sa réussite.
“Bon, dit elle. Il ne nous reste plus qu’à empêcher ce démon de revenir.”
Sitôt qu’elle eût fini sa phrase, les flammes achevèrent de s’assembler, créant une énorme colonne de lumière, qui fut vue partout en Mydelir, avant de s’éteindre.. Face à eux, se tenait un homme gigantesque. Des cornes, immenses et rougeoyantes, se dressaient sur son crâne. Il avait une immense cape, qui semblait être faite de lave, et son corps était couvert de motif incandescents. Dazzrug, le démon des flammes, se retourna alors vers les deux jeunes femmes.