J'ai vu
Vice-Versa et j'en suis sorti déçu.
Il a très certainement plus de matière et de fond que beaucoup de films d'animation récents, je ne dis pas le contraire. Mais si ça faisait automatiquement un truc trop cool de la mort, ça se saurait.
Déjà, la forme. C'est difficile d'être plus académique et lacunaire que ça. Coucou
le traitement des couleurs vu et revu ces cinquante dernières années, coucou la plastique des personnages Pixar rigoureusement identique à tous leurs métrages, coucou les bords effilochés dégueulasses... Coucou
le monde imaginaire tout en couloir et en cloisons (paie ton raccord au concept), coucou l'absence totale de plans du Minnesota, coucou la vision ultra-segmentée de San Francisco. Et encore, si au moins j'avais eu des passages "wahou", j'aurais pu accepter. Mais non. Pas un seul passage "wahou" de tout le film. Vous savez ce que c'est, un passage "wahou" pour moi ? La scène du royaume dans
Raiponce : wahou. Juste wahou. Du haut de mes vingt-sept ans, j'ai vu cette scène avec les étoiles dans les yeux qu'avaient les fillettes en voyant la tignasse à tresser qui s'offrait à elle. Dans un autre style,
Pinocchio que j'ai revu très récemment : wahou, on peut vraiment montrer ça aux gosses ? O__O Ou encore
Kiki la Petite Sorcière : wahou, juste wahou. Et
Vice-Versa ne m'a procuré strictement rien s'en approchant.
Parlerai-je de la bande son ?... Nan, c'est pas beau de se moquer des handicapées. En plus je vois pas ce que j'en dirai : je n'en ai rien retenu.
Ensuite, les personnages. Je vous présente
Joie, le personnage principal, l'une des cinq émotions fondamentales de la petite
Riley (ce prénom est vraiment à chier). Joie est autoritaire, intolérante, égoïste et monomaniaque. Elle ne supporte pas que le monde puisse tourner autrement que comme elle en a décidé et soit elle écrase les autres émotions, soit elle les met au placard pour que cela dure ; tout pour elle n'est que fonction et moyen mis à disposition de son monde idéal. Bel exemple pour la jeunesse Pixar. Et j'aurais apprécié qu'on formule un peu plus explicitement le rôle de Tristesse vu que le film s'adresse pas mal à un public trop jeune (ou trop peu formé) pour en tirer toutes les conclusions du premier coup.
Vient alors l'aventure dans l'ensemble. Là, je crois que je n'ai rien vu d'aussi prévisible, déjà-vu et by the books de ma vie. Dès les dix premières minutes, tu sais exactement tout ce qui va se passer ou presque. Tu vois
ça, tu sais très bien ce qui va arriver. Paie ta difficulté d'immersion. Même
Alien était plus imprévisible que ce film
(parce que dans Alien, je faisais un compte à rebours de ce qui allait se passer et je tombais pas souvent loin).
Je pourrais aborder le caractère comique de l’œuvre. J'avoue, j'ai rigolé à quelques occasions, du fait du seul truc que je n'ai pas réussi à voir venir, le jingle du chewing-gum. C'est tout ce qui m'a fait rire. Le reste a pu m'amuser, mais guère plus. Aparté au sujet du public de la salle ; madame la spectatrice située cinq rangs derrière moi, le fait que vous ayez payé pour voir un film classé "comédie" ne vous oblige pas à vous esclaffer bruyamment à chaque phrase que prononce les personnages, a fortiori quand celle-ci n'a strictement rien d'amusant. Heureusement, votre voisin s'est chargé de vous en informer avant que
la salle ne se ligue contre vous.
Dernier point à aborder : le traitement de l'aspect "psychologie". Je crois que c'est la partie la moins ratée de tout le film. Mais attention. Moins ratée ne rime pas avec réussie. Parce qu'on mélange des mots savants que tout le monde a entendu au moins une fois dans sa vie (tel que "subconscient" ou "idée abstraite") avec des notions sortis de je ne sais où (le Monde Imaginaire ou Dream Productions). Et même quand ils prennent le temps d'approfondir, ils s'en tiennent le plus souvent à ce qui les arrange, comme le subconscient qui est la geôle des phobies. Ce n'est pas faux. Mais c'est très réducteur. De même que, comme dit précédemment, ce monde imaginaire cloisonné à en rendre jaloux
FF 13.
C'est d'ailleurs somme toute très impressionnant de voir qu'avec quelque chose d'aussi foutraque, le film parvienne à brosser un tableau presque impeccable des épreuves de Riley et son évolution. Pour m'être trouvé dans une situation très analogue à mes onze ans, je peux vous le certifier. C'est parfaitement cohérent.
Qu'est-ce qu'il y a à sauver dans
Vice-Versa ? Peu de choses. Un usage intelligent de quelques concepts, l'attitude et le développement d'une justesse rare de Riley, un running gag vraiment drôle. Mais il s'y mêle un bon tas de nawak, d'incomplet, d'invention et même de contresens par moments. Ce qui la fout éminemment mal, surtout au service d'un film qui n'a rien d'impressionnant ou de bouleversant. A réserver à un public
(qui a su rester) jeune.
8/20.