J'ai acheté sur un coup de tête
comme d'hab diront certains Et l'Homme créa les Dieux, adaptation en roman graphique par Joseph Béhé de l'essai éponyme de Pascal Boyer.
L'histoire brodée est celle d'un très long dîner pendant lequel l'auteur va expliquer ses positions, ses références et ses réserves sur le grand sujet : les divinités n'existent pas comme entités réelles, tangibles, mais comme émanation de la psychologie humaine, de sa nature, de son évolution, de ses nécessités et j'en passe.
Le bouquin a l'intelligence de commencer par décortiquer les idées reçues, les raisonnements basiques et autres jugements arrêtés par lesquels les gens croient pondérer, justifier -ou condamner- la place de la religion dans la société.
Il enchaîne sur nombre d'exemples, de raisonnements étayés, de recherches dans des domaines très variés (anthropologie, psychologie, mathématiques, biologie et histoire) pour mener, non pas à une éclatante vérité, mais à un faisceau de faits qu'on peut prendre comme on veut.
Bien entendu, comme tout chercheur qui se respecte, Boyer partait convaincu de sa position, et forcément, il la défend solidement. C'est un essai écrit par un athéiste convaincu, ce qui ouvre bien entendu à un certain nombre de partis pris ou de biais. Par son assise, son charisme et ses connaissances (il est quand même maître de conférences) Boyer leur ferme tellement leur gueule à chaque objection qu'ils finissent par s'aligner sur ses opinions.
Je suis personnellement en accord avec ses propos, mais je ne néglige pas que cela peut grandement desservir le tout pour ceux qui ne sont pas d'accord de base, sans parler du biais de conformité.
Le plus gros reproche formel à l'ouvrage : les différents personnages ne sont pas tous développés à égale mesure, et sont parfois un peu trop "fonctionnels". Le cynique athée qui fait un peu Richard de Trondheim prend bien plus de place que la catholique réactionnaire constamment sur la défensive, elle-même plus présente que la femme de l'hôte, et ainsi de suite. Sachant qu'à côté de ça, le graphisme de l'ouvrage est assez spécial, parfois très chargé. Les 350 pages, faut parfois se les farcir, j'ai dû y aller petit à petit et une lecture ne va clairement pas me suffire à tout retenir.
Ce fut une lecture fort enrichissante, je ne regrette pas l'argent que j'y ai mis, mais est-ce que je dirais à n'importe qui de l'acheter ? Non, il faut être intéressé par le sujet, et aussi, être en accord avec le postulat. Ca me semble une vraie nécessité. Si c'est votre cas, je vous invite à le feuilleter, et à voir si elle vaut ses 35 ou 40€.