C'est intéressant ce que tu dis. Ça me fait penser à 1984, le fameux chapitre qui décrit l'histoire du monde, et qui explique qu'avoir un ennemi facilement identifiable et perçu comme suprême permet d'unifier la population contre cet ennemi, et aussi de détourner l'attention du public ("Désolé, on est en temps de guerre, on doit faire des sacrifices", ça marche aussi avec le mot "crise"). Et la "sécurité", c'est aussi un impératif pour lequel on est prêt à beaucoup de choses, quitte à s'attaquer à des libertés fondamentales de certains citoyens, voire de tous, pour les protéger de certains qui pourraient nuire à cette sécurité. Et le problème, c'est qu'avec la surmédiatisation du moindre événement, on instaure peu à peu un climat de peur/d'insécurité, alors qu'on vit quand même dans des pays "sûrs".
J'en parlais avec une Vénézuélienne, là-bas les gens craignent de se rendre à la station essence ou au supermarché du coin parce qu'il y a des morts tous les jours par arme à feu, même dans la capitale. Et on ne parle pas de guerre civile, c'est juste que le taux de criminalité est extrêmement élevé (et encore plus depuis la mort de Chavez). Et elle m'a raconté bien des histoires sur son pays, et comparativement, je me suis rendu compte que mes légères inquiétudes quand je me promène le soir avec mes écouteurs dans des quartiers "chauds" étaient bien exagérées. Mais à force de le lire dans les médias, d'entendre parler d'agressions, de terroristes, de violence urbaine, on rentre dans ce climat de peur et on en vient même à féliciter l'augmentation du nombre de policiers (alors que c'est la crise, mais visiblement + pour l'enseignement ou la culture que pour la défense nationale ou la police
).
Bref, je m'éparpille un peu trop, mais rien que le mot "terrorisme" a une forte connotation politique, et agit presque comme un argument d'autorité. C'est pour ça que les Etats-Unis se sont permis de défier l'ONU en allant en Irak : la menace brandie était tellement important qu'ils n'avaient pas le choix, ils devaient intervenir, et bluffer sur la menace que représente l'ennemi, ça a toujours été une bonne manière de justifier une guerre, ou la gloire à en tirer après coup.
Et sinon, y'a un concept en relations internationales qui explique tout ça bien mieux que moi, je cite Wikipedia en anglais sous spoil si ça en intéresse :
Securitization is a process-oriented conception of security, which stands in contrast to materialist approaches of classical security studies. Classical approaches of security focus on the material dispositions of the threat including distribution of power, military capabilities, and polarity, whereas securitization examines how a certain issue is transformed by an actor into a matter of security. Securitization is an extreme version of politicization that enables the use of extraordinary means in the name of security. For the securitizing act to be successful, it must be accepted by the audience.