Je réactualise ce topic parce que j'ai fini cette nuit le Livre sans nom, qui a la particularité d'avoir été écrit anonymement, ce qui m'empêche, de fait, de vous donner le nom de son auteur. Le bouquin a gagné une certaine aura, à cause du mystérieux auteur de l'écrivain à son origine, mais aussi parce qu'il a connu un franc succès.
De quoi ça parle ? Du Bourbon Kid, un pistolero de légende qui a traumatisé la ville de Santa Mondega - une bourgade extrêmement mal famée, à la frontière mexicaine - après l'avoir vidé de la moitié de ses habitants à la suite d'une altercation et d'un verre de bourbon, boisson réputée pour le rendre invincible et sans pitié. Cinq ans après, deux moines d'Hubal, petite île du Pacifique, rescapés du massacre de leur ordre, sont envoyés par leur supérieur à la rechercher de l'Oeil de la Lune, une pierre bleue que l'ont dit dotée de pouvoirs magiques, et notamment de conférer l'immortalité. Au même moment, une jeune femme nommée Jessica, qui a survécu au massacre du Kid, se réveille à la suite d'un coma de cinq ans ; un flic spécialisé dans le paranormal, Jensen, est envoyé à Santa Mondega pour enquêter sur une suite de meurtres particulièrement violents, auprès d'un agent local convaincu que le Bourbon Kid est derrière tout ça ; et un tas de crimes s'enchaînent à toute vitesse, à quelque jours de la Fête de la Lune qui célèbre une éclipse tous les 5 ans.
Tout au long de l'histoire, le lecteur va changer de point de vue pour suivre les nombreux personnages impliqués dans l'intrigue, dans un méli-mélo de faits tous plus surprenants les uns et que les autres, et vraisemblablement tous liés. On se retrouve plongé au coeur d'une jungle urbaine peuplée de fauves qui se disputent le gâteau, mais aussi de petits malins qui veulent tirer leur épingle du jeu. Les amateurs du cinéma de Tarantino ou de Rodrigues (en particulier les aventures du marriachi El, Pulp Fiction et Reservoir Dogs), du Snatch de Guy Ritchie ou encore des séries de roman Baccano! et de Durarara de Ryogho Narita et de leurs adaptation par Omori... ont tout intérêt à se tourner vers cet ouvrage, où ils se trouveront en terrain connu : situations rocambolesques, intrigues mêlés, personnages charismatiques et légendes urbaines qui se confrontent les uns aux autres, gunfight endiablés, standoff à la mexicaine, bars glauques et autres joyaux de ce genre de chef d'oeuvre s'y trouveront ravis.
Personnellement, j'ai beaucoup apprécié ; je suis loin d'avoir été transcendé, mais je me suis vraiment éclaté à lire ce bouquin pas prise de tête qui vous jette d'un bout à l'autre de l'intrigue et vous piège dans une toile de faits liés avec une légèreté dérisoire. Un bon bouquin qui assume pleinement son côté pop-corn, violent et drôle à souhait.
J'édite parce que je viens de finir Asile de fous de Regis Jauffret... L'objectif de l'ouvrage était de partir d'une anecdote somme toute basique, celle d'un jeune homme qui envoie son père annoncé à son ex leur rupture, et de développer la perception des concernés : Gisèle, celle qui se fait plaquer, Damien, le jeune homme, et les parents de Damien. Là où le livre fait fort, c'est qu'il nous présente des personnages complètement cinglés, dans la tête desquels on se promène. Au fur et à mesure de la lecture des points de vus de chacun, exprimés à la première personne du singulier, on les voit partir dans des délires absolument effrayants ; que ce soit leurs dialogues pleins de poisons, le fil détraqué de leurs pensées ou à travers les évènements qui tiennent lieu de conséquences à la séparation, on ne peut que se prendre en pleine face la folie de chacun.
C'est un ouvrage assez effrayant, tant la dureté des situations, leur extravagance, la psychée tordue des personnages et leurs paroles toujours très crues, le tout dépeint avec un réalisme froid, nous prend aux tripes. Pas un seul n'est équilibré, pas un seul ne rattrape l'autre, les fantasmes et visions du monde de chacun les rendent absolument terrorisants. J'ai pris un plaisir malsain, non dénué de malaise, alors que je dévorais chacune des lignes venues me livrer une histoire au contexte, au fond, simple, mais à l'écriture troublante et nauséeuse. Si plonger dans la tête de gens que vous n'aimerez pas rencontrer, et si baigner dans la psychose de parfait inconnu vous intrigue, laissez-vous tenter : c'est aussi fascinant que perturbant. Il y a quelque chose qui tient à la fois du journal intime, de la confession et du délire le plus total, dedans, et pour un peu qu'on arrive à accrocher à tant de crasse, c'est vraiment génialissime. Une de mes révélations de l'année, tiens.
Je réédite parce que je viens de finir l'album BD Coeur de Pierre de Gauthier et Almanza... Un ouvrage avec un souffle très burtonnien, que ce soit dans le dessin ou dans l'histoire et les personnages. Petit conte graphique à la poésie mélancolique, c'est un album extrêmement sobre, assez rapide à lire, mais très beau et à regarder, et à consulter, et qui m'a laissé complètement sous le charme, et pas mal ému. Si vous avez la chance de le voir, n'hésitez pas à y jeter un oeil, voire à l'acheter : sans être un must have, ça reste le genre de petits trésors que l'on aime posséder.
L'histoire pourrait se résumer à ça : son coeur à lui est une pierre, qui ne peut aimer ou ressentir de sentiments. Le sien à elle est un artichaut. Je vous laisse rêver la suite, et la découvrir par vous-même !